La prière de Jésus, au coeur de la spiritualité orthodoxe

« J'enlèverai votre cœur de pierre, et je vous donnerai un cœur de chair. » (Ez 36.26)
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VexillumRegis
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La prière de Jésus, au coeur de la spiritualité orthodoxe

Message non lu par VexillumRegis » ven. 09 déc. 2005, 13:09

Bonjour,

J'ai lu récemment un petit livre (170 p.) fort intéressant : Récits d'un pèlerin russe, aux éditions du Seuil (Livre de vie).

Publié pour la première fois en Russie vers 1870, ce petit livre, dont l'auteur est resté anonyme, représente l'un des plus beaux textes spirituels de l'orthodoxie russe.

A travers un style qui garde le charme du langage populaire, le lecteur découvre la piété russe, dans ce qu'elle a de frais et de pur. Des épisodes nombreux et colorés le mettent au contact direct de la Russie ancienne, celle qui a inspiré les grands écrivains du siècle passé. Il rencontre enfin une tradition contemplative - l'hésychasme - remontant aux premiers siècles de l'Orient chrétien, appliquée par un contemporain de Dostoïevski et de Tolstoï.

Pour se guider dans son parcours initiatique, le pélerin n’a que deux livres, la Bible et un recueil de textes patristiques, la Philocalie. Ce nom seul permet de définir l’école à laquelle il se rattache. Russe du XIXème siècle, le pélerin s’inspire d’une des plus vénérables traditions de l’Orient chrétien, la tradition hésychaste (de hèsuchia, calme => silence => contemplation).

L’hésychasme remonte aux premiers siècles chrétiens. Il prend son origine au mont Sinaï et au désert d’Egypte. Dans l’Eglise d’Orient, il apparaît comme le courant mystique par opposition à la tradition spécifiquement ascétique issue de saint Basile.

Inspirées d’Origène, d’Evagre et de Grégoire de Nysse, les écoles mystiques de l’Orient chrétien assignent pour fin à l’homme la déification. Celle-ci est souvent comprise comme la restauration en l’âme de la ressemblance divine. Dieu a créé l’homme à son image et à sa ressemblance (Gn I, 26). La nature intellectuelle et morale de l’homme est à l’image de Dieu. Elle lui devient ressemblante lorsque par la charité Dieu vient habiter dans l’âme humaine, l’élevant ainsi au-dessus de toute la création. Libéré des passions par la pratique de la vertu, l’esprit contemple les raisons des choses créées et dans l’amour reçoit l’union avec Dieu. Cette union peut s’accomplir dans la lumière ou au contraire dans les ténèbres. Elle peut prendre une forme plus intellectuelle ou plus affective. Elle demeure toujours un mystère, puisqu’elle unit l’âme créée au Dieu incréé et transcendant. La théologie mystique d’Orient, tout comme celle d’Occident, mais avec des accents différents, se situe hors de la gnose, du panthéisme ou du naturalisme.

La tradition spirituelle qui, sous l’influence de grands contemplatifs comme Diadoque de Photicé (Vème siècle), se constitue peu à peu dans les monastères d’Orient, donne au coeur un rôle central dans la vie d’oraison. Considéré comme le siège de l’intelligence et de la sagesse, le coeur doit être tourné vers Dieu sans répit. On le nourrira à cette fin d’une prière constamment répétée : Seigneur Jésus-Christ, ayez pitié de moi. C’est la prière de Jésus, mentionnée dès le VIème siècle par saint Jean Climaque. Cette méthode ne conduit pas par elle-même au recueillement. Conjuguée avec la pratique des vertus, éclairée par l’amour de Dieu, elle peut favoriser l’oraison. Mutatis mutandis, elle fait penser à la pratique du rosaire en Occident.

A partir du XIème siècle, une évolution se dessine. Sous l’influence indirecte d’un profond mystique, saint Syméon le Nouveau Théologien, on tend à donner à la conscience psychologique du surnaturel une valeur exagérée. Nul ne sera vraiment chrétien s’il n’a expérimenté concrètement la grâce. Les hésychastes repoussent les visions imaginaires mais, cherchant l’illumination consciente, ils sont exposés à certains dangers. Les uns, prenant le mot coeur dans son sens physiologique, attribuent trop d’importance aux moyens « scientifiques » de parvenir à l’oraison : position du corps, rôle du coeur, contrôle du souffle, etc. D’autres font de la vision expérimentale de la lumière le but de l’oraison. Cet aspect extrême de l’hésychasme suscite au XIVème siècle de vives controverses où s’illustre Grégoire Palamas. Cependant la tradition authentique continue à inspirer de nombreux contemplatifs.

L’hésychasme est transmis à la Russie par Nil de la Sora (1435-1508), l’une des plus hautes figures du monachisme russe. Tombée plus tard dans l’oubli, cette tradition est restaurée à la fin du XVIIIème siècle par un autre starets, Païsius Velitchkovski, installé en Moldavie. Les textes hésychastes qu’il rassemble et publie en 1794 dans la Philocalie slavonne, le Dobrotolioubie, guideront les solitaires et les spirituels russes du XIXème siècle. Ceux-ci renouent ainsi avec une tradition bien antérieure à la rupture de l’unité dont certains aspects n’ont pas été ignorés du moyen âge latin.[/align]


[align=center]Deux extraits des Récits d'un pèlerin russe[/align]

[align=justify]Je cherchai avant tout à découvrir le lieu du coeur selon l’enseignement de saint Syméon le Nouveau Théologien. Ayant fermé les yeux, je dirigeai mon regard vers le coeur, essayant de me le représenter tel qu’il est dans la partie gauche de la poitrine et écoutant soigneusement son battement. je pratiquai cet exercice d’abord pendant une demi-heure, plusieurs fois par jour ; au début, je ne voyais rien que ténèbres ; bientôt mon coeur apparut et je sentis son mouvement profond ; puis je parvins à introduire dans mon coeur la prière de Jésus et à l’en faire sortir, au rythme de la respiration, selon l’enseignement de saint Grégoire le Sinaïte, et de Calliste et Ignace : pour cela, en regardant par l’esprit dans mon coeur, j’inspirais l’air et le gardais dans ma poitrine en disant : Seigneur Jésus-Christ, et je l’expirais en disant : ayez pitié de moi. Je m’exerçai d’abord pendant une heure ou deux, puis je m’appliquai de plus en plus fréquemment à cette occupation et, à la fin, j’y passais presque tout le jour. Lorsque je me sentais alourdi, fatigué ou inquiet, je lisais immédiatement dans la Philocalie les passages qui traitent de l’activité du coeur, et le désir et le zèle pour la prière renaissaient en moi. Au bout de trois semaines, je ressentis une douleur au coeur, puis une tiédeur agréable et un sentiment de consolation et de paix. Cela me donna plus de force pour m’exercer à la prière, à laquelle s’attachaient toutes mes pensées et je commençai à sentir une grande joie. A partir de ce moment, j’éprouvai de temps à autre diverses sensations nouvelles dans le coeur et dans l’esprit. Parfois il y avait comme un bouillonnement dans mon coeur et une légèreté, une liberté, une joie si grandes, que j’en étais transformé et me sentais en extase. Parfais mes larmes coulaient d’elles-mêmes par reconnaissance pour le Seigneur qui avait eu pitié de moi, pêcheur endurci. Parfois mon esprit borné s’illuminait tellement que je comprenais clairement ce que jadis je n’aurais pas même pu concevoir. Parfois la douce chaleur de mon coeur se répandait dans tout mon être et je sentais avec émotion la présence innombrable du Seigneur. Parfois je ressentais une joie puissante et profonde, à l’invocation du nom de Jésus-Christ, et je comprenais ce que signifie sa parole : Le Royaume de Dieu est à l’intérieur de vous (Lc XVII, 21).- pp. 67-69[/align]

[align=center](....)[/align]

[align=justify]Alors représente-toi ainsi ton coeur, tourne tes yeux comme si tu le regardais à travers ta poitrine, et écoute de toutes tes oreilles comment il bat coup après coup. Quand tu te seras fait à cela, efforce-toi d’ajuster à chaque battement de ton coeur, sans le perdre de vue, les paroles de la prière. C’est-à-dire avec le premier battement dis et pense : Seigneur, avec le second : Jésus, avec le troisième : Christ, avec le quatrième : ayez pitié, avec le cinquième : de moi, et répète souvent cet exercice. Cela te sera facile, car tu es déjà préparé à la prière du coeur. Puis, quand tu seras habitué à cette activité, commence à introduire dans ton coeur la prière de Jésus et à l’en faire sortir en même temps que la respiration, c’est-à-dire en inspirant l’air, dis ou pense : Seigneur Jésus-Christ, et en l’expirant : Ayez pitié de moi ! Si tu agis ainsi assez fréquemment, et assez longtemps, tu éprouveras bientôt une légère douleur au coeur, puis peu à peu il y naîtra une chaleur bienfaisante. Avec l’aide de Dieu, tu parviendras ainsi à l’action constante de la prière à l’intérieure du coeur. Mais surtout garde-toi de toutes représentations, de toutes images naissant dans ton esprit pendant que tu pries. Repousse toutes les imaginations ; car les Pères nous ordonnent, afin de ne pas tomber dans l’illusion, de garder l’esprit vide de toutes formes pendant la prière. - pp. 145-146

- VR -

Larmorencourt
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Message non lu par Larmorencourt » lun. 12 déc. 2005, 15:49

Très beau livre que je viens de lire il y a deux mois. Saint-Jean Climaque fait allusion à l'hésychasme dans l'échelle Sainte, si je me souviens bien. La prière de jésus n'est-elle celle de la liturgie orthodoxe qui est chantée decrescendo puis crescendo par series de dix?

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Message non lu par Bartalin le fou » lun. 12 déc. 2005, 21:39

Je l'ai essayée, lors d'un pélerinage solitaire, tout en lisant le Pélerin russe pendant les haltes. C'est plus difficile à lire qu'à pratiquer, et ma prière s'est vite transformée en ave Maria... Mais il faut absolument lire le bouquin

bartalin
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Philocalie

Message non lu par Christophe le pélerin » ven. 30 déc. 2005, 19:44

Bonsoir,
Quelqu'un dans cette honorable assemblée peut-il m'indiquer les références de la meilleure édition de la philocalie (tant sur le plan historisque que spirituelle).
Merci d'avance pour votre diligence.

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VexillumRegis
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Message non lu par VexillumRegis » ven. 30 déc. 2005, 20:17

[align=justify]Bonsoir Christophe,

Voici les principales références :

- Petite Philocalie de la prière du coeur, textes réunis par Jean Gouillard, Paris, Points Sagesses, 1979, environ 250 p. [Il s'agit là une petite anthologie, pratique et d'un prix modeste]

- Philocalie des pères neptiques, éditée par l'abbaye de Bellefontaine, deux tomes : le premier en trois volumes, le second en quatre. Prix moyen du volume : 11 euros.

- Philocalie des pères neptiques, présentée par Olivier Clément, Editions Desclée de Brouwer, 1995 - Deux volumes d'environ 35 euros.

Je ne connais que le premier des trois.

En Christ,

- VR - [/align]

giraud81
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la priere du coeur

Message non lu par giraud81 » ven. 13 juil. 2007, 12:22

« Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur »

« Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, pardon et merci »

Dieu a un manque :

L’Amant a besoin de l’aimé : l’amour de l’Homme,

Dieu est en manque de l’amour de l’homme.
Dieu a besoin de l’homme et de sa réponse créatrice à l’appel du divin écrit (N .Berdiaev).

Le cœur :
Hébreu: (leb) ou (lebab)
Grec: cardia (cf. cardiologie)
Latin: cor (cf. cordial)

PREAMBULE :
Berdiaev annonce : "Les temps sont venus où les chrétiens cesseront d'être un obstacle sur la voie du christianisme".
La prière du cœur : Au coeur du quotidien, dans une chambre de clinique. La maladie, une parole muette, un sens qui ne peut pas se dire. Une prière a peine audible.
Douceur de cette nuit de pleine lune. Vibration apaisée de la nuit au milieu des nuages. Juste le pas d’un âne dans le ciel, et les grelots des chèvres qui traversent ma mémoire :
Aujourd'hui je vois la vie avec les yeux du coeur, Je suis plus sensible à l'invisible, à tout ce 'qu'il y a à l'intérieur...
La prière du coeur, tel un silence profond qui transcende le tumulte de la vie, m'inscrit à nouveau au coeur du vécu, pour le transfigurer, pour y déceler la ténébreuse lumière de Dieu.
L’homme reçoit tout de Dieu par l’esprit et c’est par l’esprit que l’homme donne tout à Dieu, qu’il multiplie les dons qu’il a reçus, qu’il crée ce qui n’existait pas auparavant. L’esprit saint vient de Dieu. L’esprit de liberté n’est pas créé par Dieu comme l’est la nature.

.Esprit incréé dont Dieu n’est pas la cause. Il n’est en rien dans le fondement de la liberté de l’homme, ou alors il est responsable des malheurs de l’homme.
La prière du cœur est une liberté en disponibilité :
Prendre le temps de regarder, émerveillé, les couchers de soleil, les fleurs, les enfants, les mille et une beautés du quotidien, se remplir l'oeil, sentir les parfums de la création et de la vie, faire prier ses yeux et son nez. Nos oreilles accueillent les sons de la vie, le bruissement du vent dans les feuilles, le vent qui claque, le cliquetis du sable qui danse,le chant des cyprès, le roulement des vagues de la mer sur la plage. La beauté du visage de mon voisin en fin de vie.

J’ai tenté ici, d’en rester au cadre scolaire en ce qui concerne les recherches! Pour autant quand à la forme j’ai souhaité lui conserver son aspect école buissonnière. La pensée autre, c’est pouvoir entendre à l’écart, l’assemblage plus que le conglomérat des différences. La pensée autre est un écart de conduite et de langage .Je suis un malpoli, et non un impoli.

Ce vaste Bien
Aucun pied ne l’a foulé
Le sens créé
Jamais n’y est allé
C’est, mais personne ne sait quoi,
C’est loin et c’est proche
C’est profond et c’est haut,
Ainsi donc ce n’est
Ni ceci et ni cela
(Prière de Maître Eckhart)

C’est d’abord l’histoire d’une rencontre qui ne peut s’enfermer dans une seule démarche scolaire- certes, la rigueur est nécessaire, comme l’est tout autant la poésie « du pèlerin russe » qui est tout à la fois théologie :
1. théologie centrée sur l'âme (foi) : pensée
2. théologie centrée sur le coeur (espérance) : sentiment
3. théologie centrée sur la volonté (charité) : action
« Si tu es théologien, tu prieras vraiment, et si tu pries vraiment, tu es théologien ». Dès lors, la théologie entendue comme connaissance intime de Dieu n'est plus le monopole des académiciens et des clercs instruits, elle est à la portée de tous, elle dépasse de loin les frontières de l'Université, elle en est quelquefois même exilée...
Mais qu'est-ce que la méditation hésychaste? Le mot grec hésychia signifie « calme, paix, sérénité, silence, recueillement, quiétude, la marque d'un intérieur unifié » Pour résumer lapidairement, on peut dire que l'hésychasme est la prise de conscience que « le Royaume de Dieu est au-dedans de vous » (Lc 17,21). La méthode de prière, centrée sur l'invocation du Nom de Dieu, et plus particulièrement le Nom de Jésus, la posture corporelle, le chapelet de laine, ne sont que des supports pour chercher à « libérer le dynamisme de l'Esprit enfoui dans le coeur humain ». L'essentiel est de « demeurer devant Dieu, avec l'intellect dans le coeur, et de continuer à se tenir ainsi devant lui, sans cesse, jour et nuit, jusqu'à la fin de sa vie » L'hésychasme représente le coeur intime de la spiritualité orthodoxe, le choix de « la meilleure part » (Lc 10,42), la réponse au commandement « quand tu veux prier, entre dans ta chambre » (Mt 6,6), la chambre du coeur, le centre unifiant de l'être. Le mot de l'Apôtre « Priez sans cesse » (1 Th 5,17) devient ainsi un but réaliste.
QRT 39=Eth.p 147 « « si tu veux servir Dieu dans ton corps comme un être incorporel, aie une prière ininterrompue en secret dans ton cœur et, avant ta mort, ton âme deviendra comme un ange ».
« Quand le Christ ordonne de suivre la voie étroite, il s'adresse à tous les humains. Le moine et le séculier doivent atteindre les mêmes hauteurs » (S. Jean Chrysostome). Une seule spiritualité pour tous, l'idéal étant le même pour tous, seuls les degrés varient. Ainsi, l'Orient chrétien n'a pas développé de « spiritualité laïque », de « spiritualité du troisième âge », de « spiritualité du tourisme », du couple, des enfants, etc. Le moine est d'ailleurs un simple laïc qui pousse jusqu'au bout le radicalisme de l'Évangile.
« Voilà comment, je vais maintenant, disant sans cesse la prière de Jésus, qui m'est plus chère et plus douce que tout au monde. Parfois, je fais plus de soixante- dix verstes en un jour et je ne sens pas que je vais; je sens seulement que je dis la prière. Quand un froid violent me saisit, je récite la prière avec plus d'attention et bientôt je suis tout réchauffé. Si la faim devient trop forte, j'invoque plus souvent le nom de Jésus-Christ et je ne me rappelle plus avoir eu faim. Si je me sens malade et que mon dos ou mes jambes me fassent mal, je me concentre dans la prière et je ne sens plus la douleur. Lorsque quelqu'un m'offense, je ne pense qu'à la bienfaisante prière de Jésus; aussitôt, colère ou peine disparaissent et j'oublie tout. Mon esprit est devenu tout simple. Je n'ai souci de rien, rien ne m'occupe, rien de ce qui est extérieur ne me retient... Dieu sait ce qui se fait en moi (Récits d'un pèlerin russe, Paris, Seuil, 1948, p. 34-35).
Où est ton trésor, là aussi sera ton cœur (Mt 6,21). C’est, la réponse à l’homme d’aujourd’hui que fait le pèlerin russe.
Où est ton désir ?
Là où est la perle rare répond le pèlerin russe.
Quel est ton désir ?
Tendre vers.
Le désir ici est aspiré vers le haut .Nous sommes comme un triangle : il y a toujours un point plus haut que les deux autres, c’est la seule sortie possible.
Le fond uni ,c'est ici le blanc de la page ,avec des vagues à l'âme ,le vent la tempête ,les nuages bien sûr ,l'orage .C'est l'énormité du mal ou du bonheur et finalement la vanité de la qualité (bien ou mal )du moment qu'on est à l'heure au rendez-vous.
Là, ou dans la nuit tout nous échappe et où l’on ne peut dormir : Lieu unique que seule la poésie peut aborder par son silence entre les lignes :

Ombres et Lumière

Nous étions tous ensevelis
certains jusqu’au cou
d’autres jusqu’aux narines
suffoquant au coeur des sables mouvants.
Parce qu’un jour le désespoir
s’est ancré jusqu’au fond de nos os.
Il y coule depuis comme un mauvais sort visqueux
entraînant nos pauvres corps
inexorablement
dans l’abîme.
Pour l’un, c’était la mort aux portes
pour l’autre, un rêve fracassé
Un cerveau percuté
un avenir annihilé
un enfant disparu...
Pour lui: ses os qui éclateraient un à un...

