Forme ordinaire et ars celebrandi

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AdoramusTe
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par AdoramusTe » jeu. 17 juin 2010, 10:43

archi a écrit : Pour trouver de nos jours de grandes églises avec jubé, il faut aller dans les cathédrales anglicanes. J'en ai visité quelques-unes l'année dernière et... je dois dire que j'avais souvent du mal à m'y situer avec cette architecture cloisonnée, surtout quand l'entrée se faisait sur le côté. Bref, je ne saurais plus dire où tombait exactement chaque élément, et les "autels" y avaient des positions diverses, du moins dans mon souvenir. Il faudrait y aller en ayant précisément en tête d'étudier cette question.
L'Eglise Saint Etienne du Mont à Paris (en face du Panthéon) a conservé son jubé.
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Théophane
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Théophane » jeu. 17 juin 2010, 14:10

Je n'ai jamais vraiment compris où se situait l'autel à l'époque où existaient les jubés. Il me semble en tout cas que le peuple voyait très peu, et même pas du tout, ce qui s'y passait. Le jubé avait, semble-t-il, pour but de séparer les laïcs des clercs, lesquels réalisaient les actes de culte dans le chœur liturgique.

Il y a encore certaines églises où les jubés existent, par exemple à la cathédrale d'Albi. Dans d'autres, ils ont été déplacés. À la cathédrale de Limoges, le jubé est désormais au fond. C'est là qu'on a installé l'orgue.
Pour ce qui est des églises anglicanes, j'ai eu l'occasion de visiter il y a quelques années la chapelle du King's College, à l'époque où mon beau-frère travaillait à l'Université de Cambridge. Mes souvenirs sont assez lointains, mais il me semble que le jubé se trouvait au milieu de la chapelle et que l'orgue était au-dessus.
« Être contemplatifs au milieu du monde, en quoi cela consiste-t-il, pour nous ? La réponse tient en quelques mots : c’est voir Dieu en toute chose, avec la lumière de la foi, sous l’élan de l’amour, et avec la ferme espérance de le contempler face à face au Ciel. »
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par philémon.siclone » jeu. 17 juin 2010, 15:42

Le jubé à l'occidentale n'est d'ailleurs pas sans rapport avec l'iconostase des "orthodoxes".
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Griffon
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Griffon » jeu. 17 juin 2010, 17:22

philémon.siclone a écrit :Cher Griffon,

Vous savez tout autant que moi que les défenseurs de l'orientation vers l'Orient passent leur temps à se justifier en répétant que l'expression "dos au peuple" ne reflète pas la réalité, mais qu'il s'agit pour l'assemblée et le célébrant de s'orienter dans la même direction. Je signale au passage que la même chose se produit chez les musulmans lors de la prière. Celui qui dirige la prière est tourné dans la même direction que les fidèles, savoir La Mecque.

D'accord Philémon,
Mais s'il s'agit en fait de s'orienter dans la même direction, pourquoi utiliser l'expression "face à Dieu".
Comme vous l'expliquer vous-même plus bas, cette expression n'a pas de sens !
Quand à aller chercher une justification chez les musulmans, permettez-moi de m'étonner.
Qu'ils se tournent vers La Mecque a une signification qui leur est propre. Mais...
Ont-ils le Christ ? Ont-ils la messe ? Vraiment ! Cette comparaison me semble tout à fait hors de propos.


Pourtant, malgré cette insistance, l'expression "dos au peuple" revient sans arrêt dans la bouche des détracteurs,...

Et puisque l'expression "Face à Dieu" n'a pas de sens pour dire "tous dans la même direction", les détracteurs sans doute, et moi aussi, j'utilise l'expression "dos au peuple" et "face au peuple". C'est l'expression la plus logique et la plus courte pour désigner par où se tourne le prêtre.


... et toujours dans le but de discréditer l'orientation vers Dieu. Cette expression sous-entend qu'il y aurait, dans cette façon de célébrer, une forme de mépris envers l'assistance, et une prise de distance entre le clergé et les fidèles. Voilà le sous-entendu sur lequel on compte pour mieux discréditer ce genre de célébration.

