Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

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Anachorète moderne
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Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Anachorète moderne » jeu. 03 févr. 2022, 20:29

Bonjour,

Cela peut sembler paradoxal qu'une personne ayant souffert de dépression pendant longtemps et qui n'en est pas encore assurément sortie, fasse l'éloge de la joie et de l'espérance. Mais je vais tenter d'expliquer les mécanismes qui mènent à la dépression selon moi. Je sais que pour certains ce n'est qu'un dérèglement chimique du cerveau, mais je ne partage pas cette vision. Au plus, ces dérèglements sont un symptôme et pas une cause de la dépression ( Sauf exception ).

La dépression est une maladie de l'espérance. Et les dépressifs ont selon moi 1 point fort très marqué : une certaine lucidité sur le monde.

En effet, si il est répandu de penser que les dépressifs voient tout en noir et forcément avec pessimisme, c'est faux.
Les dépressifs voient des réalités, certes sombres, mais pertinentes.

En réalité des psychiatres admettent que les dépressifs soient plus lucides.
Si vous ne me croyez pas, renseignez-vous sur les études du réalisme dépressif ( depressive realism ).
Je pense que ces études possèdent leurs biais, le principal étant d'oublier Dieu, et de ne regarder que les réalités du monde. Et cela est pessimiste.

Néanmoins, on ne peut nier une vraie lucidité sur un monde pourri, sur la noirceur du monde. Et il serait faux de dire qu'un naïf ne peut pas souffrir de dépression, mais il s'agit d'une forte tendance.

Qui ouvre vraiment les yeux sur le monde, a de bonne chances de passer par une dépression. Mais je vais pointer du doigt ce qui nous empêche le plus souvent d'en sortir : la désespérance et des croyances fausses qui en découlent.

Un dépressif trouve souvent que la vie ne vaut pas la peine d'être vécue. Le monde, aussi dur et injuste soit il, ne peut occulter la miséricorde de Dieu pour nous, son amour ineffable. Il transcende les réalités du monde et pansera les blessures les plus profondes de ceux qui ont foi en lui. Vraiment, si la vie ici est décevante à certains égards sur notre planète insensible et brutale, le salut que Dieu nous propose doit être encore plus inimaginable que les manquements de nos personnes et du monde.voila une bonne raison d'être optimiste, et de façon réaliste.

Voilà pourquoi la joie est un fruit de l'esprit Saint ! On se concentre sur Dieu qui dépasse de loin nos déceptions.

Si le monde nous apprend à désespérer, Dieu nous donne l'espérance.

Il convient de ne pas se complaire dans une prétendue et fausse lucidité. Fuir les comportements nocifs et travailler sur notre espérance qui faillit.

Il est bon de ne pas tomber aussi dans la stigmatisation des personnes souffrant de dépression.
Les dépressifs ne sont pas des égoïstes, c'est aussi faux que de prétendre que tous les dépressifs sont sensibles et empathiques. Cette conclusion hâtive peut naître a cause de certaines études qu'on peut trouver sur internet par exemple, les gens généreux sont plus heureux. Je ne pense pas que ce soit vrai, les dépressifs tendent à se replier sur eux-même par manque d'espérance plutôt que par égoïsme. Un grand biais dont on ne parle pas : les dépressifs sont désespérés et ne cherchent pas à maintenir la vie, tellement ils sont tristes et dévorés par la douleur. Ainsi, ces études sont biaisées par la structure même de la dépression.

Et si vous avez un peu de jugeote, vous aurez remarqué la variété des personnalités, aussi bien chez les gens heureux que les malheureux.

De plus, ici c'est mon avis, les dépressifs présentent assez souvent une forme de générosité : compatir des maux des autres, ne pas y être indifférent. Il convient de dediaboliser la personne dépressive. La dépression ne définit pas une personne.

