Pourquoi Dieu a-t-il créé le Serpent tentateur ?

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Etrigan
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Message non lu par Etrigan » mer. 02 août 2006, 14:28

Ah merci pour vos explications sur Lilith !!

Quant à votre interprétation, il faudrait que je la relise à tête reposé et prenne le temps d'y répondre.
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L'avocat du diable
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Message non lu par L'avocat du diable » sam. 05 août 2006, 14:09

Bonjour à tous,

Je remercie tous ceux qui par leur intervention érudite ou plus personnelle ont apporté des éléments de réponses à la question posée. Toutefois, il me semble que nous avons dévié de la question initiale et que nous n'avons pas vraiment abordé le coeur du problème.

Jusque-là nous nous sommes interrogés sur l'origine du Mal dans la Création. Chacun s'accorde ici à penser que le Mal ne peut pas venir de Dieu. Et pour cause ! Comment Dieu qui est Amour, qui est suprême bonté, pourrait-il être à l'origine du Mal ? Cela semble absolument contradictoire (sauf à introduire la négativité en Dieu) !...
Je me contenterais alors de laisser cette question ouverte puisque personne n'y a véritablement répondu : "comment le plus parfait des anges a-t-il pu se pervertir en raison de sa propre perfection ?! comment la nature angélique de Satan a-t-elle pu se corrompre d'elle-même ?" Certains me répondront peut-être que c'est là le mystère insondable du Mal. Soit, mais cette réponse ne me satisfait pas.

Passons alors au deuxième aspect de la question, qui est celui de l'omniscience Dieu en toute éternité. Je pense que vous conviendrez que Dieu est l'Etre incréé et qu'Il existe de toute éternité. Dieu est hors du temps. Par conséquent, l'intelligence de Dieu ne saurait être soumise au temps : Il connaît le passé, le présent et le futur. Tout ce qui est, tout ce qui fut, tout ce qui sera appartient à la connaissance de Dieu. Il n'est donc pas possible que Dieu ignore les conséquences de nos actes. Si Dieu est hors du temps, Il ne peut pas ne pas savoir ce qu'il advient de l'homme dans la tentation.
Je m'explique : Dieu ne pouvait pas ne pas savoir que l'homme désobéirait à l'ordre qu'il lui avait été donné. Encore une fois, je ne nie pas la liberté humaine : l'homme avait le choix. Le Serpent ne pouvait le contraindre à transgresser l'interdit. C'est par orgueil que l'homme a désobéi à l'ordre divin, mais l'homme pouvait renoncer à son orgueil (je ne reviens pas sur l'analyse que j'ai fait précédemment de l'orgueil comme amour de soi sans amour de Dieu). Donc l'homme a choisi librement de transgresser l'interdit divin, mais Dieu ne pouvait ignorer qu'il succomberait à la Tentation. Car de deux choses l'une : ou bien Dieu ignorait qu'en donnant la liberté à l'homme, celui-ci se laisserait tenter par le Serpent ; ou bien l'intelligence de Dieu est hors du temps, et Il ne pouvait ignorer que l'homme succomberait à la Tentation. Je préfère penser que Dieu est hors du temps et que son intelligence n'est pas soumise à la temporalité des événements. Mais il faut alors être conséquent : Dieu ne pouvait pas ne pas savoir qu'en donnant à l'homme le libre-arbitre celui-ci transgresserait l'interdit qui lui avait été fait.
D'où ma question initiale : Dieu n'est-il pas un peu pervers ?
Comment affirmer d'un côté que Dieu est Amour et de l'autre que Dieu est omniscient (qu'il savait que l'homme ferait un mauvais usage de sa liberté) ? Je ne crois pas que cette question soit anodine et que l'on peut se permettre d'y répondre par un simple appel à la foi (laquelle serait alors aveugle) ou par l'impénétrabilité des voies de Dieu. Car, ce qui se joue dans cet épisode du péché originel, c'est la question de la condition humaine, de sa misère, de sa souffrance, de son désespoir.