Tout cela c'est vous qui l'ajoutez. Cela relève du procès d'intention : pourquoi les accuser de discréditer l'orientation vers Dieu alors qu'ils exposent leur préférence et tentent de l'expliquer ?
Cela témoigne combien vous êtes partie prenante pour une des deux possibilités au point de ne pas supporter ceux qui préfèrent l'autre solution.
Pourquoi ne pas accepter qu'ils manifestent seulement une préférence sans chercher à discréditer ou à mépriser la vôtre ? Il me semble qu'on peut très bien être catholique et avoir un point de vue différent sur la chose.
Cela ne vous semble pas ?

Il me semble donc qu'un interlocuteur qui respecte l'opinion adverse devrait prendre en compte les explications avancées, au lieu d'employer cette expression dévalorisante et non reconnue.

J'avoue avoir du mal à respecter l'opinion de ceux qui s'expriment pour l'orientation ... [que puis-je dire ?], que vous défendez.
Pas tant parce que j'ai du mal avec cette option, même si je préfère l'autre.
Surtout, parce qu'il est impossible de discuter tant ceux qui préfèrent cette option, invoquent tout et son contraire du moment qu'ils peuvent soutenir leur argument. Cela donne des discussions improductives, fatigantes,... et sème la division chez les catholiques. C'est pourquoi, je disais qu'il valait finalement mieux ne pas en parler. (Même, si, je le comprends, ce n'est pas vraiment une solution)


Maintenant, pour ce qui est de votre question, à savoir : "Dieu serait-il quelque part géographiquement pour qu'on se tourne physiquement vers Lui ?" je vous répondrais simplement que la Liturgie a besoin de gestes significatifs qui accomplissent une action donnant du sens au Mystère. Ce n'est pas cela qui donne sa validité à la célébration. On pourrait tout autant se tourner vers le Nord-Ouest, ou bien tous se tourner le dos en cercle, ou bien encore faire la farandole durant toute la messe, et la célébration serait encore valide. Ce n'est donc pas une question de validité, mais de sens donné au Mystère.

Comme vous nous le montrez, l'expression "face à Dieu" n'a donc pas de sens.
Il est encore plus étonnant que vous trouviez qu'il y ait plus de sens à cette disposition qu'à une autre.
Ce qui vous plait, c'est que tous, fidèles et prêtres, soient tournés dans le même sens.
Vous trouvé que cela donne du sens au Mystère, mais cela vous ne l'expliquez pas.
Est-ce un ressenti ? Un sens profond qui vient de votre culture...
Je ne vais pas être vache en vous demandant si vous avez été musulman :p
(je ne résiste pas à un bon mot,... juste pour vous détendre !


Qui en a besoin ? Pas Dieu. Mais nous, les simples fidèles, qui avons des corps, et avons besoin de signes, à cause de la faiblesse de la chair. Et tout ce qui donne du sens ne reste pas sans conséquence, d'un côté comme de l'autre. Ainsi, une célébration où l'on se fait face, peut être vécue comme une assemblée fermée sur elle-même, et donc pas spécialement ouverte vers Dieu. Tandis qu'une célébration orientée dégage aussitôt l'horizon, et tire le fidèle hors de lui-même, l'oriente mentalement vers Dieu.

Ainsi, une assemblée avec le prêtre face au peuple vous semble fermée.
Et l'autre forme serait plus ouverte.
Et qui plus est, ouverte sur Dieu.
Ben... que voulez-vous que je vous dise... n'allez plus qu'à des messes où le prêtre est tourné dans la même direction que les fidèles.
Car en effet, nous, humains, nous avons besoin de sens.

Pour ma part, la messe avec le prêtre tournée vers les fidèles a plus de sens.
Le prêtre agit "in persona Christi". Nous sommes autour de Lui pour célébrer le Père, le Christ et l'Esprit-Saint.
Il nous a dit : " Quand 2 ou 3 sont réunis... je suis au milieu d'eux."
Et effectivement, il est là. Donné.
Il nous a dit : "Je suis avec vous tous les jours..."
Et effectivement, tous les jours, je bois à la source de son Mystère, je contemple son Sacrifice et je l'adore dans la Communion.
Beaucoup mieux ainsi, que lorsque cela se passe au fin fond du choeur, le Christ, en la personne du prêtre, tourné vers l'extérieur.

