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par Cinci » ven. 31 mars 2017, 23:13
Encore ...
"... n'est-ce pas cette même répulsion secrète - structurelle et a priori parce que la miséricorde suppose qu'on se reconnaisse faible et fragile - qui expliquerait en partie la tenace réticence à l'égard du sacrement de confession? Depuis trente ans, on a assisté de différentes manières à un rejet systématique, plus ou moins avoué, qui s'en prend à la pratique personnelle du sacrement de pénitence. C'est d'autant plus navrant qu'aucune époque de l'histoire de l'Église n'a jamais connu de consignes aussi simples et justes tels qu'elles sont exprimées dans le nouveau rituel du sacrement de réconciliation [...] et en même temps un état de désobéissance aussi généralisé (dans certains pays occidentaux au moins).
Dès les débuts du christianisme, les apophtegmes des Pères signalent la difficulté d'admettre la miséricorde.
Un solitaire du désert de Scété ayant commis une faute, les anciens s'assemblèrent et envoyèrent prier le père abbé Moïse de bien vouloir venir. Ce qu'ayant refusé, ils l'en firent prier une seconde fois par un prêtre qui lui dit qu'ils l'attendaient tous. Il vint donc, portant sur son dos une vieille corbeille pleine de sable. Étant allés au-devant de lui et le voyant en cet état, les moines lui dirent : "Qu'est-ce que cela, mon père?" - Ce sont, leur répondit-il, mes péchés que je ne vois pas, parce qu'ils sont derrière moi; et vous me faites venir ici pour être juge de ceux d'autrui? Ce qu'ayant entendu, les moines pardonnèrent à leur frère, sans lui parler davantage de la faute qu'il avait faite.
[...]
L'Église, en ses saints, a toujours été audacieuse. [...] l'Esprit Saint n'a cessé de susciter en elle des hommes et des femmes qui, remplis d'amour fou, dépassent les bornes du raisonnable et essayent de faire accepter par les chrétiens l'extravagance. Ils s'Inspiraient des exemples de miséricorde laissés par Jésus, qui, non seulement avait accueilli ceux que son milieu regardait comme des pécheurs à éviter, mais qui était allé les chercher.
A chaque époque, il y eut les opprimés et les vaincus [...] les détenus, les condamnés à mort étaient, presque toujours, fort mal traités et délaissés de la société respectable; ils savaient pourtant qu'ils pouvaient s'adresser à des hommes de Dieu.
Depuis l'époque des Pères du désert, on voit des voleurs, des bandits parricides, des brigands et des assassins de toute sorte, sous l'influence de leurs victimes qui leur pardonnent, ou de saints moines et religieux qui leur donnent asile, se convertir; les uns entrent dans la vie religieuse, et certains y deviennent à leur tour des saints; d'autres sont reclassés dans la société, parce qu'un saint les a récupérés, leur a rendu confiance, a obtenu leur grâce ou a purgé leur peine à leur place.
Quant aux filles exposées au mal ou aux femmes débauchées, combien d'entre elles sont devenues moniales, au temps des Pères ou dans les monastères fondés pour elles, à partir du XIIe siècle par un bienheureux Robert d'Arbrissel et par d'autres? Au XIIIe siècle, quand on recueille des fonds pour financer la construction de Notre-Dame de Paris, les prostituées veulent y apporter leur contribution; des moralistes s'y opposent, mais l'évêque Maurice de Sully, appuyé par quelques théologiens, leur reconnaît le droit de faire servir à la gloire de Dieu l'argent qu'elles ont gagné légitimement, même si ce n'est pas moralement. Puis on voit se constituer ces congrégations de Madeleines où des filles de joie, repenties, deviennent religieuses. "
(Aime et tu sauras tout, p. 233)
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Cinci le sam. 01 avr. 2017, 2:53, modifié 1 fois.