Il convient de ne pas s'y complaire. C'est ce que je voudrais dire aux gens malheureux, avec douceur et compréhension.
Ravivez l'espérance, ayez confiance en Dieu.

J'ai une vie compliquée moi aussi mais il faut que je ne me laisse pas aller, je suis diagnostiqué schizophrène, j'ai complétement foiré mon parcours scolaire et professionnel, j'ai vécu l'isolement, l'injustice et le harcèlement. Mais songez à Dieu. Même si ma vie continuait à être compliquée et que des attentes secondaires ne se réalisaient pas, le principal, c'est d'aimer, c'est ça, la vraie réussite.

Alors que vous soyez dépressifs ou suicidaires, avec des traumatismes et une vie compliquée, ne baissez pas les bras pour un monde pourri, mais relevez les pour un Dieu qui vous aime profondément.

Luttons, soyons optimistes pour Dieu au delà de la désespérance, il y a l'espérance. Je vous invite à cultiver cette vertu théologale. Et une joie plus qualitative viendra alors.

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par LaCaverneduPelerin » ven. 04 févr. 2022, 13:33

Merci pour cette contribution. Une phrase centrale dans votre texte : La dépression ne définit pas une personne.
De façon générale, c'est une tare de notre société qui définit les personnes via des prismes réducteurs. En faisant ainsi, beaucoup de mal est affligé à la personne concernée.

De plus, on oublie souvent que la dépression est une maladie psychique. On a tendance à dire "je déprime" alors qu'on passe simplement une mauvaise passe, sans dégâts psychiques. C'est un mot à manipuler avec précaution.
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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Anachorète moderne » ven. 04 févr. 2022, 13:52

Bonjour La CaverneDuPelerin,

Oui, je suis d'accord avec vous sur les prismes réducteurs. Les préjugés font souffrir eux aussi.

Que ce soit sur la dépression, ou même sur autres choses, on est parfois trop confiant.
On pense savoir ce qui se passe dans l'esprit d'autrui... Alors que par définition, c'est difficile.

A fortiori les dépressifs, qui doivent avoir un fardeau de plus en ayant des étiquettes désobligeantes.

Mais je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a quelque chose de " psychique ", une " cassure " intérieure.
Mais ce n'est pas QUE ça. Il y a aussi des dimensions spirituelles. Notamment le fait de ne plus croire en rien.
Très fréquent chez les dépressifs. Ne plus croire au bonheur même dans le monde à venir par exemple...

Merci à vous de rappeler que la personne dépressive est autre chose que son malheur, de même qu'une personne bien dans sa peau est autre chose que son bien-être.

Mais vouloir guérir uniquement par le psychisme sans la dimension spirituelle... ça me semble réducteur.

Cordialement.

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Lalibellule1473 » mar. 15 févr. 2022, 18:43

Bonjour et merci pour votre post !

Cela fait plusieurs semaines que la dépression m'a rattrapée.

Et je ne m'en sors pas.

Parce que j'espère tellement en la vie éternelle, je sais que la vie éternelle auprès de Dieu sera tellement belle -bien plus belle qu'ici bas - que je n'ai qu'une hâte - mourir.

Mais bien sûr je ne vais pas me suicider !

Mais la vie m'est devenue très lourde à porter.

Il y a six ans que j'ai découvert Dieu et trois ans que je suis baptisée. Je connais son amour dans cette vie de souffrance alors qu'est ce que je fais encore là ?

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par gerardh » mar. 15 févr. 2022, 19:39

__

Bonjour,

Je suis chrétien et pourtant j'ai souffert de plusieurs dépressions.

Surtout ne boudez pas la médecine.

___

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par nicolas-p » mer. 16 févr. 2022, 11:55

Je vais essayer de répondre en tant que médecin, ( je ne suis pas psychiatre donc à prendre pour ce que c'est : un avis sans réelle compétence)

Vous avez tous entièrement et parfaitement raison!

Merci pour votre lucidité et témoignages.