Nous promenions des yeux atterrés
(tout ce qu’il nous restait de mobile après le choc)
sur un horizon noir et poisseux.

Comme nous
il s’agrippait au sable
et lorsque celui-ci lâchait sous un vent opaque
il espérait
L’arrêt du temps
le retour au passé
le miracle.
Puis un vent noir
lui crachait de nouveau au visage
collant derechef ses épaules à sa perte.

C’est alors que, sans bruit,
Quelqu’un
détacha sa paupière de cet horizon pourri.

Il prit sa main
et la posa sur son coeur
il prit l’autre
et lui fit l’ouvrir sur sa vie
Pour y faire ses propres traces
empreintes de ses efforts
et des échos de tout son être.
Maintenant, parfois, sous ses foulées allégées
les sables raidissent
et d’un coup de rein il remonte de cent centimètres
...l’horizon s’élargit alors de cent kilomètres
Jusqu’aux rives du jourdain.
Lorsqu’un vent noir
frappe à nouveau
à lui craquer les os
Il dépose la main sur son coeur
ouvrant l’autre sur l’écho de ses pas
vers cette aube fraîche et douce...
Les sables alors durcissent
Et d’un coup de rein…

Il traversa le Jourdain.


Il y a toujours un soleil
Derrière le voile
et c'est la nuit qu'on voit l'étoile
Sur le sable des corps se lèvent d’eux mêmes

Il s’agit ici, que d’empoigner le souffle, (L’homme seul est créé dans le Souffle de Dieu participe à la ‘rouah’ – au Souffle – de Dieu). Il s’agit, de prendre tout notre souffle dans ces vents qui de toute éternité, avant même l’Incarnation du Fils hurlaient toute la folie de Dieu pour l’homme et de l’homme pour Dieu :

-Seigneur, Jésus – Christ, Fils de Dieu, merci de m’aimer, encore.

-Seigneur, Jésus, Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pauvre pécheur.
(-(Les mots slavons milost et pomilui ont la même racine que ceux qui expriment la tendresse, l’affection, et lorsque nous prononçons les mots eleison, " aie pitié de nous ", pomilui, nous ne demandons pas seulement à Dieu d’éloigner de nous sa colère, nous demandons l’amour). Tout le monde n’est pas censé connaître le slavon( c’est mon cas).
Le mot « pitié » est dans le monde occidental chargé de tant d’hypocrisies, et d’égoïsmes
qu’il est difficile, tout au moins pour moi de le prononcer sans penser qu’il porte aussi la lâcheté du chrétien qui a pitié : « le pauvre il me fait pitié » comme si cela suffisait pour ne pas agir, au mieux il participe aux « bonnes œuvres comme ces dames du XIX siècle.. » Le fait de prier pour… ne suffit pas. (Ou alors il faut être moine). L’Evangile oblige à l’agir).
L’agir du moine et l’agir de l’homme dans la cité ne peuvent identiques, même si ils sont de mêmes natures.

- Seigneur, Jésus, Christ, Fils de Dieu, pardon et merci

"L’homme est la seule créature qui refuse ce qu’elle est."(Albert Camus).
Le vrai monde pour l’homme n’est pas encore, il le porte en creux
La prière du cœur est la seule réponse (parce qu’elle est silencieuse, inaudible, de l’homme a Dieu, de Dieu à l’homme) qui ne s’impose pas, qui se propose, qui s’offre : à Camus et à Nietzsche. Le message chrétien [...] n'est pas une loi à imposer, mais une aimantation à proposer. Il n'appartient pas à l'Église de dicter les lois de l'État ou de les bloquer comme un quelconque « groupe de pression ». L'Église inspire et sanctifie, elle ne contraint pas ; ce sont les coeurs qu'elle tente de changer. Même pour ses fils l'Église doit donc être une mère miséricordieuse et non un pouvoir juridique impersonnel.
La vie ne doit pas se jouer. Elle doit se vivre en vérité. La personne ne vit qu’en rencontrant d’autres personnes. (Mais, nous ne sommes plus capables de voir les Vieux mourir ! Ce temps privilégié de la prière, mais comme on ne sait plus prier : on ne peut aimer voir les Vieux mourir non pas de manque d’eau mais de manque d’Amour). Camus disait: «Vieillir c'est passer de la passion à la compassion.» J'ajouterais, sans prétention, que vieillir c'est traverser la consommation pour prendre la voie de l'admiration et de la contemplation.
. La prière du cœur, d’instant en instant, offre à prendre le temps de se sentir vivre au-delà du droit et du devoir, conjoints d’obéir et commander. Et l’homme ne vit réellement qu’en alliance avec L’Authentique Autre. Le moment où Il vient prier dans nos cœurs. Le ‘nous’ précède le ‘je’. La conscience commence comme :
Conscience- avec- d’autres- consciences.
Devenir homme est impossible sans la rencontre avec l’Autre. Déjà l’enfant n’émerge d’un syncrétisme primitif pour prendre progressivement conscience de soi qu’en regard d’autres. Cette émergence s’explicite à partir d’une relation inter- personnelle d’abord implicite. Ce n’est consciences émergées.
Que vers la troisième année qu’il commence à se désigner lui-même à la première personne. Et personne ne peut jamais dire avec certitude, même à la fin d’une longue

Vie, être parvenu à une pleine conscience de soi.

L’émergence de ‘soi’ à partir d’un ‘nous’, si elle se manifeste génétiquement et historiquement, est d’abord essentielle. L’humanité de l’homme se définit par sa relation avec l’autre. L’engendrement de l’humain se fait dans une communauté gestatrice d’humanité.
Cette communauté est immédiatement la communauté humaine. Une réalité spécifique et originale, radicalement différente, de la société animale. Elle est à la fois plus et autre que l’ensemble des individualités qui la composent, sans lesquels, pourtant, elle ne serait pas .Quelle est cette spécificité ? C’est d’être relationnelle. Elle est d’abord relation. Relation absolument originale par rapport à tous les autres types de relations. Tous les troubles psycho- pathologiques s’accompagnent variablement, selon leur nature et leur degré, de pertes de la possibilité de vivre une authentique relation inter- personnelle. Prisonnier de son autisme, le malade devient incapable d’établir des relations et d’entrer en relation avec l’autre. Les cas de schizophrénie sont typiques de ces dissociations entre l’homme et les autres hommes, entre l’homme et le monde, entre l’homme et lui-même.
-Toute schizoïdie ne peut être que péché contre ce que l’homme est fondamentalement : Un être en relation, Un être en Alliance. Le péché d’Adam a été de refuser cette alliance. L’enfer, c’est les autres ? Sartre, dans Huis clos, marque la possible faillite de la dialectique constructrice du spécifique humain. L’autre devenu aliénation. Engluant, chosifiant, pétrifiant... Violé, manipulé, utilisé...
La véritable rencontre inter- personnelle est inquiétante, exigeante, difficile, menacée par l’ambiguïté, l’échec, le péché. Pourtant elle est la condition première d’une authentique humanisation. Elle est éducation, dans la douleur des ruptures et
l’euphorie des marches en avant.
-La véritable rencontre inter- personnelle ne scelle pas seulement le ‘nous’ de l’empirie. Elle est créatrice infiniment plus loin. Jusqu’à l’extrême de la communion. Dans le bien comme dans le mal. Jusqu’au mystère de la communion des saints. Cette singulière solidarité mystique dont le génie d’un Dostoïevski évoque si intensément la réalité.
Car, si j’approuve et partage leurs révoltes contre un Dieu ennemi de la liberté et de la vie, contre un Dieu extérieur dont la toute-puissance écrase l’homme. Je me situe ailleurs, dans ce que G. Marcel approche dans le domaine de " l’entre-nous " où " le temps est essentiellement une nouvelle naissance. (Et non pas une re- naissance comme il est courant de l’entendre dire.) " La vie humaine devient alors ce temps nécessaire à l’émergence du sujet, où l’individu se fait homme, en devenant lui-même créateur de sa propre personne dans la relation à un Autre. La prise de conscience de cette dignité dans le dialogue avec la vie, avec les autres et avec Dieu nous conduit vers une présence toujours plus intérieure où nous nous découvrons comme un autre. Toute notre existence est alors transfigurée par cette expérience de communion avec Celui qui est la vie de notre vie, à la fois unique pour chacun et commun à tous. La vie alors n’est plus absurde quand elle devient le lieu d’une rencontre et de la naissance d’un Autre en soi.
Depuis quand nous crions « j’étouffe »…ce cri nous jette au pied de la croix, au centre de la prière du cœur pour refaire notre souffle, reprendre souffle. C’est par Son Souffle humain qui s’éteint que le Vivant en nous, prend vie. Cette prière n’est en rien réservée au moine (par expérience je me suis aperçu que par tout, et en tout lieu, a tout moment elle est à vivre aujourd’hui encore plus qu’hier). Dans cette caverne du XXI siècle ou ce qui manque le plus c’est le Souffle Vivant. Notre air est pollué. Les plus fragiles en meurent ! Le fond de l’air se transforme en air vendu T.V.A. en plus, dans les grands magasins au rayon du « tout sens bon », il y en a pour tous les goûts, tous les parfums pour ne plus sentir’, l’odeur de poubelles’, ‘ l’odeur de merde’ de ‘défection’ ‘ l’odeur de fric’ du fond de l’air .Mais ce besoin de supprimer les odeurs ne date pas d’hier. C’est quand Rome parfumait ses fontaines de pétales de roses, que l’odeur d’une société en putréfaction était la plus dominante, dans cette fin d’empire.
- Plus près de nous :
-« Soit connaissance de tous ces faits, soit hasard, M. Salmon, de Paris, a eu l'heureuse idée de mêler de la poudre de charbon à la matière des fosses d'aisances et aussitôt l'odeur en a été enlevée. C'est sur ces données que j'ai entrepris l'expérience dont je vais avoir l'honneur de vous rendre compte.
Vous savez tous, Messieurs, que lorsque neuf heures du soir arrivent, une odeur infecte de matières fécales se répand depuis la hauteur de l'hôtel de la Belle-Fontaine jusqu'au pont de Caen et dans une partie des rues adjacentes, telles que celles du Pont-Mortain et de la Boucherie. L'absence de latrines dans ces quartiers force les habitants à déposer dans des vases le résultat de leurs digestions ; mais l'odeur infecte qui se répand dans leurs étroits appartements, les oblige à les vider tous les soirs sur la voie publique, et le lendemain encore on trouve des restes non équivoques de la malpropreté du soir. J'ai pensé que ce serait rendre un véritable service à la société que de lui offrir les moyens de se soustraire à ce genre de désagrément ; pénétré de cette idée, je n'ai point reculé devant le sacrifice qu'il fallait faire pour me livrer à des expériences désagréables.
Le 16 juillet dernier, je fis placer convenablement un vase dans un étroit grenier, dont la température était de 20 degrés centigrades ; deux personnes, mon élève et mon domestique, y déposèrent leurs excréments et leurs urines pendant quarante-cinq jours consécutifs. A chaque opération, ils jetaient une petite quantité de charbon en poudre et nulle odeur ne s'exhalait. La température s'abaissa singulièrement dans les premiers jours de l'expérience, de 20 elle descendit à 12 degrés centigrades ; mais dans les premiers jours d'août, elle monta jusqu'au 27e degré et s'y maintint quelques jours. Cette température était convenable pour juger de l'action désinfectante du charbon, par la raison que la fermentation devait être plus grande, que par suite plus grande devait être la quantité des gaz infects, tels que le sulfhydrate d'ammoniaque, le gaz ammoniac, provenant de la décomposition de l'urine qui se putréfie avec la plus grande facilité, que partant il y avait plus de gaz et de vapeur à absorber, et que le pouvoir absorbant du charbon diminuait à cause de la force expansive du calorique. Aucune odeur ne se fit sentir.
J'ai dit, Messieurs, qu'on y jetait un peu de charbon ; car ce n'est pas, comme vous le pourriez croire, un mélange exact de charbon et de matières excrémentielles qu'il faut faire à chaque fois ; non, il n'est pas absolument nécessaire que chaque molécule charbonneuse se trouve en contact avec une molécule infecte, que chaque atome rencontre un autre atome comme dans beaucoup de réactions chimiques ; il suffit d'y jeter, ou d'y faire jeter par son domestique, un peu de charbon en poudre, avec une carte ou une petite pelle percée en écumoire. Au bout des 45 jours, je cessai les expériences et je fis porter le vase au bord de la rivière, à l'endroit où les lessivières lavaient du linge ; plusieurs d'entre elles ont eu la curiosité de regarder dans le vase, et pas une n'a reconnu ce qu'il contenait ; vous-mêmes, Messieurs, vous avez pu vous convaincre du peu d'odeur de la substance noire que j'ai fait circuler dans vos rangs. Eh bien ! Cette matière noire résulte d'un mélange grossièrement fait des deux corps. Le charbon animal aurait probablement, comme dans maintes circonstances, une supériorité d'action marquée sur le charbon végétal, mais je n'ai point expérimenté avec cette substance ; j'ai voulu ôter tout prétexte au mauvais vouloir qui se serait retranché derrière une dépense qu'il aurait représentée comme exorbitante. En effet, le charbon animal coûte en fabrique 15 francs les 50 kilogrammes, le port, le bénéfice du marchand, le prix de revient, seraient à Lisieux de 23 centimes le demi- kilogramme. C'est avec du charbon de bois que j'ai opéré ; le charbon léger des boulangers, nommé braise, qui paraît brillant et laiteux et peu propre à ce genre d'expérience, est pourtant celui que j'ai employé ; il est à la portée de toutes les classes ; il se réduit facilement en poudre, passé seulement au tamis de crin ; il remplit parfaitement le but que je me suis proposé. Pendant les 45 jours qu'a duré l'expérience, j'ai dépensé 750 grammes de poudre de braise, dont le coût est de dix centimes. Ainsi tout prétexte de dépense disparaît, et je pense même qu'il y aura bénéfice pour les particuliers, car ils pourront vendre à des cultivateurs, ou faire porter dans leurs jardins cette substance, où elle servira d'engrais précieux ; à la rigueur ils pourront la déposer sur la voie publique, puisqu'elle sera inodore ; seulement, dans ce cas, ils seront obligés de mêler le tout avec un bâton, parce que les couches internes de la stratification n'étant pas en contact avec le carbone, des effluves infectes se manifesteraient. Le magistrat éclairé qui souvent nous préside, sera prié de faire connaître à ses administrés, par tous les moyens en son pouvoir, ce procédé aussi simple qu'économique, et d'en prescrire expressément l'emploi.
- (De fait, la magistrature n’a pour seule fonction que de faire les poubelles. Rien n’est plus réconfortant de voir l’histoire refermer les poubelles sur toutes les idéologies…). Je le pense sans prétention.
Et pourtant, malgré tout, comme « l'âne aveugle qui patiemment pendant des années tourne autour de la noria, endurant les coups, la nature féroce, le soleil, les mouches, endurant encore, et de cette lente avancée en rond, apparemment stérile, monotone, douloureuse, les eaux jaillissent inlassablement ".(Albert Camus).
De co-créateur nous voulons devenir copropriétaire, nous voulons toujours avoir plus et avoir tout.
Pour constater que les églises chrétiennes ne sont que des syndics de faillite qui vivent a crédit pour entretenir les vocations de la nullité. L’incroyance a dépouillé les prêtres du respect et du mépris dont les drapait leur ministère. Dieu grâce aux théologiens chrétiens occidentaux dépend désormais de la fouille archéologique et les épisodiques criailleries de chantier ne changeront rien à la faillite (enfin !) des entreprises religieuses. A vouloir un christianisme sans Dieu, ou, et c’est encore et aussi scandaleux, si ce n’est plus : un Dieu sans Dieu, un Dieu a la mesure de l’homme. Un Dieu qui ne dérange pas ! On ne dit plus’ parts et ne reviens plus’, mais’ restes et tais- toi’ (sa présence est nécessaire pour les marchands du temple). On sait mieux que Toi : ce qu’il faut dire et surtout ce qu’il ne faut pas dire. Non comptant de lui avoir coupé le souffle, nous nous approprions sa Parole.
Mais dire cela c’est se condamner a rester à la porte des églises dans la solitude, à tendre la main. Car la moyenne ne pardonne jamais à l’unique de l’avoir quitté pour la vérité. Il n’y a ici ni tristesse, ni mélancolie, car c’est une place royale que te tendre la main à l’entrée des églises. Qui- suis- je pour juger mes frères et mes sœurs et de quel droit ?
Dans la mesure ou celui qui tend la main ne cesse de demander au Seigneur ‘ Oui Seigneur Roi, donne’ moi de voir mes fautes et de ne pas juger mon frère, car tu es béni aux siècles des siècles. Amen’. (Prière de Saint Ephrem) :
Je ne peux pas tricher, je ne peux plus tricher, faire comme si de rien n’était Incarné
Je ne peux pas vivre dans la nostalgie d’un amour raté, mais dans un Amour à vivre au présent.
. A ce point de ma vie, je ne peux dire que oui, ou non. La maladie est le pays idéal pour suivre le pèlerin russe. Elle ouvre à tous les espaces.
- Comme si, je pouvais survivre à une foi transie, engourdie par la Dictature du divertissement. La liturgie entre le Loft et la star Académie qui à coup sur, verra naître (ce qui est déjà dans la cité) un nouveau totalitarisme insidieux.
- La prière du cœur : mots en liberté, qui ne cessent comme le derviche tourneur de tourbillonner autour du cœur pour le rendre vide et disponible à Dieu :
Ces mots qui échappent aux dualités qui ont régi le logos occidental C’est dans la mesure où ils nous échappent qu’ils deviennent traces, sans cesse en déplacement :