Je reconnais néanmoins certains points faibles à l'orientation vers le peuple.
La qualité de la foi du prêtre entre beaucoup plus en jeu : un prêtre priant porte à la prière. Cela se ressent.
Ensuite, il faut reconnaître que le prêtre est plus exposé. Si le peuple l'impressionne, cela ne doit pas être très agréable de faire la messe ainsi.

Pour pallier à votre sentiment d'une assemblée fermée sur elle-même, la réponse du Saint-Père est de mettre un crucifix sur l'autel. Je trouve cela très judicieux : l'autel est le lieu de Dieu.
Cela me paraît une réponse beaucoup plus efficace que de se retourner.


Merci de m'avoir lu, Philémon.
Je reconnais vous avoir été lourd en insistant sur le soi-disant "procès d'intention".
Je l'ai fait pour être clair avec les autres lecteurs de votre bord : car il y a là une vraie difficulté de parler.
S'il vous plait, veuillez m'en excuser.

En tout cas, merci aussi de m'avoir répondu,
en vérité de façon apaisante, au point de trouver utile d'exposer mes arguments.

Merci,

Griffon.
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Jésus, je m'abandonne à Toi.
Mon bonheur est de vivre,
O Jésus, pour Te suivre.

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philémon.siclone
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par philémon.siclone » jeu. 17 juin 2010, 18:44

Griffon a écrit : Mais s'il s'agit en fait de s'orienter dans la même direction, pourquoi utiliser l'expression "face à Dieu".
Comme vous l'expliquer vous-même plus bas, cette expression n'a pas de sens !
C'est vous qui dites que cela n'a pas de sens. Alors que je vous dis justement que cela donne du sens à la Liturgie. On parle de Missa ad Orientem. Ce n'est pas une notion inventée par les tradis, mais une notion pleinement catholique. Orient/Orienter, ces deux mots sont liés étymologiquement. Se tourner vers l'Orient, ou s'orienter vers Dieu, c'est le même symbole. L'Orient, c'est le soleil levant. Et c'est un attribut de Dieu, et plus exactement du Christ, qui est souvent appelé "Orient" dans la liturgie, "Lumière" ou "Soleil véritable" (voir les hymnes de l'office). Donc les chrétiens des premiers temps ont pris l'habitude de se tourner vers l'Orient dans leurs prières et célébrations. Cette tradition s'est conservée, que ce soit dans l'Eglise catholique (jusqu'aux années 1960), ou dans le rite orthodoxe. Bien sûr, Dieu est partout. Mais se tourner symboliquement vers Dieu, cela donne physiquement du sens à la liturgie. Il n'est donc pas faux d'employer l'expression "face à Dieu". Car ce qui est recherché, ce n'est pas de tourner le dos au peuple (ce qui serait effectivement une humiliation), mais de se tourner vers Dieu. Et cela correspond complètement à l'état d'esprit du chrétien qui recherche Dieu. Relisez le psaume 27 : "Mon Dieu, je cherche ta face." Dans les psaumes, cette idée est omniprésente. "Mon Dieu, ne me cache pas ton visage." Evidemment, on sait bien que Dieu ne se montre pas physiquement, et qu'il est à la fois invisible et omniprésent. Mais c'est l'attitude du chrétien que de le rechercher sans cesse, et de faire effort pour se tourner vers lui, parce qu'il est à sa recherche. Ce n'est donc pas absurde, durant la messe, que toute l'assemblée, prêtre compris, se tourne dans une même direction figurant symboliquement celle de Dieu. Le chrétien est ainsi dans l'action physique de rechercher la face de Dieu. Et la liturgie est avant tout action et prière.

L'expression "dos au peuple" n'a donc strictement aucun sens, car à aucun moment le célébrant ne se préoccupe délibérément de tourner le dos aux fidèles. Ce serait absurde.