La médecine est incapable de voir au dela de la chimie du cerveau et du palpable.

Les médicaments sont biens sûr très utiles et nécessaires mais ne font pas tout loin de là.

Il y a dans toutes les maladies psychiques un dérèglement des neurotransmetteurs ce que la médecine objective qui est probablement effectivement la "face émergée de l'iceberg " et à tort je pense pris pour la "cause" alors qu'ils sont plutôt peut-être la "conséquence".

Il y a une intrication du psychisme et du spirituel qui est malheureusement nié par la science objective et qui à mon sens fait " l'incurabilité" de tant de maladie psychiatrique .
La médecine se polarise sur les signes biologiques sans voir la cause profonde.

On ne soigne en fait qu'une partie de l'être ( psychisme ) en laissant de côté l'âme. Quelle erreur.

Il me semble qu'une vrai prise en charge serait l'association de la médecine ( psychiatre ) avec un prêtre formé pour accompagner spirituellement les malades.

Satan sait parfaitement pousser au désespoir.
Sans bien sur dire que les dépressifs soient tous poussés par le malin, Ceux qui traitent des dépressions sévères et réfractaires devraient collaborer avec un prêtre qui apporterait son expertise.

Malheureusement cela ne se fera pas.

En tant que malades il faut comme vous le faites être accompagné spirituellement tout en continuant à se faire suivre médicalement parlant.
Les 2 sont nécessaires.

malheureusement il y a une séparation de ces 2 composantes (psychiques, organiques) et spirituelles car peu de médecins iront sur ce terrain.

Or, une vrai coopération je pense sincèrement serait la clé de nombreuses maladies dites psychiques.

Certains psychiatres (peu) collaborent avec des exorcistes.

Attention tout malade n'est pas possédé loin de là ( exceptionnel! )

Mais il y a derrière chaque malade une tentation au désespoir, qui est un signe de l'action ordinaire du malin ( tentation, voire vexations ).

d'ailleurs comme vous le dites souvent on arrive plus à prier.

Un simple accompagnement avec confession, sacrements voir prières de guérison ou délivrance serait un pas énorme.

Dans les hôpitaux psychiatriques combien de personnes étiquetés " fou" sont sous une certaine emprise du mal?

Impossible de répondre mais certains y sont et non pris en charge comme il le nécessiteraient.

Merci pour vos témoignages: à votre manière vous portez chacun vos croix et participez par vos souffrances à celles du Christ et bien plus que les "bien portants" .

Je suis persuadé que vous serez dans l'éternité reconnus et récompensés à la mesures de vos souffrances.

Cela doit rester votre espérance ultime!

Les derniers sur terre seront les premiers au ciel.

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Jean-Mic » mer. 16 févr. 2022, 15:31

Étant passé par là (comprenez par la dépression, en l'occurrence par un burn-out sévère ... - je passe les détails), je me permets de réagir à mon tour.

En introduction, je commencerais par affirmer que la dépression est bien une maladie, et je dirais même : une sale maladie ... qui vous tient longtemps. Je ne dis pas ça pour vous démoraliser, mais au contraire pour vous aider à accepter (et c'est la première étape - difficile et douloureuse) de regarder la réalité en face. Il est inutile de croire qu'on s'en sort rapidement, mais je peux témoigner qu'au fur et à mesure on a la joie de découvrir à quel point chaque étape du traitement et de la guérison est une victoire et ... une belle occasion d'action de grâce !

nicolas-p a écrit :
mer. 16 févr. 2022, 11:55
Les médicaments sont bien sûr très utiles et nécessaires mais ne font pas tout loin de là.
Je serais beaucoup plus catégorique : la prise des médicaments prescrits est le préalable à toute autre considération, et elle est, à mon avis, non négociable. (En cas d'effets secondaires, il est nécessaire et urgent de le signaler à votre médecin qui adaptera le traitement en conséquence.)
Ne vous leurrez : c'est long, très long ! On parle de mois, voire d'années (avec une dégressivité sur la fin du traitement). Ne brûlez pas les étapes.