Octavio Paz (prix Nobel 1990)
Une écriture qui vous écrit
Par des lettres en dents de scie
Elle vous consomme
Par des signes en braise
Un habit qui vous dévêtit
Ecriture qui vous habille d’énigmes
Ecriture dans laquelle je m’enterre.
-En des extrêmes profondeurs abyssales l’Autre appelle. Selon la parole du psaume "L’Abîme appelle l’abîme". L’autre Abîme, l’Abîme Divin, t’appelle en ton abîme.
L’essentiel de la vie se joue et se décide sur un autre plan qui n’est plus celui des évidences quotidiennes. Un ‘ailleurs’ qui est pourtant plus proche et plus présent que toutes les présences et toutes les proximités mondaines, puisqu’il coïncide avec notre intérieur. La maladie, quand elle dite incurable esquive toutes les mondanités, elle vous introduit de part son incurabilité. Je préfère dire dans son in- solvabilité : On ne peut plus avoir de crédit, prendre une assurance vie et dans le cas où vous souhaiteriez prévoir vos obsèques on vous propose des paiements différés mais avec une assurance accident : (mort avant le terme du contrat). L’huissier n’a rien à saisir. Cette situation d’insolvabilité vous projette par obligation dans « un ailleurs ». L’ordonnance médicale est un cachet de cire : cet homme est insolvable. Cet homme qui n’a plus rien, ne peut même plus vivre a crédit. Parce que non saisissable, sans crédit cet homme est libre de quitter la caverne. Il respire en quittant l’enclos. Rien de mieux qu’une chambre de clinique pour découvrir la liberté et prendre le chemin du pèlerin russe.
Le mystère des profondeurs humaines, même barricadées, est trop saint pour être livré aux trafiquants du temple.
Alors qui nous sauvera ?
Et si l’homme d’aujourd’hui, qui ne sait que capitaliser l’avoir, l’homme occidental, malade comme un chien, malade de Dieu, savait ne pas désespérer ! Et suivre le mince fil d’eau qui, au travers de l’incroyable amoncellement de défenses obstruant ses divines profondeurs, continue à jaillir, témoin de la Source qui nous conduit au Jourdain.
C’est dans son ‘cœur’ que l’homme expérimente profondément sa parenté avec Dieu et qu’il décide ultimement pour ou contre cette parenté.
Il n’y a qu’un problème que beaucoup ne se posent pas : c’est celui précisément de la vocation humaine. Il est suggéré par cette petite phrase de Camus :

"L’homme est la seule créature qui refuse ce qu’elle est." (Albert Camus )

Le vrai monde pour l’homme n’est pas encore, il le porte en creux.

A travers les ténèbres, le monde va vers une nouvelle spiritualité (…) Elle sera tournée vers le monde et les hommes .Le chaos actuel n’est que l’envers du trop plein de lumière qui le traverse. N Berdiaev.
Le dernier mot n’appartiendra pas à l’homme épris de puissance, l’assassin ne sera pas victorieux.
Voici le temps de l’authenticité…
Mais, nous devons nous battre encore contre l’inflation médiatique. Le spectacle subit le tassement du marché social. Les rôles y sont soldés au prix du pouvoir, dans les arlequinades de parlement, des copains et des coquins, de prétoire, de conciles ou de conseils d’état, ce sont les coulissent et les ficelles qui suscitent la curiosité. Comment prendre ces rôles au sérieux quand on a sous les yeux couplés par deux, arrangés en faire- valoir, vendu à la paire dans une --interchangeable vérité :
- - bon - mauvais,
- -brillant - minable,
- - dur - mou,
- - policier - assassins,
- - terroriste d’état - terroriste privé,
- - prêtre - philosophes,
- - réactionnaires- progressistes,
- - exploitants,- exploités,
- - banquier de la principauté de Monaco, -banquier de l’état du Vatican,
- - poli- ti- ni- que,- truand ?
-
- Ils n’ont plus de visage juste un nez qui leur donne un air morveux, goutteux. La morve dégouline. Le seul air qui leurs convienne « *il plût du nez » (* il n’y a pas de faute dans ce choix)...)
-
- Dans Carnet d’un inconnu Dostoïevski nous dépeint cet homme sans visage. Ces hommes de télévision et de pouvoirs qui animent la caverne à travers le personnage de Foma Fomitch (p 10 Grasset 15 éditions) : Une servilité mise au service d’une ambition de pouvoir.
-
- Pour la première fois dans l’histoire, il n’y a plus pour s’opposer à la montée du Vivant en nous, que la force d’inertie qui continue d’agenouiller ceux que le pouvoir n’a plus la force de contraindre. Depuis que l’opinion publique constate l’effondrement des diverses formes d’autorité, le mélange de peur, de haine, de respect et de mépris que propageaient les surplis, breloques et uniformes s’exorcisent en rires et railleries avant de se diluer bientôt dans une indifférence amusée. ( Pour avoir approché de très près le Pouvoir : je connais bien ce besoin de vouloir gouverner les autres, ce lieu où il ne faut savoir ni aimer ni être aimé. Mais, dans le seul but et de tirer son plaisir et son piquant d’une brosse à reluire et à étriller ! Ce n’est qu’un lieu où l’on apprend à tuer. C’est un peu court pour justifier une vie. J’en sais le prix à payer, quand on refuse de cirer les bottes. L’addition en est toujours très lourde).

• La caverne, c’est en même temps le règne de la cacophonie :

• Les prisonniers ne savent littéralement plus ‘à quel saint se vouer’. Toutes les religions se valent… ! Après le temps des théologiens de la mort de Dieu, voilà le temps des théologiens de l’hybridation : un peu de kabbale, une portion de zen, un peu plus de mantra, sans oublier le soufisme, pour terminer le chaman, puis pour faire savant la gestalt, pour les catholiques un peu de gesticulation devant une icône pour colorer l’ensemble d’un l’orientalisme en vogue actuellement (ils confondent les métanies avec ces mouvements, alors qu’ils n’ont toujours pas de théologie de l’Icône). Là où tout se met à flotter dans une relativité généralisée, Là où l’être s’éparpille dans le superficiel, Dans un espace qui s’horizontalise en immanence. Là où l’on se contente de l’eau des citernes et des nappes phréatiques polluées. Nos culs souillés par les papiers journaux servant d’essuie-tout. Au milieu de nos existences stressées et de notre condition chahutée, Là où le monde de l’humain risque de se boucler sur lui-même. Pourrait-il en être autrement lorsque débattent les ombres et que se mettent à flotter les critères de distinction et de discernement? Ils aiment à distance, ils jouissent par l’ordinateur, pour l’ordinateur, leurs spermes éclatent l’autre sur l’écran. L’image dé- couronner, l’image dépucelée, l’image glutineuse se brouille sur l’écran. Paolo Pasolini dans Salo’ ou les 120 journée de Sodome arrive à la limite de l’insupportable : quatre puissants, un duc, un banquier, un président de tribunal, et un monseigneur, ontologiques et donc arbitraires, « réduisent à l’état de choses » d’humbles victimes. Le sexe comme métaphore du pouvoir- Image tellement cruelle qu’elle oblige a se distancier, feindre de n’y pas y croire et voir de manière glaçante, ce processus de l’homme objet par ce trop plein de sexe. Maintenant, nous nous y sommes adaptés : le sexe comme obligation et laideur .La réduction du corps à l’état de chose est banalisée par l’ordinateur et encensé à la télévision. Gogol bien avant Pasolini traite du même thème :
" Le nez " : satire de la trivialité.

L'interprétation que fournisse le plus couramment les psychanalystes est de l'ordre sexuel : le nez est le symbole de l'organe sexuel et le fait qu'il se détache du corps montre le refoulement que Kovaliov exerce sur lui-même. En effet, il refuse d'affronter les femmes, sa vie est rythmée par une constante névrose, il souffre d'un manque ontologique : le rapport sexuel ; ce qui amène le nez à se détacher. En ce sens le nez peut-être le symbole de la virilité.
De cette interprétation en découle une autre : le nez est la satire de la trivialité. En effet, si l'on conçoit le nez comme un organe sexuel, c'est déjà là une connotation dégradante. En outre, étant donné que le barbier trouve le nez dans le pain et que la nourriture suscite chez Gogol le dégoût, c'est pour l'auteur un élément du trivial. C'est là le fait du mauvais goût.

Le nez : Antéchrist annonciateur de la fin des temps.

Enfin, le nez semble être la prédiction de la venue de l'Antéchrist, le prélude à une déchristianisation prochaine du monde. En effet, le nez, symbole de trivialité se rend à la cathédrale Notre Dame de Kazan où il prie avec " l'expression de la plus extrême dévotion ". Trivialité et religion se trouvent ici associés ou plutôt diabolisme et christianisme, prophétisant par là même une prochaine extinction de la religion.

Par ailleurs, dans le pain, on ne trouve plus le corps du Christ mais le nez d'un fonctionnaire.

De même Pétersbourg est, elle aussi, l'Antéchrist par opposition à Moscou, la ville sainte. Plus qu'une simple récession de la foi, l'Antéchrist pourrait même symboliser l'apocalypse. Le nez " pourra bien traverser les immensités de la terre russe, prendre possession de l'univers et transformer ses cathédrales en musées d'un passé révolu ". Telle est la vision du théologien Evdokimov (dans son livre : Gogol et Dostoïevski ou la descente aux enfers) qui voit dans le nez l'irrémédiable prophétie de la fin du monde :

Là, où il n’y a plus de visage.
• Tout y est virtuel, Là où nous ne savons plus de qui nous sommes fils ou filles. Là où Eros veut régner seul, Là où le mal est vécu comme absurdement de trop.

• Cet univers de la relativité absolue nécessite d’urgence un référentiel.

-Ma démarche ne va donc pas sans aussi agir ‘contre’ :

Dialectiquement. Contre les enfermements de la caverne. Contre les gourous du Discours dominant. Contre ces théologiens occidentaux sans Tradition, a-t-on vu un arbre sans racine vivre (quelques fois, il me semble qu’un peu de bon sens paysan, de ces gens qui sentent bon la terre, fait défaut a ces thomistes de la modernité). Le danger des réductionnismes est toujours qu’au bout de la recherche des éléments de plus en plus anciens on ne retrouve plus qu’un vide. Le ‘vide’ bultmannien se veut être porteur de sens. Soit. (j’ai du en abandonner très rapidement la lecture). Mais ce sens est-il encore un sens vivant pour l’homme vivant ? Au nom de quoi dicter à Dieu ce qu’il a à faire ? Au nom de quoi lui interdire de faire des miracles, même visibles ? L’approche de Bultmann est sans doute trop ‘protestante’, c’est-à-dire trop ‘intellectualiste’ et en trop grande proximité avec le ‘subjectivisme’ de la modernité. L’orthodoxie n'est pas une religion de la Parole qui se présenterait sous la forme d'une tentative d'interprétation de la Révélation (ce qui est souvent le cas dans les différentes formes du Protestantisme .Voir Le mythe et le rite STRAUSS et le Christ de la foi : Bultmann).
L'orthodoxie se veut davantage une religion de la contemplation et de la louange du Dieu vivant qui continue d'agir sans relâche pour le bien de tous les hommes. Elle souhaite transformer le monde en un vaste temple de l'adoration et de l'action de grâces, elle veut ainsi construire l'homme en forme de prière, il ne suffit pas d'avoir la prière, il faut que le croyant devienne lui-même prière. Pour l'orthodoxie, tout le message de l'Évangile de Jésus-Christ pourrait se résumer en quelques mots :

Réjouissez vous et soyez dans l'allégresse... que tout ce qui vit et tout ce qui respire rend grâce à Dieu.
Le Pseudo Denys avait écrit : " Le mouvement de l’âme est circulaire : l’enroulement de ses puissances intellectuelles sous forme d’unité lui donne la même continuité qu’à une roue " (Des noms divins, ch. 4). Ce mouvement cyclique de l’oraison exprime l’effluence de l’esprit dans le coeur, la circumincession de l’intellect et de l’amour. Il préfigure aussi, si grossièrement que ce soit, la circumincession de la Trinité, la communication d’amour des Trois Personnes., un mouvement circulaire (dans le sens contraire à celui des aiguilles d’une montre).
Aujourd’hui, on pense avoir inventé le psychosomatique. Evagre le Pontique en fait toute une description bien plus fine que nos contemporains, dans la mesure où il le place, le fait circuler aussi en sa verticalité. L’horizontalité : Le grand enfermement. : Spécifique de notre modernité ! Un Michel Foucault en a marqué les contours. Du côté des prisons. Du côté des hôpitaux psychiatriques. De tant et de tant de côtés ! Ce besoin perfectionniste de classer et de mettre en cage. Aux beaux jours du Moyen Age le fou avait droit de cité parmi les hommes à part entière. Le débile cohabitait avec les autres enfants de la maison. Le malade, même à l’hôpital, restait entouré des siens. On logeait les morts au cœur du village. Mais le grand enfermement n’est pas seulement de nature sociologique. Ce sont les âmes qu’il fallait parquer. Ce sont les esprits, toujours rebelles, qui devaient se façonner aux limites étroites de l’enclos. . La parole se désintègre. La parole humaine n’est plus à partir du sens mais se veut créatrice du sens. Contre les modes, et, ces philosophes média-tirés comme médiatisés ou média-tissés en col blanc, d’un chic … ! On ne sait plus très bien, s'ils sont mannequins pour un couturier du prêt a penser où attachés commerciales pour une maison d’édition (si possible la leur). L’enclos suscite les ‘maîtres penseurs’ à sa mesure. C’est-à-dire lucides seulement jusqu’à l’horizon indépassable de la clôture. Lorsque manque le sens qui donne sens toutes les logorrhées sont possibles. Il suffit de discourir... Courir de ci, de là. Mais, attention, pas au-delà des limites de l’enclos. On court ainsi jusqu’à l’étourdissement face aux questions essentielles.
Ils savent tout surtout, sauf faire silence,

" L’homme est plus homme par ce qu’il tait que par ce qu’il dit. "(Albert Camus)

-Contre les bigoteries de gauche ou de droite. Contre le ‘correct’ sous toutes ses formes... L’homme moderne a beau protesté. Il ne pourra jamais faire comme s’il était seulement sorti de la cuisse de Jupiter. On ne lutte pas toute une nuit – comme Jacob – avec l’Autre sans se retrouver déhanché le matin. C’est dire que mon approche se veut être en même temps provocatrice, et révolte par le souffle provocateur de l’Esprit. Parce que en tout un premier lieu, elle se laisse émerveiller. Sa source n’est pas le manque, mais l’émerveillement qui caractérise « le pèlerin russe ».
La prière du cœur est ce référentiel. Ma provocation, ma révolte ne peuvent se justifier que par ce référant et, dans ce seul référant.
« La prière du cœur : communion à l’autre par la présence vivante du Christ :
Une prière hors les murs du désert :
À partir du commandement évangélique « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta force (ou volonté) et de tout ton esprit ; et ton prochain comme toi-même » (Lc 10, 25-27), Paul Evdokimov propose : le monachisme intériorisé, qui répond dit- il à l'exigence évangélique d'être dans le monde sans en être : « Vous êtes dans ce monde, vous n'êtes pas du monde ».
Priez le Père -LUC

« Demandez, on vous donnera; cherchez, vous trouverez; frappez, on vous ouvrira.
En effet, quiconque demande reçoit; qui cherche trouve; à qui frappe on ouvrira.
Ou quel est celui d'entre vous qui donnerait une pierre à son fils qui lui demanderait du pain?
Ou lequel d'entre vous donnerait un serpent à son fils qui demanderait un poisson?
Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui le lui demandent!

Le Fils agit avec le Père dans
une parfaite unité et dépendance

19
Alors Jésus reprit la parole: « En vérité, en vérité je vous le dis, le Fils ne peut rien faire de lui-même; il ne fait que ce qu'il voit faire au Père, car tout ce que fait le Père, le Fils le fait pareillement.
20
Le Père, en effet, aime le Fils
et lui montre tout ce que lui-même fait.
Il lui montrera même des oeuvres plus grandes
que celles-ci,
si bien que vous serez étonnés.
21
En effet, comme le Père ressuscite les morts et leur donne la vie, de même le Fils donne la vie à qui il veut.
22
Le Père, également, ne juge personne, mais il a remis tout jugement au Fils,
23
pour que tous honorent le Fils
comme ils honorent le Père.
Celui qui refuse d'honorer le Fils,
il refuse d'honorer le Père qui l'a envoyé.
24
En vérité, en vérité je vous le dis,
l'homme qui écoute ma parole
et croit en celui qui m'a envoyé
possède la vie éternelle.
Il n'est pas soumis à un jugement;
mais il est déjà passé de la mort à la vie.

