Y a-t-il une vérité?

Epistémologie - Logique - Écoles - Ontologie - Métaphysique - Philosophie politique
Avatar de l’utilisateur
stephlorant
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1714
Inscription : sam. 12 mars 2011, 21:09

Y a-t-il une vérité?

Message non lu par stephlorant » jeu. 28 avr. 2011, 14:21

La vérité ne demande pas grâce pour elle, parce qu'aussi bien elle ne s'étonne pas de sa condition. Elle sait qu'elle vit dans ce monde en étrangère ; que, parmi des étrangers, elle trouve facilement des ennemis, que d'ailleurs c'est dans les cieux qu'elle a sa famille, sa demeure, son espérance, son crédit et sa gloire. En attendant, elle n'a qu'un désir, c'est de ne pas être condamnée sans être connue.

Tertullien
Apologétique, 1, 2
In manus tuas, Domine, commendo spiritum meum
http://www.youtube.com/watch?v=WDV94Iti5ic&feature=related (Philippe Herreweghe)

C.-J.
Quæstor
Quæstor
Messages : 277
Inscription : sam. 30 avr. 2011, 15:15
Localisation : Ardennes

Re: La Vérité n'a qu'un désir : être connue.

Message non lu par C.-J. » mer. 11 mai 2011, 20:31

stephlorant a écrit :La vérité ne demande pas grâce pour elle, parce qu'aussi bien elle ne s'étonne pas de sa condition. Elle sait qu'elle vit dans ce monde en étrangère ; que, parmi des étrangers, elle trouve facilement des ennemis, que d'ailleurs c'est dans les cieux qu'elle a sa famille, sa demeure, son espérance, son crédit et sa gloire. En attendant, elle n'a qu'un désir, c'est de ne pas être condamnée sans être connue.

Tertullien
Apologétique, 1, 2

Quel très beau texte !


Il faut prendre du temps pour découvrir ce forum, ce qui fait sa nourriture.
Voilà un sujet très intéressant : la vérité.
J'accorde énormément d'importance à ce mot, au besoin que j'ai de vivre en vérité.


Avatar de l’utilisateur
stephlorant
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 1714
Inscription : sam. 12 mars 2011, 21:09

Re: La Vérité n'a qu'un désir : être connue.

Message non lu par stephlorant » ven. 13 mai 2011, 18:17

L'homme peut-il sans la grâce, connaître quelque chose de vrai ?

Objection 1 : Il ne semble pas, car à propos de S. Paul (1 Co12,3) : "Nul ne peut dire 'Jésus est Seigneur', que sous l'action de l'Esprit Saint", nous lisons dans la Glose ambrosienne : "Tout ce qui est vrai, dit par quiconque, vient de l'Esprit Saint". Or le Saint-Esprit habite en nous par la grâce. Donc, sans la grâce, nous ne pouvons connaître la vérité.

Solution 1 : Toute vérité, quel que soit celui qui l'exprime, vient de l'Esprit Saint comme source de la lumière naturelle et comme exerçant sur l'esprit de l'homme une motion pour saisir et dire le vrai. Non comme habitant en lui par la grâce sanctifiante ou comme le gratifiant de quelque don habituel surajouté à la nature : cela ne se rencontre que pour certaines vérités à connaître et à dire, spécialement dans ce qui a rapport à la foi ; c'est précisément de cela que parlait l'Apôtre.

St Thomas d'Aquin
Somme de Théologie, I-II, q.109, a.1, ad 1
In manus tuas, Domine, commendo spiritum meum
http://www.youtube.com/watch?v=WDV94Iti5ic&feature=related (Philippe Herreweghe)

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

De la vérité (et de quelques autres points)

Message non lu par Raistlin » lun. 06 août 2012, 15:22

Bonjour Gehennam,
Gehennam a écrit :
Raistlin a écrit :Vous savez, l’Église a 2000 ans d’expérience humaine derrière elle. Elle en a vu des choses. Elle est experte en humanité et surtout, elle est guidée par l’Esprit du Seigneur selon ses propres promesses.
Juste une remarque : l'Humanité n'est pas vieille que de 2000 ans... De plus, je ne pense pas que c'est à vous que j'apprendrai que l'Histoire est assujettie à ceux qui l'écrivent...
Non, l'humanité n'est pas vieille de 2000 ans... mais je n'ai jamais dit ça. J'ai dit que l'Église fréquente l'humanité depuis 2000 ans, nuance. Quant à votre référence à l'Histoire, j'avoue ne pas bien comprendre où vous voulez en venir.

