Que reproche l'Église au communisme ?

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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Relief » mer. 09 juil. 2008, 9:46

Invité a écrit :Moi je suis Communiste et sachez que le communisme ne devient dictature seulement lorsque les dirigeant des gouvernement communiste bascule dans la dictature...
...c'est-à-dire à chaque fois, comme nous le montre l'Histoire.
Invité a écrit : mais regardez le vénézuela, tout va bien la bas...
Chavez n'est pas communiste, il prie et fait le signe de croix en public.

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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par ximatt » mer. 09 juil. 2008, 11:26

Relief a écrit :Chavez n'est pas communiste, il prie et fait le signe de croix en public.
Diantre ! Peppone dans "Don Camillo" ne serait pas communiste ? :-D

Christian
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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Christian » jeu. 10 juil. 2008, 16:15

Cher « Anarchiste chrétien »
Je suis effectivement socialiste libertaire. Et j'utilise le terme "communisme" pour désigner une société, et non les moyens d'y arriver. Quelle société? Deux éléments nouveaux la caractérisent:
-sur un plan politique: un régime de démocratie directe, participative, où les individus peuvent gérer, individuellement et collectivement, les décisions qui les concernent, sans ingérence illégitime des concentrations de pouvoir.
-sur un plan économique: un système fondé sur la coopération et non la compétition (ce qui me semble une aspiration profonde du christianisme), sur la propriété collective et non privée, sur l'abondance et non la rareté organisée.
Socialiste, vous l’êtes assurément. Libertaire, ça reste à prouver. Pour nous en convaincre, il faudrait passer un petit test.

Si tous les participants de la société nouvelle que vous appelez de vos vœux sont d’accord pour jouer le jeu de la démocratie directe, de la coopération plutôt que la compétition, s’ils sont d’accord de mettre en commun leurs propriétés (comme cela se passe dans les monastères, les kibboutz et autres communautés), votre idéal est admirable. Je suis de cœur avec vous. De cœur seulement, car je suis un libéral du genre capitaliste. Je préfère pour ma part un autre style de vie que le collectivisme. Mais mon libéralisme précisément admet sans problème l’existence de toutes les communautés qui ne sont pas fondées sur la coercition.

En ce sens, le communisme et le socialisme (pas plus que l’Islam ou le Catholicisme) ne sont incompatibles avec le libéralisme et le capitalisme. C’est le communisme imposé à ceux qui n’en veulent pas, qui est antilibéral.

Il faut donc que les communistes (ou les tenants d’une religion, etc.) nous expliquent pourquoi ils ne reconnaissent pas aux libéraux le droit de vivre comme ils l’entendent, puisque ces libéraux n’interdisent à personne qui le souhaite la pratique du communisme, du socialisme, ou d’une quelconque religion. Ce qui est permis aux uns ne le serait-ils pas aux autres ?

Mais vous serez d’accord avec moi sur ce point, puisque vous vous qualifiez d’anarchiste. Un anarchiste ne saurait admettre que des êtres humains soient soumis à la volonté d’autres hommes, fussent-ils une majorité, sans possibilité de faire défection et de créer leur propre communauté selon leurs propres règles.

N’est-ce pas le test du libertaire ? Accorde-t-il aux autres ce qu’il revendique pour lui-même ?

L’Eglise catholique enseigne depuis son Fondateur, depuis les Actes des Apôtres (5.1-11 traite précisément de cette question), depuis St Paul, depuis St Thomas d’Aquin, qu’on ne rend pas les gens meilleurs contre leur gré. L’Eglise n’a rien contre le communisme (elle le pratique dans ses communautés). Elle a quelque chose contre la violence. Assurez-nous, comme votre alias l’annonce, que vous êtes pour un communisme sans contrainte, et vous serez dans la droite ligne de l’Eglise et du libéralisme.

Deux remarques encore :

-- le régime actuel n'est pas libéral, puisqu'il ne permet pas aux communistes de vivre leur communisme entre eux. Je suis d'accord avec vous que la société doit changer cet état de choses.

-- je n'ai pas mentionné "les moyens d'arriver" à la société communiste, puisque vous vouliez les exclure de votre propos, seulement le fonctionnement de cette société. Acceptera-t-elle qu'on puisse faire défection ? Si elle ne le permet pas, elle exerce une violence qu'un anarchiste ou libertaire ne saurait approuver.

Libéralement vôtre,

Christian
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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Anarchiste chrétien » ven. 11 juil. 2008, 14:58

SBS a écrit :Cher Anarchiste,

Quelques réflexions :

1/- Oui, le soviétisme n'est pas le marxisme !

2/- ... mais la doctrine de Marx lui-même induit la violence (relire Marx) !

3/- Le communisme n'est pas le nazisme ! Alors que le communisme (tel qu'on le définit depuis 1848) vise finalement à assouvir sans Dieu des valeurs classiques, et notamment le tèlos, le nazisme inversait toutes les valeurs, le mal devenant le bien et vice-versa. Tous les schémas sont inversés, et, dès lors, l’Église se trouve face à une situation bien plus grave !

4/- Cet extrait de la Nouvelle Revue Apologétique d'octobre-novembre 1939 (page 231), revue que Pie XII a toujours défendue :
"Par ses négations et les conséquences qui en résultent, le racisme du IIIe Reich est devenu une contre-Eglise, plus redoutable que la Franc-Maçonnerie, que le marxisme léniniste et stalinien."

5/- L'Eglise condamne de manière absolue non pas toutes les possibilités de communisme (différence d'avec le marxisme), mais de manière absolue le communisme athée qui est celui que condamna toujours Jean-Paul II, et pas que lui (tout comme d'ailleurs les formes les plus excessives du libéralisme) !