Bien à vous. :twisted:

PS1. Je réponds ici à une remarque de Zef :
satan s'est exterminé lui-même en se rebellant contre son Créateur
Cette explication me paraît assez obscure. Peut-être voulez-vous dire qu'en s'opposant à Dieu, Satan s'est séparé de Dieu et perd par là même sa propre dignité ontologique. Comment Satan pourrait-il subsister par lui-même puisqu'il ne contient pas en lui-même son propre principe ? L'argument formulé en ces termes est intéressant, mais il revient à nier l'existence du Mal. Je préfère avancer une autre hypothèse (que j'ai évoqué dans un de mes précédents messages) : Satan se nourrit de sa propre haine. Satan subsiste dans sa propre négativité par la haine de soi. Aussi la victoire du Christ sur Satan est-elle la victoire de l'amour sur la haine dans le coeur de l'homme.
pour Dieu il n'y a ni passé ni futur, mais il est l'Eternel Présent, Le Vivant par excellence.
Cette fois-ci, tout à fait d'accord. Ce qui nous ramène à la question centrale.

PS2. Je réponds cette fois-ci à l'intervention de Charles
Le Mal dont vous parlez est métaphysique et ne devient moral et théologique que sous l'effet de l'orgueil.
Je suis d'accord avec vous. Mais il faudrait préciser cette distinction : comment distinguer le Mal moral du Mal métaphysique ? Et qu'entendez-vous par Mal théologique ? Il me semble que le Mal moral est la désobéissance de la Loi de Dieu. Avant de goûter du fruit de la connaissance, l'homme ne savait pas ce qui est "bien" et ce qui est "mal", mais il savait ce qui est "permis" et ce qui est "interdit". Ce n'est pas tant d'avoir goûté au fruit de l'arbre qui est un "mal" que d'avoir transgressé un interdit. Quant au Mal métaphysique, il est incarné par la figure du Serpent dont la fonction dans le récit est de séparer l'amour de Dieu en Soi de l'amour de soi sans Dieu.
La créature ne peut qu'aspirer à l'éternité, seulement le mal moral et théologique, pour elle, c'est d'obtenir cette éternité hors de la relation à Dieu, hors de l'amour. Dieu a créé l'homme, sa créature est finie et mortelle, mais il veut la combler d'être, par l'amour et dans l'amour qu'il lui porte, en se donnant à elle.
Je ne suis pas certain que l'homme dans le jardin d'Eden aspire à l'éternité. Rien ne dit que la nature du premier homme était celle d'être mortel. Au contraire, la mort apparaît comme un châtiment divin : "tu mangeras ton pain, jusqu'à ce que tu retournes au sol. Car tu es glaise et tu retourneras à la glaise" (3, 19).
L'homme n'a pas à connaître le bien et le mal, c'est-à-dire se regarder le nombril, sa limite, sa naissance et sa mort, sa condition de créature, mais à aimer Dieu. Quand l'homme connaît, regarde, contemple le bien et le mal : il se regarde lui-même, un être fini et limité. Mais s'il pense qu'il peut rester avec lui-même, comme Dieu demeure en lui-même, il se trompe, l'homme se perd doublement s'il pense se conserver tout seul. C'est quand il est tourné vers Dieu, vers un autre, qu'il accède à l'éternité. Il perd l'autre et il se perd lui-même en mourant. Pour moi, le récit de la Genèse dit cela : que l'homme est si profondément créé pour l'amour, pour recevoir sa plénitude d'un autre (qui est Dieu), qu'il meurt de se détourner de lui.
Je suis assez d'accord avec vous cette fois-ci. Quand l'homme a goûté du fruit, il éprouve de la honte à cause de sa propre nudité et se dérobe au regard de Dieu. Je ne crois pas qu'il y ait ici d'allusion à la sexualité (contrairement à une mauvaise interprétation et trop littérale). La nudité de l'homme, comme vous le dîtes, c'est son statut de créature qui ne saurait exister par elle-même. L'homme découvre sa propre misère, misère de l'homme sans Dieu. En découvrant sa propre nudité, l'homme prend conscience qu'il a fauté, qu'il n'est rien sans Dieu, que l'amour de soi est l'amour d'une image et non point le véritable amour qui est amour de Dieu lui-même.

