Le baptême des enfants

Cinci
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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cinci » dim. 14 janv. 2018, 14:58

Bonjour,
Cepora a écrit :
Dites moi si je me trompe, mais il me semble qu'il y ait des conditions au baptême des enfants.
La seule condition que je connais : que les parents ne fassent pas obstacle à ce que l'enfant puisse recevoir le baptême et pour ensuite y recevoir une éducation chrétienne. Habituellement, si les parents sont d'accord : c'est o.k.

J'ai une amie qui est née dans une famille totalement étrangère au christianisme. Or ses parents ont voulu qu'elle soit baptisée afin qu'elle puisse recevoir une éducation chrétienne. Ce fut chose faite.

Mais admettons que l'enfant ne naît pas dans une famille chrétienne, et que cet enfant meurt avant d'avoir l'âge de raison pour faire le choix de se convertir, qu'advient-il de lui ?
On confie la personne à la miséricorde de Dieu.



Vous me demanderiez si les catholiques croient dans un Dieu qui châtierait des peines de l'enfer éternel un petit africain mort d'inanition avant même de savoir parler, victime de la guerre civile et parce qu'il aurait eu le malheur aussi de naître dans un foyer animiste ? Je vous répondrais que le catholique déblatérant de la sorte ("L'enfer ...") serait bon à enfermer au cabanon certainement.

C'est même le pape Pie IX qui disait qu'aucun petit enfant n'était passible de la damnation éternelle, ne pouvant être tenu responsable d'un péché grave, d'une faute volontaire.

Il écrivait le 10 août 1863, dans l'Encyclique Quanto conficiamur :

"... car Dieu, qui voit à découvert, sonde, connaît tous les esprits, intentions, pensées, dispositions des hommes, ne permettrait jamais, dans sa bonté souveraine et dans sa clémence, qu'un être qui n'est pas coupable d'une faute volontaire soit châtié des peines éternelles." (Pie IX cité dans L'Église du Verbe incarné, p. 1776)

Que les enfants qui meurent sans avoir reçu le baptême ne vont pas en enfer : c'est saint Thomas d'Aquin qui le disait également au XIIIe siècle. "... ils jouiront, corps et âme, d'un réel bonheur, mais resteront privés de la vision surnaturelle de Dieu." (Thomas d'Aquin in IV Sent. I, II, dist. 30, q. 2)
Cette doctrine des limbes restera l'enseignement courant de l'Église, jusqu'au milieu du XXe siècle (P. Descouvemont, Guide des difficultés de la foi catholique, p. 510)
et
Le chanoine Didiot, ancien doyen de la faculté de Lille, expliquait en 1896 en quoi devait consister cet état "... ils sont ainsi dans un état de perfection et de béatitude finales, auquel le genre humain tout entier eût été convié par la providence, si elle ne lui eût fait de plus hautes destinées en l'élevant à l'ordre surnaturel." (morts sans baptême, Lille, p. 67)

Quant aux Jansénistes, ils croyaient que les enfants qui mouraient sans recevoir le baptême allaient purement et simplement en enfer !
Pour mémoire : la doctrine janséniste a été condamnée par Rome.

Si on résume, l'enseignement courant de l'Église catholique refuse d'envisager le fait qu'un enfant mort sans baptême puisse être damné ou châtié des peines de l'enfer. C'est également ce que dit le catéchisme officiel de l'Église édité en 1992, usant d'une expression telle que "confié à la miséricorde de Dieu".

La différence entre l'an 1910 et l'an 2010, mais elle réside dans le fait que l'enseignement à propos des limbes ne peut plus guère représenter autre chose qu'une opinion théologique, non pas un dogme. Si c'est une opinion, alors des catholiques sont libres d'opiner différemment, et alors libres d'espérer, par exemple, qu'un enfant mort sans baptême puisse jouir lui aussi de la vision béatifique un moment donné. En 1910, la question n'était pas encore tranchée, et l'opinion de beaucoup à propos des limbes aurait pu éventuellement devenir un élément indiscutable - très théorique - de la foi catholique. Mais nos autorités au Vatican auront écarté très sagement et définitivement tant qu'à moi cette avenue étroite.