« L’un des fondements du Christianisme : l’altérité, cette connaissance de l’autre par un retournement, une métanoïa de cœur vers l’autre, vers celui qui n’est pas nous même mais qui nous est plus intime à nous- même, car il est à l’image et à la ressemblance de Dieu. La prière du cœur est donc une relation vivante et elle marque notre mode de présence au monde. C'est-à-dire la relation à l’autre vivifiée par notre communion à cet autre par la présence vivante du Christ, communion qui restaure en nous le principe de notre nature ontologiquement originelle.
Dans son livre De l'esclavage et de la liberté de l'homme, Nicolas Berdiaev écrivait: "Les atteintes les plus révoltantes commencent toujours par frapper le corps." On affame, on frappe, on tue avant tout le corps, pour atteindre, à travers lui, l'homme tout entier. Et cela parce que l'esprit ne se laisse ni affamer, ni torturer, ni tuer directement. Ce n’est que cela l’euthanasie : Une mise à mort.
« Ceux qui croient trop en une force spirituelle font figure de sot .O n rit d’eux »et alors, en quoi cela gène t- il si j’ai choisi d’être saltimbanque ? Celui qui fait rire dans les cliniques et mourir de rire dans les cimetières ! Ce sont les seuls ‘ lieux festifs ‘…où tous les spectateurs sont acteurs.
Ce cœur : centre organique de la vie se transforme en temple de Dieu.
Il m’a fallu avoir l’expérience de ces moments où l’on ne peut plus ni lire, ni formuler avec les lèvres une prière pour la vivre comme une réponse qui n’est plus de l’ordre du savoir – avoir, mais de l’être en relation.

La prière du cœur est tout d’abord un hommage à la nature

Le pèlerin russe écrit « la prière du cœur me rendait si heureux que je pensais pas qu’on pût l’être sur terre, et je me demandais comment les délices du royaume de cieux pouvaient être plus grands que ceux- là. Ce bonheur n’illuminait pas seulement l’intérieur de mon âme ; le monde extérieur aussi m’apparaissait sous un aspect ravissant, tout m’appelait à aimer et à louer Dieu ; les hommes, les arbres, les plantes les bêtes, tout m’était comme familier, et partout je trouvais l’image du Nom de Jésus – Christ. Parfois je me sentais si léger que je ne croyais avoir n’avoir plus de corps et flotter doucement dans l’air ; je rentrais entièrement en moi- même. Je voyais clairement mon intérieur et j’admirais l’édifice admirable du corps humain. ».

Cette relation par la prière à ce tout autre qui est au plus profond de nous- même (prière à Dieu, à son fils, à sa Mère toute pure, aux saints et à l’autre, celui de qui nous devons nous faire le prochain), ne peut être vivante dans un amour partagé que si nous sommes trois dans cette relation, à l’image de celle des trois hypostases de la Tri- unité.
C’est là où réside la véritable altérité métaphysique, la véritable co- naissance qui est la re- naissance (naissance, me parait plus approprié) à notre être avec l’autre » ». (La prière, expérience de Dieu.2 de Jean – marc Duru, supplément s.o.p. août 2002.)

LA PRIERE DU CŒUR :
Au cœur du monde et centre de la spiritualité orthodoxe est tout à la fois réponse personnelle et choeur de l’Eglise
.
Ceux qui ont lu les Récits d’un pèlerin russe connaissent bien cette courte prière " Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur ", indéfiniment répétée. Les Récits d’un pèlerin russe sont l’histoire d’un homme qui voulait apprendre à prier sans cesse (cf. 1 Th 5,17).
Le pèlerin va vers, il est en marche :
"Cherche la noble perle, elle est plus précieuse que ce monde. Elle ne s'éloignera jamais de toi, et où sera la perle, là sera aussi ton cœur : tu n'as pas besoin d'aller chercher plus loin qu'ici le paradis, la joie, et les délices du ciel." Jacob Boehme.
Tout le message, et plus encore toute la réalité de l’Évangile, sont contenus dans le nom, dans la personne de Jésus. Si vous prenez la première moitié de la prière, vous verrez comment elle exprime notre foi au Seigneur : " Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu. " Au coeur de cette formule nous trouvons le nom de Jésus ; c’est le nom devant qui tout genou doit fléchir (Is 45,23 et PH 2,10), et quand nous le prononçons, nous attestons l’événement historique de l’Incarnation. Nous affirmons que Dieu, le Verbe de Dieu, co-éternel au Père, s’est fait homme, et que la plénitude de la divinité a habité parmi nous, corporellement, en sa personne.
C’est là, tout Saint Marc.
Un seul qui prie avec ferveur, dans sa chambre, dans le secret, peut causer, par son union au Christ, le salut de milliers de personnes.
Notre siècle : Assurément témoigne d’un manque d’hommes en prière. (Olivier Clément). Là, où il n’y a plus dualité ou d’opposition dans ce domaine du PNEUMA. Là, où l’éternité est au présent, où le cœur et l’esprit, ne sont plus que prière. La vie dans l’Esprit est Exode. Elle s’identifie ainsi à la grande aventure historique du Peuple de l’Alliance.
Tant que le cœur, bat, il est prière.
Prier n’est pas roucouler.
Au nom de quoi et de qui, peut- on décider de mettre fin à cette prière ?
"Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous", dit saint Paul (1 Co 3,16).
J’ai tracé là, la toile de fond sur laquelle se construit un travail plus scolaire, plus concret -du moins, je l’espère.
BIBLIOGRAPHIE :
-Philocalie des pères neptiques –Macaire l’égyptien et Syméon le nouveau théologien.
- Au cœur de la fournaise –Un moine de l’Eglise d’Orient (Lev Gillet)
-La prière du cœur – Jacques Serr- Olivier Clément
-Le Christ dans la philocalie – Jacques Touraille
-La spiritualité orthodoxe- Placide Deseille
-Dictionnaire de la bible- André- Ma rie Gérard
-Dictionnaire du Nouveau Testament- Xavier Léon- Dufour.
-L’Evangile au désert- Placide Deseille.
- De l'esclavage et de la liberté de l'homme, Nicolas Berdiaev
-Carnet d’un inconnu, Dostoïevski
-La prière, expérience de Dieu.2 de Jean – marc Duru, supplément s.o.p. août 200-
-Les sentences des Pères du désert –(troisième recueil et tables édition Solesmes 1976 par Dom Lucien Regnault)
-Le mythe et le rite (STRAUSS) et le Christ de la foi (Bultmann).
-Synopse des quatre évangiles d’après la synopse grecque (du r.p. m.j Lagrange. O.p.)
Le coeur de l'homme :
Centre de l'intelligence spirituelle