PS3. Je réponds enfin à la remarque faite par Montségur :
Et la genése de son coté n'a jamais été conçu je pense pour entrer en contact avec la raison et la philosophie. Elle reste et restera sources de mystéres.
C'est vrai. Mais que serait devenue l'exégèse biblique sans la rencontre avec la philosophie grecque ? La théologie eut-elle seulement existé sans les schèmes conceptuels du néoplatonisme ? N'est-ce pas rejeter toute la tradition que de considérer que la Genèse est inaccessible à l'intelligence humaine et à la raison ?
L'incapacité du livre à définir clairement une origine du Mal (même avec les symboles) s'est heurté à la raison (et se heurte toujours).
Donc ma réponse à la question originale
"Ne sommes nous pas en train de faire la même erreur que les grecs ?"
Je ne pense pas qu'interpréter le texte biblique à la lumière de la raison soit une "erreur". N'y a-t-il pas au contraire une certaine complaisance dans le "mystère" qui nous rend intellectuellement paresseux ? Comment convaincre ceux qui doutent ou ceux qui ne croient pas si la foi reste aveugle à sa propre vérité ?
:twisted:
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zora
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Message non lu par zora » dim. 06 août 2006, 16:36

Bonjour

L’avocat du diable a écrit :
"comment le plus parfait des anges a-t-il pu se pervertir en raison de sa propre perfection ?! comment la nature angélique de Satan a-t-elle pu se corrompre d'elle-même ?"
Alors je fais une tentative de répondre : c’est mon opinion à moi et je peux toujours me tromper, naturellement. Alors je suppose que Lucifer a désobéi ou au moins il n’était pas d’accord avec le Dieu. Il a pensé (peut-être, on ne le sait pas?) d’en savoir plus, de pouvoir faire mieux. Il a peut-être voulu aussi le bien au début ? Mais les choses et les comportements ont ses conséquences et les conséquences ne demandent pas si quelqu’un a voulu ou su certaines choses. Si un tout petit enfant entre dans le feu ne sachant pas ce que lui arriverait il brûlerait à la même façon d’un adulte suicidaire qui savait précisément la conséquence de son acte. Alors cette perversion du plus parfait des anges était peut-être une conséquence de désobéissance et de manque de foi en Dieu et c’était irréparable parce qu’il est écrit que la chute pour un ange est comme la mort pour un humain.
Passons alors au deuxième aspect de la question, qui est celui de l'omniscience Dieu en toute éternité. Je pense que vous conviendrez que Dieu est l'Etre incréé et qu'Il existe de toute éternité. Dieu est hors du temps. Par conséquent, l'intelligence de Dieu ne saurait être soumise au temps : Il connaît le passé, le présent et le futur. Tout ce qui est, tout ce qui fut, tout ce qui sera appartient à la connaissance de Dieu. Il n'est donc pas possible que Dieu ignore les conséquences de nos actes. Si Dieu est hors du temps, Il ne peut pas ne pas savoir ce qu'il advient de l'homme dans la tentation.
Je m'explique : Dieu ne pouvait pas ne pas savoir que l'homme désobéirait à l'ordre qu'il lui avait été donné. Encore une fois, je ne nie pas la liberté humaine : l'homme avait le choix. Le Serpent ne pouvait le contraindre à transgresser l'interdit. C'est par orgueil que l'homme a désobéi à l'ordre divin, mais l'homme pouvait renoncer à son orgueil (je ne reviens pas sur l'analyse que j'ai fait précédemment de l'orgueil comme amour de soi sans amour de Dieu). Donc l'homme a choisi librement de transgresser l'interdit divin, mais Dieu ne pouvait ignorer qu'il succomberait à la Tentation. Car de deux choses l'une : ou bien Dieu ignorait qu'en donnant la liberté à l'homme, celui-ci se laisserait tenter par le Serpent ; ou bien l'intelligence de Dieu est hors du temps, et Il ne pouvait ignorer que l'homme succomberait à la Tentation. Je préfère penser que Dieu est hors du temps et que son intelligence n'est pas soumise à la temporalité des événements. Mais il faut alors être conséquent : Dieu ne pouvait pas ne pas savoir qu'en donnant à l'homme le libre-arbitre celui-ci transgresserait l'interdit qui lui avait été fait.
D'où ma question initiale : Dieu n'est-il pas un peu pervers ?
Je dois avouer que je ne comprends pas du tout vos arguments et votre raisonnement ?
Comment affirmer d'un côté que Dieu est Amour et de l'autre que Dieu est omniscient (qu'il savait que l'homme ferait un mauvais usage de sa liberté) ? Je ne crois pas que cette question soit anodine et que l'on peut se permettre d'y répondre par un simple appel à la foi (laquelle serait alors aveugle) ou par l'impénétrabilité des voies de Dieu. Car, ce qui se joue dans cet épisode du péché originel, c'est la question de la condition humaine, de sa misère, de sa souffrance, de son désespoir.
Alors si on retourne un peu la question : imaginons la question de la condition divine : Il doit être éternel, toujours seul, toujours craint et incompris, toujours omniscient et toujours omniprésent et omnipotent (mais pour les autres et seulement et toujours pour les autres), Il doit savoir et penser toujours à tout, Il doit donner tout, accorder tout, permettre tout mais être aussi responsable pour chaque abus, chaque méchanceté, chaque coup de crane et chaque mauvaise volonté et de la part des hommes et de la part des anges. Voudriez-vous être Lui monsieur?