:)

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Suliko » dim. 14 janv. 2018, 16:03

Cinci,

Je crois que vous vous trompez et interprétez mal les extraits préconciliaires que vous citez. En enfer, il existe deux peines : de dam et de sens, autrement dit de privation de la vision béatifique (surnaturelle) et de tourments éternels plus ou moins pénibles selon la gravité de ses péchés. Tout ce que dit Pie IX et saint Thomas, c'est qu'un être humain mort sans baptême, mais avant d'avoir atteint l'âge de raison, ne peut pas souffrir de la peine de sens, càd de tourments pour ses péchés, étant donné qu'il n'en a pas sur la conscience en raison de son âge ! Les limbes dont parle saint Thomas ne sont pas une partie du paradis, et correspondent à ce que je viens de décrire. Si vous avez lu la Divine Comédie, il s'agit du premier cercle de l'enfer (juste avant le purgatoire), où l'auteur place Aristote, Saladin, Virgile, etc... Nous avons donc la certitude que les enfants morts sans baptême ne souffrent pas et ne sont pas malheureux. Ils jouissent d'un état de félicité naturelle (et non pas surnaturelle, puisque seul le baptême donne la vie de la grâce). Pour un être non encore parvenu à l'âge de raison, il n'existe que deux possibilités pour se sauver : le baptême sacramentel ou le martyre (baptême de sang, comme par exemple pour les Saints Innocents). A la limite, on peut prier et espérer que Dieu ait pu faire parvenir d'une manière précoce tel ou tel petit mort sans baptême à l'usage de la raison juste avant sa mort pour qu'il puisse obtenir - ou refuser - le baptême de désir. Mais on ne saurait généraliser une telle possibilité sans détruire totalement la théologie catholique des sacrements. Ce n'est pas pour rien que l'Eglise nous commande de baptiser les nouveau-nés le plus tôt possible et ce n'est pas non plus pour rien que les enfants morts sans baptême ne peuvent pas être enterrés religieusement.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cendrine » lun. 15 janv. 2018, 10:57

Bonjour,

Suliko, vous dites :
A la limite, on peut prier et espérer que Dieu ait pu faire parvenir d'une manière précoce tel ou tel petit mort sans baptême à l'usage de la raison juste avant sa mort pour qu'il puisse obtenir - ou refuser - le baptême de désir
Mon mari et moi n'avons été convertis que récemment, il y a moins de 3 ans. Nos enfants ont donc été élevés hors de la religion chrétienne, voire même dans la détestation du catholicisme, et bien sûr, pour être cohérents, sans baptême. Cette éducation a porté des fruits amers qui sont ma croix. Mais notre fille, qui a maintenant 10 ans, dès qu'elle a vu notre retournement, s'est engagée avec joie et ardeur dans la foi catholique. Elle sera baptisée le 1er avril 2018. Si jamais elle venait à mourir avant ce jour, elle serait donc estimée avoir reçu un baptême de désir ?

Quant à mon aîné, qui va avoir 18 ans en avril, il a subi tellement d'années en haine de la foi, qu'il porte un lourd "héritage", au point de refuser d'être baptisé.
Récemment cependant, il nous a laissé entendre qu'un jour il pourrait recevoir le baptême, mais sans accepter de se prêter au jeu puéril du catéchisme-pour-les-jeunes tel que pratiqué dans notre paroisse. Quand je fais le catéchisme à notre fille, je m'arrange pour que ce soit en la présence de mon garçon. Inlassablement je prie pour qu'il laisse le Christ entrer dans son cœur... Puisque nous avons élevé ce garçon dans la haine de la religion chrétienne et que les dégâts semblent juste commencer à se colmater dans son esprit, le fait de savoir que c'est à cause de nous mais que pour autant maintenant nous pouvons vivre de la grâce de Dieu alors que lui en est incapable : voilà ma croix. C'est pire que si ce n'était que par sa seule faute (car après tout, il n'aurait que les fruits de son propre travail), mais le fait que cela soit de notre faute, nous qui cependant en avons été pardonnés, cela donne lieu à des peines intérieures qui chassent souvent ma sérénité. Une prière accrue pour mon garçon est le seul fruit que je vois pour le moment à cette situation.

