RÉPONSES A VEXILLUM REGIS ET PRO LITURGIA
L'auteur de l'article "L'espace liturgique dans le néocatéchuménat" répond deux derniers billets de ce forum.
1. SUR L'EMPLACEMENT DE LA CROIX
La Présentation Générale du Missel Romain indique que la croix doit être “sur l’autel ou à proximité, bien visible pour le peuple assemblé” sans autre précision. Le désaccord entre Vexillum Régis et moi porte sur ce “à proximité” qui est vague. Il interprète cette expression d’une manière restrictive : la croix doit être sur ou au dessus de l’autel. Mais “à proximité” peut aussi s’interpréter comme devant, derrière ou à côté. Pourquoi une croix suspendue serait plus appropriée qu’une croix du néocatéchuménat ? La distance qui sépare l’autel de cette croix suspendue est-elle plus courte que celle qui sépare l’ambon de l’autel ? La
PGMR n’a pas donné d’indications plus précises, on doit donc accepter toutes les possibilités du moment que la croix est “bien visible pour le peuple assemblé”, comme c’est le cas dans le néocatéchuménat. Même si cette façon de faire n’a pas la faveur de certains, il faut reconnaître qu’elle n’est pas sans fondement et, surtout, pas contradictoire avec les règles du Missel Romain.
2. SUR LA PLACE DE L'AUTEL
Les textes de l'Église indiquent que l’autel doit occuper une place centrale dans l’Église. Le débat porte sur l'interprétation de cette notion de centre : Vexillum Régis et Pro Liturgia opposent le “centre de convergence” et le “centre géométrique”, le centre "spirituel" et le centre "géographique" de l'église. Cette opposition renvoie à la question de la place concrète de l'autel dans chaque église. Dans les églises conçues sur le modèle classique du chœur et de la nef, il est clair que l'autel ne peut pas être au centre géographique de l'église : l'architecture ne l'a pas prévu ainsi, sa place est dans le chœur. L'autel reste le centre de l'activité liturgique. Dans les églises neuves, par contre, on peut imaginer de placer véritablement l’autel au centre à la fois de l’église, de l’attention, de l’activité liturgique. L’importance de l’autel - sa centralité - dans la célébration de l’eucharistie est d’autant mieux soulignée que l’autel est effectivement au centre du point de vue architectural.
3. SUR LA HIÉRARCHIE DU PEUPLE DE DIEU
La hiérarchie des membres du Corps du Christ est bien entendu exprimé par la place que chacun occupe.
Les clercs sont situés à une extrémité de l’église alors que les laïcs sont situés des autres côtés. La place des clercs est clairement distingués : ils se trouvent devant une grande icône, derrière l’ambon et l’autel. Leurs sièges sont mis en valeur par rapport aux chaises ou aux bancs des laïcs. Ils sont surélevés par rapport à l’assemblée pour être visibles même lorsqu’un lecteur proclame la Parole de Dieu. De plus, seuls les clercs se présentent devant l’autel. Les laïcs sont tenus plus éloignés de la Table eucharistique. Il n’y a pas de confusion possible.
Les chanteurs et musiciens se trouvent du côté droit des clercs, près de l’ambon et de l’autel. Ils sont dans l’assemblée mais sont bien distinct des autres laïcs par la place qu’ils occupent. Ils forment un corps dans le Corps. Les fidèles ne se tiennent pas indistinctement autour de l’autel : Pro Liturgia ne semble pas avoir vu le schéma de répartition de mon billet et les deux photos que l’on peut agrandir et qui montrent bien que l’assemblée est ordonnée et hiérarchisée.
Pro Liturgia relève que ma citation sur la place du prêtre est introuvable dans la
Présentation Générale du Missel Romain. C’est que j’ai repris la traduction du site “Cérémoniaire : les rites liturgiques” et non celle du Vatican, ce que j’indiquais en renvoyant par lien au site. La traduction n’est pas exactement la même et celle du Vatican est bien entendu celle à prendre en référence. Je reconnais mon erreur et je vais rectifier le billet ! Mais, la traduction officielle n’interdit pas que les clercs soient placés à l’extrémité de l’église, elle précise seulement qu’ils doivent être "tournés vers les fidèles" et "situés dans l’axe du sanctuaire". Pro Liturgia relève une erreur de traduction qui risque d'induire en erreur (la phrase laisse penser que c'est une pratique à généraliser), mais cela ne prouve pas que cette pratique soit interdite, surtout quand il n'y a pas de maître-autel avec tabernacle (situé dans le néocatéchuménat dans une chapelle à côté) que le prêtre risque de cacher.
4. SUR LES CITATIONS DU CARDINAL RATZINGER
Le cardinal Ratzinger était particulièrement intéressé par les débats liturgiques même si ce n'était pas son domaine de spécialité en théologie. Il discutait volontiers avec d’éminents liturgistes et n'hésitait pas à entrer en débat avec eux - comme ce fut le cas dans la revue
La Maison-Dieu avec le dominicain Pierre-Marie Gy. Il prenait la liberté de donner son point de vue personnel sans abuser de son titre (cardinal) ou de sa position hiérarchique (préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi). Devenu pape, il a gardé cette liberté de paroles en publiant “
Jésus de Nazareth” à titre privé et non comme pape, en son nom propre plus qu'en celui de l'Église. Il admettait qu'on pouvait être en désaccord sur certains points sans être dans la désobéissance ou l’erreur. En tant que cardinal, il a donc pu écrire des choses qui reflétaient davantage son opinion, son point de vue, subjectif et documenté. Il faut donc distinguer absolument les écrits produits par le cardinal Ratzinger en tant que théologien et en tant que préfet, en tant qu'intellectuel et en tant qu'autorité de l'Église. Il faut encore plus distinguer les écrits personnels du cardinal des discours et prises de position en tant que pape. Il ne faut pas utiliser les écrits du cardinal Ratzinger en leur donnant un poids équivalent à ceux qu'il peut écrire en tant que pape.