Gehennam a écrit :
Raistlin a écrit :La vérité est nécessairement UNE. Par exemple, soit la Terre tourne autour du Soleil, soit le Soleil tourne autour de la Terre mais certainement pas les deux en même temps. De même, soit le Terre est plate, soit elle est ronde, mais pas les deux. Il en va de même pour des doctrines religieuses ou des idéologies : si deux doctrines se contredisent, soit l’une est fausse, soit les deux sont fausses, mais les deux ne peuvent pas être vraies. Ou alors, il faut qu’on m’explique…
Je suis d'accord avec vous sur ce point, mais je rejoins ticaramel972 sur un point : nul ne détient LA Vérité. A mon sens, nul Homme ne la détiendra jamais. Après cela n'engage que moi, mais cela signifie que toutes les religions sont dans l'erreur (partiellement au minimum, je ne pense personnellement pas qu'il y ait de croyances entièrement fausse)...
Je respecte votre avis mais notez la contradiction : en affirmant que nul ne détient la vérité, vous affirmez vous-même une vérité. C’est ce que faisait déjà remarquer Aristote en son temps : si vous niez que la vérité puisse être sue, vous énoncez là vous-même ce que vous prenez pour une vérité, ce qui vous conduit à la contradiction. Vous êtes donc en fait condamné au mutisme, ne pouvant jamais rien dire sur quoique ce soit.

Pour ma part, je n’adhère pas à ce préjugé infondé selon lequel, lorsqu’il s’agit de religion, nous serions condamnés au mutisme. Je préfère vérifier par moi-même. Depuis quelques années où je me penche sur la question des raisons de croire, je n’ai pas encore été amené à conclure que nous ne pouvions pas savoir où était la vérité. Que la vérité ne soit pas toujours simple à connaître, sans aucun doute, mais je ne la juge pas impossible à atteindre, ou du moins à entrevoir.

Alors certes, nous ne sommes pas dans le domaine des sciences positives où tout est soumis à l’expérimentation (quoique même dans ce domaine, tout n’est pas si simple). Néanmoins, des choses peuvent être dites, des vérités dégagées pour peu qu’on les cherche vraiment. Comme je vous l’ai déjà expliqué, on peut par exemple arriver avec un bon degré de certitude à l’existence d’un Principe premier transcendant (qu’on appelle Dieu). On peut aussi, en étudiant les enseignements et les revendications de telle ou telle religion, dire si ça tient la route ou pas.

Bien à vous,
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

Re: De la vérité (et de quelques autres points)

Message non lu par Raistlin » lun. 06 août 2012, 15:42

En fait, à bien relire votre message, je me dis que vous vouliez viser le fait que nul ne peut prétendre être vrai en tout point.

Si c'est cela que vous visiez, je réponds que telle n'est pas la question. Il ne s'agit pas de savoir si j'ai raison sur tout mais si telle doctrine que je professe est vraie (particulièrement lorsqu'elle s'oppose à d'autres). A cette réponse, certains préfèrent dire que chacun pense ce qu'il veut et que nul ne peut dire où est la vérité. Je pense que cette position, loin d'être basée sur la tolérance, est basée sur le mépris de la vérité et l'indifférence. En gros, on dit à l'autre : tu peux bien croire ce que tu veux, au fond ça ne m'intéresse pas et je n'ai vraiment pas envie de savoir si ce que tu dis est vrai.

Vous savez, je crois que notre intelligence est faite pour connaître le vrai. C'est ce vers quoi elle tend naturellement.

Bien à vous,
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Avatar de l’utilisateur
Gehennam
Censor
Censor
Messages : 126
Inscription : mer. 01 août 2012, 11:18

Re: De la vérité (et de quelques autres points)

Message non lu par Gehennam » lun. 06 août 2012, 16:20

Quand je parlais de l'histoire, je voulais dire que même si nous avons des traces de ce qu'il s'est passé par le passé, nous n'aurons jamais la vérité complète. Pour des raisons politiques ou simplement humaines, il est assez fréquent que le survivant transmettant l'histoire à ses successeurs modifie, même légèrement la réalité. De fil en aiguille, l'enseignement prodigué aujourd'hui, quelle que soit l'école qui enseigne, peut très bien avoir été inégalement transmis depuis le passé vers le présent.

En ce qui concerne la vérité, je complèterai mon propos par ceci : nul ne détien LA Vérité. Nous en détenons tous une partie.
Je ne nie pas que la Vérité puisse être sue, je dis juste qu'elle ne le pourra pas tant que toutes les formes de vies présentes dans l'univers ne mettrons pas leurs connaissances en commun. Nous pouvons tous l'entrevoir, mais notre imperfection fait que nous ne ferons toujours que l'entrevoir, jamais l'atteindre.
J'adhère personnellement au relativisme actuel, en ce sens où chacun détient sa propre vérité, a sa propre "recette" ou voie pour être heureux, et tout ce que cela implique. Je ne m'arrête cependant pas à cela, restant persuadé qu'une Vérité (que j'appelle volontiers absolue) existe mais restera à jamais hors de portée de notre intelligence limitée.