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Suliko » lun. 15 janv. 2018, 14:25

Bonjour Cendrine,
Mais notre fille, qui a maintenant 10 ans, dès qu'elle a vu notre retournement, s'est engagée avec joie et ardeur dans la foi catholique. Elle sera baptisée le 1er avril 2018. Si jamais elle venait à mourir avant ce jour, elle serait donc estimée avoir reçu un baptême de désir ?
Traditionnellement, l'Eglise considère que l'on atteint l'âge de raison à 7 ans. Bien sûr, cela peut varier en fonction de la plus ou moins grande maturité des enfants, mais il me semble à peu près sûr qu'à 10 ans, on peut être capable de désirer le baptême et donc que le baptême de désir n'est pas du tout impossible, au contraire.
Récemment cependant, il nous a laissé entendre qu'un jour il pourrait recevoir le baptême, mais sans accepter de se prêter au jeu puéril du catéchisme-pour-les-jeunes tel que pratiqué dans notre paroisse.
Je ne sais pas de quelle paroisse vous parlez. Celle de l'ICRSP ? S'il s'agit de votre paroisse ordinaire, vous savez que je ne peux pas prêcher pour des méthodes que je juge défectueuses. Si c'est à cela que s'oppose votre fils, je peux comprendre. Mais vous ne nous dites pas s'il croit au moins en Dieu ? En son Eglise ? Parce qu'à son âge, ce qui me semblerait bien utile, qu'il croit ou non, ce sont de bons ouvrages ou de bons cours d'apologétique, parce que c'est une période où on se pose généralement beaucoup de questions métaphysiques. Est-ce qu'il vous accompagne parfois à la messe traditionnelle ? Cela peut aussi le toucher.
Vous savez, je pense qu'il vous faut continuer de prier sans vous rendre malade de la situation présente. En un sens, les parents catholiques pratiquants qui voient leurs enfants cesser toute pratique religieuse à l'adolescence ou au début de l'âge adulte sont bien plus à plaindre que vous. Eux n'ont pas su transmettre ce en quoi ils croient, tandis que vous n'avez simplement pas transmis ce en quoi vous ne croyiez de toute façon pas du tout et que vous pouviez donc difficilement transmettre.

Courage !
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cendrine » lun. 15 janv. 2018, 15:34

Merci Suliko pour votre réponse qui m'aide et rassérène.

Lorsque nous avons franchi la porte de la maison paroissiale et que nous avons entamé notre catéchuménat et notre fille son catéchisme en vue du baptême (elle bénéficie donc de deux méthodes catéchétiques différentes : une dans la paroisse "ordinaire" et une autre selon un catéchisme paru avant le Concile Vatican II), nous ne connaissions bien sûr pas les "tensions" entre progressisme et traditionalisme, pour nous l'Église était la Tradition, point. Nous l'avons découverte au fil des mois et l'aimons toujours plus, même sur sa frêle barque de maintenant.

