Le sens de l'Avent

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VexillumRegis
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Re: Commentaire des dimanches du Temps de l'Avent (A)

Message non lu par VexillumRegis » sam. 22 déc. 2007, 23:37

Dominica IV Adventus
Quatrième dimanche de l'Avent
Le quatrième dimanche de l’Avent « était, dans les temps antiques, un dimanche sans liturgie, car la célébration des Quatre-Temps se prolongeait jusqu’au dimanche matin. Ce n’est que lorsque la messe des Quatre-Temps fut transférée au samedi matin qu’on composa, pour le dimanche, un formulaire spécial de messe en rassemblant des textes empruntés aux messes des Quatre-Temps (chants du mercredi, Évangile du samedi). La messe d’aujourd’hui se présente ainsi comme une célébration des Quatre-Temps renvoyée au dimanche pour les fidèles qui n’ont pas pu venir à l’Église pendant la semaine. » (Dom Pius PARSCH, Le petit guide dans l’année liturgique, 1957, p. 43). Nous étions donc en présence d’une messe composite et non sans incohérences (1). Le nouveau Missel publié après le concile Vatican II y a porté remède en faisant lire l’évangile de l’Annonciation en ce quatrième dimanche de l’Avent, ce qui semble particulièrement judicieux à quelques jours de la Nativité (2). L’introït (3), le Graduel (4) et la communion (5), qui accompagnaient cet évangile au Mercredi des Quatre-Temps, sont maintenus, de même que l’offertoire (6) emprunté à la fête de l’Annonciation. Grâce au lien thématique qui relie ces chants à l’évangile (et à la première leçon), l’ensemble gagne en cohérence et en beauté.

(1) Il était ainsi étrange de lire au dimanche précédent Noël l’évangile des débuts de la prédication du Précurseur (Lc III, 1-6), alors que les évangiles de l’Annonciation et de la Visitation étaient respectivement lus les mercredi et vendredi des Quatre-Temps, c’est-à-dire les jours précédents. Dans le nouveau Missel, l’évangile des débuts de la prédication de saint Jean-Baptiste a été déplacé au début de l’Avent, au 2ème dimanche de l’année C.

De même l’épître (1 Co IV, 1-5), selon dom Pius PARSCH, avait un rapport étroit avec l’ordination qui avait lieu dans la nuit précédente.

(2) L’Annonce à Joseph est lue en l’année A, l’Annonce à Marie en l’année B, et la Visitation, qui tient le milieu entre l’Annonciation et la Nativité, en l’année C.

(3) [Is XLV, 8 V/ Ps 18, 2] Roráte, cæli, désuper, et nubes pluant iustum : aperiátur terra, et gérminet Salvatórem. V/ Cæli enárrant glóriam Dei : et ópera mánuum eius annúntiat firmaméntum. | Cieux, répandez votre rosée ; que des nuées descende le salut ! Que s’ouvre la terre et qu’elle donne naissance au Sauveur. V/ Les cieux chantent la gloire de Dieu : leur voûte solide proclame la puissance de ses mains.

« La rosée sollicitée du ciel, c’est l’action fécondante du St-Esprit ; la terre, c’est Notre-Dame, fleur de la race, qui s’ouvre au sommet de la tige de Jessé et qui, fécondée sous l’ombre mystérieuse de l’Esprit du Très Haut, va produire son fruit divin : le Verbe faire chair. » - Dom BARON, L’expression du chant grégorien, p. 43.

(4) [Ps 144, 18 V/ 21] Prope est Dóminus ómnibus invocántibus eum : ómnibus, qui ínvocant eum in veritáte. V/ Laudem Dómini loquétur os meum : et benedícat omnis caro nomen sanctum eius. | Le Seigneur n’est pas loin de ceux qui le prient, de tous ceux qui le prient en vérité. V/ Que ma voix proclame les louange du Seigneur, que tout ce qui vit chante son nom très saint !

« Quant au deuxième verset il a sans doute été choisi à cause des mots omnis caro, qui représentent d’abord tous les êtres vivants bénissant le nom du Seigneur, mais on peut (...) aussi y voir une allusion à l’Incarnation qui va s’accomplir. Cette chair, c’est la nature humaine que le Fils de Dieu va assumer, nous entraînant à sa suite dans la grande louange qu’il adresse sans cesse à son Père. » - Y. GIRE, L’année grégorienne, pp. 25-26.

(5) [Is VII, 14] Ecce, Virgo concípiet et páriet fílium : et vocábitur nomen eius Emmánuel. | La Vierge deviendra mère et mettra au monde un fils auquel on donnera le nom d’Emmanuel.