6/- Pensez-vous que marxisme et anarchisme puissent se conjuguer ensemble (notamment à la lecture de Marx lui-même) ? :siffle:

7/- Pour vous recherches, vous devriez peut-être lire ces deux ouvrages (Cerf, coll. Cogitatio Fidei) de Mgr R. Coste : Les fondements théologiques de l'Evangile social et Les dimensions sociales de la Foi ?

8/- L'Eglise ne condamne pas a priori le socialisme libertaire ou l'anarchisme (non violent), mais dans la seule mesure où il respecte les Commandements de Dieu, et qu'il ne soit pas destructeur, ce qui n'est pas toujours le cas, loin de là. S'il les respecte, il est un pouvoir comme un autre, bien qu'il nie l'idée de pouvoir... :-D

9/- Attention aux dérives du type "Théologie de la libération" !

10/- De quel anarchisme parlez-vous, car ça balaie large !

11/- Savez-vous que le premier sens du mot "communisme" qui est apparu en français en 1704 ou 1706 (j'ai oublié :oops: ) était "co-propriétaire", "co-usufruitier", s'étendant vers 1780 au sens de "membre d'une commune", pour n'en arriver au sens contemporain qu'à partir de l'arrivée en France des Manuscrits de 1848 ? Quelle évolution de propriétaire à ... anti-propriétaire ! :-D

12/ Donc quel sens donnez-vous à communisme ? celui stricto-marxiste de communisme athée ou celui toujours admissible de communauté de (certains) biens, tel qu'on le retrouve dans certaines sociétés premières ou ... monastiques ?

Fraternellement en Jésus-Christ.
Cher SBS,

1/ La doctrine de Marx induit en effet la violence. Pourquoi? Cela remonte à mon sens à la dialéctique hégelienne.

2/ L'Eglise condamne toute doctrine athée, et l'ahtéisme en général.
Sur ce point j'aurai deux questions:
-où trouve-t-on cette condamnation? (quels textes?) y a-t-il eu des oppositions au sein de l'Eglise? des voix alternatives condamnant la condamnation de l'ahtéisme?
-cette condamnation de l'athéisme par l'Eglise me plonge dans un doute profond et angoissant quant à mon appartenance à notre Eglise. Je ne vois pas quels arguments apportent l'Eglise pour soutenir cette position. Je ne vois pas en quoi le message d'Amour que le Christ est venu porter peut conduire à condamner ceux qui refusent de croire? A mes yeux, condamner l'athéisme revient à accuser les athées pour leur non-croyance. Ce qui est absurde, puisque chacun ne doit répondre qu'à sa propre conscience, et les autres se doivent de le respecter.

3/ L'anarchisme et le marxisme se conjuguent sur un point: le matérialisme (dialéctique), qui est la seule méthode scientifiquement valable d'analyse de la société.
En revanche, on trouve dans la théorie de Marx (dictature du prolétariat, avant-garde éclairée) et dans son attitude publique (notamment au sein de la Iere Internationale) des éléments clairement autoritaires. De là découle d'ailleurs, à mon avis, tout le courant marxiste-léniniste autoritaire. Et ce second point est celui qui rend clairement différent "marxisme" et "anarchisme".

4/ La théologie de la libération déforme la foi chrétienne en voyant dans les pauvres l'incarnation du peuple de Dieu (mes connaissances sur le sujet sont faibles, mes propos sont à prendre avec précaution). L'anarchisme, par contre, se refuse à cette déification des classes oprimées.

5/ Quant à mon anarchisme, il est socialiste, libertaire, pacifique, et chrétien.

Chaleureusement

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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Anarchiste chrétien » ven. 11 juil. 2008, 15:17

SBS a écrit :Chavez se réclame du focisme, c'est-à-dire du marxisme à la sauce Castro, plus une pincée de théologie de la libération, un soupçon d'anti-sémitisme, une larme d'ouvriérisme, un tantinet d'anti-américanisme (ça fait bien en Amérique du Sud), et surtout énormément de populisme (ici, un salmigondis de Mao et de Nasser) ! Staline lui-même a fait parfois le signe de croix pour mieux tromper son monde, Hitler aussi ! Pas pour cela qu'ils étaient Chrétiens ! Chavez, ce n'est plus du marxisme, ce n'est plus du castrisme, c'est la "gauche schaker" ! C'est autant du communisme que du Christianisme, bref, ni l'un ni l'autre ! Uniquement un populisme permettant d'accèder au pouvoir et de s'y maintenir, avec un bon peu de "défense de la volonté du peuple" par une milice "très légèrement" brutale, "pour le bien du peuple". Au fait, il était quoi Chavez avant d'être "président de gauche" ? j'ai comme un trou de mémoire ; j'ai besoin qu'on me le rappelle... Chavez, c'est un populiste démagogue, rien d'autre ! Rien avoir avec un marxiste pur et dur ou un communiste fidèle à une ligne politique ! Rien avoir avec un théologien de la libération qui y croirait ! Bref, Chavez est avant tout ... un chavézien ! Certes, il peut avoir de bons moments, comme tout le monde, mais uniquement quand "ça" lui rend service ! Jules César aussi, le "dictateur démocrate" se voulait le vrai et le seul défenseur des populares ! Et on pourrait multiplier les exemples dans l'histoire ! Et le pire, c'est qu'ils sont si "perturbés du bulbe" que je suis persuadé qu'ils finissent par y croire, qu'ils croient rendre service, faire avancer les choses, faire le bien !

Reste que je fous Battista et Castro dans le même panier, même si, ayons un peu de mémoire, Castro a un un chouia été moins dictateur que Battista, bref un Battista la mafia en moins... J'ai toujours "aimé" ceux qui se sacrifiaient pour le bien du peuple, qui faisaient don de leur personne au peuple... Des faux-culs oui !