C'est en lisant les saints et le Catéchisme de l'Église catholique tel qu'édité dans les années 1990 (sans même parler de celui de Saint Pie X) que nous nous sommes rendus compte de l'écart entre ce que dit l'Église et la façon dont c'est transmis et même vécu par bon nombre de nos nouveaux compagnons paroissiens. Des liens noués avec eux, un parcours entamé sous la houlette diocésaine, l'affection et l'envie de connaître chacun des aspects de l'Église, fussent-ils discordants, ont fait que ce n'est pas dans la paroisse de l'ICRSP que notre fille a été accueillie dès le début et sera baptisée. Lorsque le besoin s'est fait sentir pour nous ses parents d'une nourriture spirituellement plus consistante, et donc d'une messe selon l'ancien missel, Iris était déjà "embarquée", mais cela ne nous trouble pas outre mesure. Pas plus que la jeune fille qui sera sa marraine, et qui elle fait partie d'une famille "traditionaliste".

Nous sommes pour le moment "bi-formalistes", nous tenons à entendre les deux formes de la messe, car, bien que non progressistes, nous sommes attachés à nos amis parmi lesquels beaucoup sont progressistes. Nous aimons l'Église dans la totalité de son pauvre troupeau chétif, et j'ai l'impression que - du moins pour le moment - c'est bon pour notre foi que de nous coleter avec des réalités qui nous heurtent parfois.

Par contre pour Léonard, je pense que le jour où il acceptera de venir avec nous à une messe, ce sera avec l'ICRSP et même chose pour une préparation au baptême, si nous en arrivons là un jour.

Il nous pose régulièrement des questions sur Dieu et sur le Christ Jésus, sur la Trinité, mais selon un angle en effet davantage métaphysique que par réel intérêt pour l'Église pour le moment. Mais oui, il croit en Dieu.

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Suliko » lun. 15 janv. 2018, 17:18

J'espère que tout ira bien pour vos enfants. En tout cas, il est clair que vous êtes soucieuse de leur salut et c'est déjà quelque chose de rare dans notre société. Comment se passe et s'est passée la transmission de la foi chez vos amis et connaissances - dont beaucoup sont progressistes (puisque vous les nommez vous-même ainsi) - de votre paroisse ordinaire ? Honnêtement, si vous constatez que les jeunes générations y délaissent la pratique religieuse, peut-être vaudrait-il mieux éviter une telle catéchèse à vos enfants ? Je ne dis pas cela pour amorcer une Nième polémique sur le NOM ou la catéchèse moderne, mais parce que je constate d'expérience que très peu d'enfants ayant fréquenté ces paroisses conservent la foi et la pratique. J'aimerais qu'il en soit autrement, mais ce n'est pas le cas, sauf exceptions (qui existent bel et bien sous nos latitudes, mais qui ne sont pas la majorité des cas). J'ai bien compris qu'en plus de la catéchèse de la paroisse, vous assuriez vous-même un enseignement plus traditionnel à votre fille et je vous en félicite, mais tout cela n'est-il pas un peu fatiguant ? N'avez-vous pas l'impression que votre fille va finir par s'apercevoir des écarts entre ce que vous lui transmettez à la maison via un catéchisme préconciliaire et ce qu'elle entend à la paroisse ? Il est vrai qu'elle n'a que 10 ans et qu'elle ne se pose sans doute pas encore de telles questions ! A-t-elle néanmoins déjà exprimé une préférence pour l'une ou l'autre des formes de la messe ? (Vous n'êtes bien évidemment pas obligée de répondre, c'est pure curiosité de ma part. Je me demande en effet parfois ce que j'aurais pensé de la FERM si j'avais eu l'occasion d'y assister à l'âge de votre fille. Aurais-je été assez mature pour y percevoir toute la grandeur et la beauté face à la platitude de bien des messes ordinaires ?)

UdP !
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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cendrine » mar. 16 janv. 2018, 10:56

Merci Suliko.