En résumé, pour connaître la Vérité, il faudrait selon moi, être Omniscient, qualité que Dieu seul possède...

Bien à vous,

Edit : rajout du texte en italique :)

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

Re: De la vérité (et de quelques autres points)

Message non lu par Raistlin » lun. 06 août 2012, 16:51

Gehennam a écrit :Quand je parlais de l'histoire, je voulais dire que même si nous avons des traces de ce qu'il s'est passé par le passé, nous n'aurons jamais la vérité complète. Pour des raisons politiques ou simplement humaines, il est assez fréquent que le survivant transmettant l'histoire à ses successeurs modifie, même légèrement la réalité. De fil en aiguille, l'enseignement prodigué aujourd'hui, quelle que soit l'école qui enseigne, peut très bien avoir été inégalement transmis depuis le passé vers le présent.
Ca, c'est bien vrai ! Néanmoins, nous ne sommes pas non plus complètement dénués de moyens. Et je suggère de ne pas non plus exagérer les déformations que peuvent subir un texte. Car il existe des textes qui ne sont pas modifiés. D’où l’importance de la critique historique qui sait identifier les apories propres à la transmission de documents historiques, s’il y en a.

Le problème, c’est qu’on entend souvent cet argument pour nier d’office toute crédibilité au récit évangélique par exemple. M’est avis que c’est là raisonner n’importe comment. C’est comme si je vous disais : rien n’empêche que les textes sur Napoléon aient été falsifiés, donc je ne crois pas à son existence. L’attitude raisonnable, c’est de se pencher sérieusement sur le matériel à disposition, d’y exercer sa raison, et de conclure, mais pas de partir d’un préjugé.

Et puis, j’ai envie de dire, les apories existent aussi dans les sciences positives. Nous ne cessons de corriger les lois formulées et d’avancer dans notre compréhension du réel, en invalidant ce qui avait été cru auparavant. Qu’attendons-nous alors pour récuser d’office toute la physique, la biologie, la chimie, etc. ?

Gehennam a écrit :En ce qui concerne la vérité, je complèterai mon propos par ceci : nul ne détien LA Vérité. Nous en détenons tous une partie.
Vous êtes plutôt gentil. Moi je connais des personnes qui ne détiennent aucune vérité en ce qui concerne Dieu, notamment parce qu’ils ne se sont jamais posés de question. :p

Bref, pour ma part, j’essaie d’éviter les préjugés : je pèse au cas par cas les affirmations des uns et des autres. Quelqu’un prétend détenir une partie de la vérité ? Très bien, vérifions cela ! Voilà ma position.

Gehennam a écrit :J'adhère personnellement au relativisme actuel, en ce sens où chacun détient sa propre vérité, a sa propre "recette" ou voie pour être heureux, et tout ce que cela implique. Je ne m'arrête cependant pas à cela, restant persuadé qu'une Vérité (que j'appelle volontiers absolue) existe mais restera à jamais hors de portée de notre intelligence limitée.
Mais pourquoi partez-vous vaincu d’avance ? Où est-ce écrit que la vérité soit hors de portée ?

En outre, le concept de vérité absolue ne veut pas dire grand-chose. Nous ne parlons toujours que de vérités particulières. Et c’est de cela qu’il faut rendre compte. En outre, avoir sa « propre » recette pour être heureux n’a rien à voir avec la vérité. C’est comme si je vous disais : moi ce qui me rend heureux, c’est d’imaginer que la Terre est plate, comme dans les livres du disque-monde, et qu’elle est peuplée d’elfes, de fées, et de licornes. Oui, ça me rend heureux mais ce n’est à l’évidence pas vrai.

Moi j’ai un double problème avec le relativisme :
:arrow: Il est contradictoire en lui-même puisqu’il énonce une vérité qui nie qu’on puisse énoncer une vérité. Allez comprendre ! :s
:arrow: Il se traduit in fine par un mépris de la vérité : ah quoi bon chercher la vérité puisque chacun peut bien penser ce qu’il veut ! J’appelle cela un déni d’intelligence dans le sens où on diminue par préjugé le pouvoir de l’intelligence humaine.

