AdoramusTe a écrit :Je suis d'accord avec vous, je ne vois pas trop le sens d'avoir plusieurs messes en même temps dans le même lieu, dans le style «travail à la chaîne». C'est aberrant d'un point de vue liturgique.
D'ailleurs, je crois que c'était aussi l'avis des pères conciliaires lorsqu'ils ont demandé l'extension de la concélébration.
Par contre, il y a un abus dans cette pratique :
- le nombre de concélébrants devrait être limité : seuls des concélébrants proches de l'autel
- la concélébration est anormale dans les paroisses rurales, où l'on pourrait avoir plusieurs messes plutôt qu'une à une seul endroit
Lorsque l'on relit les textes de l'époque du Concile sur la concélébration (dont tout le monde attendait le retour), on se rend compte qu'elle n'était jamais conçue que comme nécessairement limitée, demandant une forte préparation logistique, un nombre de concélébrants limités (notamment tout célébrant doit pouvoir toucher l'autel)... On est loin de la concélébration systématique, illimitée, et en simple étole qui est devenue la norme dans la forme ordinaire.
Après, il y a la pratique ou plutôt les pratiques des rites orientaux. Vous mentionnez le rite maronite, mais est-ce le rite maronite rénové (hélas!) dans l'esprit de la liturgie romaine moderne avec célébration face au peuple, églises-auditorium et rituel très simplifié, ou bien le rite maronite d'avant Vatican II?
Dans le rite byzantin on considère tout bonnement que c'est toute l'assemblée qui concélèbre (d'où les malentendus quand on leur parle de "concélébration" selon l'acception du rite romain). Simplement, les prêtres concélèbrent selon leur ordre, les diacres selon le leur, itou pour les laïcs. Enfin c'est ce que j'ai compris, et ce n'est pas forcément la règle absolue non plus, la seule Divine Liturgie byzantine à laquelle j'ai participé où 2 prêtres étaient présents (plus un diacre), le 2e prêtre était en soutane et participait à la liturgie en chantant avec la chorale.
Je ne parle pas des pratiques d'autres rites orientaux, je crois que c'est le rite chaldéen (à vérifier) qui pratique la concélébration synchronisée de plusieurs prêtres à plusieurs autels côte à côte, mais avec des gestes simultanés.
D'un autre côté, une photo comme celle-ci semble en enthousiasmer certains, mais je ne la trouve guère engageante (source:
http://wdtprs.com/blog/2012/06/my-idea- ... lebration/)
- il y a 3 prêtres mais aucun ne participe à la messe de l'autre en tant que servant, contrairement à la pratique léguée du rite romain.
- il n'y a pas d'orientation commune vers l'Orient liturgique, mais chacun se tourne le dos. Symboliquement, je me demande si ce n'est pas pire que la messe "face au peuple"...
En y repensant, le fait de célébrer de façon "privée", avec un seul servant d'autel (à la rigueur personne en cas de
vraie nécessité), la messe pour l'intention d'un fidèle (qui est donc au moins participant invisible), n'est pas complètement absurde et est fortement ancré dans la tradition romaine. Par contraste, la tradition byzantine est de regrouper toutes les intentions dans l'unique Divine Liturgie dominicale, mais s'y ajoutent des offices liturgiques privés, je pense notamment aux Pannychides pour les défunts. Ce sont 2 façons de faire différentes et je ne pense pas qu'il y ait de différence au niveau de l'"efficacité"... l'unique Sacrifice gardant une valeur infinie.
Le Novus Ordo a quelque peu imité la conception byzantine des choses, mais sans vraiment sortir des conceptions proprement romaines sur la "concélébration", sans que ça soit rentré dans la mentalité du clerc "de base", et le résultat n'est guère satisfaisant et ne ressemble vraiment à aucune des 2 traditions. Là-dessus je pense que le Père Guy a raison, on aurait dû s'en tenir à la tradition latine, tout en rectifiant prudemment les abus, et ne rétablir la concélébration que là où elle est vraiment justifiée, donc surtout autour de l'évêque (conformément à ce qui s'écrivait vers 1960).
Par contre, il faut aussi corriger les abus liés à la conception traditionnelle, l'idée que l'"efficacité" d'une messe est égal au nombre de messes célébrées quelles que soient les circonstances, etc... Quand je lis dans les commentaires du lien ci-dessus que la notion selon laquelle il y a de nombreuses messes mais un seul Sacrifice est une idée "protestante", je me dis qu'il y a du boulot
... et je me demande si justement le protestantisme (qui nie que les nombreuses messes soient chacune l'unique Sacrifice) n'est pas en partie né de l'abus de célébrations privées, parfois à la chaîne dans la même journée, avec une dérive "financière" que le droit canon a souvent eu du mal à contenir (cf un exemple tiré du livre que j'ai mentionné plus haut, selon lequel un ancien canon interdisait de célébrer plus de 30 messes par jour!).
In Xto,
archi.