PaxetBonum a écrit :stephlorant a écrit :
Bref, avant de me rendre à cette messe en latin, j'emporterai un léger tranquillisant, car l'émotion risque d'être forte !
Vous risquez de vous sentir pousser des ailes dans le dos
Pensez à mettre vos chaussures de scaphandrier !
J'espère que vous nous raconterez !
Voici le récit (revu et corrigé pour y ajouter ma méditation du jour) de cette belle matinée:
Je n'ai pas eu besoin de tranquillisants, car ma trachéite suffisait bien ! J'ai donc trouvé l'église à Brasménil, sur la place, si exactement à là frontière que les drapeaux belges et français étaient croisés sur le monument au mort, à quelques mètres de l'entrée de l'Eglise. Une surprise dès l'entrée, un paroissien que je connais est venu me serrer, et ensuite un couple âgé dont l'homme, avant de me serrer la main, m'a tapé sur l'épaule... moi qui étais en train de me concentrer sur les textes du jour ! L'Evangile était celui de la multiplication des pains.
La messe a commencé, le prêtre avec ses deux acolytes, comme il y a ... bon, pas nécessaire de le rappeler. Un moment de forte émotion, c'est lorsque nous avons tous (une trentaine) entonné le 'Credo in unum deum'... que je connaissais toujours par coeur, alors que j'imaginais l'avoir oublié !
Le prêtre, qui a revêtu, un petit chapeau pour l'occasion, nous a fait un sermon sur trois sacrements essentiels : le premier étant bien présent dans la prière de l'Aspergesme, le second étend la pénitence, le troisième l'Eucharistie.
Il nous a parlé de David, d'Urie et de Bethsabée, sa femme: David avait exposé à la mort au combat Urie, un de ses plus fidèles lieutenants, afin de pouvoir 'en toute justice' épouser sa femme. Non seulement il la désirait, mais il avait déjà commis l'adultère avec elle : elle était enceinte. A la fin de l'histoire, c'est le prophète Nathan qui vient lui révéler que Dieu n'est certainement pas dupe du stratagème employé par le roi David afin de masquer d'abord son adultère e t l'épouser ensuite en toute 'légalité'. Le sermon tenait en cela: qu'aucun fidèle n'en arrive à s'imaginer qu'en contournant de petites règles pour finalement enfreindre carrément une loi intangible, il réussira à tromper Dieu - puisque Dieu connait par avance chacune de nos intentions. C'était bien dit. De retour chez moi, j'ai repris ma Bible et j'ai admiré l'intelligence de David, qui commence par vouloir cacher la grossesse de Bethsabée en faisant revenir Urie du champ de bataille: si Urie ne passait ne fut qu'une nuit avec son épouse, l'adultère serait passé inaperçu, l'enfant à naître eût été d'office déclaré enfant de Bethsabée et d'Urie. Mais le stratagème ne fonctionne pas, car Urie, en tout point fidèle à son devoir passe ses nuit avec ses soldats, au corps de garde, en attendant les ordres du roi.
C'est à ce moment-là que David devient vraiment machiavélique : il faut faire mourir Urie. S'il meurt au combat, tous les problèmes sont résolus, la faute est cachée, et David peut célébrer de belles noces publiques ! Comment un homme comme David, si proche de Dieu, l'héritier de la promesse, a-t-il pu s'abaisser jusque-là ? Je pense qu'il faut y voir une double cause, la passion s'alliant ici avec les murmures du démon: autant la passion dans le coeur de l'homme peut rencontrer la miséricorde divine, autant le froid calcul sur la mort d'un juste est totalement inacceptable, c'est une véritable abomination. J'en ai tiré la conclusion qu'il vaut mieux pour moi, pécheur, de reconnaître simplement que je suis pécheur, que d'aller me chercher n'importe quel prétexte et de me donner ainsi une "bonne conscience", laquelle, c'est tout à fait exact, finirait par me faire perdre, définitivement, la grâce divine. Dans mon quartier, il existe beaucoup de gens désœuvrés qui boivent (en vingt ans, j'en ai vu mourir des dizaines), mais rares sont ceux parmi eux m'ont dit, comme un ou deux que je connais, qui s'enivrent chaque jour, délibérément, afin de hâter leur fin... faut-il qu'ils aient perdu tout espoir ! L'un d'entre eux, à qui j'avais osé une remarque m'a répliqué froidement et en haussant la voix : "Mais tu sais donc pas qu'on n'est RIEN !" Il vit toujours, mais son ventre s'arrondit et il prend désormais des cachets... et il continue de boire.
A la communion, j'ai hésité un instant, d'abord car il faudrait s'accroupir devant une barrière et puis tendre la langue (en plus, cela faisait si longtemps) ensuite parce que j'avais encore à l'esprit mes débats intérieurs de ces derniers jours. Les cinquante-cinq ans, l'existence plus rude, les désaffections que je ne comprends pas, la peur et le doute, les tentations... et tout d'un coup, je me suis "réveillé" de ce débat intérieur, car j'avais
déjà quitté ma chaise pour me mettre dans la file, sans bien songer à ce que j'allais faire. J'ai donc communié, yeux fermés, langue en avant, les mains sous un tissu courant dessus la petite barrière, et 'Ouille' aux genoux....
Lors de mon retour (un peu plus de quinze kilomètres), la Joie est venue, de la manière habituelle... d'abord, on dirait un point de lumière intense au milieu du front... qui donnerait bien envie de dormir si cela durait; ensuite la lumière descend au niveau de la poitrine et c'est là que je la ressens le plus, et enfin, elle diffuse et je la ressens encore toute la journée : j'ai repris du courage aussi.
Je sais désormais où me rendre au mois d'août (spécialement pour l'Assomption qui est vraiment très négligée cette année...) Dieu vous bénisse et vous garde - et particulièrement merci à ceux et celles qui m'ont renseigné !
Etienne