M. et Mme P. étaient un vieux couple qui vivait encore dans leur maison sur la rive d'un lac, dans le décor champêtre d'une petite municipalité de campagne.
Quoique passablement âgés, ils tenaient à y demeurer. La dame avait des problèmes de motricité et lorsqu'elle sortait, c'était en fauteuil roulant qu'elle se déplacait, avec l'aide de son mari qui poussait le fauteuil d'un air enjoué.
Ils étaient beaux tous les deux. Il émanait d'eux comme une légèreté, un raffinement, une dignité tranquille.
Je revois M.P qui saluait les gens aimablement en poussant sur le fauteuil de sa femme.
Malgré le poids des ans qui lui voûtait le dos, il avait un beau port de tête, cet homme, et un sourire irrésistible.
C'était vraiment un bel homme, un beau couple.
Ils étaient anglophones et conversaient avec nous dans un mélange de français et d'anglais. Nous, on faisait la même chose et tout le monde se comprenait très bien
.
Un jour Mme P. a voulu essayer un fauteuil motorisé, sous le regard attentif de son mari.
Elle avait de la difficulté avec les commandes, reculait au lieu d'avancer, ne tournait pas du bon côté , bref c'était la pagaille. Ils riaient tous deux comme des enfants et s'amusaient beaucoup.
De toute évidence, non seulement ils s'aimaient, mais ils aimaient aussi la vie.
Avec le temps, leur état de santé s'est détérioré. Mme P. avait de plus en plus de difficultés motrices et M.P. a reçu un diagnostic d'Alzheimer. C'est alors que leurs enfants sont intervenus pour apporter leur aide.
Ils ne pouvaient être là en permanence mais ils se relayaient l'un l'autre et ont aussi engagé du personnel soignant pour veiller sur leurs parents à la maison, car ça leur aurait brisé le coeur de la quitter.
L'intervention des enfants, dans ces cas, n'est pas toujours reposante pour les intervenants et l'équipe médicale.
Mais avec ceux-là, ce fut un pur bonheur.
Dès le premier contact, on voyait que ces gens avaient eu une belle éducation. J'ai connu deux d'entre eux, un homme et une femme.
Je ne peux mieux les décrire qu'en disant qu'ils avaient de la classe. Ils avaient le même raffinement que leurs parents, ils nous parlaient simplement, avec un regard franc et avenant et surtout on sentait qu'ils nous respectaient, qu'ils respectaient notre travail et nous faisaient confiance. Ils collaboraient pleinement avec nous. Et ils s'exprimaient très bien en français avec un petit accent anglais qui ne manquait pas de charme.
Ils avaient toujours l'air heureux de nous rencontrer pour discuter de l'état de santé de leurs parents. Leur attitude était toujours amicale.
Comment, dans ce cas, ne pas donner le maximum, comment ne pas se montrer digne de leur confiance et de l'opinion qu'ils avaient de nous ?
On sentait aussi que ces gens très équilibrés étaient conscients des limites de chacun, de leurs propres limites et des nôtres, et qu'ils les respectaient.
Il y a des gens, comme ça, qui ont le don de nous tirer vers le haut, si on peut dire, de nous faire donner ce qu'il y a de meilleur en nous.
Infirmières, aide-soignants, pharmaciens, médecins, il y avait entre nous une collaboration harmonieuse, nous étions tous motivés, car une chose nous unissait: nous aimions ces gens, et ils nous faisaient aimer notre travail.
Mme P. est un jour décédée, et l'Alzheimer de M.P. ayant fait ses ravages, il est devenu impossible de le garder plus longtemps dans sa maison de campagne.
Il a alors été question de le tranférer à l'hôpital des vétérans de la région de Montréal. Des vétérans???
C'est là seulement que nous avons appris que M.P. avait été pilote pendant la dernière guerre. Personne n'en avait jamais fait mention, ni M. et Mme P. ni leurs enfants. Vraiment, ils avaient de la classe ces gens..
Depuis, le 11 novembre, je pense toujours à M.P., à son merveilleux sourire, à ce qu'il a été, à ce qu'il nous a donné, à son adorable épouse , à ses enfants si dignes et si attachants, et je lui dit du fond du coeur:
Merci, M.P. !