Au fait, lisez les livres de Guareschi ! Ne vous contentez pas du Don Camillo de Fernandel ! C'est beaucoup plus grave, plus violent dans beaucoup de cas (exception faite de "Don Camillo et les contestataires", bref du dernier de la série) : - des enfants privés de nourriture parce que l'aide alimentaire vient des Etats-Unis, les pères étant frappés sous les yeux des dits enfants pour ne pas avoir respecté la ligne du Parti ; - des meurtres "pour le bien du peuple" ; - etc... ! Oui, parfois très loin de livres comiques !

Cher SBS, et cher Ximatt,

Les 5 groupes de presse mondiaux détenant le monopole de tous les quotidiens dont nous faisons la lecture déversent, depuis des années, et avec acharnement, une propagande maniechéenne et souvent calomnieuse contre le gouvernement de M.Chavez.

En se fiant à d'autres sources (ONG, médias indépendants, professeurs d'université) on se rend compte des immenses progrès sociaux et démocratique réalisés par le Venezuela. Sous M.Chavez:

-les bureaux de vote se situent désormais à une moyenne de 2h de marche de la majorité des populations indigènes (auparavant il fallait 4 jours)
-des centaines de milliers de versions papiers de la constitution et des droits fondamentaux ont été délivrées aux citoyens
-cinq millions d'indigènes et de marginalisés ont retrouvé des papiers d'identité, et par là leur dignitié et leur droit de vote
-des milliers de dispensaires médicaux ont été installés dans les quartiers populaires
-des dizaines de milliers de personnes sans ressources, atteintes d’affections oculaires, ont été gratuitement opérées
-les produits alimentaires de base sont subventionnés et proposés aux plus démunis à des prix inférieurs de 42 % à ceux du marché
-la durée de travail hebdomadaire est passée de 44 heures à 36 heures, tandis que le salaire minimum montait à 204 euros par mois (le plus élevé d’Amérique latine après le Costa Rica)

Ce qui a entraîné, entre 1999 et 2005:
-la pauvreté a baissé de 42,8 % à 37,9 %, tandis que la population vivant de l’économie informelle chutait de 53 % à 40 %.
-ce recul de la pauvreté a permis une croissance annuelle de 12 %, parmi les plus élevées du monde, stimulée aussi par une consommation qui a progressé de 18 % par an.

De tels progrès dérangent nos dirigeants politiques autant que les médias (la liste des articles mensongers du Monde, de El Pais, du NYT prendraient des heures à dresser, sans que jamais n'aient été formulées des excuses auprès des lecteurs occidentaux).

Hem, mon intervention est clairement a-religieuse, mais elle ne fait que répondre aux vôtres.

Et cela montre à mon avis qu'on ne peut dissocier les principes de notre foi de nos tendances politiques.

Chaleureusement

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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Anarchiste chrétien » ven. 11 juil. 2008, 15:30

Christian a écrit : Mais mon libéralisme précisément admet sans problème l’existence de toutes les communautés qui ne sont pas fondées sur la coercition.

(...)

Il faut donc que les communistes (ou les tenants d’une religion, etc.) nous expliquent pourquoi ils ne reconnaissent pas aux libéraux le droit de vivre comme ils l’entendent, puisque ces libéraux n’interdisent à personne qui le souhaite la pratique du communisme, du socialisme, ou d’une quelconque religion. Ce qui est permis aux uns ne le serait-ils pas aux autres ?

Mais vous serez d’accord avec moi sur ce point, puisque vous vous qualifiez d’anarchiste. Un anarchiste ne saurait admettre que des êtres humains soient soumis à la volonté d’autres hommes, fussent-ils une majorité, sans possibilité de faire défection et de créer leur propre communauté selon leurs propres règles.

(...)

Deux remarques encore :

-- le régime actuel n'est pas libéral, puisqu'il ne permet pas aux communistes de vivre leur communisme entre eux. Je suis d'accord avec vous que la société doit changer cet état de choses.

-- je n'ai pas mentionné "les moyens d'arriver" à la société communiste, puisque vous vouliez les exclure de votre propos, seulement le fonctionnement de cette société. Acceptera-t-elle qu'on puisse faire défection ? Si elle ne le permet pas, elle exerce une violence qu'un anarchiste ou libertaire ne saurait approuver.

Libéralement vôtre,

Christian
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Cher Christian,

Il va de soi que dans une société anarchiste tout un chacun sera libre de "faire défection" et de créer, avec d'autres, une communauté régie par les règles qui leur conviennent. Ainsi, une société anarchiste acceptera sans rechigner que vous organisiez, en parallèle, votre société capitaliste libérale. Aucune volonté individuelle ne saurait s'imposer à autrui. Il s'agit là d'une exigence de cohérence et de réciprocité qu'un "bon libéral" et un "bon anarchiste" ne sauraient oublier.

Cependant, pour ne pas vous cachez le fond de ma pensée, j'imagine ce qui suit: dans une société anarchiste (ou libérale mais sans la propriété privée, pourrait-on dire) nul ne souhaitera s'en "extraire" pour créer à côté une société capitalise-libérale. Pourquoi? Tout simplement car il y aliénerait sa liberté. Mais mais mais... encore une fois, à supposer que vous y teniez fermement, vous pourrez évidemment vivre ainsi.

Chaleureusement.