cordialement
zora
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L'avocat du diable
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Message non lu par L'avocat du diable » dim. 06 août 2006, 18:07

Bonjour Zora,

Je reviens sur votre première remarque.
Alors cette perversion du plus parfait des anges était peut-être une conséquence de désobéissance et de manque de foi en Dieu
Il me semble que vous inversez la cause et la conséquence : ce n'est pas parce que Satan a désobéi à Dieu que sa nature s'est corrompue, mais parce que sa nature était déjà corrompue qu'il a manqué de foi (?) et s'est opposé à Dieu.

Revenons à présent à la question centrale qui nous occupe. Vous dîtes que cette question est au fond celle de la "condition divine". Je pense tout d'abord que l'expression est mal choisie, car précisément Dieu est l'Etre inconditionné. Il n'y a pas de "condition" à l'existence de Dieu. Mais passons. Je pense en fait que vous voulez parler de "l'essence" de Dieu, c'est-à-dire des attributs par lesquels nous pensons que Dieu est Dieu.
Il doit être éternel, toujours seul, toujours craint et incompris, toujours omniscient et toujours omniprésent et omnipotent (mais pour les autres et seulement et toujours pour les autres), Il doit savoir et penser toujours à tout
Si Dieu est l'Etre suprême et souverainement parfait, alors je vous accorde que Dieu est éternel, omniscient, omniprésent et omnipotent. Qu'il y a pas de limite à son intelligence, ni à sa volonté (laquelle est essentiellement bonne), ni à l'amour qu'Il porte à l'égard de ses créatures. L'idée selon laquelle Dieu est "toujours seul" me paraît plus problématique, mais peut-être voulez-vous dire simplement que Dieu est transcendant, séparé du monde et subsistant par lui-même en raison de sa propre perfection ? Que Dieu soit "toujours craint et incompris" me paraît encore plus discutable, car Dieu est Amour et cet Amour s'est manifesté à travers la Révélation, laquelle peut être comprise.
Il doit donner tout, accorder tout, permettre tout mais être aussi responsable pour chaque abus, chaque méchanceté, chaque coup de crane et chaque mauvaise volonté et de la part des hommes et de la part des anges
Je ne crois pas que Dieu puisse tout permettre, car Il ne peut tolérer le Mal si sa volonté est essentiellement bonne. Je ne crois pas non plus qu'il faille attribuer à Dieu la responsabilité de chacun de nos actes. Dans les deux cas, vous niez la liberté humaine. Or, je le répète, je reconnais l'existence du libre-arbitre. Ainsi, chacun de nous est absolument responsable de ses actes parce que notre volonté est entièrement libre.
La question que je pose est seulement de comprendre pourquoi Dieu a donné à l'homme cette liberté sachant qu'il en ferait mauvais usage, c'est-à-dire sachant qu'il transgressait l'interdit qui lui avait été fixé, le précipitant de la sorte hors du jardin d'Eden.

Cordialement. :twisted:
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Message non lu par zora » dim. 06 août 2006, 20:18