Quand à aller chercher une justification chez les musulmans, permettez-moi de m'étonner.
Qu'ils se tournent vers La Mecque a une signification qui leur est propre. Mais...
Ont-ils le Christ ? Ont-ils la messe ? Vraiment ! Cette comparaison me semble tout à fait hors de propos.
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C'était simplement pour souligner que personne ne reproche aux musulmans d'avoir des célébrants qui tournent le dos au peuple. Mais la signification est la même : le célébrant et les fidèles se tournent dans une même direction, parce qu'ils adressent leur prières à Dieu. Dieu est-il seulement à la Mecque ? On pourrait imaginer une cérémonie où le célébrant se tourne vers les fidèles. Il est quand même là pour guider la prière, alors pourquoi leur tourner le dos ? Mais la prière n'aurait plus le même sens si l'imam était face au peuple. C'est exactement le même problème, et je trouve cette illustration excellente.
Et puisque l'expression "Face à Dieu" n'a pas de sens pour dire "tous dans la même direction", les détracteurs sans doute, et moi aussi, j'utilise l'expression "dos au peuple" et "face au peuple". C'est l'expression la plus logique et la plus courte pour désigner par où se tourne le prêtre.
L'expression semble en effet logique pour quelqu'un qui critique sans même essayer de comprendre objectivement.
Tout cela c'est vous qui l'ajoutez. Cela relève du procès d'intention : pourquoi les accuser de discréditer l'orientation vers Dieu alors qu'ils exposent leur préférence et tentent de l'expliquer ?
Non je ne l'ajoute pas. Ne faites pas la vierge effarouchée... Vous savez aussi bien que moi que le discours contre la messe orientée consiste souvent à critiquer le fait de "tourner le dos au peuple" comme une sorte d'élitisme du clergé, réputé pur et exempt de tout péché, et prenant ses distances avec le peuple réputé impur et noyé dans ses péchés. C'est l'argument qui est sous-entendu en permanence pour critiquer de façon générale la liturgie traditionnelle. L'expression "dos au peuple", qui est un véritable symbole en soi, véhicule toute cette idée. Il s'agit de tourner le dos au peuple : c'est quand même parlant ! Mais on ne cesse de vous répondre qu'il ne s'agit pas du tout de ça. Donc le fait d'insister, et de reprendre volontiers cette expression, sans tenir compte des explications fournies, procède manifestement de l'intention de jeter le discrédit, avec tout ce qui est sous-entendu par cette expression. C'est exactement comme si nous appelions la messe "face au peuple" : la messe "dos à Dieu". Je crois que vous le prendriez très mal, parce que cela sous-entendrait que vous tournez délibérément le dos à Dieu. Ce serait une façon de vous diffamer. Donc, employer l'expression "dos au peuple", c'est aussi une manière de diffamer, d'autant plus que l'expression est parlante, et véhicule des idées péjoratives.
Cela témoigne combien vous êtes partie prenante pour une des deux possibilités au point de ne pas supporter ceux qui préfèrent l'autre solution.
Là, c'est vous qui inventez. Pour l'heure, je ne fais que défendre la messe orientée. Je n'ai rien dit de fâcheux contre la messe face au peuple.

J'avoue avoir du mal à respecter l'opinion de ceux qui s'expriment pour l'orientation ... [que puis-je dire ?], que vous défendez.
Bon, ben comme ça c'est clair, au moins.

Cela donne des discussions improductives, fatigantes,... et sème la division chez les catholiques.
Ce sont les innovations hasardeuses qui ont introduit des divisions chez les catholiques. Jusqu'aux nouveautés des années 1960, une même liturgie était suivie par tout le monde, et ne donnait pas lieu aux batailles et divisions que nous connaissons depuis 40 ans.
Ainsi, une assemblée avec le prêtre face au peuple vous semble fermée.
Et l'autre forme serait plus ouverte.
Et qui plus est, ouverte sur Dieu.
Ben... que voulez-vous que je vous dise... n'allez plus qu'à des messes où le prêtre est tourné dans la même direction que les fidèles.
etc.
Je ne cherche pas à ferrailler contre la messe "face au peuple". Il m'importe seulement de faire ressortir l'intérêt de l'orientation "vers Dieu". Moi-même, il m'arrive d'aller à des messes "face au peuple", et ça ne me gêne pas spécialement. Je dis simplement que l'orientation "vers Dieu" est davantage porteuse.
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Pierre-Antoine
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Pierre-Antoine » jeu. 17 juin 2010, 19:11

Pour le jubé.

J'invite les lecteurs à se procurer et à lire le livre la cathédrale d'Alain Erlande-Brandenbourg.

Ce qu'il fait apparaitre dans son livre c'est que la cathédrale que nous connaissons (gothique du XII° siècle pour faire simple souvent revisité dans notre imaginaire collectif par la période romantique XIX°) est le fruit d'une évolution du batiment et de l'ensemble de batiment.

