Bonjour Yassine
Hortus.Conclusus a écrit :A aucun moment je n'ai eu l'intention de mal agir. Reste à préciser qu'au moment des faits j'avais le désir de baptême, et il n'était pas possible de le recevoir. Les circonstances ne le permettent pas.
Je suis conscient des circonstances, c'est pourquoi j'ai commencé par dire que votre cas est compliqué.
On m'a tantôt parlé de baptême de désir, mais avec le temps, j'ai fini par perdre ce désir et me persuader que la foi, la grâce et le salut ne sont pas forcément distribués par l'Eglise, et qu'on peut au fond se passer de sa médiation et être pleinement chrétien. D'ailleurs, il y'a une multitude de confessions chrétiennes, chacune se réclame de la vérité à l'exclusion des autres.
Votre cheminement est tout à fait compréhensible, il est même très humain. C'est là quelque chose de très bien connu en psychologie : c'est ce qu'on appelle la résolution d'une dissonance cognitive. Vous aviez le désir du baptême, mais vivez dans l'impossibilité de le demander. Cela crée une forte tension mentale, qui ne fait qu'augmenter avec le temps, jusqu'à ce que vous trouviez un moyen de la résoudre : nous recherchons tous à ce que notre vie effective soit cohérente à nos attentes.
Lorsque procéder à un changement effectif dans nos actes est difficile, on est souvent amené à évoluer dans nos attentes. Puisqu'il vous est difficile de demander le baptême, vous avez trouvé un raisonnement qui vous amène à penser que vous pouvez vous en passer, et ainsi vous retrouver une certaine paix d'esprit.
C'est là tout à fait normal.
Ce n'est pas à moi de vous dire quoi faire à partir de votre situation présente : je n'ai aucune envie de jouer avec votre vie en restant assis tranquillement derrière mon écran d'ordinateur.
Face au risque d'erreur, je me suis abstenu de faire un choix et finalement décidé de demeurer dans l'état où le Seigneur m'a visité, en tous cas jusqu'à ce que j'arrive à y voir plus clair.
Il y a certes beaucoup de confessions chrétiennes. Elles ont entre elles des différences plus ou moins profondes, mais elles ont aussi des choses sur lesquelles toutes sont d'accord. Parmi cela, toutes reconnaissent la nécessité du baptême. Pas forcément pour les mêmes raisons théologiques, mais le résultat reste qu'il faut être baptisé.
Je vous invite à réfléchir à cela, et puis nous verrons ce qui peut être fait. Vous avez déjà communié en France : les circonstances sont différentes selon que vous pourriez revenir en France, même pour un séjour assez bref, ou si vous ne pouvez pas quitter le Maroc.
Par ailleurs, des déclarations comme "hors de l'Eglise point de salut" ou "celui qui n'a pas l'Eglise pour Mère ne peut avoir Dieu comme Père" n'ont fait qu'augmenter mes réserves vis-à-vis du catholicisme, bien que je partage avec les catholiques l'essentiel du corpus des dogmes.
Ces déclarations ne sont pas des dogmes de l'Eglise, et elles sont souvent très mal comprises. Nous pourrons en discuter une autre fois si vous voulez.
Il est évident que l'Eglise ne peut pas enfermer le Christ, le prendre en otage : Il sauve qui Il veut. Mais si l'on croit que les sacrements sont les moyens ordinaires du salut, puisqu'il n'est pas possible de recevoir les sacrements hors de l'Eglise, il faut bien se demander comment le salut serait possible. La question n'est pas simple du tout, vraiment pas simple du tout.
Je verrais comme vous dites avec un prêtre, même s'il n'est pas facile d'en trouver un. Je prie souvent l'Esprit saint pour être affermi dans la vérité.
A l'heure où j'écris ces lignes, je n'ai pas de meilleur conseil à vous donner.
J'entends par "religieux" un catholique entré dans les ordres, et non un pieux laïc.
OK. Peut-être avez-vous un peu choqué sa grande piété personnelle. Peut-être est-ce mon propre rapport aux sacrements qui est erroné.
Je risque d'aggraver encore plus l'incohérence si je vous avouais que je convoite une vie de religieux indépendant. Peut-être que mes conceptions religieuses sont encore très musulmanes.
Comment vos conceptions religieuses ne pourraient-elles pas être encore très musulmanes ? C'est ainsi que vous avez appris à penser, cela a moulé votre personnalité, votre spiritualité, c'est une part importante de votre histoire personnelle.
Il y a chez les catholiques des gens qui sont des religieux indépendants. Cela s'appelle des ermites. Charles de Foucault, qui a vécu et est mort en Algérie, dans le Hoggar, était ermite (après avoir un temps été moine trappiste), et c'est l'une des grande figures spirituelles de notre temps.
Il y a aujourd'hui dans nos villes des gens qui sont ermites. Ils ont un travail, parce qu'il faut travailler pour manger, et mènent leur vie spirituelle chez eux. Souvent, leurs voisins ne savent pas qu'ils sont ermites. C'est là une manière de vie qui pourrait tout à fait répondre aux circonstances qui sont les vôtres (je ne vous encourage pas à être ermite, je dis juste que je pense que cela peut être une manière de vivre en chrétien dans votre pays - ce n'est pas la seule, ni forcément celle à laquelle vous-même êtes appelé).
Mais je vous invite fortement à méditer sur ceci : la vie religieuse chrétienne n'est jamais une vie indépendante. C'est une vie où l'on est disciple de Jésus, où l'on s'efforce d'approfondir chaque jour notre relation à Lui, à être en communion avec Lui le plus pleinement possible. Et il faut savoir que souvent, cela demandera des renoncements difficiles, parce que Jésus nous demandera d'entendre des paroles dures (pensez à Pierre qui, à la première annonce de la Passion, refusait d'entendre Jésus qui annonçait sa mort), parce qu'il nous demandera de faire des choses difficiles (pensez au jeune homme riche, qui suivait la Loi, mais n'était pourtant pas encore prêt à suivre Jésus). La vie chrétienne n'est pas une vie solitaire, et encore moins une vie indépendante.