Bonsoir

L’avocat du diable a écrit :
Il me semble que vous inversez la cause et la conséquence : ce n'est pas parce que Satan a désobéi à Dieu que sa nature s'est corrompue, mais parce que sa nature était déjà corrompue qu'il a manqué de foi (?) et s'est opposé à Dieu.
C’est une chose qu’on ne peut pas savoir ni vous ni moi ni aucun autre être humain. Il écrit que Lucifer a été créé bon comme tous les autres anges. Alors sa nature n’a pas pu être déjà corrompue sans un état intermédiaire, sans une natte psychologique ou métaphysique (je ne sais pas comment m’exprimer et appeler cette chose, je ne suis pas Freud et surtout pas pour les anges qui ne sont pas des êtres humains et n’ont pas la même nature comme nous) où il aurait dû tomber. Un être humain peut désobéir et s’opposer à quelqu’un sans être corrompu et méchant (et sans avoir raison mais être quand même en bonne foi). Je suppose que la même chose valait aussi pour les anges au début (après la rébellion de Lucifer et ses anges Dieu a fait quelque chose avec les anges restés fidèles et ils ne peuvent plus tomber).
(…) car précisément Dieu est l'Etre inconditionné. Il n'y a pas de "condition" à l'existence de Dieu.
Alors c’est un jeu des paroles mais je pense qu’il y a de « condition » à l’existence de Dieu même si Lui personnellement est inconditionné. L’univers entier, les anges, les hommes, les animaux, la nature etc. et leur sort final sont la « condition » de l’existence de Dieu.
La question que je pose est seulement de comprendre pourquoi Dieu a donné à l'homme cette liberté sachant qu'il en ferait mauvais usage, c'est-à-dire sachant qu'il transgressait l'interdit qui lui avait été fixé, le précipitant de la sorte hors du jardin d'Eden.
Parce qu’Il ne voulait pas être ni l'Etre suprême et souverainement parfait, éternel, omniscient, omniprésent et omnipotent avec une intelligence et une volonté sans limites, transcendant, séparé du monde (inexistant ou fait comme un screen saver) et subsistant par lui-même, plein d’amour (pour qui selon vous : pour les robots qui ont l’aspect des hommes ou des anges?) dans un vide absolu (ça serait vraiment un paradoxe par excellence) mais pas non plus « Maître des poupées » sans volonté, sentiments, valeurs moraux et esthétiques, créativité et conscience, mais il veut avoir avec Lui des êtres pourvu de la libre volonté et qui sont ses égaux au moins selon la qualité sinon selon la quantité. Et puis nous ne savions pas s'Il l'avait su ou pas.

Quant a mes paroles :
« Alors si on retourne un peu la question : imaginons la question de la condition divine : Il doit être éternel, toujours seul, toujours craint et incompris, toujours omniscient et toujours omniprésent et omnipotent (mais pour les autres et seulement et toujours pour les autres), Il doit savoir et penser toujours à tout, Il doit donner tout, accorder tout, permettre tout mais être aussi responsable pour chaque abus, chaque méchanceté, chaque coup de crâne et chaque mauvaise volonté et de la part des hommes et de la part des anges. »
cela n’est pas mon opinion à moi mais ma description comment beaucoup de personnes imaginent Dieu.

cordialement
zora
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Charles
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Message non lu par Charles » dim. 06 août 2006, 20:56

L'avocat du diable a écrit :D'où ma question initiale : Dieu n'est-il pas un peu pervers ?
Comment affirmer d'un côté que Dieu est Amour et de l'autre que Dieu est omniscient (qu'il savait que l'homme ferait un mauvais usage de sa liberté) ?
La réponse est incluse dans la question. C'est seulement que vous ne mesurez pas la portée de cet amour. en fait personne ne le peut puisqu'il est infini. Il est infini, pardonne et sauve. Dieu savait que l'homme ferait un mauvais usage de sa liberté mais il savait aussi qu'il le pardonnerait et le sauverait...

Je me surprends maintenant à vous rappeler sainte Thérèse de Lisieux : tout le péché du monde est comme une goutte d'eau dans un brasier, celui de l'amour de Dieu.

Nous avons du mal à estimer ce que peuvent être ces voies de Dieu qui ne sont pas les nôtres. Votre question sur la perversité de Dieu relève de nos voies, pas des siennes.

Je me souviens aussi d'avoir entendu que la sainteté consistait simplement à avoir le même regard sur les hommes que celui du Père : plein d'amour, de patience, de pardon.

"Le Seigneur descendit dans la nuée et vint se placer auprès de Moïse. Il proclama lui-même son nom ; il passa devant Moïse et proclama : « YAHVÉ, LE SEIGNEUR, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d'amour et de fidélité...."