Pour ma part, je trouve que l’intelligence humaine est plutôt performante. Certes, elle est limitée et peut parfois dire des choses erronées. Mais quand même, elle n’est pas si mal que ça, même en Histoire ! Nous vivons une époque paradoxale : notre intelligence réalise des prouesses jamais égalées, et pourtant jamais sa capacité à atteindre le vrai n’a été à ce point remis en questions. Nous vivons une époque de schizophrénie. <:


Pour terminer, je dirais qu’effectivement, la connaissance parfaite n’existe pas. Mais qui a dit qu’il fallait atteindre une connaissance parfaite pour prendre position, pour diriger sa vie ? Si c’était le cas, nous ne ferions plus rien du tout. Qui peut par exemple, être parfaitement sûr s’être aimé de sa femme ou de son mari ? Qui peut affirmer sans aucun doute possible, lorsqu’il va chez le médecin, que ce n’est pas un charlatan ? Nos connaissances sont forcément imparfaites. Mais cela suffit. Il ne faut pas confondre connaissance imparfaite et connaissance erronée.

Cordialement,
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Avatar de l’utilisateur
Gehennam
Censor
Censor
Messages : 126
Inscription : mer. 01 août 2012, 11:18

Re: De la vérité (et de quelques autres points)

Message non lu par Gehennam » lun. 06 août 2012, 17:31

Raistlin a écrit :Ca, c'est bien vrai ! Néanmoins, nous ne sommes pas non plus complètement dénués de moyens. Et je suggère de ne pas non plus exagérer les déformations que peuvent subir un texte. Car il existe des textes qui ne sont pas modifiés. D’où l’importance de la critique historique qui sait identifier les apories propres à la transmission de documents historiques, s’il y en a.

Le problème, c’est qu’on entend souvent cet argument pour nier d’office toute crédibilité au récit évangélique par exemple. M’est avis que c’est là raisonner n’importe comment. C’est comme si je vous disais : rien n’empêche que les textes sur Napoléon aient été falsifiés, donc je ne crois pas à son existence. L’attitude raisonnable, c’est de se pencher sérieusement sur le matériel à disposition, d’y exercer sa raison, et de conclure, mais pas de partir d’un préjugé.

Et puis, j’ai envie de dire, les apories existent aussi dans les sciences positives. Nous ne cessons de corriger les lois formulées et d’avancer dans notre compréhension du réel, en invalidant ce qui avait été cru auparavant. Qu’attendons-nous alors pour récuser d’office toute la physique, la biologie, la chimie, etc. ?
Je suis d'accord avec vous, cela n'empêche que nous n'avons aucune certitude que certains textes anciens aient traversé les siècles sans modification d'aucune sorte, nous ne pouvons avoir que des convictions intimes.
Après tout, si les textes anciens avaient été intégralement retranscrits avec exactitude, les divergences à leurs propos seraient des plus limitées (limites fixées par les différentes interprétation que l'Homme peut en faire).
Raistlin a écrit :Mais pourquoi partez-vous vaincu d’avance ? Où est-ce écrit que la vérité soit hors de portée ?
Je n'ai probablement que trop conscience de mon imperfection :p
Raistlin a écrit :En outre, le concept de vérité absolue ne veut pas dire grand-chose. Nous ne parlons toujours que de vérités particulières. Et c’est de cela qu’il faut rendre compte. En outre, avoir sa « propre » recette pour être heureux n’a rien à voir avec la vérité. C’est comme si je vous disais : moi ce qui me rend heureux, c’est d’imaginer que la Terre est plate, comme dans les livres du disque-monde, et qu’elle est peuplée d’elfes, de fées, et de licornes. Oui, ça me rend heureux mais ce n’est à l’évidence pas vrai.
Sauf si vous êtes profondément convaincu que cela est vrai et que vous niez l'évidence <:
Cela dit, pour vous développer mon concept de Vérité absolue, c'est ce que je considère comme l'ensemble de lois/règles/principes (je manque de mots pour définir cela précisément mais je donne quelques synonymes pour approcher du concept) régissant l'univers depuis sa création, indépendamment de toute interprétation faite par l'Homme, et qui, si elle venait à être connue des Hommes, unifierait toutes les vérités individuelles, toutes les croyances particulières, pour ne laisser qu'une seule et unique Vérité. Cela reviendrait, à la réflexion, à nier la liberté et le libre-arbitre de l'Homme pour lui imposer une façon de penser/d'agir/d'être.
Raistlin a écrit :Le problème est qu’effectivement, la connaissance parfaite n’existe pas. Mais qui a dit qu’il fallait atteindre une connaissance parfaite pour prendre position, pour diriger sa vie ? Si c’était le cas, nous ne ferions plus rien du tout. Qui peut par exemple, être parfaitement sûr s’être aimé de sa femme ou de son mari ? Qui peut affirmer sans aucun doute possible, lorsqu’il va chez le médecin, que ce n’est pas un charlatan ? Nos connaissances sont forcément relatives. Mais cela suffit.
A moi cela ne suffit plus. Je suis las de voir l'Homme se déchirer au nom des croyances individuelles. Las de constater que la Vie qui est notre bien le plus précieux et la seule chose qui nous est acquise jusqu'à la fin peut être gaspillée par la Liberté dont Dieu nous a fait cadeau. Bien sûr que la prise de position ne nécessite pas une connaissance parfaite. Bien sûr que diriger sa vie ne demande q'une connaissance limitée. Mais je ne peux pas me contenter d'une connaissance partielle.

