Pourquoi on dit que la foi est libre

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ChristianK
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Pourquoi on dit que la foi est libre

Message non lu par ChristianK » jeu. 09 août 2018, 2:04

La foi, ou argument d'autorité, consiste à tenir une proposition vraie (non démonstrativement) par confiance en la parole d'un locuteur.
En religion et théologie on répète souvent que la foi est libre, sur la base de raisons religieuses, comme le mérite, le respect de Dieu pour l'homme, l'exemple du Christ etc.
Je voudrais souligner qu'il y a une raison plus générale et fondamentale, qui fait que toute foi, religieuse ou non, est libre. Cette raison est aussi reliée au fait que la certitude de foi est une certitude morale (Elle implique non seulement un acte libre de celui qui croit, mais un acte libre d'un locuteur, acte libre donc contingent, et qui implique une grande complexité.). Mais elle n'implique pas un choix gratuit et sans fondement, une indétermination.

Avant d'aller plus loin, voici un tableau connu de St. Thomas sur les étapes ou aspects d'un acte pleinement libre. Il sont classés en 3 groupes: relativement à la fin, aux moyens, à l'exécution et chaque groupe est coupé en 2 selon que l'intellect ou la volonté sont impliquées:



Intellect--------------------------------------------------------------------Volonté


I relativement à la fin

1 idée d'un bien--------------------------------------------------------amour de ce bien
2 jugement de possibilité d' atteinte--------------------------- volonte de réalisation

II relativement aux moyens

3 Delibération sur les moyens------------------------------------consentement aux moyens
4 Jugement du meilleur moyen-----------------------------------choix de ce moyen

III relativement à l'exécution

5 Décision d'utiliser le moyen-------------------------------------vouloir ultime de l'acte concret

6 Joie causée par l 'atteinte de la fin


A chaque étape la raison pratique fait face à des options, et celles ci sont souvent nombreuses en raison de la complexité des choses. S'il s'agit d'une opération militaire, qui doit tenir compte des gestes de l'ennemi, la complexité est pratiquement infinie et celui qui voudrait une certitude scientifique pourrait passer des années à la déterminer. Donc, quand le temps manque les circonstances imposent de cesser la délibération-recherche pour passer à l'action, et à ce moment de ses recherches, celles-ci seront parvenues à un certain résultat: il faut faire A et non B. C'est parce que ce moment à été choisi qu'on se fixe sur A; avec une semaine de plus ca aurait pu être B.

Le cas est analogue quand nous faisons confiance. La complexité fait en sorte que nous pourrions toujours retenir notre confiance, mais aprês un certain temps nous l'accordons (ou non), selon le moment ou nous cessons nos recherches-délibérations.

Prenons 2 arguments d'autorité:

-je crois qu'il y a un ours dans cette forêt car un ami me l'a dit.
-Je crois en 1950 que telle proposition d'Einstein en physique est vraie (non démonstrativement) parce qu'il le dit.

Je peux bien penser que l'ami ne m'a jamais menti et qu'il a toute sa tête, sur base inductive (son passé etc.) . Mais qui sait, il n'est pas totalement impossible qu'il ait vu autre chose, qu'il veuille faire une blague, qu'une maladie se soit déclarée. L'esprit d'un homme, sa parole sont choses infiniment complexes et si je veux augmenter ma certitude pour avoisiner une certitude scientifique je n'en finirai pas; donc je vais mettre fin à mon examen à un certain moment et croirai selon le coté ou je pencherai à ce moment.
La raison pratique intervient, sur un point néanmoins théorique (existence d'un ours).

POur Einstein, il y a un argument d'autorité supplémentaire, collectif: la réputation. Mais supposons que je le connaisse depuis 1 ans, et que je remarque qu'à 71 ans, il y a des signes de pertes de mémoire etc. ainsi que d'autres facteurs qui font que je me retrouve dans une zone grise.
Encore une fois, je vais devoir mettre fin à ma délibération-recherche, qui pourrait quasi durer toujours.

C'est cette libre décision de la raison pratique qui fait que toute foi, ou confiance en un locuteur, est libre. La racine en est la complexité et la contingence des paroles de ce locuteur, presque un mystère (acte libre) si on veut des explications poussées.


Pour la mort de César le 15 mars, on peut dire avec raison qu'il serait déraisonnable d'en douter. Mais pas irrationnel (contradictoire), alors il y a encore une liberté de l'intellect, qui peut retenir son assentiment sur la base de théories historiques très minoritaires, de nouveaux textes qu'on pourrait découvrir, du fait que peut-être très peu de gens ont pu vérifier qu'il n'a pas pu survivre jusqu'au 16, que les manuscrits qui se sont copiés les uns les autres ont abouti à une certitude excessive etc.
Encore une fois en ce cas, la parole des hommes est chose complexe.


C'est pourquoi la foi (confiance) est dite libre, en tout domaine.

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