nicolas-p a écrit :
mer. 16 févr. 2022, 11:55
En tant que malade, il faut comme vous le faites être accompagné spirituellement tout en continuant à se faire suivre médicalement parlant.
Les 2 sont nécessaires.
Tout à fait d'accord, mais ...
Inutile de rêver : en dehors de quelques grandes villes, vous avez peu de chances de trouver un psy-catho qui allie les deux compétences ! Pas grave, ce n'est pas vraiment du même ordre.
Par ailleurs, rares sont les prêtres vraiment armés pour cela ... Si le prêtre qui vous accompagne ne répond pas à vos attentes, trouvez-en un autre, mais ne mélangez pas les genres : ce n'est pas à lui d'aborder le sujet médical.


nicolas-p a écrit :
mer. 16 févr. 2022, 11:55
Un simple accompagnement avec confession, sacrements voire prières de guérison ou délivrance serait un pas énorme.
Oui, c'est une possibilité, mais n'oubliez pas qu'il existe un sacrement pour cela : c'est le sacrement des malades. Il est parfaitement adapté à cette maladie qu'est la dépression. Je peux témoigner qu'il est d'un grand secours.
Heureux ceux qui savent rire d'eux-mêmes. Ils n'ont pas fini de s'amuser !

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par nicolas-p » mer. 16 févr. 2022, 15:53

merci.

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par anachorète moderne » mar. 20 juin 2023, 6:58

Bonjour,

J'ai décidé d'avoir plus de " mordant " (c'est-à-dire de ne pas me laisser faire trop facilement dans certains cas ), donc je vais répondre aux commentaires. Même si cela fait longtemps que j'avais publié ici.

La réponse de Jean-Mic était tellement tranchante, que je n'ai pas osé répondre. Pourtant, je dois le dire, je l'ai trouvée consternante. gerardh abonde en ce sens quand il écrit :

" Bonjour,

Je suis chrétien et pourtant j'ai souffert de plusieurs dépressions.

Surtout ne boudez pas la médecine. "

Mon but n'était pas de créer une polémique, mais de sortir du manichéisme ( les dépressifs qui ont une vue forcément altérée et les autres ) et / ou de la diabolisation de la dépression ( c'est de la faute du dépressif ).

Pour ce qui est de la diabolisation, il y a un biais dont j'avais parlé ailleurs qui s'appelle " la croyance en un monde juste ". C'est quelque chose de très répandu, j'en suis convaincu. En effet, quand je parle de dépression, on y voit soit une simple maladie provoquée par un déséquilibre chimique pur et dur du cerveau, à curer avec des médocs ( qui personnellement ne m'ont pas du tout aidé de mon sentiment ). Soit au manque de volonté. Soit au péché (pour les préjugés religieux ).

Il est rare qu'on dise à la personne " tu as vécu beaucoup d'injustices " par exemple. Pourtant ça peut très bien être le cas.

Donc par " maladie ", j'affirme à mon tour que ce n'est pas un pur déséquilibre chimique qu'il convient de "médiquer". Non.

En revanche, je ne niais pas que la dépression est une réelle souffrance et qu'il est loin d'être aisé d'en sortir ( dans les cas sévères ).
je pense même qu'on peut garder une vulnérabilité, et en sortir très difficilement voire ne pas en sortir.

