Toute l'hypocrisie et le scandale du monde

[etienne lorant]

Evangile de Jésus-Christ selon saint Luc 11,47-54.

Jésus disait aux docteurs de la Loi: "Malheureux êtes-vous, parce que vous bâtissez les tombeaux des prophètes, alors que vos pères les ont tués. Ainsi vous témoignez que vous approuvez les actes de vos pères, puisque eux, ils ont tué les prophètes, et vous, vous bâtissez leurs tombeaux.
C'est pourquoi la Sagesse de Dieu elle-même a dit : Je leur enverrai des prophètes et des apôtres, ils tueront les uns et en persécuteront d'autres. Ainsi cette génération devra rendre compte du sang de tous les prophètes qui a été versé depuis la création du monde, depuis le sang d'Abel jusqu'au sang de Zacharie, qui a péri entre l'autel et le sanctuaire. Oui, je vous le déclare : cette génération devra en rendre compte. Malheureux êtes-vous, docteurs de la Loi, parce que vous avez enlevé la clé de la connaissance ; vous-mêmes n'êtes pas entrés, et ceux qui essayaient d'entrer, vous les en avez empêchés. » Après que Jésus fut parti de là, les scribes et les pharisiens se mirent à lui en vouloir terriblement, et ils le harcelaient de questions ; ils étaient à l'affût pour s'emparer d'une de ses paroles.

La clé de la connaissance, pour moi, c'est l'Amour. Si on retire l'Amour, c'est comme retirer la pierre angulaire d'une voûte: tout s'écroulera aussitôt. Si, au-dessus des catégories de bien et de mal, des commandements et des interdits, on ne place pas l'Amour, alors on peut pratiquer une foi d'apparences, mais à l'intérieur on n'a pas été pénétré, on n'a pas éprouvé quel insondable mystère est contenu dans le verbe: aimer. Or,si l'on n'a pas rencontré l'Amour crucifié, on finira toujours par lapider la femme adultère; on éludera l'aumône avec des arguments incontournables; on entretiendra ses vices (mot qui a disparu du langage !) en déclarant qu'il y a dans la séduction, le vol, l'assassinat, l'avarice... des formes d'art dont l'Histoire est remplie.

Et finalement, hors de l'Amour, on tombe tout droit dans la folie, avant de glisser dans la mort. La sagesse du monde ne montre-t-elle pas sa vacuité lorsqu'elle construit des tombeaux pour les prophètes qu'on n'a pas voulu entendre ? C'est que font les Juifs du temps de Jésus, mais c'est aussi ce que pratiquent les hommes politiques, lorsqu'ils instituent le "devoir de mémoire" : on emmène les jeunes visiter Auschwitz, mais on oublie les centre fermés pour illégaux et la façon dont est morte Sémira Adamu lors d'un retour "forcé" vers l'Afrique. (*)
Malheureux docteurs de la Loi qui n'ont pas reconnu le Christ... Mais j'ajouterai aussi: malheureux ceux qui ont le devoir de dénoncer les dérives suicidaires des sociétés modernes et qui n'osent pas le faire. Malheureux ceux qui savent et qui se taisent. Malheureux ceux qui refusent de se remettre en question. Malheureux les nouveaux princes de ce monde et tous ceux qui s'imaginent pouvoir impunément mettre leur conscience dans leur poche ! Le réveil sera amer !





(*)Le décès de Semira Adamou (2003) repose les questions du traitement de l'immigration, des sans papiers, des expulsions et surtout du respect de la dignité humaine. Une toute jeune africaine,sans papier, a été emmenée de force dans un avion qui devait la ramener dans son pays quelle avait fuit pour ne pas devoir épouser de force un homme de 65 ans. Pour l'empêcher de crier et de protester les gendarmes ont appliquer une "procédure habituelle" prévue dans ce cas là et l'ont étouffée avec un coussin. La jeune femme a perdu connaissance, puis est entrée en coma et est décédée.