« Si nous parcourons la Bible, surtout dans ses parties les plus archaïques, moins intellectualisées, nous voyons bien que le coeur n'est pas seulement un organe physiologique où retentissent les émotions, mais qu'il symbolise aussi, au sens le plus réaliste, le centre d'intégration personnelle des facultés humaines et le lieu du combat spirituel.
Le coeur est l' " en -dedans " de l'homme, de sorte que le péché s'inscrit dans la divergence de la bouche et du coeur.
C'est l'organe des sentiments, de la volonté, de la passion, celle-ci pouvant se retourner en compassion. Dans la joie, " le coeur est bon ", il " a mal " dans la tristesse.
Surtout, le coeur est le lieu de l'intelligence, à la fois dans les racines contemplatives et l'expression réfléchie de celle-ci.
Il désigne ainsi la personne, c'est en lui que la nature s'ouvre sur le, " sans fond " irréductible de l'existence personnelle.
C'est pourquoi il est " impénétrable ", Dieu seul " sait les secrets du cœur " (Ps. 44, 22). " L'abîme du cœur " est ainsi le lieu de la rencontre avec Dieu, le lieu où l'homme ouvre ou ferme au Mendiant d'amour qui " attend à la porte ".
Le refus de Dieu, la crispation sur soi, la Bible les nomme, "endurcissement du cœur ". Le coeur fidèle, au contraire, " se fixe " en Dieu.
C'est pourquoi, à travers nos destins, Dieu laboure nos coeurs comme un bon laboureur qui brise la terre durcie par la sécheresse pour qu'elle puisse recevoir l'eau et les graines.
Dieu " est près de ceux qui ont le coeur brisé " (Ps. 34, 19).
Et le prophète, annonçant l'accomplissement ultime, pour nous christique, unit le coeur et l'esprit dans l'ouverture au Saint Esprit: " Je vous donnerai un coeur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau, j'ôterai de votre chair le coeur de pierre et je vous donnerai un coeur de chair... Je mettrai mon Esprit en vous " (Ex. 36, 26-27).Olivier CLEMENT - Questions sur l'homme - Stock - 1976. ».
-Ils nous arrivent souvent, les uns et les autres, de voir notre cœur battre et l’entendre, lors d’un examen d’échographie. Rien n’est plus beau, il prie pour nous qui ne savons pas prier. Nous n’avons pas besoin d’ouvrir les lèvres « Seigneur viens prier en moi, dit le rythme cardiaque, comme un tamtam, ou les Djudjura, ces filles kabyles qui disent le nom de Dieu. Et, de montagne en montagne dans les Aurès, l’écho transporte leurs voix qui planent comme l’aigle (du DT 32, 11) pour que le derviche tourneur dans la vallée danse pour l’Indicible.
Cette prière de jésus ou prière du cœur est le centre de l’unité de la personne dans la spiritualité orthodoxe. Ce n’est donc pas sur le plan de la morale que se pose le problème de l’euthanasie, ou, de l’éthique : cette façon de tenir la mort à distance avec des mots. Et la question, à ce moment précis du passage n’est pas de savoir, pourquoi je meurs, mais pourquoi je vis.
« Le slogan " mort dans la dignité " peut servir à couvrir un grand nombre d’attitudes et de pratiques qui ne se préoccupent guère du bien-être spirituel ou physique ultime du malade. Et dans la mesure où cette attitude prône en pratique l’euthanasie active sous une forme ou sous une autre, elle favorise involontairement en fin de compte " la mort dans l’indignité " en encourageant l’homicide ou le suicide.
Plus proche de la perspective chrétienne, maintient qu’à un moment donné du processus de mort, le " non- traitement " (c’est-à-dire la cessation de tout moyen de prolongation artificielle de la vie) peut être moralement justifié, permettant au malade d’avoir une mort " naturelle ". Cependant, même cette dernière façon de voir les choses soulève un certain nombre de questions épineuses. Choisir la méthode de " non- traitement ", que l’on appelle communément " débrancher " le malade, revient-il vraiment à laisser la nature suivre son cours ? Ou bien cela correspond-il à pratiquer une forme illicite d’euthanasie ? En d’autres termes, le non- traitement n’est-il jamais moralement justifié, étant donné que son but est de hâter la mort du malade, même si cette mort se produit par des moyens naturels ? Et que dire des différences qui existent entre diverses formes de non traitement : doit-on faire par exemple une distinction morale entre supprimer un respirateur et retirer une sonde d’alimentation ? Finalement, peut-on éthiquement considérer comme véritablement " passive " la forme de non- traitement qui constitue en fait un acte de " négligence dans un but bienfaisant " ? Ou bien le fait de pratiquer le non- traitement, si on le considère sous l’aspect de l’intention, ne correspond-il pas toujours une intervention active, une forme d’euthanasie que l’on peut qualifier d’homicide sinon de meurtre.
Finalement, il faut admettre que la souffrance comprend souvent un élément de l’absurde. Nous ne pouvons pas tout bonnement tenir pour acquis que toute tragédie dans l’existence humaine vient de la volonté de Dieu. Dans l’Évangile de Jean la guérison de l’aveugle-né, Jn 9,1-40), Jésus affirme sans équivoque que la souffrance et la culpabilité ne sont pas nécessairement reliées. Dieu permet la tragédie, oui. Dans la
prière des Pères d’Optino, nous supplions Dieu : " Apprends-moi à accepter d’une âme sereine tous les imprévisibles de la journée.., donne-moi la conviction profonde que rien n’arrive que ce ne soit avec ton agrément... que je me souvienne que tout événement imprévu l’est avec ton accord ". Cependant il est impensable que le Dieu de miséricorde et de compassion soit d’accord pour permettre – dans le sens de vouloir et de désirer – la torture, les bombes des terroristes ou des tremblements de terre effroyables comme nous en avons connu ces dernières années. Si nous affirmons que " rien n’arrive que ce ne soit selon la volonté de Dieu ", nous devons tout de même insister sur la distinction fondamentale entre ce qui est la volonté de Dieu et son désir et ses intentions. Dieu ne désire pas que ses créatures, si rebelles soient-elles, soient les victimes de souffrances déshumanisantes. Tout ce que nous pouvons savoir à cet égard, toutefois, est en fait tout ce que nous avons besoin de connaître au sujet du mystère de la souffrance humaine. Et c’est que, en dépit de l’élément de l’absurde qui lui est inhérent, Dieu nous accompagne dans notre souffrance : il la connaît et la partage pleinement. En tant que Serviteur souffrant, Il a le pouvoir de transformer nos angoisses sans signification en une expérience véritablement rédemptrice. Là où la personne est devenue incapable de ressentir cette qualité rédemptrice à cause de l’intensité de la douleur physique ou mentale, il reste la possibilité d’une souffrance rédemptrice portée par un Autre, par celui qui demeure à jamais " le Crucifié " (Mc 16,6), ainsi que par la présence, l’intercession et l’amour de ceux qui portent et partagent le fardeau de celui qui est affligé. »
Ecrit le Père Jean Breck
L’euthanasie : une mise à mort pour le bonheur du mort. C’est une « mort chirurgical ! » Mieux encore un « mort d’ami ».
Mais, de quel droit et au nom de quoi et de qui, quelque qu’un peut- il décider à quel moment l’autre ne doit plus respirer, c'est-à-dire prier?
Les paroles de la Bien-aimée du Cantique des Cantiques de Salomon : " Je dors, mais mon cœur veille " (Ct 5,2) ne peuvent-elles pas s’appliquer ici ? Les abîmes de l’inconscience ne sont-ils pas peut-être comparable à ceux du schéol dans la vision du psalmiste : " Si je monte au ciel, tu y es, si je descends aux enfers, tu es là " (Ps 138,8) ? Le débat actuel est à côté de la cible. C’est au nom de la même culture qui justifie toute corrida que le débat éthique se pose?
« Une " bonne " mort ne peut advenir que grâce à un " bon " mourir. Le but primordial de l’équipe médicale ne doit donc pas être de prolonger la vie du mourant, mais bien plutôt de soulager la souffrance, de sorte que le malade puisse être en mesure de puiser au maximum dans ses propres ressources spirituelles. La " séparation de l’âme et du corps dans la paix " demande que le malade soit suffisamment libéré des douleurs et autres formes de souffrance pour pouvoir se préparer à la mort de façon adéquate. Le fait de lui administrer des médicaments appropriés à cet effet ne constitue pas une violation du principe du " caractère sacré " de la vie, même si cela doit avoir pour conséquence secondaire de hâter le moment de la mort ».
« Personne, hormis le malade lui-même, n’est en mesure de juger si ses souffrances ont une qualité rédemptrice. S’il est dans le coma ou s’il est la proie de grandes souffrances qui ne peuvent être soulagées, il est alors tout- à- fait justifié de mettre fin aux moyens qui prolongent artificiellement la vie et de prescrire des médicaments antalgiques administrés par voie orale ou par injection ».
C’est à partir de la seule prière du cœur, que, je peux me situer par rapport à cette question qui est de l’ordre de l’existentiel et non d’une rhétorique à la saint Thomas d’Aquin.
Que nous dit la philocalie :
« Voyez-vous, frères, que tous les chrétiens, du plus petit jusqu'au plus grand, ont tous en commun le devoir de prier continuellement, de dire la prière intellectuelle "Seigneur Jésus Christ, aie pitié de moi", et d'accoutumer leur intelligence et leur coeur à la dire toujours ? »
Elle donne à l'homme d'être toujours en dialogue avec Dieu. Ô chose vraiment merveilleuse ! Tu es avec les hommes par le corps, et tu es avec Dieu par l'intelligence. (Grégoire Palamas de Thessalonique). Grégoire le Théologien enseigne à tous les chrétiens qu'il nous faut, dans la prière, nous souvenir du nom de Dieu plus souvent que nous prenons notre respiration.
L’oeuvre d'Évagre n'est pas un traité composé selon les règles de la rhétorique. C'est un ensemble de sentences, de maximes, d'aphorismes que l'on doit déguster, méditer, une à une, ne passant à la suivante que lorsqu'on a fait sienne, en en comprenant tout le sens, celle que l'on vient de lire. Certes, cette oeuvre était destinée à des moines... Mais moine, en grec, se dit monakhos et ce mot, en grec classique, est un adjectif qui signifie seul, unique, simple. Tout homme qui prie est seul, face à face avec Dieu qu'il implore, tout homme en prière est unique, s'il dirige exclusivement sa pensée vers Dieu, tout homme qui prie doit être simple, "simple en esprit" comme le veut le Sermon sur la Montagne, tout homme en prière est donc moine, au sens le plus fort du terme. Il peut l'être pour une minute, une heure, un jour, un an, une vie, peu importe : la prière, comme le dit Évagre, est "une conversation de l'intelligence avec Dieu", en se souvenant que, peut-être, nous entendons par "coeur" ce qu'il nommait "intelligence".
11. Efforce-toi de rendre ton intelligence, au moment de la prière, sourde et muette, et tu pourras prier. .
12. S'il te survient quelque provocation ou contradiction et que tu sois irrité et sentes ta colère se porter à rendre la pareille ou à répliquer, souviens-toi de la prière et du jugement qui t'y attend, et aussitôt le mouvement désordonné s'apaisera en toi.
13. Tout ce que tu feras pour te venger d'un frère qui t'aura fait du tort, tout cela te deviendra une pierre d'achoppement au moment de la prière.
14. La prière est un rejeton de la douceur et de l'absence de colère.
15. La prière est un fruit de la joie et de l'action de grâces.
16. La prière est exclusion de la tristesse et du découragement.
17. Va, vends tout ce que tu as et donne aux pauvres, et puis prends la croix, renie-toi toi-même pour pouvoir prier sans distraction.
18. Si tu veux prier dignement, renie-toi à toute heure; et si tu endures toutes sortes de tracas, accepte cela sagement pour la prière.
19. Toute peine que tu auras endurée avec sagesse, tu en trouveras le fruit au moment de la prière.
20. Si tu désires prier comme il faut, ne contriste personne, sans quoi c'est en vain que tu cours.
21. Laisse ton offrande, est-il dit, devant l'autel, et va d'abord te réconcilier avec ton frère, et étant ensuite revenu, tu prieras sans trouble. Car la rancune aveugle la raison de celui qui prie et enténèbre ses prières.
Il faut répondre à cette question qui précède l’action définitive. L’important
n’est pas de guérir mais de vivre avec ses maux. Puis- je vivre, qu’avec ce que je sais et avec cela simplement ? L’absurde serait- il le péché sans Dieu,
L’innocent coupable ?
. Comme les suicides les dieux changent avec les hommes. Camus a compris la proposition chrétienne comme une réponse, une explication du monde, comme une projection de nos affectes sur une image.
Le suicide tout court seul m’intéresse. Je laisse au café philosophique. : la question du suicide philosophique.
Pourquoi vivre infirme ?
Le monde est déraisonnable et absurde .La seule réponse est dans cet amour déraisonnable de Dieu à notre égard. Non, comme explication du monde, ou comme une consolation à la souffrance. L’amour de Dieu est non seulement déraisonnable, mais, absurde à notre encontre. En ce sens , L'incarnation d'un Dieu se montrant en image dans la figure d'un fils fonde une théologie et une politique nouvelle, comme possible réponse a cette seule question fondamentale : qu’est-ce qu’être homme ?
• Dans ses Leçons Sur la divino- humanité, Soloviev a posé cette question : la Bonne Nouvelle du Christ n'est-elle qu'une méthode individuelle pour le salut de l'âme ? N'est-elle que la voie personnelle de chaque homme, qui se perfectionne pour obtenir après sa mort la béatitude éternelle ? Si c'est le cas, le christianisme ne se différencierait pas des autres systèmes religieux ; ne trouve-t-on pas, en effet, la même idée dans l'islam et dans les religions orientales ?
• Soloviev adopte un tout autre point de vue :
• Pour lui, le christianisme est la ligne qui unit le supérieur et l'inférieur, le divin et l'humain. Si la spiritualité chrétienne est divino- humaine, cela veut dire que rien dans l'histoire ne lui est indifférent. Cela signifie que l'idéal chrétien peut tout intégrer, aussi bien les problèmes sociaux et moraux de la société que l'art. Soloviev a créé une grande synthèse pour que les deux conceptions du christianisme retrouvent leur unité intrinsèque.
• Le cœur revient souvent chez saint Macaire l’égyptien : « garde- toi autant que tu le peux et efforce- toi d’avoir toujours le cœur humble et brisé ». (sur la liberté de l’intelligence 115).
• -« en effet, puisqu’au- dedans ils ont été rendus par l’Esprit irréprochables et purs de cœur ». (90).ou (67).(116).(129).
• AM 152,6 page 166:
• Le frère lui demanda encore : « quelle est l’activité la meilleure dans l’ascèse et l’abstinence ? »Il lui répondit « O bienheureux celui qu’on trouvera retenant le nom béni de Notre Seigneur Jésus- Christ, sans cesse et avec contrition de cœur ; car en vérité, il n’y a point dans toute la vie pratique d’activité qui soit meilleure que cette nourriture bienheureuse. Si tu rumines sans cesse comme fait la brebis lorsqu’elle fait remonter (la nourriture) et goûte la douceur de ruminer, jusqu’à ce que la chose ruminée entre dans les entrailles de son cœur et qu’elle répande une douceur et une onction dont profitent ses viscères et tout son intérieur ; et ne vois tu pas la beauté de ses joues pleines de la douceur de ce qu’elle a ruminé dans sa bouche ? Qu’il nous arrive que Notre Seigneur Jésus Christ nous fasse grâce en son nom doux et onctueux ».
• - de même chez Syméon le nouveau théologien dans vivre avec le père spirituel ou la crainte de Dieu.
• et pour : Saint Nectaire d’Égine :
« Le cœur pur perçoit Dieu et le découvre, alors que le cœur fourbe ne le voit pas, même lorsqu’on l’indique.
Il est évident que l'incroyance est un fruit mauvais d'un cœur mauvais ; le cœur pur et sans ruse découvre Dieu partout, le discerne partout, et croit toujours sans hésitation en son existence. Quand l'homme pur de cœur regarde le monde de la nature, c'est-à-dire, le ciel, la terre, et la mer et toutes choses en eux, et qu’il observe les systèmes les constituant, la multitude infinie d'étoiles dans le ciel, l'innombrable quantité d'oiseaux, de quadrupèdes et de toute espèce d'animal sur la terre, la variété des plantes, l'abondance des poissons de la mer, il est immédiatement stupéfié et clame avec le prophète David : Que tes œuvres sont grandes, Seigneur, toutes avec la sagesse tu les fis (Ps 103, 24). Un tel homme, poussé par son cœur pur, découvre Dieu également dans la grâce de l'Église, dont l'homme de mauvais cœur est éloigné. L'homme de cœur pur croit en l'Église, admire sa vie spirituelle, découvre Dieu dans les mystères, dans les hauteurs de la théologie, dans la lumière des révélations divines, dans les vérités des enseignements, dans les commandements de la loi, dans les accomplissements des saints, dans l'acte bon, dans chaque don parfait, et en général dans la totalité de la création. Juste donc la parole du Seigneur dans ses Béatitudes au sujet de ceux qui ont le cœur pur : Bienheureux les cœurs purs, car ils verront Dieu (Mt 5, 8).
L'homme est non seulement raison mais également cœur. Les puissances de ces deux centres, s'aidant mutuellement l'un l'autre, rendent l'homme parfait et lui enseignent ce qu'il ne pourrait jamais apprendre par la raison seule. Si la raison enseigne au sujet du monde naturel, le cœur nous enseigne au sujet du monde surnaturel... L'homme est parfait quand il a développé à la fois son cœur et son intellect ; le cœur est développé grâce à la religion révélée.
1705 J 705(cf spn 195 :pe IV 24,1,2):
Un frère interrogea un vieillard : “ qu’est-ce que le culture de l’âme pour que celle- ci porte ses fruits ? »Le vieillard lui dit « Pour moi, la culture de l’âme, c’est l’hésychia avec attention, la tempérance, la mortification du corps, beaucoup de prière vocale et ne pas regarder les fautes des hommes ».
En effet, le coeur de l’homme, au sens biblique du terme, désigne cette source secrète d’où procède sa vie spirituelle la plus profonde, faite de ces inclinations spontanées et de ce sens intime des choses qui engagent tout son être. Au baptême, ce coeur a été recréé par l’Esprit, qui y a gravé sa loi et l’a pénétré de son onction ; en d’autres termes, il y a inscrit un attrait pour le bien capable de triompher de toutes les sollicitations du mal, et un sens de Dieu et de ses mystères en vertu duquel le chrétien ne devrait plus avoir besoin d’un enseignement extérieur, puisque cette onction l’instruit de tout (cf. 1 Jn 2, 27).
Diadoque dit que le Nom de Jésus - comme les versets de l’Écriture que les anciens moines aimaient ruminer en une méditation incessante - possède une efficacité exceptionnelle pour réveiller dans le coeur l’amour divin caché en lui, en vertu du baptême, comme une étincelle sous la cendre. Sous le choc de l’invocation, le goût de Dieu et des choses de Dieu se fait sentir et triomphe des fausses douceurs du péché. L’esprit peut alors " voir sa propre lumière ", expression évagrienne qui désigne la contemplation et signifie que l’esprit, en prenant une conscience expérimentale de l’inclination qui le pousse vers Dieu, goûte quelque chose de Dieu lui-même, puisque cet attrait est la manifestation de la présence divinisante du Christ et de son Esprit dans l’homme.
• L'origine égyptienne de la prière du cœur :
" Je vous guiderai vers la voie de vie
" La bonne voie de celui qui obéit à Dieu
" Heureux celui que son coeur conduit vers elle
" Celui dont le coeur est ferme Sur la voie de Dieu
" Affermie est son existence sur la terre. "
PETOSIRIS, prêtre d'Hermopolis (IVe siècle avant J.C.)
Les conceptions anthropologiques de la vieille Egypte considéraient le coeur comme l'élément essentiel de la vie physique, source du sang, du souffle et du sperme générateur, mais aussi le siège sacré des sentiments, de la pensée, de l'intelligence et de la volonté.
Pointe suprême de la conscience, le coeur assumait la responsabilité des actes de l'individu et, à ce titre, subissait l'épreuve de la psychostasie après la mort de son possesseur.
Aucun texte n'exprime peut-être mieux l'importance du muscle cardiaque que le célèbre traité de théologie memphite où toute la cosmogonie développée à pour moteur la parole réalisatrice des évolutions du coeur (ib)
Le coeur de l'Égyptien était aussi le lieu privilégié de son corps par lequel passait l'inspiration divine. En lui, cheminait la voie par laquelle le conseil divin arrivait jusqu'à l'être.
Le dieu fait naître la pensée dans les coeurs des hommes
En retour, selon que l'Égyptien avait le coeur ouvert ou non, il lui était loisible d'être plus ou moins en communication avec le Divin et de Lui être obéissant.
Dans l'état de prière, qui, d'après l'antique sagesse pharaonique, était avant tout un état de SILENCE, il allait de soi que le coeur était le pivot indispensable autour duquel gravitait l'oraison. L'intériorisation était la condition sine qua non de celle-ci.
Or, c'est dans les milieux monastiques coptes qu'est attestée le plus anciennement la pratique de la " prière du coeur " ou " prière de Jésus " dont la fortune fut ensuite extraordinaire en milieux byzantin et slave.
L'auteur égyptien des Homélies Spirituelles (Ve siècle) attribuées au grand Saint Macaire de Scété, explique bien que dans ce mode de prière, le lieu par excellence de la grâce contemplative est le coeur: " Dans le Christianisme, il est possible de goûter la grâce de Dieu: Goûtez et voyez que le Seigneur est bon (Ps. XXIV). Cette gustation, c'est la puissance pleinement active de l'Esprit qui se manifeste dans le coeur. Les fils de la lumière, ministres de la Nouvelle Alliance dans l'Esprit Saint, n'ont rien à apprendre auprès des hommes; ils apprennent auprès de Dieu. La grâce elle-même inscrit sur leurs coeurs les lois de l'Esprit... Le coeur, en effet, est le maître et le roi de tout l'organisme corporel, et lorsque la grâce s'empare des pâturages du coeur, elle règne sur tous les membres et toutes les pensées; car là est l'intelligence, là se trouvent toutes les pensées de l'âme et c'est là qu'elle attend le bien. Voilà pourquoi la grâce pénètre dans tous les membres du corps.
Au cinquième siècle, Diadoque de Photicé contribua grandement à faire connaître et apprécier la prière du coeur dans tout l'Orient byzantin. Il reviendrait cependant au monastère Sainte Catherine du Mont- Sinaï de devenir le centre de propagation de l'hésychasme, notamment grâce à Saint Jean Climaque, higoumène de ce couvent vers 580-650.
Chez ce dernier, l'importance du coeur apparaît tout aussi nettement que chez le pseudo Macaire: l'hésychaste est celui qui dit: " Mon coeur est affermi " (Ps. LVII;8). " L’hésychaste est celui qui dit: "Je dors, mais mon coeur veille " (Cant. V;2). " Fermez la porte de votre cellule à votre corps, la porte de vos lèvres aux paroles, la porte intérieure aux esprits ".
Le rôle central du coeur dans l'hésychasme allait être particulièrement mis en lumière par Nicéphore l'Hésychaste, moine du Mont Athos dans la seconde moitié du Xllle siècle. Il nous a laissé un traité intitulé " Sur la garde du coeur ", dans lequel il conseille, afin de rétablir l'unité essentielle physico-psychique de l'être humain corrompue par le péché et promise à la restauration par la mort du Christ, de " faire revenir l'esprit dans le coeur" : " Entre dans ta chambre, enferme-toi, et t'étant assis dans un coin, fais comme je vais te dire: Tu sais que notre souffle, l'air de notre inspiration, nous ne l'inspirons qu'à cause du coeur... Ainsi que je t'ai dit, assieds-toi, recueille ton esprit, introduis-le -je dis ton esprit - dans les narines; c'est le chemin qu'emprunte le souffle pour aller au coeur. Pousse-le, force-le de descendre en ton coeur en même temps que l'air inspiré. Quand il y sera, tu verras la joie qui va suivre... n'aie d'autre occupation ni méditation que le cri de " Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi "... Mais si, mon frère, malgré tous tes efforts, tu n'arrives pas à pénétrer dans les parties du coeur suivant mes indications, fais comme je te dis et, avec le concours de Dieu, tu arriveras à tes fins. Tu sais que la raison de l'homme a son siège dans la poitrine. C'est dans notre poitrine en effet que, nos lèvres demeurant muettes, nous parlons, nous décidons, nous composons nos prières et nos psaumes... Après avoir banni de cette raison toute pensée, ... donne-lui le " Seigneur Jésus-Christ aie pitié de moi " et contrains-le de crier intérieurement, à l'exclusion de toute autre pensée, ces paroles. Quand, avec le temps, tu te seras rendu maître de cette pratique, elle t'ouvrira l'entrée du coeur, ainsi que je te l'ai dit, indubitablement.
La raison est dans la poitrine - le coeur est le siège de la pensée et l'endroit le plus favorable à la communion mystique. A des siècles et des siècles, voire des millénaires, de distance, ce sont là les mêmes conceptions que celles de Ptahhotep ou du Traité de théologie memphite.
Elles demeureront telles dans l'Église d'Orient jusqu'à nos jours, non seulement dans l'orbe byzantin mais aussi dans le monde slave. Qu'on en prenne à témoin ce texte du grand starets Nil Maïkov (1433-1508), fondateur d'un ermitage sur la rivière Sora : " L 'hésychie... c'est de rechercher le Seigneur dans son coeur, c'est-à-dire de garder son coeur dans la prière et se retrouver constamment à l'intérieur de ce dernier.
Certains auteurs ont voulu rattacher la prière du coeur chrétienne à la technique du dhikr musulman ou même celle du yoga hindou. C'était oublier que dans l'optique hésychaste l'attention du Cœur n'est qu'un moyen d'accéder au divin, tandis que pour les adeptes du dhikr ou du yoga, l'extase devient souvent une fin en soi. En ce sens, la prière du coeur chrétienne est bien plus proche des méthodes d'oraison de l'Egypte antique.
-Seigneur Jésus, Christ, Fils de Dieu, pardon et merci.

« La prière du cœur : communion à l’autre par la présence vivante du Christ.
« L’un des fondements du Christianisme : l’altérité, cette connaissance de l’autre par un retournement, une métanoïa de cœur vers l’autre, vers celui qui n’est pas nous même mais qui nous est plus intime à nous- même, car il est à l’image et à la ressemblance de Dieu. La prière est donc une relation vivante et elle marque notre mode de présence au monde. C'est-à-dire la relation à l’autre vivifiée par notre communion à cet autre par la présence vivante du Christ, communion qui restaure en nous le principe de notre nature ontologiquement originelle.
Cette relation par la prière à ce tout autre qui est au plus profond de nous- même (prière à Dieu, à son fils, à sa Mère toute pure, aux saints et à l’autre, celui de qui nous devons nous faire le prochain), ne peut être vivante dans un amour partagé que si nous sommes trois dans cette relation, à l’image de celle des trois hypostases de la Tri- unité.
C’est là où réside la véritable altérité métaphysique, la véritable co- naissance qui est la re- naissance (naissance, me parait plus approprié) à notre être avec l’autre » ». (La prière, expérience de Dieu.2 de Jean – marc Duru, supplément s.o.p. août 2002.)

Il va sans dire, mais, c’est encore mieux de le dire, que, cette formulation a mon adhésion totale.

Car, elle implique un double mouvement :

-verticale et horizontal,

-solidarité et contemplation.

-Elle est le signe oral de la gestuelle du signe de Croix. (La main sur le cœur)

-le dire et le faire,

-action et prière

-Pardon à Dieu, et pardon à mes frères.

-Merci à Dieu, et merci à mes frères.