Dans ma paroisse il y a une partie des fidèles qui, sans être des habitués de la messe selon l'ancien missel, ont un regard critique sur la façon dont la catéchèse est faite ici mais qui continuent à entretenir des rapports cordiaux avec les "progressistes" qui sont à des endroits-clef du diocèse (pastorale des jeunes, catéchuménat des adultes, chorale, maison diocésaine, catéchisme des enfants, etc) et dont on ne peut se couper sans abimer l'esprit de charité et de communion ecclesiale. Nous sommes donc quelques uns à ne pas apprécier le côté olé-olé mais nous restons unis malgré tout. Certains autres couples font donc aussi comme nous, et sont "bi-formalistes".
Comment se passe et s'est passée la transmission de la foi chez vos amis et connaissances - dont beaucoup sont progressistes (puisque vous les nommez vous-même ainsi) - de votre paroisse ordinaire ?
Ma fille et ses petits compagnons disposent d'un livret (https://boutique.editions-mediaclap.fr/fr-FR/nathanael) qui est le support de chaque séance, il est accompagné d'un CD-Rom et d'un petit "bricolage" à faire à la maison. Pour la séance il y a aussi des chants qui se veulent "tendance", des coloriages et des discussions autour du thème du jour. Je suis reconnaissante à ces personnes de donner leur temps ainsi, elles croient bien faire, mais ne se rendent pas compte que ce type de catéchisme est un coup d'épée dans l'eau. Les enfants en ressortent plus horizontaux que jamais je crois. Comme les parents de ces enfants ne mettent jamais les pieds dans une église, il y a parfois des "Caté-dimanche", où nous rejoignons les fidèles pour la messe, avec au préalable un temps où on leur explique les lectures du jour et où, pour qu'ils n'aient pas l'impression que c'est ennuyeux, on leur montre une petite chorégraphie avec gesticulations des bras et de la tête.
J'ai bien compris qu'en plus de la catéchèse de la paroisse, vous assuriez vous-même un enseignement plus traditionnel à votre fille et je vous en félicite, mais tout cela n'est-il pas un peu fatiguant ? N'avez-vous pas l'impression que votre fille va finir par s'apercevoir des écarts entre ce que vous lui transmettez à la maison via un catéchisme préconciliaire et ce qu'elle entend à la paroisse ?
Ma fille est souvent un peu gênée dans ce type de séances, elle perçoit le côté un peu cucu la praline et peu recueilli, mais je ne suis pas mécontente qu'elle apprenne son catéchisme aussi comme ça, car cela lui donne l'occasion de se sentir pauvre et démunie, devant aussi la pauvreté de ses compagnons de foi, elle intègre que nous sommes tous des pauvres en esprit et nous pensons que cela peut augmenter en elle la charité et une foi humble avec un regard tendre mais lucide sur son prochain. Oui, elle ressent bien le contraste qu'il y a entre sa catéchèse paroissiale et celle plus rigoureusement méthodique, claire et orthodoxe qu'elle reçoit avec moi à la maison grâce au catéchisme ancien mais je crois que ce n'est pas pour elle un problème, elle voit les différences dans la foi de chacun et elle sait que ce n'est pas à elle de juger, ni à nous, et qu'il faut juste que nous fassions ce que nous croyons bon pour notre foi et qui nous a été légué par l'Église et sa Tradition sans nous occuper de façon trop acerbe de ce que font les autres fidèles. Nous allons aussi ensemble adorer Jésus Christ devant l'ostensoir ou le tabernacle, c'est aussi une façon d'apprendre la foi. L'ICRSP fait venir notre chanoine depuis le département voisin, il n'y a donc pas de catéchisme donné par ses soins.
A-t-elle néanmoins déjà exprimé une préférence pour l'une ou l'autre des formes de la messe ?
Elle n'est jamais venue encore à une des messes selon la forme extraordinaire, elle ne vient d'ailleurs pas à toutes les messes du dimanche, et elle sait que cela ne sera plus ainsi une fois qu'elle sera baptisée. Elle a parfaitement compris la différence entre les deux états, baptisé et non-baptisé, et la responsabilité que cela induit : elle attend avec joie ce passage caractéristique et sait que sa vie en changera substanciellement si elle reste fidèle au Christ. Nous tenons pour notre part à bien marquer ce passage en ne la prenant pas avec nous systématiquement à la messe tous les dimanches.

