Valentin a écrit : ↑sam. 23 déc. 2017, 0:56
Socrate d'Aquin a écrit : ↑lun. 02 oct. 2017, 13:21
Vous pouvez être cent fois plus vertueux que votre voisin, et vivre cependant dans l'indigence tandis que celui-ci est riche à millions. Pour autant, ce n'est pas un argument valable en faveur de la dépravation morale.
Pardonnez-moi, Socrate d'Aquin, nous n'avons pas encore été présentés et cela m'embête un peu de vous « tomber dessus » comme ça !
Mais je ne peux pas rester silencieux lorsque je lis des choses pareilles.
Je sais bien qu'il s'agit d'une comparaison, que l'idée que vous souhaitez exprimer est un peu moins brutale.
Mais enfin les mots ont un sens, et je suis peiné par ceux que vous avez choisis pour décrire l'Église à laquelle j'appartiens. Considérez-vous vraiment les orthodoxes comme des dépravés ? Des corrompus, des pervers (c'est le sens du mot « dépravation ») ?
Considérez-vous vraiment l'Église latine comme « cent fois plus vertueuse » que l'Église grecque ? Je dois dire que j'ai souri, malgré mon affliction, en lisant cela ; mais d'un sourire amer. C'est une affirmation objectivement grotesque. Tous les catholiques de bonne foi seront d'accord là-dessus.
Valentin, votre zèle est appréciable, mais vous auriez dû relire le message du cher Socrate. Il ne faisait qu'employer un exemple parallèle sur les notions de richesse et vertu pour illustrer la logique de son argument. Il n'a pas accusé votre Eglise d'être un repère de dépravés !
Ce qu'il dit (et j'approuve), c'est que même si votre Eglise semble extérieurement mieux se porter que l'Eglise catholique, elle est en réalité en une situation bien pire, bien que cela soit moins apparent.
L'Église romaine a connu un schisme au tournant des XIVe et XVe siècle, quand pendant quarante ans il y eut deux, voire trois papes. L'avez-vous oublié ?
Et que dire du schisme protestant, cent ans plus tard ? C'est un détail ?
Les Anglicans ne sont pas des schismatiques ?
La
Petite Église, issue du refus du Concordat, et qui rassemblait 100 000 fidèles au début du XIXe siècle, n'est-elle pas née d'un schisme ?
Les
vieux-catholiques, ayant refusé le dogme de l'infaillibilité pontificale, ne sont-ils pas des schismatiques ?
En laissant de côté le cas de la FSSPX, qui n'est pas un schisme à proprement parler, il me semble que vous comprenez mal ce que veut dire Socrate, vu la plupart des exemples que vous présentez. Les protestants et tous ceux que vous citez après sont dans une situation comparable à celle de vos vieux-croyants ; coupés clairement et nettement de votre communion pour hérésie ou schisme.
Ce que Socrate pointe du doigt, ce sont les situation ecclésiologiquement absurdes telles que furent celles, par exemple, de l'Eglise bulgare durant trente ans au XIXe siècle ; en communion avec Moscou, excommuniés par Constantinople, sans que ces deux derniers patriarcats aient rompu la communion.
Ce genre de situation est théoriquement possible en ecclésiologie catholique,
mais elles sont théoriquement aisément solubles par le recours à l'Eglise qui gouverne en tête des autres Eglises et préside à la charité, à savoir, l'Eglise de Rome. Si une telle situation se présente dans l'Eglise catholique, l'Eglise de Rome a pour rôle de discerner et de prendre parti, comme elle l'a fait de nombreuses fois au cours du premier millénaire. Un exemple type, qui a donné à Saint Jérôme l'occasion d'écrire en termes quasi-ultramontains sur la primauté de Rome, était le schisme mélétien à Antioche, où il y avait trois prétendants catholiques au trône d'Antioche.
C'est là la différence avec l'Orthodoxie ; le cas bulgare s'est éternisé sur deux générations, faute d'arbitre ecclésiastique, et il a fallu que Constantinople consente à réintégrer la Bulgarie dans sa communion, et à reconnaître le patriarcat bulgare (contre lequel il avait jeté l'anathème pour l'ethnophylétisme). Et ce genre d’événements est possible à tout moment.
Si ce genre de bizarreries ecclésiologiques se produit chez vous, et que le dialogue fraternel a échoué, on n'a pas d'autre option que s'asseoir et attendre. Chez nous, on peut faire appel au Siège qui veille sur la paix et la prospérité des saintes Eglises de Dieu.
Je concède que le Grand Schisme d'Occident, tout comme toute crise impliquant un antipape, est une difficulté historique ; cependant il a bien fini par se résorber, et était quand même un fruit pourri de la corruption de l'Eglise médiévale. Sa résolution par le Concile de Constance est intimement liée à l'élection d'un évêque de Rome incontesté, et la validation dudit Concile par ce même évêque de Rome, ce qui est une démonstration assez admirable de la faculté qu'a la papauté à retomber sur ses pattes.
Je vous accorde volontiers que l'Église romaine dispose d'une administration centralisée et d'un monarque absolu en la personne de l'évêque de Rome, ce que refusent précisément les Églises de la Communion orthodoxe – pour des raisons qui me paraissent personnellement excellentes et qui doivent en tout cas être respectées par toute personne de bonne foi.
Je ne vous accorde pas que le pape soit un monarque absolu, quoiqu'en dise la polémique orthodoxe.
Je respecte vos raisons, mais elles ont montré leurs fruits. Les Eglises orthodoxes n'ont guère de moyen effectif de se mettre d'accord sur des polémiques liées à la foi, sur tout ce qui déborde des définitions des 7 conciles ; l'hésychasme étant une exception guère répétable depuis la chute de Byzance. Aujourd'hui, dans la communion orthodoxe, il existe, par exemple, plusieurs positions mutuellement incompatibles sur la question extrêmement grave du mode de réception des hérétiques et schismatiques dans l'Eglise, et, par extension, de la validité des sacrements hors de la communion visible de l'Eglise orthodoxe ; ces positions ont varié de multiples manières au sein d'un même patriarcat depuis le Moyen-Âge. En ce moment, les Grecs rebaptisent généralement les catholiques se convertissant à l'Orthodoxie, mais les Russes les chrisment simplement (ce qui est une nouveauté curieuse). Or, cette controverse a été réglée en Occident au IIIe siècle, et n'a pas été réveillée depuis dans l'Eglise catholique, orientale ou occidentale. Comment prendre au sérieux une Eglise qui ne sait même pas si vous êtes validement baptisé ou pas ?