A elle seule, elle condense, compacte, présente toute la Christologie, tout le mystère de la Sainte Trinité. Dans ce pardon et merci c’est la réponse que je peux faire si l’on vient à me demander qu’est- ce qu’être chrétien. Elle conduit au Père. La découverte du mystère de l’homme et de celui de Dieu, elle est une connaissance d’amour, c’est-à-dire engagement réciproque dans un rapport interpersonnel entre deux libertés.
Dieu ne se conçoit pas sans l’homme ni l’homme sans Dieu. Entre Dieu et l’homme, il n’y a qu’un seul mystère, celui de la personne. " Un visage humain n'est pas réductible à la nature et à la société. "Il apparaît furtivement comme unique, déchirure dans la prison indéfinie du monde ", écrit Olivier Clément. Et c'est à partir de ce visage qu'il faut façonner le disciple du Seigneur. Souvenons-nous des Pères de l'Eglise qui aimaient dire que l'homme est potentiellement christique parce qu'il unit le visible et l'invisible, la terre et le ciel. La prière du cœur en est le rite. Elle est la source du Personnalisme et non de l’individuel.
-Le chemin du pèlerin russe ne peut que se parcourir qu’en expérience de Dieu, dans l’événement de Dieu en nous. (Devant moi, sur le chemin, le pèlerin russe qui va vers l’orient de l’âme). Car " nous sommes les collaborateurs de Dieu. " La prière du coeur aboutit à l’homme, pour qu’à chaque respiration, il soit Transfiguré par le dernier souffle de Dieu sur terre. Il est le ciel où Dieu se manifeste à condition que l’homme s’épure, qu’il se libère, Dieu a besoin d’un homme libre, en liberté. Dieu n’est pas une idée, ni un objet d’expérience (scientifique) et de réflexion. Dieu est un "Tu", c’est-à-dire l’un des deux sujets de cette rencontre et de ce dialogue. " Dieu, ce n’est pas quelqu’un dont on parle, mais que l’on respire, que l’on communique par l’atmosphère qui émane de nous ". Dieu n’est ni l’objet de cette expérience et encore moins l’objet d’une réflexion à partir d’une idée du divin, Dieu est le sujet de cette expérience. Elle est essentiellement kérygmatique. Elle est invitation à une conversion du regard. Pour, que l’homme reprenne à son compte le dernier souffle de Dieu sur la croix. Là, où Adam avait coupé le souffle de Dieu pensant se suffire à lui- même. Dans cette ‘’ tendresse pour soi’’ (philautie, Elle ne cherche que soi- même dans cet attachement maladif au moi.) Evagre le Pontique avec une grande subtilité et justesse est celui qui de tous les Pères( pour moi) qui cible au mieux le péché originel d’Adam dans ce qu’il a d’essentiel : l’acédie, en tant que sommes de toutes les passions, est peut- être l’expression la plus pure de la ‘’spirituelle’’ d’Adam, qui s’est détourné de Dieu pour se tourner vers soi- même, se manquant du même coup. Et, puisqu’elle ne peut s’atteindre nulle part, cette ‘’tendresse pour soi’’ se tourne en haine contre tout.
L’homme est fait pour de vertigineuses profondeurs de grâce. Hélas, il préfère rester à la surface et se condamner à l’inauthentique : Dieu en solde !
La prière du coeur prend son souffle, au moment du dernier souffle du Christ sur la croix, elle en est le relais, tout se joue là, dans le dernier souffle de Dieu (au début de la genèse il souffle pour donner la vie. Sur la croix, il meurt étouffé pour redonner la vie) pour refaire l’alliance ou comme selon l’admirable formule de Mgr Philarète, là où le Père est l’amour crucifiant, le Fils l’amour crucifié, l’Esprit l’amour triomphant. Les Noms divins sont l’écoulement de la vie divine dont la source est le Père, que nous montre le Fils et que l’Esprit nous communique.
- Croyez vous en l’homme ?
-Homme, qui es-tu?
-D’où viens-tu?
-Où vas-tu?
Ces questions risquent aujourd’hui de paraître surannées... Il n’en existe pourtant pas de plus appropriées ni de plus indispensables dans ce début du XXI siècle!(il est vrai qu’aujourd’hui, la seule question est : combien gagnes- tu ?). Face au questionnement sur la vérité de l’homme, l’indifférence se veut sagesse. Et nombreux sont les refoulements qui jouent d’alibi. Les certitudes de la caverne ne sont-elles pas faites pour nous garder de cette in- quiétude qu’engendre inévitablement l’infinie question sur notre condition? Pour autant, on ne peut pas évacuer d’un trait de plume, la question de Camus : peut-on être un saint sans Dieu ? Une telle révolte contre Dieu se fonde sur un amour de la vie qui exige de l'individu qu'il se dépasse en autrui, qu'il renonce à lui-même au bénéfice des autres dont il se reconnaît solidaire.
Cette révolte contre Dieu, ce non à la religion judiciaire, provoque un écho dans ma conscience chrétienne; elle y suscite aussi des questions. Le révolté est invité à se passer de Dieu qui se désintéresserait du malheur des hommes, à vivre sans l'espérance en la vie éternelle qui conduirait à une résignation devant le mal, à délaisser l'Église qui enlèverait aux croyants leur autonomie morale! Se pose là, la peine éternelle : l’enfer .La dernière des peurs, c’est pour moi impensable, inacceptable. Je ne peux pas accepter cette théologie de la dernière peur. Regardant l’Icône de la descente aux enfers…il y a trop d’amour qui s’en dégage pour ne pas croire un instant que :
Tant qu’il y aura un seul homme en enfer Dieu ne peut pas être en paix avec lui- même. Accepter cette notion de peine éternelle c’est remettre en question ma vie spirituelle, ma vie, ma liberté. Un seul homme en enfer : c’est l’échec de l ‘Incarnation…de la Création. Si l'Un de la Sainte Trinité, comme le confesse la Liturgie byzantine, meurt humainement sur la croix, c'est bien pour ensuite ressusciter et tout remplir de lumière, le ciel, la terre, et même l'enfer.
• Pour autant, on ne peut pas évacuer d’un trait de plume, la question de Camus : peut-on être un saint sans Dieu ? Une telle révolte contre Dieu se fonde sur un amour de la vie qui exige de l'individu qu'il se dépasse en autrui, qu'il renonce à lui-même au bénéfice des autres dont il se reconnaît solidaire.
_ L’expérience première de l’esprit est celle du souffle qui anime un être vivant en même temps que celle du vent qui balaye la terre. Esprit: spirare: respirer: souffler. Le souffle de la vie et le souffle de la terre... La Parole de Dieu signifie cet élément pris à la limite de la matière solide dans son ‘autre’ dimension. Le Souffle de Dieu : L’Inspir et l’Expir de Dieu. La Parole de Dieu. Les liens sémantiques sont puissants. Les liens théologiques plus puissants encore. Centré sur la Parole se met en lumière le Mystère Trinitaire. L’Esprit en personne se joint à notre esprit pour attester que nous sommes enfants de Dieu." (Romans 8,16).
• "Et la preuve que vous êtes des fils, c’est que Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie: Abba, Père !" (Galates 4,6).

• ‘Le cœur dans sa dimension pneumatique désigne cette verticale instance humaine capable de Dieu. Il se tient, dans les extrêmes profondeurs humaines, béant sur l’Abîme de Dieu, et source vivante de toutes les capacités humaines, physiques et spirituelles, qui se superposent, en sa dépendance, au-dessus de lui.’ « Au principe était le Logos. Le Logos était avec Dieu et le Logos était Dieu. Il était au principe avec Dieu. Par lui tout fut créé, et rien de ce qui existe ne fut créé sans lui. En lui était la vie et cette vie était la lumière des hommes. La lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas obscurcie.
Le Logos était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans ce monde. Il était dans le monde, lui par qui le monde s’est fait, mais le monde ne l’a pas reconnu. Il est venu chez les siens, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais tous ceux qui l’ont reçu, ceux qui croient en son nom, il leur a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu. Ils ne sont pas nés de la chair et du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme: ils sont nés de Dieu.
Et le Logos s’est fait chair et il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, la gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique plein de grâce et de vérité. « (Jean 1:1-5, 9-14).
Le Logos – en grec: tout ensemble parole, calcul, science, raison, intelligibilité – non pas seulement ‘au commencement’ spatio-temporel mais ‘au principe’. ‘En archè’. C’est-à-dire à la racine absolue de toute chose et de toute raison. Avec Dieu. Dieu lui-même. Le Souffle de Dieu. Verbe fait chair qui habite parmi nous.
-Ce Logos n’est pas de l’ordre de la nécessité, mais de l’ordre de la personne. Il n’est pas un neutre ‘il y a’. Il est un ‘je suis’’. L’absolu ‘Je Suis’. Toutes les mystiques du monde convergent vers Lui.
Une seule le désigne, le reconnaît, le nomme, le rencontre en personne. Logos fait chair. Jésus Christ. Fils de Dieu. Fils de l’Homme.
La modernité expulse aussi violemment la croix qu’elle expulse la transcendance. Ce Messie crucifié qui, depuis les origines, est folie pour les païens reste, aujourd’hui, plus folie que jamais. Qu’est, en effet, la croix sans transcendance, sinon absolu non-sens ? Elle qui EX- pose. Elle qui est Exode absolu. Hors de... Mais vers quoi ? Vers qui ? Vers où ? Vers le néant ? Ou vers l’Autre ? Le regard charnel, conditionné à ne jamais voir que l’envers du monde, ne comprend pas la profondeur transcendante du mystère de Dieu tel qu’il peut se partager avec l’homme divin. Il faut pour cela descendre en ses propres profondeurs. La théologie dite ‘négative’ reste sans doute l’approche qui fait le moins violence à la vérité du mystère divin. Elle professe que ce que nous nions de Dieu est plus éloigné de l’erreur que ce que nous en affirmons. La ‘béance’ divine se refuse à nos concepts et résiste à nos possibilités intellectuelles. Seule une approche ‘mystique’, une approche par le vide, permet de rencontrer, à la limite, l’indicible et inexprimable mystère.
Analogiquement, pourquoi ne pas oser l’expression d’anthropologie ‘négative’ ? Une telle analogie se justifie et se fonde sur la parenté de l’homme avec Dieu, créé qu’il est ‘à son image et à sa ressemblance’, et révélé ‘divin’ par grâce. Mais on peut parler également, et dans la logique de toute notre approche, d’anthropologie de la ‘béance’.

‘L’homme passe l’homme’, dit Pascal avec infiniment de pertinence. A sa manière le mystère humain est indicible et reste proprement inexprimable. Nous ne pouvons réellement en parler qu’à la limite. L’essentiel de l’humain étant ‘à travers’.

L’anthropologie négative est en profonde intelligence avec le ‘non’ sans lequel l’humain n’est pas et avec lequel toute culture commence. Elle n’est que dans la rupture de cet animal qui seul se fait violence à lui-même et qui devient homme à travers cette violence.
L’anthropologie négative dit ‘oui’ à travers un ‘non’. Sa vérité passe entre les mots et dans l’éclatement de la nominaliste et défensive clôture des étiquettes. Par-delà la masse accumulative des articulations, elle pointe vers... Encore ne faut-il pas suivre l’imbécile qui, selon le proverbe chinois, ne regarde que le doigt lorsque le sage pointe l’index vers le ciel !
Tout discours en clôture se révèle béant d’altérité, s’ouvre à l’au-delà de sa propre positivité et dit dans l’ouvert. Pas seulement, scientifiquement, la larve. Mais aussi, poétiquement, le papillon. Malgré les apparences qui donnent d’abord raison à la larve.
Comme l’humour, l’anthropologie négative commence par lire entre les lignes du phénomène humain. Là où c’est blanc entre les signes. Là où l’homme ‘passe’ l’homme. Une telle approche ne peut que fuir le flot de paroles si incroyablement sûres d’elles-mêmes telles que proférées par les ‘pseudo- sciences du bla-bla-bla’ en quoi se résume hélas trop souvent ce que devraient être d’authentiques ‘sciences humaines’. Une anthropologie ‘de la béance’ ne peut que se situer dans l’humour radical : les positivistes consistances. C’est en leur cœur qu’elle surgit. Et c’est dans leur négation qu’elle procède. Dialectiquement :
L’anthropologie négative a plus volontiers partie liée avec le silence. Et pourtant elle doit se dire aussi. Tout en sachant qu’elle ne peut jamais arriver à s’articuler dans la clôture d’un discours bouclé sur lui-même. Il lui reste à parler autour. Elle parle dans les béances du plein. En ne cessant d’entretenir cette étonnante pensée de derrière. Elle cultive le non- sérieux. Elle se prend elle-même avec un sourire. Elle « prend le temps » de respirer. C’est dans ce « prendre le temps » que tout se joue dans « prends pitié » :
D’avoir enclos l’inconscient dans la caverne en faisant croire aux hommes que leurs profondeurs et, partant, leurs béances ne vont pas au-delà de la finitude, tel est bien la pertinence de cette sotériologie en gnosticisme inversée.
Les ‘sciences’ dites ‘humaines’ ne se nouent-elles pas en mécanisme de défense de l’homme schizoïde bouclé sur lui-même ? Trop de symptômes convergent et manifestent, derrière leur jeu de cache-cache, une tendance profonde de la schizoïdie à se justifier. Comme si elle devait se trouver des raisons. Comme si elle devait se déculpabiliser. Se constituer en cohérence auto-justifiée et auto- justifiante. Ne suffit-il pas qu’un système soit en accord avec les affects pour que les affects s’y retrouvent ? On finit toujours par penser la cohérence qui arrange, c’est-à-dire qui ‘range’ les choses par rapport à la pensée et la pensée par rapport aux choses.
Impasse de l’humain piégé en sa clôture. Un tel enfermement peut désespérer de ses ouvertures mais ne peut pas infiniment réprimer la question. Et l’irrépressible question, de mille manières formulée et de mille manières refoulée, pourrait se formuler ainsi: cette impasse est-elle totale ou bien lui reste-t-il, malgré tout, même subrepticement, l’ouvert d’un ailleurs ?

Mais la raison la plus profonde de l’unidimensionnalité des sciences humaines qui ne peuvent révéler qu’une des faces du mystère humain c’est que, de fait, elles se constituent comme négative théologie. L’endroit d’un envers. L’envers d’un endroit. Un vide de Dieu se remplit étrangement de substituts inversés du divin. Un refoulement massif témoigne négativement du refoulé.

Le ‘même’ crie négativement l’autre, là- même où la totalisation schizoïde expérimente l’ultime rétrécissement de la finitude et où elle croit rencontrer l’absolu neutre côtoyant l’absolu néant. Un point de rupture. D’intersection aussi. Et de symétrique inversion :
Douleurs d'enfantement d'Agapè
J'estime qu'il n'y a pas de commune mesure
entre les souffrances du temps présent
et la gloire que Dieu va bientôt révéler en nous.

En effet, la création aspire de toutes ses forces
à voir cette révélation des fils de Dieu.

Car la création a été livrée au pouvoir du néant...

Pourtant, elle a gardé l'espérance
d'être, elle aussi, libérée de l'esclavage,
de la dégradation inévitable,
pour connaître la liberté,
la gloire des enfants de Dieu.

Nous le savons bien, la création tout entière crie sa souffrance,
elle passe par les douleurs d'un enfantement qui dure encore.

Et elle n'est pas seule.
Nous aussi nous crions en nous-mêmes notre souffrance.
Nous avons commencé par recevoir le Saint Esprit,
mais nous attendons notre adoption
et la délivrance de notre corps.
Car nous avons été sauvés, mais c'est en espérance.

Mais nous, qui espérons ce que nous ne voyons pas,
nous l'attendons avec persévérance.

Bien plus, l'Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse,
car nous ne savons pas prier comme il faut.

L'Esprit lui-même intervient pour nous
par des cris inexprimables.
Et Dieu, qui voit le fond des cœurs,
connaît les intentions de l'Esprit.
Il sait qu'en intervenant pour ses fidèles,
'Esprit veut ce que Dieu veut.

Nous le savons, quand les hommes aiment Dieu,
lui-même fait tout contribuer à leur bien,
puisqu'ils sont appelés selon le dessein de son amour.

Ceux qu'il connaissait par avance,
il les a aussi destinés à être l'image de son Fils,
pour faire de ce Fils l'aîné d'une multitude de frères.

Ceux qu'il destinait à cette ressemblance,
il les a aussi appelés;
ceux qu'il a appelés,
il en a fait des justes;
et ceux qu'il a justifiés,
il leur a donné sa gloire.
Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ?
Qui pourra nous séparer de l'amour du Christ ?
La détresse ?
L'angoisse ?
La persécution ?
La faim ?
Le dénuement ?
Le danger ?
Le supplice ?

Non, car en tout cela nous sommes les grands vainqueurs
grâce à celui qui nous a aimés.

J'en ai la certitude:
ni la mort, ni la vie,
ni les esprits, ni les puissances,
ni le présent, ni l'avenir,
ni les astres, ni les cieux,
ni les abîmes, ni aucune autre créature,
rien ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu
qui est en Jésus Christ notre Seigneur.

(Romains 8,18-39).
- L’homme passe infiniment l’homme. Probablement est-ce Pascal qui, en cet aphorisme, traduit l’essentiel anthropologique spécifiquement judéo-chrétien. C’est cette même béance qui, déjà, hante le ’païen’ Platon et le Bouddhisme. N’y a-t-il pas là des convergences les plus extraordinaires de toute l’histoire de la pensée humaine ?

L’homme passe l’homme. Infiniment. Il est au-delà de son être ’naturel’, au-delà de ce qui est simplement donné au départ de toute naissance et qui se révèle être ’caverne’, c’est-à-dire piège et aliénation. Soupçonner la caverne là où spontanément nous vivons l’espace absolu de notre humanité est la condition première d’une possible sortie.

Dès lors la tâche humaine par excellence est tâche d’humanisation, c’est-à-dire d’é- ducation. En tous les sens mineurs sans doute. Mais essentiellement en son sens majeur qui dit ex- ducere. Conduire hors de. Hors de la caverne. Hors de toute caverne. Infiniment en LE DERNIER NOM DE DIEU : Jésus
-
- Le premier non de Dieu :
Ayin, ce tout premier NOM est celui du Dieu Incréé qui, en tant qu'Il crée, se fait "Rien" pour que soit le créé.
Il exprime l'extrême contraction divine, la totale abnégation, l'infini retrait - que le grec appelle "Kenosis"", l'hébreu, "Tsim-Tsoum" - en un point ultime encore appelé par cette même tradition hébraïque, le Point d’en haut, celui qui est, et qui n'est point..... .

Ce Point, ce Rien, qui, appliqué aux mathématiques et ne pouvant être démontré est l'axiome de base de toute cette science, n'est-il pas Celui qui fonde l'âme humaine "créée de Rien", "Me Ayin" ?
Et ce "Me Ayin" lui-même ne nous laisse pas ignorer que "nous sommes de race divine", comme l'affirme l'apôtre Paul à Athènes, au milieu de l'Aréopage (Actes 17, 28-29) :
Nous sommes "Myn" l'espèce de " A (leph)", Elohim, "de la race d'Elohim".
-
- Un nom vierge de trahison ;
- Un nom en mesure de nous unir sans barbelé ;
- Un nom qui n'exclue pas mais donne envie de participer ;
- Un nom capable de nous délivrer du destin tragique de duelliste
- Un nom inextricablement enchevêtré et profondément enraciné au plus intime de notre réalité
- Un nom illuminant qui sonne comme un flash d'informations, comme un bouquet d'explications
- Un nom subtil qui apporte des liens et des ancrages par millions
- Un nom capable de nous réveiller de ce mauvais rêve ;
- Un nom en mesure d'établir un contact immédiat ;
- Un nom, un seul, le centième, comme une ultime combinaison de lettres, enfin capable de nous déverrouiller à Dieu, non dans un exercice inutile de théologie ou un renoncement à la raison, mais comme une ouverture à la vie.