En réalité c'est le regroupement un seul de deux à trois batiments : l'Eglise canoniale (du chapitre cathédrale), l'Eglise paroissiale et du baptistère.

En somme cette cathédrale est le regroupement dans un seul espace des fonctions occupés par deux ou trois batiments, fonction qui sont différentes.

Le principe est de se rappeler qu'il y a des communautés qui ont des rythmes et des formes de prières différentes : une communauté de clercs (comme le chapitre canonial) à un rythme de prière liturgique quotidien, auquel s'associait peu le peuple. Le peuple à un rythme de liturgique qui correspond aux grandes fêtes avec quelques dévotions.

dans les Eglises majeures se regroupe ces deux communautés et ces deux pratiques.

Le choeur fermé par le jubé est l'église des clercs. Il permet à ceux-ci un certain isolement du reste du batiment (c'est particulièrement vrai à notre-Dame de Paris, à Saint Etienne du mont) pour développer leur liturgie propre tout en permettant les dévotion du peuple (usage du déambulatoire). ce choeur n'a vocation à s'ouvrir sur le reste que rarement pour les grandes fêtes.

L'espace de l'Eglise paroissiale se trouve dan ce qui reste de la nef. Certains jubés adossaient des autels (début des autels face au mur ?) qui étaient utilisés pour la liturgie paroissiale du peuple.

Le déambulatoire est l'espace de circulation qui permet de se rendre dans les chapelles où sont exposé les reliques.


Pour rendre un peu plus concret ce discours, j'invite les lecteurs de ce fil à se rendre à Notre-Dame de Paris et à tester 3 position lors d'une liturgie :
- dans la nef
- dans le coeur
- dans le déambulatoire (debout en train de déambuler)

Si vous éprouvez les mêmes émotions que moi vous devriez ressentir :
- dans le coeur : un isolement total du reste de l'Eglise : un espace de prière clos, presque intime
- dans la nef : une unité avec ce qui se passe dans ce vaisseau central, et une abstraction presque totale du flot de touristes incessant qui passe dans le déambulatoire.
- dans le déambulatoire, une impression d'être en dehors de l'action liturgique (tout en l'entendant) et la possibilité d'accomplir des dévotion à telle ou telle relique, ou tout simplement, tel le touriste moyen, la possibilité d'admirer le batiment et son statuaire.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par archi » jeu. 17 juin 2010, 19:42

AdoramusTe a écrit :L'Eglise Saint Etienne du Mont à Paris (en face du Panthéon) a conservé son jubé.
Merci de l'info, il y a aussi une liste sur la page Wikipedia:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jub%C3%A9

En lisant cette liste, outre la cathédrale d'Albi mentionnée dans ce fil que j'ai déjà visitée il y a quelques années (elle m'avait marqué, mais j'aurais bien du mal à me souvenir de son plan exact), j'en vois plusieurs dans ma région dont 1 presque sur mon trajet quotidien pour le boulot. Et je pourrais passer à St Etienne du Mont à mon prochain passage à Paris. Ca me fait un programme de découverte des églises françaises à jubé, si je n'oublie pas :)

Sinon, dans la même page, on trouve un lien vers cette page (orthodoxe et anglo-centrée):
http://stmaterne.blogspot.com/2006/11/h ... stase.html

Cette page insiste sur la clôture du choeur, le jubé est présenté comme une évolution progressive de la clôture du choeur. D'un autre côté, je connaissais aussi l'explication d'une volonté d'isoler le choeur pour permettre aux chanoines de prier tranquillement. Ca rejoint ce que dit Pierre-Antoine sur l'ambiance dans le choeur. Mais les 2 explications ne sont pas incompatibles, on peut penser par exemple que le besoin d'isoler le choeur a pu inciter au développement des jubés dans les collégiales, idée qui a rejailli ensuite sur l'aménagement des églises paroissiales.