L'avocat du diable
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Message non lu par L'avocat du diable » lun. 07 août 2006, 0:47

Merci Charles pour votre réponse.
Charles a écrit :Dieu savait que l'homme ferait un mauvais usage de sa liberté mais il savait aussi qu'il le pardonnerait et le sauverait...
Je suis entièrement d'accord avec vous. Cette réponse me paraît cohérente dès lors que l'on reconnaît l'omniscience de Dieu. Je crois que c'est la solution proposée par Leibniz dans la Théodicée, mais peut-être d'autres avant lui avaient avancé la même solution. Peu importe au fond. Car ce qui m'intéresse, c'est le contenu de votre réponse. Si je comprends bien l'argument, Dieu savait que l'homme ferait un mauvais usage de la liberté, qu'il serait châtié pour cela, mais qu'il serait ensuite racheté. Autrement dit, il faut que l'homme ait péché pour qu'il soit racheté. La mort du Christ n'aurait aucun sens sans le Péché originel. Il faut, je vous l'accorde, un "amour infini" pour sacrifier son Fils en échange du rachat des péchés de l'humanité !... Ceci dit, combien de peines, combien de misères n'eut-on pas épargnées à l'humanité si le premier homme n'avait point cédé à la Tentation ! Il faut croire que toutes ces souffrances n'ont pas été vaines puisqu'elles trouvent leur justification dans la Rédemption.
C'est seulement que vous ne mesurez pas la portée de cet amour. en fait personne ne le peut puisqu'il est infini. Il est infini, pardonne et sauve.
Je n'aurais bien évidemment pas la prétention de mesurer, moi, pauvre pécheur, l'Amour de Dieu qui, comme vous le dîtes, est infini. Disons les choses autrement : si l'Amour de Dieu est infini, il ne peut pas vouloir le Mal. L'idée selon laquelle Dieu serait "pervers" est évidemment absurde au regard de l'Amour infini qu'il porte à ses créatures. Il nous faut donc admettre que c'est par amour que Dieu a donné à l'homme le libre-arbitre et que c'est par amour qu'il a sacrifié son Fils pour la rémission de nos péchés.
Faut-il conclure que c'est par amour qu'il a châtié l'homme de son péché, qu'Il l'a obligé à gagner son pain à la sueur de son front, qu'Il a fait de lui un être sujet à la maladie, à la vieillesse et à la mort ? Je vous laisse tirer par vous-même la conclusion...
Je me surprends maintenant à vous rappeler sainte Thérèse de Lisieux : tout le péché du monde est comme une goutte d'eau dans un brasier, celui de l'amour de Dieu.
Cet argument me paraît en revanche beaucoup moins convaincant. J'ai l'impression que vous sous-estimez la réalité du mal en ce monde. J'imagine que vous me répondrez que, moi, une fois encore je sous-estime l'amour de Dieu... Mais, tout de même, ne sommes-nous pas davantage confrontés à la réalité du mal durant notre existence terrestre ? Tout le monde n'a pas la chance ici-bas de vivre dans la béatitude de l'amour de Dieu.
Nous avons du mal à estimer ce que peuvent être ces voies de Dieu qui ne sont pas les nôtres. Votre question sur la perversité de Dieu relève de nos voies, pas des siennes
C'est vrai. Mais c'est pourquoi je me suis inscrit sur ce Forum. J'espère ici trouver des Chrétiens qui sauront m'éclairer sur les "voies de Dieu". L'argument que vous avez avancé est intéressant, mais il me laisse un peu perplexe. Je vais vous expliquer pourquoi en utilisant une image.
Imaginez qu'un Père donne à ses enfants une clef en leur disant : "Je vais m'absenter quelques jours. Avec cette clef, vous pouvez ouvrir toutes les portes de la maison, mais la porte qui est au sous-sol, vous ne devez pas l'ouvrir." Le Père s'absente et les enfants qui sont restés à la maison se demandent ce qu'il y a derrière la porte qui est au sous-sol. Après avoir longtemps tergiversé, ils décident d'ouvrir la porte pour voir, mais la pièce est totalement sombre et ils ne voient rien. Ils allument la lumière et découvrent une pièce de rangement avec des boîtes empilées les unes sur les autres. Entre toutes ces boîtes, il y a en a une qui les intrigue davantage. Ils décident de l'ouvrir et découvrent dedans un pistolet. Le garçon, tout fier d'avoir trouvé une arme, la brandit et vise sa soeur pour s'amuser. Pan ! Le pistolet était chargé, la soeur est touchée et tombe. Le Père rentre quelques temps après à la maison, voit la porte du sous-sol ouverte et, partagé entre la colère et l'inquiétude, appelle ses enfants. Son fils en pleurs répond, montre l'arme et le Père voit sa fille gisant à terre. La petite n'est pas morte, mais elle est inconsciente. Il l'emmène à l'hôpital et là, grâce au travail des médecins, la petite est sauvée. Mais elle ne pourra plus marcher. Elle devra désormais vivre en fauteuil roulant.
Qui est selon vous responsable de l'accident ? Le fils assurément, puisqu'il a désobéi à son père, puisque c'est lui qui a tiré. Mais le Père ne pouvait-il pas prévoir l'accident ? Il l'avait prévu, puisqu'il avait dit à ses enfants de ne pas ouvrir cette porte. Est-ce être un Père responsable de prendre le risque d'un accident en leur donnant cette clef ? N'eût-il pas été préférable qu'il ne donne pas cette clef ? Ou à tout le moins qu'il change la serrure de la porte du sous-sol afin que les enfants ne puissent pas entrer ?
Remplacez à présent la clef par le "libre-arbitre". Je sais que mon analogie est fort imparfaite, mais elle permet de comprendre ce que je veux dire : Dieu (Le Père) peut-il donner la liberté à l'homme sans savoir qu'il en fera mauvais usage ? Vous m'avez déjà répondu : Il le savait mais Il savait aussi que l'homme serait sauvé et pardonné. Qu'est-ce à dire ? Si je reprends ma petite histoire : la petite soeur est "sauvée" et le petit frère sera "pardonné". Mais si la Rédemption équivaut à un fauteuil roulant, la belle affaire ! Oui, je sais, ma comparaison est grotesque, mais je pense que vous comprenez bien ce que je veux dire : que Dieu ait donné à l'homme la liberté pour qu'il puisse ensuite être "sauvé", cela me laisse assez perplexe... :-x
N'eut-il pas été préférable qu'Il empêche l'homme d'accéder à l'arbre de la connaissance du bien et du mal par exemple ?...