Personnellement, depuis la mort de ma grand-mère, mon obsession pour cette connaissance absolue n'a cessé de croître, se faisant parfois moins présente dans les moments d'euphorie, beaucoup plus présente dans les moments difficiles (comme je traverse actuellement, coeur brisé oblige - sombre histoire avec la religion catholique). C'est peut être égoiste, mais je voudrais cette connaissance pour empêcher l'Humanité de gâcher sa vie...

Avatar de l’utilisateur
Raistlin
Prætor
Prætor
Messages : 8038
Inscription : jeu. 01 mars 2007, 19:26
Localisation : Paris

Re: De la vérité (et de quelques autres points)

Message non lu par Raistlin » lun. 06 août 2012, 18:27

Gehennam a écrit :Je suis d'accord avec vous, cela n'empêche que nous n'avons aucune certitude que certains textes anciens aient traversé les siècles sans modification d'aucune sorte, nous ne pouvons avoir que des convictions intimes.
Vous savez, l’Histoire est une vraie science. Ce n'est pas qu’une affaire de conviction personnelle. Bien sûr, le degré de certitude ne sera jamais absolu. Mais aucune discipline humaine n’offre un degré de certitude absolu. Il importe donc de savoir si le degré de certitude est bon ou pas. Or en histoire, comme dans d’autres disciplines, il existe des cas où le degré de certitude est bon, voire quasi certain.

Vous savez, on peut douter tout. Pourquoi ne pas commencer en doutant de ses propres doutes ? :)

Gehennam a écrit : Cela dit, pour vous développer mon concept de Vérité absolue, c'est ce que je considère comme l'ensemble de lois/règles/principes (je manque de mots pour définir cela précisément mais je donne quelques synonymes pour approcher du concept) régissant l'univers depuis sa création, indépendamment de toute interprétation faite par l'Homme, et qui, si elle venait à être connue des Hommes, unifierait toutes les vérités individuelles, toutes les croyances particulières, pour ne laisser qu'une seule et unique Vérité. Cela reviendrait, à la réflexion, à nier la liberté et le libre-arbitre de l'Homme pour lui imposer une façon de penser/d'agir/d'être.
Pourquoi voulez-vous que la liberté de l’homme soit niée par la vérité ? Bien au contraire, la vérité rend libre : libre de choisir en conscience, libre de rejeter l’erreur et le mensonge, libre de se positionner par rapport à la vérité.

Non, vraiment, je crois que la liberté libère bien plus qu’elle n’enchaîne. C’est plutôt l’erreur et le mensonge qui nous enchaînent car nous posons nos actes sur du faux.

Gehennam a écrit : A moi cela ne suffit plus. Je suis las de voir l'Homme se déchirer au nom des croyances individuelles. Las de constater que la Vie qui est notre bien le plus précieux et la seule chose qui nous est acquise jusqu'à la fin peut être gaspillée par la Liberté dont Dieu nous a fait cadeau. Bien sûr que la prise de position ne nécessite pas une connaissance parfaite. Bien sûr que diriger sa vie ne demande q'une connaissance limitée. Mais je ne peux pas me contenter d'une connaissance partielle.
Dans ce cas, vous êtes condamné à ne pas aimer, ne pas faire confiance, ne rien dire du tout. Car vous ne saurez jamais avec certitude que vos proches vous aiment ou si vous pouvez faire confiance à telle personne. De même, vous ne saurez jamais avec certitude si ce qu’on vous dit sur le monde est vrai. Aussi bien, il existe un vaste complot mondial et le Soleil tourne autour de la Terre ! Vous voyez, vous êtes obligé de faire confiance… car vous ne pouvez tout éprouver par vous-même, et surtout obtenir des garanties irréfutables dans chaque domaine.

Votre erreur (je le dis en tout amitié, n’y voyez aucune agression de ma part) vient d’une mauvaise image de ce qu’est la connaissance humaine. Parfois, nous connaissons sans preuve au sens mathématique du terme, mais de façon tout aussi certaine : nous sentons que nous pouvons faire confiance à telle personne, nous savons que notre mère nous aime, etc.