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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Christian » ven. 11 juil. 2008, 17:51

Cher Anarchiste chrétien,

J’écris cette fois votre alias sans guillemets puisque vous prouvez par votre réponse à mon test que vous n’usurpez pas cette belle revendication. Anarchiste, vous êtes. Comme moi. Nous pourrons discuter, cependant, sur ce forum ou ailleurs, de la cohérence de votre position. Notamment concernant la propriété privée. Car je vois bien comment des propriétaires accepteraient d’apporter leurs biens à une communauté sans y être forcés, mais le processus inverse de privatisation de biens communautaires par ceux qui voudraient faire défection me paraît moins clair.

Je vois mal aussi les limites de cette communauté. Ceux qui font apport de leurs biens voudront sans doute rester entre gens de bonne compagnie, partageant les mêmes valeurs. Ce qui facilitera les prises de décision, mais pas la mixité sociale. Y voyez-vous une objection ?

Vous dîtes encore que toute proposition sera débattue et soumise au vote, discipline qui implique un nombre restreint de « citoyens ». Cette règle démocratique ne serait pas ma façon de procéder, mais admettons que dans un petit groupe, elle soit admise unanimement. Un problème demeure. Sur notre planète pas si petite que ça, les décisions qui affectent notre vie quotidienne sont prises aussi souvent à Shanghai et New York que dans notre quartier. Voulez-vous dire alors que l’on votera à Romorantin et Ouagadougou pour approuver une invention à Bangalore, qui risquerait de créer du chômage ici et bouleverser la tradition là ? Et comment anticiper les bienfaits ou méfaits d’une invention ? Celles que nous considérons les plus bénéfiques aujourd’hui n’auraient jamais vu le jour si on les avait soumises à référendum. Pourquoi si quelques uns ont envie d’un nouveau produit, d’autres le leur interdiraient ?

La propriété privée résout tous ces problèmes. Elle en crée peut-être d’autres, mais au moins elle pose de façon objective, je dirai scientifique, la limite entre le permis et l’interdit dans la société. Chacun reconnaît à autrui qu’il peut faire ce qu’il veut avec ce qui lui appartient (à charge pour chacun de n’user de ce droit que conformément à la morale — mais obéir à sa conscience n’est pas se soumettre à autrui, c’est au contraire exercer sa pleine liberté).

Ce bornage entre le mien et le tien est repérable par toutes sortes de tests ; les juristes les connaissent bien. Assuré de ce qui est à moi, je peux établir des plans pour l’avenir. Par exemple, ayant dûment loué un théâtre à un propriétaire approuvant mon projet, je peux monter une pièce très provocatrice sans me soucier d’un vote populaire qui l’interdirait. Mais si le théâtre n’appartient à personne, qui va décider de son utilisation ? pourquoi des gens que personne n’oblige à voir le spectacle voteront-ils pour empêcher les autres de le voir ?

Et si vous n’accordez pas le droit de vote sur une invention et sur un spectacle qui mettent en cause les fondements de la société, à quoi sert le droit de vote ?

Bonne réflexion

Christian



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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Anarchiste chrétien » ven. 11 juil. 2008, 23:50

Cher Christian,

Je vous remercie de vos objections qui me permettent de soumettre à la critique les idées que je soutiens. Je vais essayer d'y répondre par points.

1/ "Je vois bien comment des propriétaires accepteraient d’apporter leurs biens à une communauté sans y être forcés, mais le processus inverse de privatisation de biens communautaires par ceux qui voudraient faire défection me paraît moins clair. "

En fait, une société anarchiste, pour s'instaurer, nécessite une révolution. Révolution qui, entre autres, s'empresserait de mettre un terme à la propriété privée. Pourquoi? Car si les libéraux ont bien cerné que l'Etat constitue une source de castration de nos libertés, ils oublient que la seconde source d'aliénation est précisément la propriété privée.
Dès lors, une société anarchiste se constitue sur les bases économiques du collectivisme. Tel est la situation, au moins dans un premier temps.
Dans un second temps, après l'abolition de la propriété privée, chacun sera libre de se retirer de cette société communiste. Dans ce cas, il obtiendra de la société la part de propriété privée qui lui est due ("selon ses besoins"). Avec son petit champ, sa voiture, ses milliers d'euros (question du maintien de l'argent qui demanderait un traitement approfondi) il peut aller vivre dans une communauté capitaliste constituée en marge de la société communiste.
Cependant, qui voudra faire défection? A priori pas grand monde, ou peu de personne saine d'esprit. En effet, chacun pourra constater que le "retour" à une société capitaliste signifie les retrouvailles de l'esclavage salariale, de l'aliénation dans le travail-marchandise, de l'exploitation industriel, de la rareté organisée.
NB: tout cela reste sujet à nuances, puisqu'il s'agit de spéculation sur le futur. Le prophétisme n'ai pas mon fort, et c'est toujours avec réticence que je m'y adonne. Je préfère bien davantage expliquer en quoi la société capitaliste actuelle est mauvaise plutôt que de spéculer sur les futurs lendemains qui chantent.

2/ "Je vois mal aussi les limites de cette communauté. Ceux qui font apport de leurs biens voudront sans doute rester entre gens de bonne compagnie, partageant les mêmes valeurs. Ce qui facilitera les prises de décision, mais pas la mixité sociale. Y voyez-vous une objection ?"
Nous ne nous comprenons peut-être pas parfaitement sur les moyens par lesquelles la société anarchiste pourrait s'instaurer. Ce ne serait clairement pas par "consentement général", où ceux qui veulent nous rejoigne. Cela est matériellement impossible. Pour instaurer l'anarchisme il faut une révolution, i.e. un mouvement radical renversant les institutions actuelles (principalement l'Etat et la propriété privée). C'est ce changement d'infrastructure qui mènera à une nouvelle superstructure. Les individus se rendront, a posteriori, que la révolution les a rendu plus libres.
Pourquoi actuellement n'y a-t-il pas cette société? Car les individus, aliénés, n'en veulent pas. La sociologie communiste considère la société capitaliste comme un espace de lutte. Et c'est par la lutte, la crise, les tensions et leurs exacerbations que l'on pourra changer de société. Mais non par "consentement général", puisqu'actuellement le consentement général est l'agrégation d'individus aliénés qui se satisfont d'une situation qui (sans qu'ils en prennent réellement conscience) anéantit leurs possibilités de vie.