M. et Mme P. étaient un vieux couple qui vivait encore dans leur maison sur la rive d'un lac, dans le décor champêtre d'une petite municipalité de campagne.
Quoique passablement âgés, ils tenaient à y demeurer. La dame avait des problèmes de motricité et lorsqu'elle sortait, c'était en fauteuil roulant qu'elle se déplacait, avec l'aide de son mari qui poussait le fauteuil d'un air enjoué.
Ils étaient beaux tous les deux. Il émanait d'eux comme une légèreté, un raffinement, une dignité tranquille.
Je revois M.P qui saluait les gens aimablement en poussant sur le fauteuil de sa femme.
Malgré le poids des ans qui lui voûtait le dos, il avait un beau port de tête, cet homme, et un sourire irrésistible.
C'était vraiment un bel homme, un beau couple.
Ils étaient anglophones et conversaient avec nous dans un mélange de français et d'anglais. Nous, on faisait la même chose et tout le monde se comprenait très bien :-D .
Un jour Mme P. a voulu essayer un fauteuil motorisé, sous le regard attentif de son mari.
Elle avait de la difficulté avec les commandes, reculait au lieu d'avancer, ne tournait pas du bon côté , bref c'était la pagaille. Ils riaient tous deux comme des enfants et s'amusaient beaucoup.
De toute évidence, non seulement ils s'aimaient, mais ils aimaient aussi la vie.
Avec le temps, leur état de santé s'est détérioré. Mme P. avait de plus en plus de difficultés motrices et M.P. a reçu un diagnostic d'Alzheimer. C'est alors que leurs enfants sont intervenus pour apporter leur aide.
Ils ne pouvaient être là en permanence mais ils se relayaient l'un l'autre et ont aussi engagé du personnel soignant pour veiller sur leurs parents à la maison, car ça leur aurait brisé le coeur de la quitter.
L'intervention des enfants, dans ces cas, n'est pas toujours reposante pour les intervenants et l'équipe médicale.
Mais avec ceux-là, ce fut un pur bonheur.
Dès le premier contact, on voyait que ces gens avaient eu une belle éducation. J'ai connu deux d'entre eux, un homme et une femme.
Je ne peux mieux les décrire qu'en disant qu'ils avaient de la classe. Ils avaient le même raffinement que leurs parents, ils nous parlaient simplement, avec un regard franc et avenant et surtout on sentait qu'ils nous respectaient, qu'ils respectaient notre travail et nous faisaient confiance. Ils collaboraient pleinement avec nous. Et ils s'exprimaient très bien en français avec un petit accent anglais qui ne manquait pas de charme.
Ils avaient toujours l'air heureux de nous rencontrer pour discuter de l'état de santé de leurs parents. Leur attitude était toujours amicale.
Comment, dans ce cas, ne pas donner le maximum, comment ne pas se montrer digne de leur confiance et de l'opinion qu'ils avaient de nous ?
On sentait aussi que ces gens très équilibrés étaient conscients des limites de chacun, de leurs propres limites et des nôtres, et qu'ils les respectaient.
Il y a des gens, comme ça, qui ont le don de nous tirer vers le haut, si on peut dire, de nous faire donner ce qu'il y a de meilleur en nous.
Infirmières, aide-soignants, pharmaciens, médecins, il y avait entre nous une collaboration harmonieuse, nous étions tous motivés, car une chose nous unissait: nous aimions ces gens, et ils nous faisaient aimer notre travail.
Mme P. est un jour décédée, et l'Alzheimer de M.P. ayant fait ses ravages, il est devenu impossible de le garder plus longtemps dans sa maison de campagne.
Il a alors été question de le tranférer à l'hôpital des vétérans de la région de Montréal. Des vétérans???
C'est là seulement que nous avons appris que M.P. avait été pilote pendant la dernière guerre. Personne n'en avait jamais fait mention, ni M. et Mme P. ni leurs enfants. Vraiment, ils avaient de la classe ces gens..
Depuis, le 11 novembre, je pense toujours à M.P., à son merveilleux sourire, à ce qu'il a été, à ce qu'il nous a donné, à son adorable épouse , à ses enfants si dignes et si attachants, et je lui dit du fond du coeur:
Merci, M.P. !