On peut penser que le pape n’est pas friand des eucharisties du néocatéchuménat et qu’il préfère, à titre personnel, une liturgie plus traditionnelle avec chant grégorien. Mais, comme pape c’est-à-dire en tant que Vicaire du Christ, il a permis au néocatéchuménat quelques exceptions par rapport aux règles du Missel. C’est un pape d’orientation liturgique traditionnelle qui permet au Chemin NC de recevoir la communion sous les deux espèces tout en restant sur place. Bien entendu, il a corrigé certaines manières de faire et le néocatéchuménat a obéi.
Dans ses ouvrages ou dans ses articles, le cardinal Ratzinger n’a jamais fait explicitement référence à la liturgie telle qu’elle est vécue dans le néocatéchuménat. Ses critiques sur certaines manières de célébrer “face au peuple” concernent d’abord la grande majorité des paroisses habituelles (ou sans étiquettes en quelque sorte). Quand il dit que déplacer la croix pour “libérer la vue du prêtre” est une aberration il dénonce une pratique qui ne peut avoir lieu que dans les églises où le chœur est surélevé par rapport à la nef et où le prêtre derrière l’autel peut être gêné par la Croix qui l’empêche de voir l’assemblée. Sa remarque ne concerne pas le néocatéchuménat pour qui ce problème ne se pose pas.
User des paroles du cardinal Ratzinger - et non du pape lui-même qui parle au nom de l’Église - pour contredire le néocatéchuménat est injuste car vous lui faites dire quelque chose qu’il ne dit pas. Ne mettez surtout pas les actes publics du pape - qui béni le néocatéchuménat - en contradiction avec ses discours personnels.
5. SUR L'ASPECT COMMUNAUTAIRE DE LA MESSE
Pour le néocatéchuménat, l’eucharistie est bien à la fois un MÉMORIAL du SACRIFICE unique du Christ sur la Croix et du REPAS de la Cène. On ne peut séparer l’un de l’autre et il est vain de vouloir les opposer.
Vexillum Régis dénigre les messes du chemin néocatéchuménal en écrivant qu’elles cherchent à singer les pratiques du Christ (sic)… mais ira-t-il jusqu'à écrire que la célébration du lavement des pieds le Jeudi-Saint est un mime de la cène ? Un mémorial n'est-il que cela ?
Je ne comprends pas bien en quoi l’architecture des églises selon le néocatéchuménat risque d’enfermer sur soi ? La célébration selon le rite tridentin ne risque-t-elle pas non plus d’enfermer sur soi ? L’usage intégral du latin ne risque-t-il pas de sélectionner les croyants selon une certaine catégorie socioprofessionnelle et certaines valeurs politiques ? On peut généraliser à toutes les célébrations... Le
cardinal Ratzinger avait raison d’avertir toutes les communautés (paroissiale, monacale, mouvement… ) du risque de “transformer l’assemblée en un cercle fermée”. Il avait raison, ce n’est pas la communauté qui rassemble mais la communauté est rassemblée par Dieu pour le célébrer. Mais je ne vois pas en quoi cela ne concerne que le néocatéchuménat.
Puisque ces auteurs aiment les citations, je vais à mon tour en donner.
Louis Bouyer, dans
La vie de la liturgie, parue aux édition du Cerf, écrivait que : « La communion ( … ) ne doit pas être comprise dans son usage moderne, c’est-à-dire comme la réception d’un sacrement par un croyant individuel. Il faut plutôt le comprendre, ainsi que le mot koinômia a toujours été employé par les Pères, comme signifiant la “communion avec” d’autres dans une participation commune aux mêmes dons. ( … ) L’eucharistie est un repas, un repas de communauté dans lequel tous les participants sont rassemblés pour participer en commun à des biens communs. Ces biens communs commencent par être le pain et le vin d’un véritable repas humain, quelle que soit leur signification plus profonde. » La communauté dont il est question n'est pas n'importe quelle communauté, c'est le peuple de Dieu, le Corps du Christ. C'est pourquoi, le pape
Jean-Paul II disait : « On ne doit pas laisser l’anonymat des villes envahir nos communautés eucharistiques. De nouvelles méthodes et de nouvelles structures doivent être trouvées pour construire des ponts entre les personnes, de sorte que se réalise réellement cette expérience d’accueil mutuel et de proximité que la fraternité chrétienne requiert. Il se pourrait bien que cette expérience et que la catéchèse qui doit l’accompagner soient mieux accomplies dans des communautés plus réduites. » (« Discours aux évêques de l’Ontario en visite ad Limina » (n.5),
La documentation catholique, 20 juin 1999, n° 2206, p.557)
Sur la dignité de la liturgie du néocatéchuménat voir :[youtube]
http://fr.youtube.com/watch?v=kqdjMfHEcqE[/youtube] et [youtube]
http://fr.youtube.com/watch?v=FOYWWI1n0UA[/youtube]