Je pense aussi qu'il faut avoir d'autres perspectives, oui, certains dépressifs dans certains cas peuvent y voir plus clair que ceux qui ne le sont pas. Et inversement, les dépressifs peuvent perdre le sens du " beau" et être parfois plus pessimistes qu'il convient de l'être. Le monde dans lequel on vit est loin d'être un conte de fée ! Je n'en démords pas. Ce n'est pas toujours un cadeau de voiler la face des gens en leur disant le contraire. On me dira peut-être que " tout le monde perd sa naïveté " ( comme me l'avais dit un psychiatre qui sous-entendait également que j'étais un imbécile dans d'autres paroles qu'il m'a dites ), mais non, j'affirme que beaucoup de gens mesurent mal à quel point ceci est vrai. Je lisais fortuitement un proverbe africain et je le trouvais, ma foi, assez juste : " Le monde est un enfer pour les bons et un paradis pour les méchants ".

L'important, c'est l'espérance en ce qui est solide : l'amour, la charité. Car il y a des personnes merveilleuses et des choses belles également, ce qui tend à disparaître de la vue d'un dépressif. C'était là le but de ce post. Précisément de voir la beauté au dessus de la noirceur, le mal bien réel ici-bas.

PS : Finalement, j'ajoute qu'il faut faire attention à ce qu'on dit, et en particulier aux gens souffrants. On peut les blesser et faire preuve de négativité en ce sens. Je suis tout à fait conscient que parfois, la dépression de son prochain peut être dure à supporter ; certains se plaignent, gémissent, ne sont pas positifs à cet égard. Je reconnais d'ailleurs être moi-même négatif en ce sens. Mais je ne me résume pas à cet aspect.

Bien cordialement.

Gaudens
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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Gaudens » mer. 21 juin 2023, 22:20

Bonsoir Anachorète,
Je vois que personne n’a réagi à votre message d’hier matin ; je m’y risque.
Je suis un peu étonné par votre lecture un peu abrupte du message de jean Mic.Tout comme Nicolas,il tentait de définir des barrières relativement sûres autour des phénomènes dépressifs,histoire d’éviter qu’on les traite à la légère,comme autrefois.. Les esprits sont certes plus ouverts là-dessus qu’il y a cinquante ans ou plus, ne serait-ce parce que bien rares sont les familles ou les personnes qui n’aient pas un ou plusieurs cas dépressifs autour d’eux. Cela veut-il dire que cette(ou ces) maladies relèvent toutes du traitement d’un déréglèment chimique ? Non, certainement pas. D’autant qu’il n’y a pas une dépression mais toute une panoplie de dérèglements dépressifs . Quoi de commun entre la bipolarité (jadis appelée maniaco-dépressive),le burn out momentané mais qui s’installe,dû à un gros souci sentimental,familial ,professionnel ou même issu d’un problème de santé corporel ? Rien ou à peu près.J’ai moi aussi connu à une époque de ma vie un état dépressif durable,à bas bruit, non identifié alors comme tel (et pas davantage par moi).
Cela dit,quand on identitifie l’adversaire, il faut alors essayer de mettre toutes les solutions possibles de son côté,sans exclure les médocs qui,au moins peuvent soulager les manifestations aigûes.Pas de honte à cela ! Et c’est vrai qu’un bon conseiller spirituel minimalement au courant de ces questions d’un point de vue médical mais aussi et surtout attentif aux mouvements de l’âme et à ses troubles, devrait pouvoir jouer un rôle.Mais là aussi,nous vivons la pénurie.
Denier mot : ne pas s’enfermer dans la solitude car « on ne peut pas me comprendre ».Mais si bien sûr,nous sommes sur cette terre pour nous entraider,dans ce domaine comme dans les autres et l’humaine condition est suffisamment partagée pour que nous puissions comprendre nos problèmes respectifs.
Sur ce,je vous souhaite une bonne nuit et un bon été,sans trop d’orages intérieurs (les extérieurs nous suffisent bien en ce moment …).

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par anachorète moderne » jeu. 22 juin 2023, 8:51

Bonjour Gaudens,

J'ai peut-être été un peu brutal dans ma façon de m'exprimer. Je présente mes excuses à Jean-Mic et gerardh. C'est juste que parfois, je ne supporte plus cette pensée unique concernant les médicaments psychotropes. En effet, je doute sérieusement de leur efficacité.