Cordialement :twisted:
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Message non lu par Charles » lun. 07 août 2006, 2:48

L'avocat du diable a écrit :Ceci dit, combien de peines, combien de misères n'eut-on pas épargnées à l'humanité si le premier homme n'avait point cédé à la Tentation ! Il faut croire que toutes ces souffrances n'ont pas été vaines puisqu'elles trouvent leur justification dans la Rédemption.
Pas sûr. Le Felix culpa... n'est peut-être pas une justification du mal mais plutôt l'affirmation de la toute-puissance et de la fécondité de Dieu qui peut faire produire au mal ce qui lui est le plus contraire : un bien.
L'avocat du diable a écrit :Faut-il conclure que c'est par amour qu'il a châtié l'homme de son péché, qu'Il l'a obligé à gagner son pain à la sueur de son front, qu'Il a fait de lui un être sujet à la maladie, à la vieillesse et à la mort ? Je vous laisse tirer par vous-même la conclusion...
Oui, par le plus grand amour. Car Dieu a créé l'homme pour qu'il trouve son bonheur dans le bien et dans l'amour, non dans le mal et la haine. Ce que vous décrivez sont les conséquences du péché originel, c'est-à-dire l'état de l'homme qui se prive de la source d'amour et choisit la solitude (prétend à l'autonomie). Le chatiment n'est que l'envers de l'oeuvre de sagesse de Dieu qui a voulu pour nous un bonheur qui ne nous détruise pas, mais au contraire nous comble et dans l'éternité. Dieu ne veut pas que nous soyons heureux dans le mal, heureux d'un bonheur qui nous détruise...
L'avocat du diable a écrit :Cet argument me paraît en revanche beaucoup moins convaincant. J'ai l'impression que vous sous-estimez la réalité du mal en ce monde. J'imagine que vous me répondrez que, moi, une fois encore je sous-estime l'amour de Dieu...
Enfin, son infinité. Sainte Thérèse comparait le mal affectant un être limité à l'infinité de l'amour de Dieu.
Oui, je sais, ma comparaison est grotesque, mais je pense que vous comprenez bien ce que je veux dire : que Dieu ait donné à l'homme la liberté pour qu'il puisse ensuite être "sauvé", cela me laisse assez perplexe... :-x
N'eut-il pas été préférable qu'Il empêche l'homme d'accéder à l'arbre de la connaissance du bien et du mal par exemple ?...
Non pas pour qu'il puisse ensuite être sauvé mais pour l'amour. La création, la rédemption sont des actes d'amour et c'est cela qui est essentiel. Ce sont les moments d'une histoire d'amour. Je vous conseille de lire le petit livre de Hans-Urs von Balthasar : "Le coeur du monde" aux Editions Saint-Paul, les questions que vous abordez ici y sont posées avec leur profondeur maximale et la réponse est de la même ampleur. Pas d'amour sans liberté non plus, Dieu veut une relation d'amour, avec un appel et une réponse, et nous donne la liberté pour cela.