In Xto,
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Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par philémon.siclone » jeu. 17 juin 2010, 20:19

A St-Germain l'Auxerrois (Paris), l'église paroissiale était sur le côté, et non dans la nef. Elle est devenue aujourd'hui la chapelle du St-Sacrement.
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par archi » ven. 18 juin 2010, 20:28

philémon.siclone a écrit :De plus, le choeur n'avance pas jusqu'à la croisée du transept, donc n'importe comment, l'autel ne peut pas se situer à cet endroit. Il suffit d'entrer dans n'importe quelle église pour s'en rendre compte. D'ailleurs, les aménagements post conciliaires qui ont consisté à avancer l'autel le plus près possible des fidèles, à l'aide d'estrades de fortune, n'ont fait que défigurer complètement l'architecture. Et même en faisant cela, ils n'ont jamais pu atteindre la croisée de transept, tellement cela remettait en cause tout simplement la circulation à l'intérieur de l'édifice. C'est impossible à réaliser dans la configuration architecturale de ces églises.
Eh bien, désolé de vous annoncer que vous avez tort. J'ai pu vérifier aujourd'hui en passant à Strasbourg, par l'église protestante Saint Pierre le Jeune, qui a conservé son jubé (très belle église d'ailleurs, dommage qu'elle soit tombée dans l'escarcelle réformée au XVIe Siècle, mais elle aurait bien besoin d'une restauration, à commencer par les fresques).

On peut trouver une photo du jubé vu de la nef là:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:St ... nneres.jpg

L'autel qu'on voit sur la photo se trouve précisément à l'endroit de la croisée du transept. Cependant, il faut prendre ses repères (une porte sur le côté droit) et sortir pour s'en rendre compte, parce que de l'intérieur, rien n'indique la présence d'un transept à cet endroit-là.

Je me demande si les transepts visibles de l'intérieur (ie où la nef s'étend dans les bras du transept) ne sont pas plutôt typique des églises de l'époque baroque ou classique.

Je précise que le choeur est presque aussi long que la nef.

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par philémon.siclone » ven. 18 juin 2010, 22:03

Vous me citez un exemple. Ce n'est donc pas une généralité. Je peux vous dire, de mon côté, qu'à Notre-Dame de Paris, le choeur est en dehors du transept. Et j'ai pu constater cela dans d'autres églises que j'ai visitées. Si je vous en parle, c'est justement qu'à une époque j'avais les mêmes idées que vous, et que j'ai déjà ressenti de la déception en constatant que la réalité ne correspondait pas forcément à l'idéal que je me représentais. J'en ai retenu l'idée que la recherche d'un idéalisme symbolique pouvait être une perte de temps.

Je me demande si cet idéal cosmique dont vous nous parliez (qui est d'ailleurs très intéressant) ne correspond pas à une époque donnée de l'architecture chrétienne, peut-être la période romane, où effectivement le choeur était souvent traversé par le transept (quand il y en avait un). Mais à l'époque gothique, lorsqu'on se met à développer considérablement le choeur, en le rallongeant à l'extrême, il a tendance à se décaler par rapport au transept. Etant francilien, et donc parisien, je ne vois que des église gothiques où la croisée de transept est devant le choeur, et non dans le choeur.

Et même si l'exemple que vous mentionnez à Strasbourg est un édifice gothique, je ne crois pas qu'on puisse en faire une généralité.

Ceci étant dit, le petit exposé de Pierre-Antoine démontre que la question est un peu plus complexe. En effet, si la nef des cathédrales, ou des grandes églises, servait d'"église paroissiale", avec un autel adossé au jubé, effectivement on se retrouve du coup, dans les édifices gothiques, sous la croisée de transept, ce qui donne raison à votre théorie. Mais alors, on est bien obligé de constater que le choeur des chanoines, sensé être quand même plus proche du Mystère, se retrouve dans une configuration "cosmique" "incorrecte", ce qui est assez cocasse.
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Pierre-Antoine » lun. 21 juin 2010, 8:02

philémon.siclone a écrit :Mais alors, on est bien obligé de constater que le choeur des chanoines, sensé être quand même plus proche du Mystère, se retrouve dans une configuration "cosmique" "incorrecte", ce qui est assez cocasse.
La proximité du mystère est une chose, le pragmatisme en est une autre. Il me semble que pour bien comprendre nos Eglises à Jubé, le coeur des clercs et la nef constituent deux espaces liturgiques distincts, l'un ne prévalent pas sur l'autre (le mystère se trouve sur l'autel où il est célébré et pas ailleurs).

Par ailleurs les autels des Eglises sulpiciennes se trouvent assez régulièrement à la croisée des transepts (à commencer par St Sulpice, église post tridentine). Un autel à la croisée des transept est par ailleurs l'alternative la plus esthétique à un autel au fond de l'abside.