Enfin soit.

Je ne cache pas être assez " antipsychiatrique " après avoir constaté les dégâts qu'ils sont capables de faire aussi.

Bref, pour ce qui est de la solitude, c'est compliqué d'en sortir, en effet, c'est un aspect considérable de mes " troubles " quand on voit que j'étais un des jeunes les plus seuls lors de ma scolarité... Mais je pense un peu le contraire de vous, Gaudens, je pense qu'il y a toujours du mystère chez son prochain et qu'on ne comprend jamais considérablement quelqu'un. La façon dont on voit quelqu'un est fort subjective... Cela témoigne de cette difficulté à voir objectivement quelqu'un, ou même sans porter de jugements de valeur, ses problèmes personnels.

Cordialement.

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Kerniou » jeu. 22 juin 2023, 11:28

Je dirais que la dépression est une maladie qui , à mon sens, se soigne par les médicaments et la thérapie. On soigne le cerveau et la psyché;
c'est en quoi, un suivi spirituel ne me semble pas le mieux adapté, sauf si le prêtre est, aussi psy ...Il faut savoir manier le transfert et le contre transfert: ce qui se travaille ...Certaines personnes le font intuitivement, c'est vrai, mais intuition n'est pas formation! ...
J'ajouterais que les médicaments ont considérablement évolué ... en bien ... puisqu'on en perçoit pas spécifiquement les effets ...
Normalement, un psy ne considère pas le patient comme un imbécile: il ne doit pas porter de jugement de valeur mais mettre de la "distance" avec le récit du patient et conserver une "neutralité bienveillante"comme on disait, dans le temps, quand j'ai fait mes études ... je crois que cette expression n'est plus utilisée de nos jours ...
Mais il reste important de soigner la dépression car, au fil du temps et des évènements qui jalonnent la vie, la dépression peut s'aggraver voire s'installer ...
Comme le dit Jean-Mic: "il n'y a pas de honte" à se faire soigner ou aider, c'est, au contraire, une preuve de bon sens et de clairvoyance!
" Celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu , car Dieu est Amour " I Jean 4,7.

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Léon » jeu. 22 juin 2023, 16:06

Bonjour Anachorète,

passer de la dépression à une véritable espérance joyeuse, ce n'est pas simple.
Entre ces deux situations extrêmes, il y a sans doute une passerelle de stabilité, de calme et de sérénité relative à franchir.
Par expérience de la psychiatrie comme dans d'autres domaines, on peut considérer qu'il est nécessaire d'y aller par étape par étape avec patience.
Cette situation de dépression est très éprouvante, et c'est souvent long à bien soigner, surtout quand c'est couplé avec une autre maladie du psychisme.
Je pense qu'on peut éviter la confusion entre le spirituel et le psychique, même si il y a des interactions entre les deux.
Après, je suis vraiment reconnaissant envers la médecine-psychiatrique et envers les soignants, même si parfois on n'était pas d'accord et que ça faisait quelques étincelles.
Enfin, on n'est pas obligé de s'identifier à la maladie, ça n'est qu'une situation pénible mais surement pas une identité.
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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par joseph1 » jeu. 22 juin 2023, 17:37

Pour soigner une dépression on peut faire appel aux anti-depresseurs et engager parallèlement une psychothérapie.
De plus il faut aller vers les autres, quitte à se forcer, avoir de nombreuses activités. Il est certain que la prière peut aider, c' est aussi aller vers l' Autre.

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Re: Considérations sur la dépression ; faire renaître l'espérance et la joie

Message non lu par Perplexe » sam. 24 juin 2023, 19:20

Anachorète moderne

Je souhaite vous remercier pour votre témoignage sur un thème si embarrassant pour la société et si pesant pour ceux qui vivent cette épreuve de la dépression.