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cinci » mar. 16 janv. 2018, 20:27

gérardh a écrit :
J'observe que Suliko et Altior d'une part, Cinci d'autre part, ne sont pas d'accord. Les premiers, sur une base traditionnelle, vouent aux gémonies les enfants décédés non baptisés. Cinci fait référence à la miséricorde de Dieu, pour qu'ils soient (à quelles conditions ?) épargnés de l'enfer.

Qui a raison ?

Si vous recherchez le point de vue officiel de l'Église catholique romaine en l'an 2018, mais alors vous trouverez que Suliko a tort. Car ces sont les papes Jean-Paul II et Benoit XVI qui donnent tort à Suliko. Ils donnent tort à Suliko doublement, et par la publication du catéchisme officiel de 1992, et par l'avis de la commission théologique qui a rendu public son rapport en 2007; je parle de celui liquidant cette affaire des limbes pour les enfants morts sans baptême.

Liquider veut dire ici : que les fidèles de l'Église catholique n'ont pas à tenir cette vieille histoire traditionnelle des limbes pour les enfants comme si ce devait être un dogme de l'Église ! Non, ce ne l'est pas. L'Église n'étant pas en mesure de statuer véritablement là-dessus. Dans le doute, on peut espérer. Et l'accent est porté sur le fait que les enfants pourraient très bien accéder à la sanctification des élus cf GS 22.

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cinci » mar. 16 janv. 2018, 21:18

Suliko,
Suliko a écrit :
Nous avons donc la certitude que les enfants morts sans baptême ne souffrent pas et ne sont pas malheureux. Ils jouissent d'un état de félicité naturelle (et non pas surnaturelle, puisque seul le baptême donne la vie de la grâce).
... si vous avez la certitude que ces enfants "ne souffrent pas et ne sont pas malheureux", alors vous direz la même chose que ce que le pape Pie IX disait au XIXe siècle, ce que je relevais, savoir que ces enfants n'auront pas de peines éternelles à endurer. Le Père ne les envoient pas dans le feu de la géhenne ! Ils ne vont pas en enfer. Les limbes postulés hier, ce n'est pas l'enfer. Quand on parle du purgatoire, on ne parle pas de l'enfer. Vous le savez. Idem avec le sein d'Abraham. Pour les limbes ? Même chose.

Pour un être non encore parvenu à l'âge de raison, il n'existe que deux possibilités pour se sauver : le baptême sacramentel ou le martyre (baptême de sang, comme par exemple [...])
Faux.

L'Église admet bien la possibilité que des gens ignorant l'Évangile (ignorance invincible) puissent être "visités par la grâce" et ainsi être sauvés. Si cette "visite de la grâce" est possible sans le baptême et pour des adultes hors de l'Église, rien empêche alors la grâce d'illuminer des enfants morts sans le baptême. L'état d'innocence n'étant pas ici un obstacle de plus mais un obstacle de moins.

Ce n'est pas moi qui sort ce "joker" de ma manche tel un tricheur au casino. L'argument est ancien et était avancé aussi par des théologiens catholiques spécialistes de Thomas d'Aquin.



Jean de Saint-Thomas (1589-1644) :
Il est certain que dès avant leur naissance, les petits enfants sont membres du Christ en puissance, qu'ils sont compris sous sa très universelle rédemption, car il est mort pour eux, et relèvent de son pouvoir ... Dès le sein maternel, les enfants sont dans les conditions de la vie et donc du salut, et déjà rattachés au Sauveur. Nous savons même que, par extraordinaire, ils peuvent être sanctifiés par le Christ, comme Jean Baptiste qui tressaille dans le sein de sa mère à l'approche du Christ. D'autres peut-être, que nous ignorons, ont été ainsi sanctifiés."

