Bonsoir !
Même si la cause première n'a pas de sens, si on considère que le créateur absolu est hors de toute temporalité. La notion de temporalité est humaine, Dieu a créé le temps comme toute chose, il n'y a donc pas de cause première, il me semble.
Quand on parle de "cause première" en philosophie, on est dans l'ordre de la logique, de la
causalité justemment, pas de la temporalité. La nécessité d'une cause première n'induit pas qu'elle soit temporelle.
Pourquoi l’hindouisme vous parait peu crédible en dépit de catholicisme? Cette question m'interpelle. Si vous étiez né dans une famille Indienne traditionaliste et baigné dans cette religion dès votre plus tendre enfance, le regard que vous porteriez sur celle-ci ne serait-il pas radicalement différant? Pardonnez-moi, mais je doute de la sincérité de vos affirmations quand vous me dite trouver le catholicisme plus vraisemblable. Il me semble que vous soyez influencé.
Ah mais je ne prétend aucunement à l'objectivité parfaite ; la chose n'existe pas de toute façon. Je suis né dans une famille culturellement catholique, qui m'a donné des rudiments de religion qui m'ont profondément impactés pendant mon enfance ; je suis né en Occident, dans un pays qui a été modelé par 1500 ans d'histoire intellectuelle chrétienne ; je suis un catholique pratiquant qui évolue quotidiennement dans les shémas de la religion catholique. Prétendre à l'objectivité serait un mensonge ; il est évident que je ne suis pas prédisposé à accepter les prétentions à la vérité d'une doctrine née sur les bords de l'Indus, à l'autre bout du monde, et façonné par une culture que je connais mal.
Maintenant, une chose est l'attitude instinctive, autre est la question de l'action de la raison. La première chose qui me vient à l'esprit lorsqu'il s'agit de comparer la rationalité du Catholicisme et de l'Hindouisme est qu'au fond, c'est là en soi une question qui est
déjà Catholique. Ce que je veux dire par là, c'est que le Catholicisme a toujours été une religion façonnée par l'exercice de la raison dans sa constitution et son histoire. Le Nouveau Testament est pétri de références à la philosophie grecque ; les premiers Pères de l'Eglise étaient des apologètes qui s'efforcaient de défendre de façon systématique les différents points de la doctrine chrétienne ; les théologiens scholastique passaient leurs journées dans de longues
disputatio à débattre de la nature de l'Être, des possibles articulations du dogme de la présence réelle et de la relation de l'Essence à l'Existence ; le Christianisme moderne a produit Leibniz, Descartes, Kant et Pascal ; et aujourd'hui, les problématiques liés à l'athéisme contemporain ne cessent de produire des sommes sur les mérites relatifs du théisme chrétien et de l'incroyance moderne à fonder la morale, la cohérence de l'être, la possibilité du sens, et la raison elle-même.
Cette question des fondations rationelles d'une croyance, naturelle pour le Christanisme traditionnel, ne se pose absolument pas de la même façon dans une religion comme l'Hindouisme ; cette dernière est avant tout un ensemble de rituels, de traditions et de récits qui sont hérités et se vivent
parce qu'on a toujours fait comme cela. Il n'y a d'ailleurs pas pensée systématique Hindou ; et certainement pas d'unité doctrinale ; on parle plus d'une culture religieuse que d'une religion au sens Abrahamique du terme. Il n'y a pas d'apologétique Hindou défendant l'existence de tel ou tel Dieu, pas de théologie systématique unissant les différentes croyances.
Ce n'est certainement pas pour dire qu'il n'y a pas d'usage Hindou de la raison - il y
a une philosophie traditionnelle indienne. Mais la préoccupation de savoir si telle ou telle croyance est vraie ou raisonnable, de ce que je peux en voir, n'est pas vraiment un fait Hindou.
Or, il me semble que lorsque l'on se lance dans de grandes affirmations sur la nature de l'existence, c'est mieux de chercher à ancrer ces dernières dans une réflexion rationnelle. Or si la tradition catholique est remplie à craquer de questionnements sur la foi et la raison, la nécessité de la révélation pour fonder une morale, l'existence de Dieu et ses conséquences métaphysique, il me semble qu'il n'existe pas d'équivalent Hindou avec lequel on pourrait établir une comparaison.