Gehennam a écrit : Personnellement, depuis la mort de ma grand-mère, mon obsession pour cette connaissance absolue n'a cessé de croître, se faisant parfois moins présente dans les moments d'euphorie, beaucoup plus présente dans les moments difficiles (comme je traverse actuellement, coeur brisé oblige - sombre histoire avec la religion catholique). C'est peut être égoiste, mais je voudrais cette connaissance pour empêcher l'Humanité de gâcher sa vie...
Excusez-moi si je me répète mais vous ai-je déjà conseillé le livre Y a-t-il une vérité ? de Jean Daujat ? Si oui, désolé de la répétition, si non, voici son intérêt : l’auteur aborde plusieurs sujets, qui vont de la connaissance au problème de la vérité, en passant par l’existence de Dieu, l’âme, etc. Il y apporte les réponses de la philosophie mais pas celle qu’on connaît depuis le XVIIIème siècle et qui empoisonne nos esprits : il parle de philosophie réaliste. Je pense que vous pourriez trouver ce livre intéressant.

Sinon, pour revenir à la connaissance absolue, entendons-nous bien. Il n’y a pas de connaissance absolue à notre niveau. Néanmoins, cela ne signifie pas qu’on ne peut pas atteindre un bon degré de certitude, voire une quasi certitude, sur certains sujets. La difficulté là-dedans, comme toujours, est de nous débarrasser de nos préjugés de départ. Si vous partez du principe que vous ne pouvez pas connaître la vérité (même s’il ne s’agit que d’une vérité partielle), comment voulez-vous avancer ?

Cordialement,
« Dieu fournit le vent. A l'homme de hisser la voile. » (Saint Augustin)

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Y-a-t-il une Vérité?

Message non lu par Cinci » lun. 13 avr. 2015, 23:15

C'est le verbatim, dactylographié à l'origine, d'une conférence que Gustave Thibon (un auteur à connaître) aura déjà donné dans les années 1960 et 1970. Il fait du bien de se laisser porter un peu (et même beaucoup) par la réflexion d'un grand auteur qui aura bien ruminé et remâché son sujet des centaines de fois plutôt qu'une.

Voyons ce qu'il peut nous transmettre comme idée :

«... il y a une vérité. Elle a trop de masques pour ne pas avoir un visage, trop de caricatures pour ne pas avoir une forme. Pourquoi l'esprit serait-il en nous la seule faculté ouverte sur le néant? Saint Thomas disait qu'un désir naturel ne peut pas être vain. Si un mouton désir de l'herbe, il peut en manquer, mais ce désir de l'herbe qu'il porte en lui prouve déjà que l'herbe existe quelque part. Mais cette vérité - et c'est qu'on l'oublie trop aujourd'hui - ne dépend pas de l'homme : il la reçoit, il ne la crée pas, il n'en est pas la mesure. Celui qui cherche au niveau de l'homme - de ses passions, de ses goûts, de ses moeurs, de ses morales, de ses politiques -devient fatalement un fanatique ou un nihiliste. Les vérités humaines sont si diverses, à la fois si sincèrement vécues et si opposées!

Pascal, qui était sceptique au sens où il convient de l'être, je veux dire sceptique à l'égard de nos vérités relatives par pressentiment de la vérité absolue, Pascal l'a dit une fois pour toutes : «Vérité en deça des Pyrénées, erreur au-delà.» Nous sommes tout à fait d'accord. Mais pour dire cela, il faut pressentir une vérité pour laquelle il n'y a pas de Pyrénées. Comment pourrions-nous juger qu'une vérité n'est vraie qu'en partie et dans certaines conditions, si ce n'est par référence implicite à la vérité absolue?

Chaque homme se raccroche à l'une ou l'autre des parties de la Vérité inaccessible dans sa totalité. Et nous nous blessons aux limites de ces vérités partielles. Si nous souffrons, parfois jusqu'au désespoir, de ne pas atteindre la Vérité, c'est que nous sommes fait pour elle. Si nous remplaçons par tant de faux dieux le Dieu que nous avons tué, si l'idolâtrie devient de plus en plus une nécéssité vitale, c'est que, refusant la nourriture, nous avons gardé la faim. «Quand on ne croit plus en Dieu, dit Chesterton, ce n'est pas pour croire en rien, c'est pour croire à n'importe quoi.» Nietzsche au moins a été logique en poussant jusqu'à la folie le refus de Dieu et le scepticisme intégral qui en découle : le suicide de l'intelligence prouve son ordination à la vérité comme le suicide physique prouve l'âme et sa destination à l'éternité. La bête ne doute pas, elle ne désespère pas, et elle ne se tue pas : il faut être au-dessus du temps pour en arrêter le cours.

