Message non lu
par etienne lorant » sam. 10 oct. 2009, 18:37
Evangile de Jésus-Christ selon saint Marc 10,17-30.
Jésus se mettait en route quand un homme accourut vers lui, se mit à genoux et lui demanda : « Bon maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? » Jésus lui dit : « Pourquoi m'appelles-tu bon ? Personne n'est bon, sinon Dieu seul. Tu connais les commandements : Ne commets pas de meurtre, ne commets pas d'adultère, ne commets pas de vol, ne porte pas de faux témoignage, ne fais de tort à personne, honore ton père et ta mère. »
L'homme répondit : « Maître, j'ai observé tous ces commandements depuis ma jeunesse. »
Posant alors son regard sur lui, Jésus se mit à l'aimer. Il lui dit : « Une seule chose te manque : va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor au ciel ; puis viens et suis-moi. »
Mais lui, à ces mots, devint sombre et s'en alla tout triste, car il avait de grands biens.
Alors Jésus regarde tout autour de lui et dit à ses disciples : « Comme il sera difficile à ceux qui possèdent des richesses d'entrer dans le royaume de Dieu ! » Les disciples étaient stupéfaits de ces paroles. Mais Jésus reprend : « Mes enfants, comme il est difficile d'entrer dans le royaume de Dieu.
Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu. » De plus en plus déconcertés, les disciples se demandaient entre eux : « Mais alors, qui peut être sauvé ? » Jésus les regarde et répond : « Pour les hommes, cela est impossible, mais pas pour Dieu ; car tout est possible à Dieu. »
Pierre se mit à dire à Jésus : « Voilà que nous avons tout quitté pour te suivre. »
Jésus déclara : « Amen, je vous le dis : personne n'aura quitté, à cause de moi et de l'Évangile, une maison, des frères, des soeurs, une mère, un père, des enfants ou une terre,
sans qu'il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, soeurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions, et, dans le monde à venir, la vie éternelle.
Cette rencontre avec l'homme riche a troublé les disciples eux-mêmes. Cet homme, pourtant, était sincère - et comme beaucoup qui sont venus à Jésus et ont été exaucés, il accourt vers lui et l'implore en se mettant à genoux. Sa réponse, au sujet des commandements qu'il faut observer pour avoir la vie éternelle, montre comme qu'il prend les choses au sérieux et que son désir de connaissance est tout à fait sincère. Cependant, avec cet homme, en dépit du regard plein d'amour de Jésus, l'invitation de tout laisser et de faire comme les disciples, rencontre un obstacle qui s'avère insurmontable. Cette difficulté infranchissable consiste dans les "grands biens". Il ne s'agit pas seulement des possessions en argent et en terrains mais aussi de tout un mode de vie. Mon idée sur ce riche, c'est qu'il est riche de tout: bonne naissance, bonne santé, considération de l'entourage, hautes études, bel esprit, etc. Ce n'est pas seulement l'argent, mais c'est tout une manière d'être. "Beati bene nati !" (*)
Il me semble tout aussi certain qu'ayant rencontré un tel homme, le Seigneur lui a proposé réellement (comme il le fera à saint François d'Assise) de troquer son bel habit contre une seule tunique, de passer d'un coup de l'autre côté de la barrière sociale, d'adopter la marche à sa suite sans pouvoir connaître par avance où il sera le lendemain... Allons,plus haut le saut, plus grande la récompense ! Mais malgré le trésor promis dans le Ciel, l'homme se fige d'un seul coup puis rebrousse chemin. Ce n'est pas ce qu'il espérait - mais qu'espérait-il ? Une approbation de sa bonne conduite ? Une révélation ? Une assurance pour la vie éternelle ? Il n'aura rien de tout cela. Même son nom ne nous est pas parvenu.
Ce qui nous indique que pour suivre Jésus, une rupture radicale s'impose - rupture d'avec tout ce que nous avons été, de tout ce que nous avons rêvé ou désiré. C'est comme une cassure, une brisure dans l'être même, une faille ouverte, mais ouverte sur Dieu. Je me fais cette réflexion pour moi-même: ce qui a été décisif dans ma conversion, c'est la découverte que tout ce que j'avais appris jusque là ne m'avait servi à rien. Je m'étais au contraire rendu plus malheureux, car la connaissance des choses de ce monde aboutit toujours à considérer tout ce qu'il nous faudra abandonner, tôt ou tard, d'une manière ou d'une autre. Mais le trésor que l'on reçoit en abandonnant nos biens, c'est la connaissance de Dieu. Imparfaite, soit, mais de plus en plus désirable. C'est aussi de se savoir aimé et guidé quoi qu'il advienne. C'est participer à une Oeuvre qui nous dépasse. C'est chaque jour, et à chaque instant, si nous le voulons, recevoir notre vie de Dieu. C'est une Joie comme une fontaine jaillissant là où il n'y avait qu'une terre aride sous un soleil de plomb : sans vraiment y croire, j'avais demandé à Dieu un verre d'eau et Lui ,il y avait fait jaillir une source d'eau fraîche !
Demain, l'Eglise va canoniser le père Damien. En voici un, comme saint François, comme Mère Térésa, comme saint Vincent de Paul et combien d'autres, qui a vraiment pu tout quitter : ce qui est extraordinaire, c'est qu'en embarquant pour l'île de Molokaï, il savait qu'il n'y aurait pas de retour. Mais il est parti, je le crois, en ayant déjà reçu une part de son trésor dans les cieux...
(*) Beati Bene Nati, disait mon vieil ami le Père Verhaeghe, c'est la béatitude d'ici-bàs. Bienheureux les gens bien nés !
«Cela ne vaut pas seulement pour ceux qui croient au Christ mais bien pour les hommes de bonne volonté, dans le cœur desquels, invisiblement, agit la grâce. En effet, puisque le Christ est mort pour tous et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’ëtre associés au mystère pascal ». ( Gaudium et Spes, le Concile Vatican II )