Encore un petit mot : l'omniscience divine ne nous détermine pas parce que ce que Dieu connaît à l'avance est une volonté libre, il la connaît libre à l'avance? Et ainsi si jamais la prescience devait déterminer quoi que ce soit, elle nous déterminerait comme des êtres libres, elle nous conférerait donc la liberté... Voir saint Augustin dans Du libre arbitre.

L'avocat du diable
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Message non lu par L'avocat du diable » mer. 09 août 2006, 14:22

Merci Charles pour votre réponse qui mérite méditation. :cool:
Je vais suivre votre conseil et lire le livre de Hans-Urs von Balthasar dont vous m'avez parlé. La discussion sera d'autant plus intéressante.
Amicalement. :twisted:
"Je suis l'Esprit qui toujours nie" (Goethe, Le second Faust)

Charles
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Message non lu par Charles » jeu. 10 août 2006, 0:19

Le Felix culpa... dont j'ai oublié la suite latine signifie "bienheureuse faute qui nous a valu un tel sauveur". Si vous voulez vraiment penser que Dieu est pervers, commencez par là. Cependant, c'est une question de décision relativement au monde et à l'existence. On trouve chez Eschyle cette déclaration étonnante et un peu stoïcienne : la souffrance qui ouvre à la compréhension, ou la souffrance qui permet de comprendre... Je n'y adhère pas, je ne suis pas de sensisibilité stoïcienne, mais il y a là quelque chose de radical, la conversion d'un mal (absolu, il ne s'agit pas de le minorer) en occasion de bien. Ici, je dis conversion mais l'idée est celle d'une fécondation. Ce n'est pas le mal de lui-même qui produit le bien, mais il y a une possibilité de violer le mal, et de force, de lui coller un polichinelle dans le tiroir... C'est Yahvé qui fait cela, qui viole le mal et lui fait produire un fruit bon : cela s'appelle la Passion. La conversion du sacrifice en oblation. C'est dans ce sens qu'une tradition orientale très ancienne affirmait que le jour de la Passion, Satan avait été roulé. L'oppression la plus violente peut devenir le lieu même de l'expression de l'amour le plus grand. Avez-vous entendu parler de cette prison de femmes qui a été transformée en monastère parce que toutes les prisonnières se sont converties et ont radicalement altéré le sens de leur présence en ce lieu ? On sait bien que de couvent sont devenus des prisons, Jean Genet a été détenu dans l'un d'eux, mais on sait moins qu'au moins une prison est devenue un couvent.... :heart:

Charles
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Message non lu par Charles » jeu. 10 août 2006, 0:24

Seulement, l'obstacle, c'est que nous ne voulons pas renoncer au mal parce qu'il nous tient chaud et que nous avons peur de la liberté. Plutôt agoniser a petit feu et mourir chez soi que quoi que ce soit dans l'inconnu. Des fois que la liberté nous conduirait à des choses aussi désagréables que la Croix ou ausssi incontrolables que l'amour et le bonheur... Enfin, Dieu a dit qu'il vomissait les tièdes. Si ton oeil est une occasion de péché arrache-le, nous dit-il... mais non, la gangrène nous tient chaud, et quand nous sommes vraiment bien gangrenés, bien pourris et bien tièdes, nous pouvons nous tirer une balle sans trop d'émotions... N'est-ce pas ?

Mais quand une voix dit que tout cela n'est que peu de chose relativement à l'infini, à l'infinité de l'amour de Dieu... qu'est-ce que ça me fait ? Rien. Ce n'est qu'une goutte d'eau, mais c'est la mienne, à moi, c'est ma tiédeur à moi, ma gangrène à moi, et plutôt mourir que la vie et l'aventure.

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