Chercher la vérité au niveau de l'humain engendre aussi la révolte. En cela, notre siècle est servi à souhait : comment ne pas douter de tous les idéaux et de toutes les vertus quand, n'ayant plus de caution divine, on voit ce qu'ils recouvrent dans l'homme et à quoi l'homme les fait servir.

[...]

Mais quoi? Si vous me dites que la morale bourgeoise vous révolte, je vous répondrai : Qu'est-ce donc qui se révolte en vous, si ce n'est l'appel vers une pureté, une authenticité, une vertu que la morale bourgeoise, ou plutôt l'homme bourgeois, affirme et trahit en même temps? Au reste, si vous niez la vérité parce que l'homme la trahit, on peut appliquer le même traitement à la morale révolutionnaire : que dissimule-t-elle? Il est facile d'y reconnaître des instincts comme l'agressivité (pourquoi luttez-vous? parce que vous avez envie de lutter ...), l'instinct destructeur (qui fait pencher pour la grande solution de facilité ...), le principe de plaisir (dans la révolution sexuelle, etc.)

Même un Sartre affirme encore sa foi en une vérité quand il distingue l'homme de bonne foi de l'homme de mauvaise foi - cet homme qu'il appelle, en terme plus énergique, «le salaud». Car dans une philosophie complètement relativiste, il serait impossible de faire cette distinction. Si on dénonce le mensonge, ce ne peut être qu'au nom de la vérité. Alors, après cela, comment ose-t-on tirer argument du mensonge pour nier l'existence de la vérité? D'abord, on reconnaît le mensonge dans le miroir de la vérité, ensuite on casse le miroir! Mais si tout est mensonge, votre haine du mensonge n'est qu'un mensonge de plus!

[...]

Oui, il y a une Vérité, il y a la Vérité. La Vérité est une. Devant tant de négations accouplées à tant d'idolàtries, devant ce maquis de vérités partielles qui s'entre-dévorent, nous devons affirmer l'existence d'une vérité transcendante à tout et qui embrasse tout. Nous la devinons par transparence dans l'ordre de l'univers et nous la sentons en nous, dans cet appel vers une pureté et une perfection qui nous manquent. »

(à suivre)
Dernière modification par Cinci le mar. 14 avr. 2015, 0:56, modifié 1 fois.

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: Y-a-t-il une Vérité?

Message non lu par Cinci » mar. 14 avr. 2015, 0:18

«Le fait que nous ne puissions rien percevoir hors du temps et de l'espace, ni rien penser hors des structures de la pensée, ne prouve rien contre la réalité objective des choses perçues et pensées. Par exemple, nous ne voyons que par nos yeux : depuis quand cela doit-il signifier que ce que nous voyons n'existe que dans nos yeux? Nous ne respirons que par nos poumons, nous ne digérons que par notre estomac : cela prouve-t-il quelque chose contre la réalité de l'air et de l'aliment? L'isolement de l'intelligence depuis Kant (peut-être depuis Descartes ...) qui contraint l'intelligence à penser la pensée au lieu de refléter l'être - est le grand schisme du monde moderne. L'être féconde la pensée, mais, si l'on coupe la pensée de l'être, elle ne remonte pas à partir d'elle-même jusqu'à l'être.

Le reflet de l'être dans la pensée, c'est ici l'intuition irréductible d'une vérité totale - même inconnue, même inconnaissable - qui permet de sauver toutes les vérités partielles, en les situant à leur niveau et dans leurs limites. Cela est vrai par rapport à ... dans la mesure où ... Hors de cette intuition régulatrice, on ne sait plus faire la part du vrai dans les choses, soit qu'on érige le vrai relatif en vérité absolue, soit que, par réaction, on le nie absolument. Simone Weil faisait remarquer que la métaphysique de Platon accorde sa place à la psychanalyse en tant que science, tandis que la philosophie freudienne élimine la métaphysique de Platon. Le regard d'en haut reconnait l'existence des choses d'en bas, le regard d'en bas dénie l'existence aux choses d'en haut ...

L'homme qui aime la vérité est toujours en marche

Un adage oriental, qui est aussi très chrétien, dit ceci : «Celui qui cherche la Vérité est un sage, celui qui croit l'avoir trouvé est un fou, car la Vérité est un lieu où l'on arrive jamais.» Le vrai devient faux quand on s'y arrête, quand on s'y installe ... L'homme qui aime la vérité est toujours en marche, car on va à la Vérité comme saint Grégoire de Nysse dit qu'on va à Dieu : par des commencements sans fin - Dieu à qui il s'adresse ainsi : «Ô toi, l'au-delà de tout!»