3/ "Vous dîtes encore que toute proposition sera débattue et soumise au vote, discipline qui implique un nombre restreint de « citoyens ». Cette règle démocratique ne serait pas ma façon de procéder, mais admettons que dans un petit groupe, elle soit admise unanimement. Un problème demeure. Sur notre planète pas si petite que ça, les décisions qui affectent notre vie quotidienne sont prises aussi souvent à Shanghai et New York que dans notre quartier. Voulez-vous dire alors que l’on votera à Romorantin et Ouagadougou pour approuver une invention à Bangalore, qui risquerait de créer du chômage ici et bouleverser la tradition là ? Et comment anticiper les bienfaits ou méfaits d’une invention ? Celles que nous considérons les plus bénéfiques aujourd’hui n’auraient jamais vu le jour si on les avait soumises à référendum. Pourquoi si quelques uns ont envie d’un nouveau produit, d’autres le leur interdiraient ? "
Qui dit "chomage" dit "salariat", et qui dit "salariat" dit "propriété privée". En supprimant la propriété privée, on supprimera le chomage.
Sous votre propos je devine l'éternelle question faites aux anarchistes, et plus généralement aux communistes et à tous les turiféraires d'une société nouvelle: "d'accord pour votre société, mais alors avec quelles institutions?"
Ma réponse: ce n'est pas à nous aujourd'hui ici et maintenant de définir des institutions dont nous n'avons aucune idée de la forme qu'elles prendront. Il ne s'agit pas de divination. Un communiste ne dresse pas un plan d'avenir pour le futur. Tous les grands penseurs s'y sont refuser, à raison. La démarche du communiste part d'une critique du capitalisme, et non d'une spéculation sur les institutions communistes. Il ne s'agit pas de dire "nous ferons cela dans 200 ans!", mais plutôt de dire "ce qui existe actuellement me déplaît, il faut donc l'analyser, le comprendre, puis le combattre efficacement à sa racine".
Quelles institutions dans la société communiste du futur? Ni moi ni personne ne le sait. Il reviendra aux individus de cette époque de les inventer. L'histoire se fera d'elle-même. Ce que nous pouvons dire, tout au plus, c'est qu'en ayant supprimer la propriété privée et son défenseur (l'Etat), les institutions futures seront bien plus démocratiques et libérales que celles d'aujourd'hui.

4/ "Ce bornage entre le mien et le tien est repérable par toutes sortes de tests ; les juristes les connaissent bien. Assuré de ce qui est à moi, je peux établir des plans pour l’avenir. Par exemple, ayant dûment loué un théâtre à un propriétaire approuvant mon projet, je peux monter une pièce très provocatrice sans me soucier d’un vote populaire qui l’interdirait. Mais si le théâtre n’appartient à personne, qui va décider de son utilisation ? pourquoi des gens que personne n’oblige à voir le spectacle voteront-ils pour empêcher les autres de le voir ? "
"Assuré de ce qui est à moi, je peux établir des plans pour l'avenir". Oui mais:
-a) dans une société communiste vous serez tout autant assuré de disposer d'une possession qui vous soit exclusive, et vous pourrez grâce à elle établir tout autant de plans pour l'avenir. Sauf que votre possession aura des limites ("selon vos besoins", et on suppose donc que vous n'aurez pas "besoin" d'être le patron d'une entreprise de 100 employés) qui impliqueront que vos plans auront des limites (vous ne pourrez pas licencier arbitrairement 20 employés et laisser leurs familles sans le sou).
-b) "assuré de ce qui est à moi": mais dans une société capitaliste libérale (ou libertarienne) qui est assuré de ce qui est à lui? Finalement personne, absolument personne, du moins en théorie. Puisque qu'il suffit de se faire "rouler" en donnant son consentement "non éclairé" à un contrat qui nous arnaque pour ensuite se retrouver à la rue. Règne la règle du plus fort. Et les plus forts tendent à se concentrer en une infime minorité (c'est l'aboutissement naturel du capitalisme libéral et d'une société humaine où règne la loi du plus fort).

Bref, tout cela pour dire que le libéralisme part d'une intention plus que louable et extrêmement perspicace (et pour cela j'admire grandement les libéraux authentiques) mais qu'il se fourvoie intégralement sur le thème de la propriété privée. Et en cela je considère que si Dieu a placé en l'homme un certain espoir de nous voir "à son image", alors, sur un plan strictement politique, l'anarchisme est l'option la plus prometteuse qui ait été formulée jusqu'ici.

Cordialement.

BJLP
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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par BJLP » mer. 06 août 2008, 23:51

On reproche au communisme d'avoir agit comme des fachistes sur le plan politique.
Jean Paul II reconnaissait que sur certain plan sociaux il y avait du bon.
La capitalisme à outrance et le communisme a outrance comme nous l'avons connu sont des régime qui aliéne l'homme.
D'un coté le capitalisme trés personnel et de l'autre le capitalisme d'état .
Dans les deux cas l'homme est un pion.
Quelle différence y a -t -il entre ne pas pouvoir se payer ce que l'on souhaite car on est trops pauvres et ne pas pourvoire se payer ce que l'on veut du fait que l'on vous empéche de l'avoir officiélement.??