Pour aborder l'architecture et l'emménagement d'une église, il est indispensable de se poser la question suivante : quelle communauté célèbre régulièrement dans cette église (quel type de vie liturgique) ? pour quelle communauté a-t-elle été construites ?

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Théophane » mar. 29 juin 2010, 21:15

Ce matin j'ai joué de l'orgue pour les funérailles d'une dame que je connaissais bien. La Messe était célébrée en langue latine selon le missel de Paul VI. L'autel amovible de la cathédrale, au demeurant peu esthétique, a été ôté et le prêtre a célébré au maître-autel. J'ai trouvé que le sens du sacré n'en ressortait que mieux. On ne peut nier que dans certains lieux, les autels versus populum qui ont été arbitrairement installés s'accordent très mal avec l'architecture du bâtiment et avec la configuration du chœur.
« Être contemplatifs au milieu du monde, en quoi cela consiste-t-il, pour nous ? La réponse tient en quelques mots : c’est voir Dieu en toute chose, avec la lumière de la foi, sous l’élan de l’amour, et avec la ferme espérance de le contempler face à face au Ciel. »
Bienheureux Álvaro del Portillo (1914-1994)

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philémon.siclone
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par philémon.siclone » mar. 29 juin 2010, 23:03

J'étais à Tours, l'autre jour, où j'ai visité la Cathédrale. Le choeur commence au-delà de la croisée de transept, sauf les marches qui y conduisent, qui se trouvent effectivement sous la croisée, et où l'on a installé l'autel vers le peuple. Ceci dit, ils n'ont pas pu le mettre exactement sous la croisée du transept, car il se serait trouvé juste au bord des marches. Ils l'ont donc mis un peu plus loin. Et j'ai fait ce même constat dans plusieurs autres églises gothiques. Preuve que l'architecture gothique, pour une bonne part d'édifices, n'a pas été conçue dans cette idée.

De plus dans une chapelle latérale, j'ai pu voir le double gisant d'enfants royaux de Charles VIII. La notice commentant ce monument expliquait qu'il se trouvait à l'origine dans la Basilique St-Martin, qui fut pillée complètement à la Révolution, et démolie à la fin du 19e s. Le gisant avait été sauvé et installé sous Louis-Philippe dans la Cathédrale. Or dans l'ancienne Basilique, le gisant occupait justement la croisée de transept... Le rédacteur de la notice ajoute même que c'était une configuration française classique [de mettre un tombeau à cet endroit-là, d'après ce que je comprends]. Etait-il d'usage de transformer les gisants en autel et d'y célébrer des messes ? Franchement j'en doute.

Le gisant date de 1506, donc on est largement avant le Concile de Trente, la Contre-Réforme, et la Réforme elle-même.
Anima nostra sicut passer erepta est de laqueo venantium
Laqueus contritus est, et nos liberati sumus

Notre âme s'est échappée comme un passerau du filet de l'oiseleur,
Le filet s'est rompu, et nous avons été délivrés.
Ps. 123

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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par AdoramusTe » lun. 04 oct. 2010, 15:09

Ahhh l'Oratoire de Londres ...

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Source : http://www.newliturgicalmovement.org/20 ... el-at.html
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Re: Forme ordinaire et ars celebrandi

Message non lu par Fleury » jeu. 28 oct. 2010, 9:28

Bonjour, plutôt que d'ouvrir un nouveau fil, je poursuis ici puisqu'on y parle "ars celebrandi".
Il y a possibilité de choix entre quatre Prières eucharistiques, pourquoi la Prière III semble-t-elle la seule choisie ?
J'ai entendu une fois la Prière I, à vrai dire, sur le moment, tellement habitué à la III, j'ai cru pendant quelques minutes que le prêtre improvisait...et jamais les autres.
Je suis le seul à n'entendre que la III ?
C'est un choix pratique ? idéologique ? Par paresse ?
La I est trop proche de l'ancien Canon et la IV trop compliquée ?
Par curiosité, je suis allé voir sur le site du Vatican les prières choisies par le Saint Père lors de quelques voyages, pour France, Chypre et Portugal, Prière III et Prière II pour Grande-Bretagne.
La III l'emporte encore !
Je suis perplexe.

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