Et on ne va pas à la Vérité - à cette Vérité unique et transcendante qui fonde les vérités - seulement avec l'intelligence, on y va avec tout son être. «Il faut aller à la vérité de toute son âme» nous dit Platon. Certes, l'intelligence est en nous la faculté du vrai, mais elle a besoin, pour s'exercer et s'épanouir, du concours de nos autres facultés. [...] si je pendais mes poumons tout seuls dans le vide, eh bien! c'est bien simple, ils ne respireraient plus. Et pourtant, on respire par les poumons ... si je me séparais de mon intelligence, si je la laissais se débrouiller toute seule, elle n'arriverait ni à la Vérité ni à rien du tout : elle ne fonctionnerait plus. [...]

La réflexion philosophique est comme un premier pas vers la Vérité et on doit nécéssairement aller au-delà, on doit se donner tout entier; dès lors, il ne s'agit plus de réflexion pure mais de vie, de participation totale - et donc d'amour. Ce n'est que par l'amour qu'on dépasse les apparences. «La vie est un songe, dit Calderon, un songe auquel on n'échappe que par l'amour.»

Pour nous, chrétiens, cet amour qui déchire la trame des apparences se nomme foi et charité; c'est une adhésion à un ordre de choses qui transcende le domaine de l'expérience et de la pure rationnalité; c'est une participation par consentement au mystère, nous nous détournons des fausses lumières pour pénétrer dans la nuit. Une nuit où l'intelligence, unie à la foi, «s'efface en s'exerçant», comme dit Simone Weil. Voyez les métaphores de la nuit chez tous les mystiques ...»

(à suivre)

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: Y-a-t-il une Vérité?

Message non lu par Cinci » mar. 14 avr. 2015, 0:41

«Ici s'insère le prodige de la médiation divine. Dieu vient à notre rencontre, il descend vers nous dans la personne de son Fils, il se fait homme, il se fait notre frère. Le Christ est le trait d'union entre notre infime esprit humain et le mystère de Dieu. «Je suis la Voie, la Vérité et la Vie.» Dans un petit livre fort peu connu, qui a été écrit sur Charles Du Bos, on cite une phrase admirable trouvée dans une lettre de l'abbé Zundel à Charles Du Bos, qui était alors très malade, une phrase qui dit tout en peu de mots : «Abandonnez-vous à travers le Christ à tout ce qu'il y a d'inconnu en Dieu.»

Enfin, si, pour reprendre l'image de Platon, l'âme est un miroir - un miroir dont l'essence est plus dans l'objet qu'il réfléchit que dans la matière qui le compose -, eh bien! c'est simple : il suffit de nettoyer le miroir pour que Dieu y apparaisse. C'est le sens du mot de l'Évangile : «Bienheureux les coeurs purs.» Suivre l'enseignement du Christ, c'est se rendre assez pur, assez pauvre (désencombrer des biens du monde), pour laisser Dieu entrer en nous. Et je conclurai par une parole de Simone Weil :«Au lieu de chercher à savoir si Dieu existe, il faut se mettre intérieurement dans une situation où Dieu, s"il existe, ne peut manquer de venir à nous.»

Source : Gustave Thibon, Les hommes de l'éternel. Conférences au grand public (1940-1985), Mame, 2012, pp.241-244

(note : c'est le père Yves Girard, moine trappiste, 87 ans, qui m'aura dit en janvier dernier lors d'une conférence, en quoi Gustave Thibon aura été un de ces auteurs qui auront le plus influencé sa propre pensée)

aur15
Quæstor
Quæstor
Messages : 246
Inscription : ven. 28 mars 2014, 21:01

Re: Y-a-t-il une Vérité?

Message non lu par aur15 » sam. 11 juil. 2015, 20:42

Je pense que le premier point c'est de regarder le périmètre de la vérité.
Est-ce qu'on parle de la vérité en biologie, dans les mathématiques, dans les lois de la physique ou en matière de religion ?
Si on parle de religion est-ce qu'on est dans une vérité unique qui exclu tout autre vérité ou on peut être partiellement dans le vrai ?
Par exemple si on crois en l'au dela et qu'on pense que c'est la vérité, les grecs et égyptien y croyais aussi donc ils n'étaient peut être pas complètement dans l'opposé de la vérité.
Comme le périmètre de la religion est dans l'invisible paradis, réincarnation, présence de démon invisible, ça me semble compliqué d'affirmer des choses, peut on prouver scientifiquement ou par un raisonnement des choses qu'on a pas déjà vu/expérimenté ?

Répondre

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 17 invités