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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Christophe » jeu. 07 août 2008, 7:31

BJLP a écrit :Jean Paul II reconnaissait que sur certain plan sociaux il y avait du bon.
Source, s'il vous plaît... :roule:
Le communisme est considéré par l'Église comme une mauvaise solution à un vrai problème ("la question sociale").

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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Souricette » ven. 08 août 2008, 0:52

Jean-Paul II, lettre encyclique Centesimus annus :

En second lieu, d'autres forces sociales et d'autres écoles de pensée s'opposent au marxisme par la construction de systèmes de « sécurité nationale » qui visent à contrôler d'une façon capillaire toute la société pour rendre impossible l'infiltration marxiste. En exaltant et en augmentant le pouvoir de l'Etat, ces systèmes entendent préserver leurs peuples du communisme ; mais, ce faisant, ils courent le risque grave de détruire la liberté et les valeurs de la personne au nom desquelles il faut s'y opposer.

Enfin, une autre forme pratique de réponse est représentée par la société du bien-être, ou société de consommation. Celle-ci tend à l'emporter sur le marxisme sur le terrain du pur matérialisme, montrant qu'une société de libre marché peut obtenir une satisfaction des besoins matériels de l'homme plus complète que celle qu'assure le communisme, tout en excluant également les valeurs spirituelles. En réalité, s'il est vrai, d'une part, que ce modèle social montre l'incapacité du marxisme à construire une société nouvelle et meilleure, d'un autre côté, en refusant à la morale, au droit, à la culture et à la religion leur réalité propre et leur valeur, il le rejoint en réduisant totalement l'homme à la sphère économique et à la satisfaction des besoins matériels.

[...]

Etant donné cette situation, il semble à beaucoup que le marxisme peut offrir comme un raccourci pour l'édification de la nation et de l'Etat, et c'est pour cette raison que voient le jour diverses variantes du socialisme avec un caractère national spécifique. Elles se mêlent ainsi aux nombreuses idéologies qui se constituent différemment suivant les cas : exigences légitimes de salut national, formes de nationalisme et aussi de militarisme, principes tirés d'antiques sagesses populaires, parfois accordés avec la doctrine sociale chrétienne, et les concepts du marxisme-léninisme.

[...]

Parmi les nombreux facteurs de la chute des régimes oppressifs, certains méritent d'être rappelés d'une façon particulière. Le facteur décisif qui a mis en route les changements est assurément la violation des droits du travail. On ne saurait oublier que la crise fondamentale des systèmes qui se prétendent l'expression du gouvernement et même de la dictature des ouvriers commence par les grands mouvements survenus en Pologne au nom de la solidarité. Les foules ouvrières elles-mêmes ôtent sa légitimité à l'idéologie qui prétend parler en leur nom, et elles retrouvent, elles redécouvrent presque, à partir de l'expérience vécue et difficile du travail et de l'oppression, des expressions et des principes de la doctrine sociale de l'Eglise.

Un autre fait mérite d'être souligné : à peu près partout, on est arrivé à faire tomber un tel « bloc », un tel empire, par une lutte pacifique, qui a utilisé les seules armes de la vérité et de la justice. Alors que, selon le marxisme, ce n'est qu'en poussant à l'extrême les contradictions sociales que l'on pouvait les résoudre dans un affrontement violent, les luttes qui ont amené l'écroulement du marxisme persistent avec ténacité à essayer toutes les voies de la négociation, du dialogue, du témoignage de la vérité, faisant appel à la conscience de l'adversaire et cherchant à réveiller en lui le sens commun de la dignité humaine.

[...]

Le marxisme s'était promis d'extirper du coeur de l'homme la soif de Dieu, mais les résultats ont montré qu'il est impossible de le faire sans bouleverser le coeur de l'homme.

[...]

Les événements de 1989 se sont déroulés principalement dans les pays d'Europe orientale et centrale. Ils ont toutefois une portée universelle car il en est résulté des conséquences positives et négatives qui intéressent toute la famille humaine. Ces conséquences n'ont pas un caractère mécanique ou fatidique, mais sont comme des occasions offertes à la liberté humaine de collaborer avec le dessein miséricordieux de Dieu qui agit dans l'histoire.

La première conséquence a été, dans certains pays, la rencontre entre l'Eglise et le Mouvement ouvrier né d'une réaction d'ordre éthique et explicitement chrétien, contre une situation générale d'injustice. Depuis un siècle environ, ce Mouvement était en partie tombé sous l'hégémonie du marxisme, dans la conviction que les prolétaires, pour lutter efficacement contre l'oppression, devaient faire leurs les théories matérialistes et économistes.

Dans la crise du marxisme resurgissent les formes spontanées de la conscience ouvrière qui exprime une demande de justice et de reconnaissance de la dignité du travail, conformément à la doctrine sociale de l'Eglise (57). Le Mouvement ouvrier devient un mouvement plus général des travailleurs et des hommes de bonne volonté pour la libération de la personne humaine et pour l'affirmation de ses droits ; il est répandu aujourd'hui dans de nombreux pays et, loin de s'opposer à l'Eglise catholique, il se tourne vers elle avec intérêt.

La crise du marxisme n'élimine pas du monde les situations d'injustice et d'oppression, que le marxisme lui même exploitait et dont il tirait sa force. A ceux qui, aujourd'hui, sont à la recherche d'une théorie et d'une pratique nouvelles et authentiques de libération, l'Eglise offre non seulement sa doctrine sociale et, d'une façon générale, son enseignement sur la personne, rachetée par le Christ, mais aussi son engagement et sa contribution pour combattre la marginalisation et la souffrance.