Je veux bien croire en la réincarnation et au Karma, mais qu'est ce qui me prouve qu'il est raisonnable d'y croire, et que ce ne sont pas des hypothèses à éliminer au fil du rasoir d'Ockham ?
Plus spécifiquement, on pourrait poser beaucoup d'autres questions bien entendu. Toutes les formes d'Hindouisme acceptent plus ou moins le panthéisme comme hypothèse métaphysique ; or le panthéisme pose beaucoup de problèmes philosophiques, et en premier lieu celui de rendre raison de la nature fondamentalement diverse du monde. Bien sûr je ne prétend pas avoir épuisé les discussions philosophiques sur la nature du divin, mais l'hypothèse de la création ex-nihilo avec un Dieu comme acte d'être résout un très grand nombre de ces problèmes dans lesquels le panthéisme est empatouillé.
De la même manière, je crois qu'un certain nombres d'éléments qui tendent à corroborer la révélation chrétienne - la crédibilité du récit évangélique, certains miracles, etc... Tendent, par voie de contradiction, à éliminer l'hypothèse métaphysique Hindoue.
De toute évidence il y a un tas de subtilités et de contradictions entre les religions. C'est normal, chaque pays a une structure différente, le monde est ainsi fait, nous avons tous une histoire qui façonne notre nation. Mais fondamentalement, les religions n’enseignent-elle pas toutes la mêmes valeurs? L'amour, le respect de son prochain, l'au delà, le/les dieu/x qu'il faut craindre ou vénérer. En regardant dans l'histoire j'ai l'impression que c'est le cas. Je suis loin d'être un expert, mais du peu que j'en ai observé,j'ai remarqué que les religions sont toutes pleines de bonnes intentions.
Ce qui est intéréssant, c'est ce que vous mettez en avant pour parler de l'existence d'une base commune aux religions est déjà teinté de Christianisme. Ce que je veux dire, c'est que citer la morale "l'amour, le respect de son prochain" comme au coeur du phénomène religieux est une idée très abrahamique. Beaucoup de religions, comme les animismes du monde, le polythéisme de l'ancien monde, une bonne partie de l'Hindouisme, ne font aucun lien entre religion et morale. La spiritualité et l'éthique sont des domaines qui ne sont liés que dans certaines configurations. Et même parmis celle-là, certaines religions comme le Bouddhisme Theravada (le Mahayana est un cas plus complexe) ne voit dans l'action morale qu'un moyen vers une fin plus éleve (la disparition de la souffrance individuelle). Plus crucialement encore, le fait de citer l'amour en premier, comme la valeur la plus importante, est typiquement chrétien. C'est le Christianisme qui enseigne que Dieu est Amour. L'Islam, par exemple, ne dit pas cela. Allah est un noble seigneur, juste et miséricordieux ; mais il n'est pas substantiellement amour dans le sens que les Chrétiens donnent à ce mot.
En tout cas je ne crois pas pouvoir (ni, au demeurant, vouloir) vous fournir des réponses pré-machées sur tout ces grands sujets. Ils sont fondamentaux, et méritent qu'on s'y penche avec rigueur. Je ne peux que vous inviter à vous faire votre propre avis ! Donnez-vous les moyens d'y répondre : lisez, pensez !
D'un point de vue plus proprement spirituel et chrétien, peut-être que Dieu désir vous faire quitter un christianisme simplement hérité dépourvu de questionnement à un christianisme réfléchi et conscient de lui-même. Votre petit commentaire du début me fait me demander, j'espère sans offense, à quelle point le catholicisme est - ou était - chez vous quelque chose de personnel, de vécu dans l'intérieur de l'âme, de pensé. La grande phrase de Tertullien demeure "on ne naît pas chrétien, on le devient !". On ne peut pas juste hériter de la foi ; il y a un moment ou il faut se poser la question de savoir ce qu'elle est, de se demander si elle mérite qu'on la place au centre de sa vie par un acte de la volonté.
Bonne chance sur ce chemin ! Il est fascinant. Que votre choix soit libre, et qu'il soit juste.
Dieu vous bénisse,
Héraclius -