Un Nom, le dernier.
Le Nom :
Pour le dernier souffle :
Un Nom inintelligible
Quand nous méditons sur Dieu et l'électron(s), non plus sur leurs attributs ou leurs caractéristiques, alors nous prenons pleinement conscience de ce qu'est le "Tout Autre", un monde dont nous pouvons chaque jour nous approcher un peu plus, tout en ayant l'assurance de ne jamais pouvoir débarquer. Nous sommes ensemble mais pas sur le même plan. Nous sommes une partie d'un champ qui agit, informe, transforme et déforme, maintient, anime, compose et décompose, accepte et refuse, évolue et change perpétuellement, sans effort, car telle est sa nature. Nous en sommes une partie, un détail, des témoins. Dieu est tout et rien à la fois. "Création et luminosité". Ainsi, devons nous nous contenter des empreintes profondes qu'Il laisse dans l'histoire, tandis que les physiciens se contentent des traces laissées par les particules élémentaires dans les chambres à bulles. Dès que nous cherchons plus activement, les empreintes de Dieu comme celles de l'électron(s) deviennent visibles et flagrantes. Permanentes.
Il suffit de pouvoir s'oublier.
L’homme n’est possible qu’à partir d’un animal en crise.
En crise face à l’altérité provocante qui le défie au dépassement.
Longue et progressive histoire d’un certain vivant à travers une suite indéfinie

de crises différentielles :

Il faut à ce processus un grand provocateur pour l’unifier. ». Dans cette conception circulaire se produit la haute unité, où tout est uni dans l’esprit comme dans la nature et se tient dans l’unité Divine. Lorsque que ces deux (nudités) sont réunies dans l’unité et baignent pourvues et dépourvues d’esprit, cela est une bienheureuse. (Prière de Maître Eckhart, 93)L’homme est défié par le sacré qui le provoque à sacrifier son animalité. La spécificité de la prière du cœur dans son aspect ruminant : circule, unifie le corps et l’esprit.
Nous ne savons pas quand cela a commencé. Personne ne le saura jamais. Mais l’accession d’un certain primate à l’humanité reste incompréhensible autrement. Il fallait la folie de Dieu pour l’homme, pour disloquer l’animal et pour ouvrir en ce primate la béance de l’infini. Le fini n’était pas suffisant pour le déifier ! Le même non plus. Il lui fallait l’autre. La grande négativité dialectique. L’autre infiniment autre.
La grande différence provocatrice
Que l’homme soit homme moins dans son insistance et dans sa consistance que dans son existence et dans sa transcendance est un postulat absolument fondamental. Par rapport à lui toute philosophie se décide. A partir donc d’une différence. A partir d’une division radicale et originaire. Ou bien la condition humaine insiste et consiste en ce qui est ’naturellement’ donné. Ou bien elle existe hors de ce qui est simplement donné dans l’ouvert de l’Autre déconcertant. Jardin zoologique ou risque d’une infinie ouverture... Toute philosophie prend implicitement ou explicitement position par rapport à ce dilemme. C’est à partir de cette position archéologique que l’être se signifie dans sa différence.
Le même concept dès lors, la ’liberté’ par exemple, prend des acceptions qui peuvent diverger jusqu’à l’antinomie. Ambiguïté profonde du langage à travers l’ensemble de la philosophie. Il peut envier au langage scientifique son univocité sans pouvoir l’atteindre cependant, sous peine de réduire ce qui précisément se joue de décisif dans l’acte philosophique.
L’homme est en rupture. En rupture d’intelligibilité et en rupture d’être. Il y a brusquement un seuil, une rupture de niveau. Le spécifique humain est proprement une aberration. Comme si une machine à écrire se mettait brusquement à faire des bulles de savon .c’est un peu cela les « bulles papale »! Un système ne peut pas, à partir uniquement de lui-même, se mettre radicalement en question. Un système en tant que système ne peut pas être en même temps son propre antisystème.
Le cœur au cœur même des Evangiles :
Xavier Léon-Dufour « il est le centre des choix décisifs, de la conscience morale, de la loi non- écrite et de la rencontre avec DIEU qui seul l’atteint. Le cœur se réchauffe à la voix du Christ, l’Esprit du Fils qui y habite révèle à l’homme l’amour de Dieu et lui fait crier « Abba, Père ». Le cœur du croyant ne « craint plus »,, il est purifié par le « sang du Christ, devenant un cœur pur, fort , en paix. Lc 21,34 ; Ac 14,17 ; JC 5,5_ Jn 16,6.22 ; Ac 2,26.37 ;_Mt 15,8- Mc 7,6- 2cor 3,14Mt 15,18- Rm 2,15- Mt 5,8-Jn 3,19-21_ Jn 3,14,1.27_( voir page 174 Dictionnaire du N.T ( livre de vie).

Il y avait un homme appelé Nicodème, qui était du parti des Pharisiens et qui était l'un des chefs juifs.

2 Il vint une nuit trouver Jésus et lui dit: «Maître, nous savons que Dieu t'a envoyé pour nous apporter un enseignement; car personne ne peut faire des signes miraculeux comme tu en fais si Dieu n'est pas avec lui.»

3 Jésus lui répondit: «Oui, je te le déclare, c'est la vérité: personne ne peut voir le Royaume de Dieu s'il ne naît pas de nouveau.»

4 Nicodème lui demanda: «Comment un homme déjà âgé peut-il naître de nouveau? Il ne peut pourtant pas retourner dans le ventre de sa mère et naître une seconde fois?»

5 Jésus répondit: «Oui, je te le déclare, c'est la vérité: personne ne peut entrer dans le Royaume de Dieu s'il ne naît pas d'eau et de l'Esprit.

6 Ce qui naît de parents humains est humain; ce qui naît de l'Esprit de Dieu est esprit.

7 Ne sois pas étonné parce que je t'ai dit: "Il vous faut tous naître de nouveau."

8 Le vent souffle où il veut; tu entends le bruit qu'il fait, mais tu ne sais pas d'où il vient ni où il va. Voilà ce qui se passe pour quiconque naît de l'Esprit de Dieu.»


« Supposez que l'arbre soit bon, son fruit sera bon; supposez-le pourri, et son fruit sera pourri. C'est au fruit qu'on reconnaît l'arbre.
Engeance de vipères, comment pourriez-vous dire de bonnes choses, vous qui êtes mauvais? Car c'est du trop-plein du cœur que la bouche parle.
Engeance de vipères, comment pourriez-vous dire de bonnes choses, vous qui êtes mauvais? Car c'est du trop-plein du cœur que la bouche parle.
Je vous le dis, les hommes rendront compte, au jour du jugement, de toute parole vaine qu'ils auront prononcée.
Car c'est d'après tes paroles que tu seras justifié, et c'est d'après tes paroles que tu seras condamné. »

« Il n'y a pas de bon arbre qui produise un fruit pourri. Il n'y a pas non plus d'arbre pourri qui produise un bon fruit.
On reconnaît chaque arbre au fruit qui lui est propre: on ne cueille pas en effet des figues sur des épines; on ne récolte pas du raisin sur un buisson.
L'homme bon tire du bon trésor de son coeur le bien; l'homme mauvais tire de son mauvais trésor le mal. Car ce que dit la bouche, c'est ce qui déborde du coeur.


Le coeur est considéré également comme l'instrument dont on se sert pour mener certaines opérations intellectuelles. C'est ainsi que l'on associe au coeur l'intelligence, l'imagination et la mémoire. Quand Luc affirme par exemple que Marie conservait tous les événements dans son coeur, il veut dire qu'elle les médite et y réfléchit en vue de les comprendre.
À une époque plus tardive, et en particulier au temps de Jésus, le coeur est perçu comme l'organe de la vie morale. On en a un exemple frappant dans la discussion qui oppose Jésus aux Pharisiens à propos de ce qui rend l'homme impur, c'est-à-dire inapte à remplir ses devoirs religieux et cultuels. Les Pharisiens considéraient que certains aliments et certains comportements causaient l'impureté rituelle. Or Jésus leur réplique que ce n'est pas ce qui entre dans le corps de l'homme, ni l'oubli de se laver les mains avant le repas, qui le rend impur, mais ce qui sort de son coeur: Ce qui sort de la bouche provient du coeur, et c'est cela qui rend l'homme impur. Du coeur en effet proviennent intentions mauvaises, meurtres, adultères, inconduites, vols, faux témoignages, injures. C'est là ce qui rend l'homme impur; mais manger sans s'être lavé les mains ne rend pas l'homme impur (Mt 15,18-20).
Le coeur est souvent associé aux « reins ». Ces organes, logés au niveau de la ceinture, évoquent souvent la vigueur physique et désignent aussi les fonctions génératrices. Comme le coeur, les reins, qui sont des organes cachés, sont considérés eux aussi comme le siège des passions, des pensées secrètes, des sentiments. Le coeur et les reins désignant l'intérieur de l'être humain, on comprendra qu'une personne ne peut en juger une autre que sur les apparences, et que seul Dieu peut « sonder les reins et les coeurs » (Ps 7,10) Jésus lui-même affirme savoir ce qu'il y a dans le coeur de l'homme (Jn 2,25). Dans la pensée de saint Paul, le coeur humain devient la demeure de l'Esprit Saint et du Christ. C'est donc dans le coeur que se joue le salut de chacun, puisqu'il est, comme nous l'avons vu, le siège de la volonté et de la décision en tant que siège des sentiments:
Amour Deutéronome 6, 5; Cantique 5, 2;
désir Exode 35, 21 et 26; joie 1 Rois 8, 66; Psaume 104, 15; regret et tristesse Dt 15, 10; Jean 16, 6; irritation Dt 19, 6; Actes 7, 54; courage 2 Samuel 7, 27; Ps 27,14; Job 41,16; peur Dt 20, 3 et 8; Isaïe 7, 4; Ps 40, 13; découragement Is 61, 1; Ps 34, 19; confiance Ps 57, 8; 108, 2; 112, 7; orgueil Dt 17, 20; Proverbes 16, 5
• en tant que siège des opérations intellectuelles
Intelligence 1 Rois 3, 9; Job 34,10 et 34
Imagination Jérémie, 7, 31; Ezéchiel 38, 10; mémoire Isaïe 65, 17; Jérémie 3, 16;
• comme demeure de l'Esprit Saint: Romains 5, 5; Galates 4, 6
Expressions courantes
« Placer son coeur » = appliquer son attention Exode 7, 23; Qohélet 1, 13 et 17;
« Parler avec son coeur » = penser Genèse 24, 25; Qohélet 1, 16; 2, 15;
« Sage de coeur » = le vrai sage ou l'expert dans son art Exode 28, 3; 31, 6; Job 9, 4;
« Droit de coeur » = le vertueux et le juste Psaume 7, 11, 11, 2

La conclusion :
Jésus, celui qui porte le nom de Sauveur, est le Messie promis dans l'Écriture Sainte et attendu par le peuple. En lui, l'Esprit Saint n'est plus la force qui dépasse les juges et les prophètes ni celle qui repose sur les rois. En lui, l'Esprit agit au-delà de toute mesure. Jésus n'est pas grand devant Dieu comme Jean Baptiste le dernier prophète; il est grand aux côtés de Dieu. Né de l'Esprit, Jésus ne parle plus au nom de Dieu; il est la Parole incarnée. Né de l'Esprit, Jésus n'attend pas une action divine; il agit dans la puissance de Dieu. Né de l'Esprit, Jésus est lui-même, par sa personne, l'irruption du royaume de Dieu en ce monde. Il ne règne pas seulement sur la maison de David, mais sur toute l'humanité. En Jésus, l'Esprit réalise pleinement le salut du monde.
L'ange lui dit : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce après de Dieu. Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé fils du Très Haut Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père; il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n'aura pas de fin ». Marie dit à l'ange : « Comment cela se fera-t-il puisque je suis vierge ?» L'ange lui répondit : « L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très Haut te couvrira de son ombre; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu. (...) » Luc 1, 30-35.


Par Archimandrite Sophrony :

Le Nom de " Jésus " fut donné par révélation d’En- haut. Il provient de la sphère divine, éternelle, et n’est en aucune façon le produit de l’intelligence humaine, bien qu’il soit exprimé par un mot créé. La révélation est un acte, une énergie de la Divinité ; comme telle, elle appartient à un autre plan et transcende les énergies cosmiques. Dans sa gloire supraterrestre, le Nom de " Jésus " est méta cosmique. Lorsque nous prononçons le Nom du Christ, lui demandant de se mettre en relation avec nous, lui qui remplit tout, il prête attention à nos paroles, et nous entrons en un contact vivant avec lui. Comme Logos éternel du Père, il demeure avec lui dans une unité indivisible, et ainsi Dieu le Père entre par son Verbe en relation avec nous. Le Christ est le Fils unique et coéternel du Père, et c’est pourquoi il peut dire : Nul ne vient au père que par moi (Jn 14, 6). Le Nom de " Jésus " signifie " Dieu- Sauveur " ; dans ce sens, il peut être attribué à toute la Sainte Trinité, mais aussi à chacune des Hypostases séparément. Mais, dans notre prière, nous utilisons le Nom de " Jésus" exclusivement comme nom propre du Dieu- Homme, aussi est-ce vers lui que se dirige l’attention de notre intellect. En lui habite corporellement toute la plénitude de la Divinité, dit l’apôtre Paul (Col 2, 9). En lui se trouve non seulement Dieu, mais encore tout le genre humain. En priant par le Nom de Jésus-Christ, nous nous plaçons devant l’absolue plénitude et de l’Être premier incréé, et de l’être créé. Pour pouvoir pénétrer dans le domaine de cette plénitude de l’Être, nous devons le recevoir en nous de telle manière que sa vie devienne aussi la nôtre, et cela par l’invocation de son Nom en conformité avec son commandement.
Seigneur, Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur.
Celui qui s’unit au Seigneur n’est avec lui qu’un seul esprit (1 Co 6, 17).
Acquérir la Prière de Jésus signifie acquérir l’éternité. Aux instants solennels et pénibles entre tous où notre organisme physique se désintègre, la prière " Jésus-Christ " devient le vêtement de l’âme ; lorsque l’activité cérébrale s’interrompt et qu’il est déjà difficile de se rappeler et de prononcer toute autre prière, la lumineuse connaissance de Dieu procédant du Nom et intimement assimilée par nous ne pourra être effacée de notre esprit. Après avoir vu la fin de nos pères, morts en prière, nous avons la ferme espérance que la paix céleste qui dépasse toute intelligence nous enveloppera, nous aussi, pour les siècles. la personne humaine est animée d'un souffle. Mais s'il en est ainsi, c'est parce qu'il lui a été donné par Dieu. Dieu est source de vie et, pour la communiquer, la vie, il l'insuffle en nous. Que le souffle de l'homme et de la femme provienne de la source divine, cela implique que la vie, ici-bas, s'accomplit non pas dans le désordre, mais selon le plan de salut inscrit dans la volonté de Dieu. Le souffle de Dieu, c'est l'Esprit Saint qui accomplit l'œuvre de Dieu dans le monde. En d'autres termes, notre vie est portée par un sens, par une histoire dont la fin n'est ni le néant ni la désolation, mais un Royaume éternel où nous serons comblés de joie. Nous pourrions dire que le souffle de Dieu est la voie de salut qui nous est donné. Mais n'est donné que ce qui est librement reçu. Il est possible alors de refuser ce qui est déjà en nous. Dès lors, on s'engage dans la voie de la perdition associée à l'esprit mauvais. On choisit la mort dans la vie plutôt que la vie en dépit de la mort; le souffle qui s'éteint plutôt que celui qui pousse vers l'avant. Mais il n'en demeure pas moins que le souffle de Dieu est une force vitale qui pénètre les cœurs de tous et de toutes. Il n'attend qu'à être désiré pour qu'à travers nous soit transformé le monde dans la perspective d'une terre nouvelle, d'un Royaume qui vient.
Jésus, sauve-moi... Jésus-Christ, aie pitié,.
« La Prière de Jésus ne peut être considérée comme une simple oraison jaculatoire comparable à celles que la piété catholique recommande, encore que la méthode occidentale des " aspirations " puisse se rattacher au même filon traditionnel remontant aux Pères du désert. Mais la Prière de Jésus est inséparable d’une doctrine de la vie spirituelle que les chrétiens byzantins et slaves considèrent volontiers comme le coeur de l’orthodoxie : l’hésychasme ». La voie hésychaste repose sur un double fondement : la doctrine de la déification de l’homme dans le Christ telle que les Pères de l’Église grecque l’ont formulée, et l’enseignement pratique des Pères du désert sur la garde du coeur et la prière continuelle. (Archimandrite Placide Deseille)
Prière qui colonne obligatoirement l’agir humain.
Marc l’Ermite écrit :
" Ceux qui ont été baptisés dans le Christ ont reçu la grâce mystiquement, mais elle opère en eux dans la mesure où ils accomplissent les commandements... Quiconque a été baptisé dans la foi orthodoxe a reçu mystiquement toute la grâce. Mais il n’en obtient la certitude qu’ensuite, en exerçant les commandements3 ".
La " certitude " (plérophoria), l’" opération " de la grâce désignent ici l’aspect expérimental de la divinisation, le goût de Dieu et des choses de Dieu ; la " pratique des commandements " est depuis Évagre le Pontique le terme technique pour désigner l’ensemble de l’effort ascétique de l’homme, la coopération de sa liberté à l’oeuvre de la grâce. Diadoque de Photicé, utilisant la distinction fréquente chez les Pères entre l’" image " et la " ressemblance " de Dieu dans l’homme, décrit ainsi les deux temps de la divinisation :
" Par le baptême de la régénération, la sainte grâce nous confère deux biens, dont l’un surpasse infiniment l’autre. Elle nous octroie immédiatement le premier ; car elle nous renouvelle dans l’eau même et fait briller tous les traits de l’âme, c’est-à-dire l’image de Dieu, en effaçant en nous toute ride du péché. Quant à l’autre, elle attend notre concours pour le produire, c’est la ressemblance. Quand donc l’intellect a commencé de goûter, dans un sentiment profond, la bonté de l’Esprit- Saint, alors nous devons savoir que la grâce commence à peindre, pour ainsi dire, la ressemblance par-dessus l’image... ainsi donc, de jour en jour, notre homme intérieur se renouvelle dans le goût de la charité, et il trouve dans la perfection de celle-ci sa plénitude. " On peut aussi opposé l’aspect peccamineux de l’homme tel que le perçoit l’homme occidental a celle de N. Berdiaev qui comme Grégoire de Nysse fondent leur conception de la liberté sur la présence divine dans l’homme, idée centrale de la Patristique orientale. (N. Berdiaev) reprenant les écrits de Grégoire de Nysse « notre nature spirituelle existe selon l’image du Créateur, elle ressemble à ce qui est au - dessus d’elle :
Dans l’incognoscilité de soi-même elle manifeste l’empreinte de l’inaccessible.