Contemplant dans la lumière de la grâce sacramentelle l’Incarnation qui se prolonge par l’Eucharistie dans tout le Corps Mystique, elle chante la joie de l’Emmanuel, du Dieu avec nous, en même temps que le mystère de Noël, dans lequel à nouveau va s’accomplir mystiquement la parole divine.” - Dom BARON, p. 53.

(6) [Lc I, 28] Ave, María, gratia plena ; Dóminus tecum : benedícta tu in muliéribus, et benedíctus fructus ventris tui. | Je vous salue, Marie, pleine de grâce, le Seigneur est avec vous. Vous êtes bénies entre toutes les femmes ; et le fruit de vos entrailles est béni.

« L’histoire de la prière Ave Maria, si chère à la piété des fidèles, (...) commence par ce splendide offertoire grégorien, qui nous donne le texte de l’Ave dans sa forme primitive, tel qu’il fut en usage durant tout le moyen âge. » - Dom SCHUSTER, Liber Sacramentorum, II, p. 170.


Dom Pius PARSCH voyait dans la messe du quatrième dimanche de l’Avent en quelque sorte la quintessence de tout ce Temps liturgique de préparation à Noël : « Isaïe en effet est Prophète, il se tient encore devant des portes fermées, sur le seuil [à l’introït] ; le Baptiste est prédicateur de pénitence et sa place est sur l’ambon de l’avant-messe [à l’évangile]. Mais Marie incorpore la grâce ; elle nous conduit vers l’autel, sur lequel le Rédempteur descend comme il descendit dans le sein de la Vierge quand l’ange vint la saluer (7) [à l’offertoire et à la communion]» (p. 44). Si ce schéma ne peut plus s’appliquer qu’imparfaitement aujourd’hui (8), on le retrouve résumé dans la deuxième préface de l’Avent, que je reproduis ci-dessous in extenso comme je l’ai fait pour la première :

Vere dignum et iustum est, æquum et salutáre, nos tibi semper et ubíque grátias ágere : Dómine, sancte Pater, omnípotens ætérne Deus : per Christum Dóminum nostrum.

Quem prædixérunt cunctórum præcónia prophetárum, Virgo Mater ineffábili dilectióne sustínuit, Ioánnes cécinit affutúrum et adésse monstrávit. Qui suæ nativitátis mystérium tríbuit nos præveníre gaudéntes, ut et in oratióne pervígiles et in suis invéniat láudibus exsultántes.

Et ídeo cum Angelis et Archángelis, cum Thronis et Dominatiónibus, cumque omni milítia cæléstis exércitus, hymnum glóriæ tuæ cánimus, sine fine dicéntes : Sanctus, Sanctus, Sanctus Dóminus Deus Sábaoth...


Il est vraiment juste et digne, c’est notre devoir et notre salut, de vous rendre grâces toujours et en tout lieu, Seigneur, Père saint, Dieu éternel et tout-puissant : par Jésus-Christ notre Seigneur.

Il est Celui que les prédictions de tous les prophètes annoncèrent, Celui que la Vierge Marie porta dans un amour ineffable, Celui dont Jean chanta la venue et dont il indiqua la présence. Il nous a accordé d’attendre le mystère de Sa nativité dans la joie, afin qu’Il nous trouve vigilants dans la prière et remplis d’allégresse dans sa louange. (9)

C’est pourquoi, avec les Anges et les Archanges, avec les Trônes et les Dominations, avec la troupe entière de l’armée céleste, nous chantons une hymne à votre gloire, redisant sans fin : Saint, Saint, Saint le Seigneur Dieu des armées célestes...


(7) La Super Oblata (*) demande que l’Esprit Saint descende sur les dons offerts comme Il est descendu pour féconder le sein immaculé de la Vierge Marie :

Altári tuo, Dómine, superpósita múnera Spíritus ille sanctíficet, qui beátæ Maríæ víscera sua virtúte replévit. | Que votre Esprit, Seigneur, dont la puissance a fécondé le sein de la Bienheureuse Marie, sanctifie les offrandes posées sur votre autel.

Cette oraison ne se trouve pas dans le MR1962 ; c’est une prière que l’on trouve dans d’anciens sacramentaires, dont celui de Bergame.

Il faut remarquer que, dans le rite arménien (voir ici), au moment de l’offertoire, le prêtre récite en faisant trois signes de croix sur les oblats ce verset de l’évangile de l’Annonciation : “Le Saint-Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre” (Lc I, 35).

(8) Saint Jean-Baptiste est présent, quoique à l’arrière-plan, en l’année C dans l’évangile de la Visitation. Par contre, Isaïe (dans la L1) et Marie (dans la P2 et la préface) se trouvent encore davantage mis en valeur.