Votre exposé est très lucide dans son ensemble mais sur deux choses, je ne vous rejoins pas. J'espère alors vous présenter mes points de vue et éventuellement avoir votre avis. Ensuite j'ajouterai des éléments à votre discours initial pour tenter de l'enrichir.

Vous dites " la dépression est une maladie de l'espérance ". À mon sens c'est plutôt une maladie (ou un trouble) du désespoir !
D'ailleurs vous dites vous-même un peu plus loin que "ce qui empêche d'en sortir : la désespérance...".
C'est à mon sens le désespoir qui fait entrer en dépression et le désespoir qui maintient en dépression.

Si vous soulignez que les dépressifs ont " une certaine lucidité sur le monde" et "qui ouvre vraiment les yeux sur le monde, a de bonnes chances de passer par une dépression ", vous dites aussi "qu'il y a quelque chose de psychique, une cassure intérieure" chez le dépressif.

Je dois dire que cette cassure m'apparait nécessaire pour ne plus penser comme pense le monde. Vous dites avec pertinence que "Si le monde nous apprend à désespérer, Dieu nous donne l'Espérance." C'est bien d'un apprentissage dont il s'agit et avec lequel il nous faut rompre, casser, pour rencontrer Dieu.

Mais concernant votre situation, la cassure semble porter deux qualificatifs : dépressif et schizophrène !

Je vous recommande très fortement le petit livre de David Cooper, "Psychiatrie et anti-psychiatrie", dans lequel vous apprendrez peut-être que l'étiquette de schizophrène est une étiquette fourre-tout ! Mais le plus important dans cet ouvrage c'est l'explication des troubles relationnels familiaux dans lesquels l'enfant est pris selon les effets de la "double contrainte" et qui le conduisent à porter le symptôme de ces troubles dans sa propre vie jusqu'à la psychiatrisation du symptôme. Pour Cooper, la schizophrénie n'est pas une maladie mentale mais un trouble relationnel familial que la psychiatrie ignore pour traiter sa victime, l'enfant ou l'adulte par la suite.

Pour revenir plus particulièrement à la dépression, ces "étiquettes désobligeantes" qu'on colle sur le dos des dépressifs masquent pour moi une autre réalité désastreuse qui m'a fait dire que les dépressifs étaient beaucoup plus proches de la guérison que ceux dits " normaux" en apparence.

Néanmoins, le second point où je ne vous rejoins pas complètement, cher Anachorète, c'est sur la finalité de cette plus grande lucidité des dépressifs. J'ose affirmer que le dépressif commet "seulement" l'erreur de se mettre au centre de son expérience destructrice ! Il n'est pas question d'égoïsme ou d'autres vices selon mon point de vue. S'il s'agit d'une cassure, le dépressif est seul face à un obstacle et ses apprentissages socio-affectifs sont insuffisants. Le repli sur soi est une stratégie de défense mais l'isolement devient rapidement une expérience destructrice.

La cassure d'avec le monde est alors engagée mais le dépressif est dans sa faille. Celle entre le monde et le Ciel. C'est bien à mon sens que la dépression est un trouble du désespoir, d'autant lorsque vous dites que Dieu " transcende les réalités du monde et pensera les blessures les plus profondes de ceux qui ont foi en Lui.".

Vous auriez tout dit avec cette dernière citation, que j'ai recueillie de votre partage, s'il était uniquement question de se tourner vers Dieu pour éviter les viles influences de ce monde. Les choses ne sont pas uniquement de cet ordre là.

La réponse que je peux apporter à ce dilemme de la dépression, dilemme consistant à se détourner du monde pour voir Dieu tout en regardant sa création et ce monde ci avec un tout autre regard, est celle de mon expérience personnelle.

Il s'agit de placer l'autre au centre de son expérience constructive, cela est ce "tout autre regard". En ce sens je vous rejoins pleinement lorsque vous dites que "guérir uniquement par le psychisme sans la dimension spirituelle... ça me semble réducteur.".

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