Dans un passé récent, le désir sincère d'être du côté des opprimés et de ne pas se couper du cours de l'histoire a amené bien des croyants à rechercher de diverses manières un impossible compromis entre le marxisme et le christianisme. Le moment présent dépasse tout ce qu'il y avait de caduc dans ces tentatives et incite en même temps à réaffirmer le caractère positif d'une authentique théologie de la libération intégrale de l'homme. Considérés sous cet angle, les événements de 1989 s'avèrent importants aussi pour les pays du Tiers-Monde, qui cherchent la voie de leur développement, comme ils l'ont été pour les pays de l'Europe centrale et orientale.

[...]

La chute du marxisme a eu naturellement des conséquences importantes en ce qui concerne la division de la terre en mondes fermés l'un à l'autre, opposés dans une concurrence jalouse. La réalité de l'interdépendance des peuples s'en trouve plus clairement mise en lumière, et aussi le fait que le travail humain est par nature destiné à unir les peuples et non à les diviser. La paix et la prospérité, en effet, sont des biens qui appartiennent à tout le genre humain, de sorte qu'il n'est pas possible d'en jouir d'une manière honnête et durable si on les a obtenus et conservés au détriment d'autres peuples et d'autres nations, en violant leurs droits ou en les excluant des sources du bien-être.

[...]

Le marxisme a critiqué les sociétés capitalistes bourgeoises, leur reprochant d'aliéner l'existence humaine et d'en faire une marchandise. Ce reproche se fonde assurément sur une conception erronée et inappropriée de l'aliénation, qui la fait dépendre uniquement de la sphère des rapports de production et de propriété, c'est-à-dire qu'il lui attribue un fondement matérialiste et, de plus, nie la légitimité et le caractère positif des relations du marché même dans leur propre domaine. On en vient ainsi à affirmer que l'aliénation ne peut être éliminée que dans une société de type collectiviste. Or, l'expérience historique des pays socialistes a tristement fait la preuve que le collectivisme non seulement ne supprime pas l'aliénation, mais l'augmente plutôt, car il y ajoute la pénurie des biens nécessaires et l'inefficacité économique.

[...]

En énonçant les principes de solution de la question ouvrière, Léon XIII écrivait : « Une question de cette importance demande encore à d'autres agents leur part d'activité et d'efforts » (114). Il était convaincu que les graves problèmes causés par la société industrielle ne pouvaient être résolus que par la collaboration entre toutes les forces. Cette affirmation est devenue un élément permanent de la doctrine sociale de l'Eglise, et cela explique notamment pourquoi Jean XXIII a adressé aussi à « tous les hommes de bonne volonté » son encyclique sur la paix.

Toutefois, le Pape Léon XIII constatait avec tristesse que les idéologies de son temps, particulièrement le libéralisme et le marxisme, refusaient cette collaboration. Depuis lors, bien des choses ont changé, surtout ces dernières années. Le monde prend toujours mieux conscience aujourd'hui de ce que la solution des graves problèmes nationaux et internationaux n'est pas seulement une question de production économique ou bien d'organisation juridique ou sociale, mais qu'elle requiert des valeurs précises d'ordre éthique et religieux, ainsi qu'un changement de mentalité, de comportement et de structures. L'Eglise se sent en particulier le devoir d'y apporter sa contribution et, comme je l'ai écrit dans l'encyclique Sollicitudo rei socialis, il y a un espoir fondé que même les nombreuses personnes qui ne professent pas une religion puissent contribuer à donner à la question sociale le fondement éthique qui s'impose.

[...]
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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Souricette » ven. 08 août 2008, 0:54

Jean-Paul II écrit encore ceci, dans la même encyclique :

Dans la société occidentale, l'exploitation a été surmontée, du moins sous la forme analysée et décrite par Karl Marx. Cependant, l'aliénation n'a pas été surmontée dans les diverses formes d'exploitation lorsque les hommes tirent profit les uns des autres et que, avec la satisfaction toujours plus raffinée de leurs besoins particuliers et secondaires, ils se rendent sourds à leurs besoins essentiels et authentiques qui doivent régir aussi les modalités de la satisfaction des autres besoins. L'homme ne peut pas être libre s'il se préoccupe seulement ou surtout de l'avoir et de la jouissance, au point de n'être plus capable de dominer ses instincts et ses passions, ni de les unifier ou de les maîtriser par l'obéissance à la vérité.L'obéissance à la vérité de Dieu et de l'homme est pour lui la condition première de la liberté et lui permet d'ordonner ses besoins, ses désirs et les manières de les satisfaire suivant une juste hiérarchie, de telle sorte que la possession des choses soit pour lui un moyen de grandir. Cette croissance peut être entravée du fait de la manipulation par les médias qui imposent, au moyen d'une insistance bien orchestrée, des modes et des mouvements d'opinion, sans qu'il soit possible de soumettre à une critique attentive les prémisses sur lesquelles ils sont fondés.
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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Yves54 » mar. 12 août 2008, 21:30

Souricette. Vous pouvez trouvé des passages d'encycliques comme vous le souhaitez. En aucun cas ça n'accréditera vos idées et ce pour plusieurs raisons :