(9) Je remercie Eucher, du forum catholique, qui a bien voulu me traduire d’une manière précise le coeur de la préface.


Mais ce qui frappe l’âme catholique en ce dernier dimanche de l’Avent, c’est sa tonalité mariale affirmée. « Durant l’Avent, l’Eglise se presse, avec une dévotion toute spéciale, autour de l’Immaculée Mère de Dieu, parce que la première, pendant les neuf mois qu’elle porta Jésus dans son sein, elle sanctifia par son amour, par son humilité, par sa totale consécration à Jésus, ce temps de joyeuse attente et de préparation à la naissance du Fils de Dieu. » (Dom SCHUSTER, p. 170) ; et dom Pius PARSCH : « L’Église et l’âme sont assimilées mystiquement à la Mère de Dieu : nous devenons nous aussi des porteurs du Christ, qui doit spirituellement être enfanté en nous le jour de Noël. » (p. 44). La terre de David (L2 ; Rm I, 1-7), fécondée par la rosée céleste, a produit un fruit de salut (A1) ; la souche de Jessé, une fleur immarcescible ; l’étoile du matin succède aux ténèbres, et précède le Soleil de justice qui va baigner le monde de Sa lumière. Comme Marie, « vigilants dans la prière et remplis d’allégresse » (Préface) en ces derniers jours avant la Nativité, l’Eglise nous invite a porter mystiquement le Christ en nos âmes, afin qu’Il puisse y être enfanté au jour de Noël, comme il y est enfanté à chaque communion eucharistique. Ce thème avait fait l’objet, naguère, d’une fête mariale fixée au 18 décembre : L’expectation de l’enfantement de la Sainte Vierge (10).

(10) Voir ici ce qu’en dit dom GUERANGER.


Le mystère de l’Incarnation, que nous nous apprêtons à fêter, et par lequel le Verbe divin a assumé notre humanité pour nous donner part à Sa divinité, n’est cependant que le premier acte de l’économie du salut de la Nouveau Alliance ; il ne doit pas être séparé du mystère de la Rédemption, qui le complète et l’achève, avant le retour du Seigneur dans la gloire. Jésus-Christ est venu dans la chair pour nous délivrer de l’esclavage du péché (Alleluia) (11), et nous conduire, « par sa passion et sa croix, à la gloire de le résurrection » (P1) (12), mystère de salut dont nous recevons le gage dans la sainte communion (P3) (13).

(11) Allelúia, allelúia. V/ Veni, Dómine, et noli tardáre : reláxa facínora plebis tuæ Israël. Allelúia. | Viens, Seigneur, ne tarde plus ! Délivre de ses péchés Israël ton peuple. Alléluia.

(12) Grátiam tuam, quǽsumus, Dómine, méntibus nostris infúnde, ut qui, Angelo nuntiánte, Christi Fílii tui incarnatiónem cognóvimus, per passiónem eius et crucem ad resurrectiónis glóriam perducámur. | [Traduction Dom HALA] Daigne, Seigneur, répandre ta grâce dans nos âmes, afin qu’ayant connu, par la parole de l’Ange, l’Incarnation du Christ, ton Fils, nous arrivions, par sa passion et sa croix, à la gloire de la résurrection.

Cette oraison est bien connue des chrétiens : c’est celle qui conclut la prière de l’Angelus.

(13) Sumpto pígnore redemptiónis ætérnæ, quǽsumus, omnípotens Deus, ut quanto magis dies salutíferæ festivitátis accédit, tanto devótius proficiámus ad Fílii tui digne nativitátis mystérium celebrándum. | [Traduction officielle] Nous avons reçu dans ton sacrement, Seigneur, le gage de la rédemption éternelle ; accorde-nous une ferveur qui grandisse à l’approche de Noël, pour bien fêter la naissance de ton Fils.

Cette oraison semble être une nouveauté du Novus Ordo (**).

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Théophane
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Méditations pour l'Avent

Message non lu par Théophane » ven. 03 déc. 2010, 13:16

Voici un lien qui pourrait intéresser certaines personnes. Il s'agit de courtes méditations prêchées par un prêtre de la Prélature de l'Opus Dei. Elles durent dix minutes et nous aident à bien vivre le temps de l'Avent et à mieux nous préparer à la fête de Noël.

http://www.dptn.org/1-actualites/82-vot ... ivite.html

Théophane
« Être contemplatifs au milieu du monde, en quoi cela consiste-t-il, pour nous ? La réponse tient en quelques mots : c’est voir Dieu en toute chose, avec la lumière de la foi, sous l’élan de l’amour, et avec la ferme espérance de le contempler face à face au Ciel. »
Bienheureux Álvaro del Portillo (1914-1994)

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