Source : Jean de Saint-Thomas cité dans Charles Card. Journet, L'Église du Verbe incarné, p. 1720
Il est considéré comme le dernier des grands commentateurs classiques de saint Thomas d'Aquin, de l'École de Salamanque, notamment par son Cursus philosophicus thomisticus (1637) et son Cursus theologicus thomisticus (1643). Il est aussi l'auteur d'un traité sur Les Dons du Saint-Esprit, traduit en 1930 en français par Raïssa Maritain. Jacques Maritain et d'autres intellectuels du néothomisme ont fait redécouvrir Jean de Saint-Thomas dans les années 1930.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_Saint-Thomas

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Suliko » mar. 16 janv. 2018, 21:38

Bonjour Cinci,
Le Père ne les envoient pas dans le feu de la géhenne ! Ils ne vont pas en enfer.
Je vous ai déjà pourtant rappelé que l'enfer est caractérisé par deux peines, de dam et de sens. Et les enfants morts sans baptême ne sont, d'après la doctrine traditionnelle, ni au purgatoire ni au paradis.
L'Église admet bien la possibilité que des gens ignorant l'Évangile (ignorance invincible) puissent être "visités par la grâce" et ainsi être sauvés. Si cette "visite de la grâce" est possible sans le baptême et pour des adultes hors de l'Église, rien empêche alors la grâce d'illuminer des enfants morts sans le baptême. L'état d'innocence n'étant pas ici un obstacle de plus mais un obstacle de moins.
Cela correspond à ce que j'écrivais ici : A la limite, on peut prier et espérer que Dieu ait pu faire parvenir d'une manière précoce tel ou tel petit mort sans baptême à l'usage de la raison juste avant sa mort pour qu'il puisse obtenir - ou refuser - le baptême de désir. Mais on ne saurait généraliser une telle possibilité sans détruire totalement la théologie catholique des sacrements.
Parce que pour que le baptême de désir soit possible, il faut évidemment que le sujet puisse faire usage de sa raison, ce qui n'est a priori pas le cas des petits enfants.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cinci » mar. 16 janv. 2018, 21:47

supplément :

... les jansénistes croyaient que les enfants qui mourraient sans recevoir le baptême allaient purement et simplement en enfer ! Ils mourraient en effet en étant maqués de la souillure du péché originel.

Aujourd'hui, les chrétiens ne croient plus à l'existence des limbes - heureusement, ce ne fut jamais un dogme de l'enseignement officiel de l'Église !

[...]

Pourquoi cet abandon de la croyance aux limbes ? Sans nier l'existence du péché originel, la réflexion théologique contemporaine a remis en valeur l'insistance avec laquelle l'Écriture affirme que le Christ est mort pour tous les hommes (2 Co 5,14). Tous les êtres humains sont donc appelés à devenir "dans le Christ" participants de la nature divine (2 P 1,14) , Dans cette perspective, il n'est plus question d'affirmer l'existence d'un bonheur de seconde classe, purement naturel, pour les enfants morts sans baptême.

Le Concile Vatican II a pleinement ratifié cette vision théologique : "Puisque le Christ est mort pour tous et que la vocation dernière de l'homme est également unique, à savoir divine, nous devons tenir que l'Esprit Saint offre à tous, d'une façon que Dieu connaît, la possibilité d'être associé au mystère pascal." (Gaudium et Spes 22, 5)

tiré de
(Abbé) Pierre Descouvemont, Guide des difficultés de la foi catholique, 1997, p. 507

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Suliko » mar. 16 janv. 2018, 22:31