Le visage est une fracture
Qui ne s’ouvre jamais que sur le visage d’un autre Visage

Il s’agit ni plus ni moins que d’humaniser et d’évangéliser, ce désir du plaisir moteur de la vie. Nous dit Saint Cassien de Marseille (CF Père Placide Deseille dans la spiritualité orthodoxe : les pages 212 213).
La maladie, celle qui incite à transformer la chambre en une cellule monacale est là pour nous dire autre chose; pour un Agir nouveau au moment où on ne peut plus courir derrière son ombre. Rien n’est plus libre qu’un homme attaché à des tuyauteries sur un lit.
Dieu n'a créé ni le mal, ni la mort, ni la souffrance. Dieu ne peut pas intervenir pour faire disparaître le mal, non pas par choix mais parce que comme nous Dieu possède ces propres limites : notre liberté. Cependant, je crois que Dieu est sans cesse à mes côtés souffrant avec moi. Souffrant avec tout ceux et celles qui souffrent. La maladie oblige à l’absolu et non plus au relatif qui encombre notre vie, elle devient temps privilégié de la prière. Seul compte l’instant. Cet instant où le regard du voisin de chambre en fin de vie approche au mieux la Déification de l’homme, quand son cœur bat au rythme de la prière du coeur. Bien sur ce corps délabré n’est pas esthétique. Mais combien est beau ce regard. Que nous dit Denys l’Aréopagite « il nous parle d’une Cause essentielle, d’ ‘on ne peut rien affirmer ni rien nier, il ne reste plus rien. C’est bien, quand un corps n’est plus à voir que l’on peut percevoir l’indicible beauté du regard. Il n’est pas esthétique, il est beau. Qui requiert, au Néant, au Rien qui s’ouvre.
- Que le « oui » ou » le non » devant cette pensée difficilement pensable de l’Infigurable. (CF. P. CL. Récamier, p. 17) s’impose. Dire oui à un Amour que l’on ne peut imaginer. Ce moment où ne pense pas Dieu, on le vit. En clinique, c’est une nuit de météores qui fait que l’océan déborde, même si tout reste vague dans cet immense décor d’une salle de réanimation. Je reste fixé à ce point qui illumine et cisaille la perfusion. Ce lien qui m’enchaîne, mais retient mon âme et mon corps. Tout est chair, respiration, présence …il faut se contenter de découvrir, mais se garder d’expliquer. Tout est vrai, tout recommence, ça vit, la mémoire, ça palpite, ça vous griffe le cœur. La souffrance s’ouvre vers le sens, c’est à dire qu’elle n’à aucun sent que le vide de l’abandon.
- Que les plus beaux poèmes abandonnés de la terre Claise pour devenir chant du monde ne sont pas nécessaire devant ce visage du Christ souffrant. Seul un face à face de silence, pour ne rien dire d’autre qu’être là pleinement. Plus rien là n’est indispensable devant la divinité –souffrante. Là où chaque mot est accomplissement du vide
- Réduction géographique
- A l’extérieur d’un corps
- Et dire sans bruit de bouche
- Ni bruit de la langue
- Ni bruit de syllabe
- Pour pouvoir dire le vide.
- Le silence est la seule prière qui convienne.
- L’intimité a besoin du silence.
- L'homme, essentiellement viateur, n'est chez soi qu'en chemin vers… (C’est là, toute la théologie du pèlerin russe, l’homme en marche. L'homme, fondamentalement lutteur, ne trouve sa plénitude qu'à travers les affrontements. C'est l'antagonisme qui nourrit son être. Ce sont les négations qui travaillent son devenir. Ce sont les ruptures qui ouvrent son accomplissement. - L'existence mystique est une existence chahutée. Elle n'est que par continuelle provocation de l'Esprit Saint. Totale militance. Incessant dépassement. Car il n’y a pas sous le ciel d’autre Nom donné aux hommes par lequel il nous faille être sauvés (Ac 4,12).
-
-
-
- Il était une fois, dans une clinique deux hommes :
L’un ne pouvait se lever et passait des heures et des heures allongées sur le dos avec pour tout horizon le plafond blanc, aseptisé de la clinique pour une mort annoncée, programmée.
L’autre pouvait s’asseoir sur un fauteuil et tous les jours aux mêmes heures, il passait un temps merveilleux à d’écrire pour l’homme couché les couleurs du parc, les enfants jouant sur un bassin, les petits bateaux voguant au gré du vent.
Les couleurs infinies d’un jardin aux mille fleurs d’un hiver avisé.
Et, l’autre toujours allongé sur le dos se remettait à vivre.
Puis, un jour, un matin où un soir peu importe, l’homme assis mourut.
L’homme allongé demanda à l’infirmière de le mettre a la place de l’homme assis. Puis longuement et lentement, péniblement se leva, alla s’asseoir devant la fenêtre et découvrit un mur.
Il appela l’infirmière pour lui demandait une explication. Votre voisin était
Aveugle, il ne pouvait même pas voir le mur.
Quelques fois, Le Christ est cet aveugle.
Dans son ultime aboutissement, cette prière nous unit entièrement au Christ. Néanmoins l’hypostase humaine n’est pas anéantie, ne se dissout pas dans l’Être divin comme une
goutte d’eau dans l’océan. La personne humaine est indestructible dans l’éternité. JE
SUIS, Je suis [...] la vérité et la vie, Je suis la Lumière du monde (Jn 8, 58 ; 14, 6 ; 9, 5).
L’Être, la Vérité, la Lumière ne sont pas des concepts abstraits, des essences impersonnelles, " QUOI ", mais " QUI ". Là où il n’y a pas de mode personnel de l’être, il n’y a pas non plus de vivant ; pas plus qu’il ne saurait y avoir là, ni bien ni mal, ni lumière ni ténèbres. Là, d’une manière générale, rien ne peut exister : Sans lui rien ne fut de ce qui existe. En lui était la vie (Jn 1, 3-4).
Seigneur, Jésus-Christ, Fils du Dieu vivant, aie pitié de nous et de ton monde.

Dieu emplit notre bouche de rire
et nos lèvres de chansons
(Psaume 126, 2)
- Aix en Provence
- Le 24.10.03
- Richard Giraud

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La prière du coeur

Message non lu par muirgheal » mar. 07 sept. 2010, 12:39

Je me renseigne sur la prière du coeur et je viens de lire ceci sur ce forum, dans un autre fil.
archi a écrit :Il y a des catholiques de tradition byzantine (en plus des orthodoxes). La prière de base, dans la tradition byzantine, c'est la prière du coeur, qui consiste à invoquer inlassablement le nom de Jésus à l'aide d'une courte phrase. L'Ave ne fait pas partie de cette tradition. Et un catholique romain peut très bien utiliser la prière du coeur, source de grâces extraordinaires, pour sa prière personnelle, même si il est sans doute préférable de pratiquer dans le rite byzantin pour approfondir pleinement cette forme de prière.
Y a-t'il des catholiques qui pratiquent cette prière ? Et comment la pratiquent-ils ?
Pouvez-vous m'en dire un peu plus sur cette prière ?

Merci,
Tu as frappé à la porte de mon cœur !
J'ai entendu ta voix et je t'ai ouvert.
Allume en mon cœur un grand feu de joie.

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Re: La prière du coeur

Message non lu par lmx » mar. 07 sept. 2010, 13:38

Bonjour

Je crois que la prière du coeur s'appelle chez les orthodoxes "hesychasme" qui veut dire en grec, paix , silence . C'est une technique de prière qui consiste à répéter "Seigneur Jésus ayez pitiez de moi" en plaçant bien sa respiration mais comment je ne sais pas. En tout cas c'est plutôt ancré dans la tradition orthodoxe.
J'ai entendu dire que le livre "Récits d'un pèlerin russe" et la "Philocalie" en parlait mais je ne les ai pas lus.

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Re: La prière du coeur

Message non lu par etienne lorant » mar. 07 sept. 2010, 16:50

Il est également possible de prier constamment le Seigneur par la simple attention.
Ok, je dis "simple attention", mais il s'agit d'une attention soutenue, du regard intérieur tourné vers le Christ de manière régulière, ainsi que la fleur de tournesol. C'est une attention d'humilité, c'est-à-dire de simple vérité, comme l'enfant regarde sa mère; de supplication, dans les moments où l'on se sent perdu, incapable de répondre et dans la souffrance; et une attention qui préserve, rend grâce, accepte, remet une offence, invoque la miséricorde...

En voiture, je fais souvent le tour d'une partie des boulevards de ceinture. Et je croise un hôpital suivi des murs d'une prison. Souvent, sans formuler un seul mot, j'ai invoqué la miséricorde pour les malades et les prisonniers. Un jour cependant, je me suis senti "repris": il fallait invoquer la miséricorde non seulement pour les malades et les prisonniers, mais aussi pour le personnel soignant de l'hôpital, ainsi que pour les gardiens de la prison... évidemment, me direz-vous, mais je n'y avais pas songé !
«Cela ne vaut pas seulement pour ceux qui croient au Christ mais bien pour les hommes de bonne volonté, dans le cœur desquels, invisiblement, agit la grâce. En effet, puisque le Christ est mort pour tous et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’ëtre associés au mystère pascal ». ( Gaudium et Spes, le Concile Vatican II )

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Re: La prière du coeur

Message non lu par lmx » mar. 07 sept. 2010, 17:10

des articles intéressants sur le sujet

http://www.pagesorthodoxes.net/coeur/coeur-c.htm
http://www.pagesorthodoxes.net/coeur/go ... priere.htm
La forme extérieure de la Prière est très simple : elle consiste à invoquer aussi fréquemment que possible le saint Nom de Jésus, habituellement dans une formule rappelant les professions de foi de saint Pierre (Mt 16,15) et de Marthe (Jn 11,27), et la prière du publicain (Lc 18,13) : "Seigneur, Jésus Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur." Son essence spirituelle, comme l'expriment constamment les Pères spirituels, est "la descente de l'intelligence dans le cœur" : ce que je comprends avec mon intelligence, je le saisis, je l'accepte et je l'embrasse avec tout mon être - avec mon cœur, dont le cœur physique est le symbole. C'est ainsi que la Prière devient véritablement la "Prière du cœur".

Par la purification progressive de la pensée et la mémoire constante du Seigneur, ceci aboutit, selon les starets, à l'illumination de l'esprit par la grâce divine et à la prise de conscience de l'inhabitation mystique du Saint-Esprit. Bénéficiant d'un certain degré de purification, l'hésychaste peut aussi recevoir le don de la prière pure - la prière "spirituelle" ou contemplative - et de la prière permanente : Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son Fils qui crie : "Abba, Père !" (Ga 4,6). La prière ininterrompue doit être l'idéal de tout chrétien, suivant l'exhortation de Saint Paul : Priez sans cesse (1 Th 5,17).
Une certaine technique corporelle a été pratiquée et recommandée par les maîtres de cette Prière : l’immobilité, la respiration régulière, la fixation des yeux sur le " coeur " etc. (Saint Ignace de Loyola proposait des conseils assez semblables). Ces exercices " physiques " n’étaient permis qu’à ceux qui avaient pour les aider un directeur expérimenté. Tous les Pères ont insisté sur le fait que ces méthodes ne sont que des " béquilles " servant de support au corps et à l’âme, tandis que l’on acquiert le contrôle de soi-même. Leur but est de purifier le corps et d’en faire un instrument de prière. Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? (1 Co 3,17).

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Re: La prière du coeur

Message non lu par archi » mar. 07 sept. 2010, 20:29

Les Récits d'un Pèlerin Russe sont sans doute l'introduction la plus facile à cette forme de prière.

Un catholique peut très bien réciter cette prière (qui est d'une formulation simplissime...) et il semblerait que certains le font couramment. Personnellement, j'ai essayé de le pratiquer à la façon du Pèlerin russe, tout le temps... et c'est dur! Parce que l'esprit vagabonde aussitôt. Ce que je trouvais difficile avec le Rosaire (où il y a au moins des repères qui obligent à se recentrer l'esprit à la fin de chaque dizaine) s'est avéré encore plus dur avec la Prière de Jésus. J'ai abandonné et je suis revenu au chapelet (le Je Vous Salue Marie est à mon avis, d'ailleurs, en quelque sorte l'équivalent occidental de la Prière de Jésus, qui ajoute au nom de Jésus celui de Marie). Par contre, j'ai fini par prendre l'habitude de répéter plusieurs fois la Prière de Jésus dès que je veux me confier à Lui.

Il n'est pas facile, pour quelqu'un qui vit dans la tradition occidentale, de s'imprégner de la spiritualité propre aux rites orientaux et qui s'est développée dans le cadre liturgique de l'Eglise byzantine.

N'oublions pas que pour la prière, nous avons aussi des trésors en Occident.

Reste que la spiritualité hésychaste, prise dans son ensemble, est vraiment, à mon avis, la plus haute forme de spiritualité chrétienne (je ne la découvre que très progressivement).

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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Re: La prière du coeur

Message non lu par Anne » mer. 08 sept. 2010, 3:35

La prière de Jésus peut être dite en tous temps. On la répète à mi-voix ou intérieurement, dans un moment de recueillement, les yeux fermés. Pour les commençants, dix minutes deux fois par jour suffiront. On peut aussi la dire durant les activités de la journée. Cela suppose que l’esprit soit assez libre pour qu’il soit attentif à ce que disent tes lèvres.

On prononce la première partie en inspirant, puis l’autre en expirant, selon ce qui nous convient. Par exemple : inspire, « Seigneur Jésus, Fils de Dieu »; expire, « Aie pitié de moi, pécheur ». Chaque expiration approfondit la détente de l’être. On peut changer l’alternance de la formule, pour une version plus appropriée à ce que l’on vit, ou prendre une autre formule, comme celle qui ouvre l’office des Vêpres : « Dieu, viens à mon aide, Seigneur à notre secours. » Cette prière de pauvreté était pratiquée par les moines du désert.
[…]
La formule peut paraître un peu longue pour certains et nous pouvons avoir de la difficulté à la rythmer avec notre souffle. C’est mon cas. On peut alors dire seulement « Jésus Christ », « Seigneur Jésus », « Viens, Seigneur Jésus », ou plus simplement encore « Jésus ». À chacun de trouver la formule qui lui convient.
Jacques Gauthier, Prier avec son corps, chez Novalis/Presses de la Renaissance, pp. 87-89
"À tout moment, nous subissons l’épreuve, mais nous ne sommes pas écrasés;
nous sommes désorientés, mais non pas désemparés;
nous sommes pourchassés, mais non pas abandonnés;
terrassés, mais non pas anéantis…
".
2 Co 4, 8-10

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Re: La prière du coeur

Message non lu par cracboum » mer. 08 sept. 2010, 8:49

L'etat naturel du coeur profond est l'adoration, mais tout concourt à l'en empêcher et je n'ai pas encore bien compris pourquoi.
L'unité de la souffrance et de la béatitude est le secret de Dieu, comme le don de sagesse surpasse celui d'intelligence. P. Varillon
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Re: La prière du coeur

Message non lu par cracboum » mer. 08 sept. 2010, 13:53

Plus précisément, quand la conscience va dans le coeur profond, elle y trouve Dieu (" Retirez vous dans le secret, le Père vous le rendra"), pourquoi alors est-ce si difficile, même pour ceux qui ont fait l'expérience ?
Comment articuler conscience et coeur profond ?
La conscience qui s'absorbe dans le coeur profond opère une enstase qui, de soit se mute en extase puisqu'elle y trouve Dieu, ou en contemplation qui est la forme épurée de l'extase. Je rejoins l'etat permanent de contemplation dont parle Etienne Lorant.
Le coeur profond est si intimement uni à Dieu que la conscience ne peut les distinguer. En fait, si la foi atteint Dieu dans son ipséité, la contemplation le possède à raison de la capacité de son coeur profond, plus précisément de la nature d'icelui, de sa vocation éternelle, du nom trés secret de sa vocation, de son appel à la Vie, à l'Amour.
Le coeur profond, tel qu'il est perçu par la conscience qui s'y absorbe, est le coeur éternel, celui qui est déjà sauvé, qui a déjà donné sa réponse à Dieu et qui précède la naissance de la conscience.
Il semble que le coeur profond soit voué à l'adoration et la conscience à la louange, comme dans la vie trinitaire les trois sont Un et autres.
Quand la conscience est parfaitement absorbée dans le coeur profond, ce qui ne peut se faire qu'au terme du parcourt, et surtout au Ciel, elle ne s'en distingue plus, comme fondue dans ce brasier d'Amour, dans l'Un, puis elle renaît, unie au processus d'éternelle naissance du Verbe, plus embrasée de Dieu, le louant et le glorifiant toujours plus, et cela incessamment, éternellement. Ainsi de notre union à la vie trinitaire, adoration-louange, comme un coeur qui bat, diastole-sistole (Image empruntée à Louis Bouyer).
L'unité de la souffrance et de la béatitude est le secret de Dieu, comme le don de sagesse surpasse celui d'intelligence. P. Varillon
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Re: La prière du coeur

Message non lu par cracboum » mer. 08 sept. 2010, 14:26

La prière du coeur, le chapelet, l'oraison carmélitaine, la méthode St Ignace, les pratiques venues d'Orient, sont à prendre ou à laisser selon qu'elles nous conviennent ou non, qu'elles nous conduisent ou non à la contemplation, ce ne sont que des techniques que peuvent égaler une vie difficile et même facile, et n'importe qu'elle situation, chacun. fait son chemin et paix aux hommes de bonne volonté.
L'unité de la souffrance et de la béatitude est le secret de Dieu, comme le don de sagesse surpasse celui d'intelligence. P. Varillon
Ne méprisez pas vos pieds

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