1/ L'Église a toujours condamné le communisme, le socialisme et le libéralisme. Si un pape avait contredit cela alors il se serait mis en désaccord avec la Tradition. C'est impensable.
2/ Le communisme met l'homme au centre de tout alors que pour un catholique c'est Dieu qui est au centre de tout. Cela étant non négociable, jamais le communisme ne pourra être défendu par un catholique.
3/ La Tradition condamnant le libéralisme il ne vous sera pas difficile de trouver des passages de celle ci dénonçant les inégalités ou l'adoration de l'argent. Le problème étant de savoir ce que Dieu veut. Et non pas ce que les hommes veulent.
4/ Vu que vous me donnez l'impression d'aimer les passages d'encycliques. Je vais vous en donner un qui est sans détour sur le communisme :
Benoit XVI in Spe Salvi a écrit :20. Le dix-neuvième siècle ne renia pas sa foi dans le progrès comme forme de l'espérance humaine et il continua à considérer la raison et la liberté comme des étoiles-guides à suivre sur le chemin de l'espérance. Les avancées toujours plus rapides du développement technique et l'industrialisation qui lui est liée ont cependant bien vite créé une situation sociale totalement nouvelle: il s'est formé la classe des ouvriers de l'industrie et ce que l'on appelle le « prolétariat industriel », dont les terribles conditions de vie ont été illustrées de manière bouleversante par Friedrich Engels, en 1845. Pour le lecteur, il devait être clair que cela ne pouvait pas continuer; un changement était nécessaire. Mais le changement aurait perturbé et renversé l'ensemble de la structure de la société bourgeoise. Après la révolution bourgeoise de 1789, l'heure d'une nouvelle révolution avait sonné, la révolution prolétarienne: le progrès ne pouvait pas simplement avancer de manière linéaire, à petits pas. Il fallait un saut révolutionnaire. Karl Marx recueillit cette aspiration du moment et, avec un langage et une pensée vigoureux, il chercha à lancer ce grand pas nouveau et, comme il le considérait, définitif de l'histoire vers le salut – vers ce que Kant avait qualifié de « règne de Dieu ». Une fois que la vérité de l'au-delà se serait dissipée, il se serait agi désormais d'établir la vérité de l'en deçà. La critique du ciel se transforme en une critique de la terre, la critique de la théologie en une critique de la politique. Le progrès vers le mieux, vers le monde définitivement bon, ne provient pas simplement de la science, mais de la politique – d'une politique pensée scientifiquement, qui sait reconnaître la structure de l'histoire et de la société, et qui indique ainsi la voie vers la révolution, vers le changement de toutes les choses. Avec précision, même si c'est de manière unilatérale et partiale, Marx a décrit la situation de son temps et il a illustré avec une grande capacité d'analyse les voies qui ouvrent à la révolution – non seulement théoriquement: avec le parti communiste, né du manifeste communiste de 1848, il l'a aussi lancée concrètement. Sa promesse, grâce à la précision des analyses et aux indications claires des instruments pour le changement radical, a fasciné et fascine encore toujours de nouveau. La révolution s'est aussi vérifiée de manière plus radicale en Russie.

21. Mais avec sa victoire, l'erreur fondamentale de Marx a aussi été rendue évidente. Il a indiqué avec exactitude comment réaliser le renversement. Mais il ne nous a pas dit comment les choses auraient dû se dérouler après. Il supposait simplement que, avec l'expropriation de la classe dominante, avec la chute du pouvoir politique et avec la socialisation des moyens de production, se serait réalisée la Nouvelle Jérusalem: alors, toutes les contradictions auraient en effet été annulées, l'homme et le monde auraient finalement vu clair en eux-mêmes. Alors tout aurait pu procéder de soi-même sur la voie droite, parce que tout aurait appartenu à tous et que tous auraient voulu le meilleur les uns pour les autres. Ainsi, après la révolution réussie, Lénine dut se rendre compte que, dans les écrits du maître, il ne se trouvait aucune indication sur la façon de procéder. Oui, il avait parlé de la phase intermédiaire de la dictature du prolétariat comme d'une nécessité qui, cependant, dans un deuxième temps, se serait avérée d'elle-même caduque. Cette « phase intermédiaire », nous la connaissons bien et nous savons aussi comment elle s'est développée, ne faisant pas naître un monde sain, mais laissant derrière elle une destruction désolante. Marx n'a pas seulement manqué de penser les institutions nécessaires pour le nouveau monde – on ne devait en effet plus en avoir besoin. Qu'il ne nous en dise rien, c'est la conséquence logique de sa façon d’envisager le problème. Son erreur est plus en profondeur. Il a oublié que l'homme demeure toujours homme. Il a oublié l'homme et il a oublié sa liberté. Il a oublié que la liberté demeure toujours liberté, même pour le mal. Il croyait que, une fois mise en place l'économie, tout aurait été mis en place. Sa véritable erreur est le matérialisme: en effet, l'homme n'est pas seulement le produit de conditions économiques, et il n'est pas possible de le guérir uniquement de l'extérieur, en créant des conditions économiques favorables.

http://www.vatican.va/holy_father/bened ... vi_fr.html

Conclusion : essayer de trouver un soutien au communisme, au socialisme ou au libéralisme dans la Tradition c'est de la mauvaise foi ou alors de l'ignorance crasse.



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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Yves54 » mar. 12 août 2008, 21:34

BJLP a écrit :On reproche au communisme d'avoir agit comme des fachistes sur le plan politique.
Jean Paul II reconnaissait que sur certain plan sociaux il y avait du bon.
La capitalisme à outrance et le communisme a outrance comme nous l'avons connu sont des régime qui aliéne l'homme.

Non, qui aliène Dieu. Ce n'est pas l'homme qui doit être au centre de votre pensée mais Dieu et uniquement Lui.


Vous pensez "homme" et toujours "homme". Essayez de penser Dieu et toujours Dieu et vous verrez que le socialisme, le communisme et le libéralisme sont des aberrations. Dieu au centre de tout et rien que Lui.


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Re: Que reproche l'Église au communisme ?

Message non lu par Christophe » mar. 12 août 2008, 22:50

Yves54 a écrit :Souricette. Vous pouvez trouvé des passages d'encycliques comme vous le souhaitez. En aucun cas ça n'accréditera vos idées
Et quelles sont donc les idées de Souricette, Yves ? :roule:
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