La doctrine traditionnelle n'a rien de janséniste... Saint Augustin, par exemple, n'était pas janséniste et affirmait pourtant la nécessité du baptême pour le salut...
Pour le reste, vous savez bien que l'enseignement postconciliaire ne m'intéresse pas, dans la mesure où il diffère de l'enseignement préconciliaire sur de nombreux points. Trouvez moins un seul auteur ancien à l'orthodoxie incontestée qui enseignerait que les enfants morts sans baptême vont très certainement au paradis et j'y prêterai une oreille attentive. Je n'en connais aucun...
Ce que disent tant de théologiens modernes n'est qui plus est pas du tout logique : ils déclarent sans sourciller que la vision béatifique surnaturelle peut sans problème être accessible à des êtres humains n'ayant pas reçu le saint baptême - sacramentel ou non -, càd à des personnes qui n'ont pas reçu la grâce sanctifiante et vivent donc d'une vie purement naturelle (et non surnaturelle)...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Cepora
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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Cepora » mar. 16 janv. 2018, 23:13

Bonjour Suliko,
Suliko a écrit :
mar. 16 janv. 2018, 21:38
A la limite, on peut prier et espérer que Dieu ait pu faire parvenir d'une manière précoce tel ou tel petit mort sans baptême à l'usage de la raison juste avant sa mort pour qu'il puisse obtenir - ou refuser - le baptême de désir.
Puisque pour le baptême des petits enfants la coopération de leur volonté n'est pas exigée (ils ne peuvent de toute façon l'exprimer de façon intelligible), on peut dire que les petits enfants ne mettent aucun obstacle personnel sur le chemin du salut. Et puisqu’il n’y a pas d’opposition de la part de ces petits enfants, ne peut-on pas espérer qu'ils puissent bénéficier ipso facto du baptême de désir ?

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par Altior » mer. 17 janv. 2018, 11:26

Bonjour, Cepora!
Cepora a écrit :
mar. 16 janv. 2018, 23:13
Puisque pour le baptême des petits enfants la coopération de leur volonté n'est pas exigée (ils ne peuvent de toute façon l'exprimer de façon intelligible), on peut dire que les petits enfants ne mettent aucun obstacle personnel sur le chemin du salut.
Je pense que «désir» suppose une volonté, un attrait, un agrément et pas une simple non-opposition, une indifférence.

D'ailleurs, il faut noter que l'existence du baptême du désir n'est pas un dogme, n'est pas une vérité de fide catholica, mais, au plus, une vérité de fide definita, tout comme l'existence du limbe des enfants est une vérité de fide definita. La différence entre une vérité de fide catholica (ayant deux niveaux: les vérités de fide divina et celles de fide apostholica et une vérité de fide definita est que seules les premières sont faites par révélation directe, tendis que les deuxièmes sont le résultats des déductions, de la raison des gens humain. Des gens de plateforme, des gens astucieux, des gens qui savent, des gens dignes de confiance, sans doute. Toutefois, elles n'ont pas Dieu comme auteur direct, mais les lumières de la science et de la raison.

Autrement dit, quelqu'un peut rester dans l'orthodoxie de la foi et ne pas succomber dans l'hérésie s'il conteste l'existence du baptême du désir, tout comme s'il conteste l'existence du limbus puerorum ou toute autre vérité qui n'est pas un dogme, n'est pas de niveau de fide catholica

ne peut-on pas espérer qu'ils puissent bénéficier ipso facto du baptême de désir ?
On peut espérer, mais on ne peut pas l'affirmer comme résultat de la Révélation. Pour chaque catholique, surtout s'il a ou s'il envisage avoir des enfants je recommande cette règle de conduite: mieux vaut, en ce qui concerne le salut, la certitude que l'espérance. Nous avons la certitude que tous les enfants baptisés, si appelés à Dieu avant l'age de la raison, se réjouissent à jamais de la vision béatifique. Voilà tout ce que nous savons avec certitude.

Fraternellement en Christ,
A.

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Re: Le baptême des enfants

Message non lu par gerardh » mer. 17 janv. 2018, 12:39

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Bonjour Suliko,

Vous cherchez un auteur incontesté. Je vous citerais le Christ, qui a propos des enfants a dit : nul ne les ravira de ma main.


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