par Souricette » lun. 29 juin 2009, 21:00
Obama à Notre Dame
Le président Obama était reçu le 17 mai à l'université catholique Notre Dame, dans l'Indiana, pour prononcer le discours de remise des diplômes et recevoir un doctorat honoris causa, provoquant le scandale. Explication par un Dominicain américain.
Au mépris des instructions pourtant clairement données par les évêques américains, l'Université de Notre Dame a honoré, lors de sa remise de diplômes le mois dernier, un homme politique activement opposé à l'Évangile de la vie. Pour compliquer l'affaire, cet homme était le président récemment investi, Barack Obama.
Lors de la cérémonie du 17 mai, l'université a décerné un doctorat honoris causa au président Obama. Quelques instants plus tard, l'université l'accueillait sur le podium pour prononcer le discours de la remise des diplômes. Dans le système universitaire américain, ce sont les deux plus prestigieux honneurs qu'une université peut accorder à un homme. On ne sera donc pas étonné de voir plus de 80 évêques américains critiquer publiquement l'invitation de Notre Dame. Dans un ras-le-bol général, les évêques ont mis en garde l'université contre le mal que pouvait provoquer une telle remise de diplôme pour les catholiques américains.
Tout d'abord, ad intra, l'autorité enseignante des évêques, déjà affaiblie, pourrait souffrir au sein de la communauté universitaire. Ensuite, la décision de l'université pourrait, ad extra, remettre en cause la crédibilité de l'Église dans ses efforts pour apporter la vérité et la raison dans le débat national sur la vie humaine. Cette seconde inquiétude s'est déjà révélée prophétique. Les lignes du débat national sur l'avortement ont été redessinées le mois dernier à Notre Dame, et Obama, avec l'aide de l'université, les a habilement redéployées à son avantage.
Or, ce n'est pas le combat que les évêques américains comptaient mener à ce stade de la présidence d'Obama. À leur conférence en janvier, les évêques ont fêté la signification historique de l'élection d'Obama, mais ils ont aussi signalé leur détermination à s'opposer aux politiques contre la vie qu'il a défendues comme candidat. Avec force et vigueur, les évêques ont jusque-là tenu leur engagement. Depuis le 20 janvier, ils dénoncent la décision d'Obama d'autoriser le financement de l'avortement et de la recherche sur les cellules souches embryonnaires par les fonds publics. De plus, ils continuent de résister à la menace du président d'abroger l'objection de conscience qui protège les médecins et les hôpitaux et qui complique les procédures de fins de vie. Par des prêches publics, des lettres pastorales, des interviews télévisées, et même sur YouTube, les évêques ont mis sur pied une impressionnante campagne pro-lite qui semble avoir touché positivement les responsables politiques vis-à-vis de la vie humaine. Un récent sondage Gallup indique qu'au cours de l'année passée un nombre important d'Américains ont changé leur position passant du pro-choice au pro-life.
L'attitude de Notre Dame a ainsi modifié la vision de la lutte pro-life des évêques. Après des avancées publiques, l'épiscopat américain est maintenant forcé de battre en retraite et de se défendre au sein de ses propres institutions. En invitant Obama, l'administration universitaire a offert au président une plate-forme catholique à partir de laquelle il a pu promouvoir son programme pro-avortement. Faisant appel aux catégories spécieuses de dialogue et de juste échange, Obama a saisi l'opportunité de faire avancer sa cause. Avec son charme habituel et ses qualités oratoires, il a fragilisé le témoignage public pro-life des évêques. Depuis la tribune, Obama a appelé les catholiques américains à imiter l'effort des figures catholiques politiquement compromises qui, au lieu de soutenir la vérité, essaient de promouvoir le dialogue et un terrain d'entente avec les forces pro-avortement. Bien sûr, dans une population américaine peu habituée à la rancœur politique, cet appel de l'exécutif atteindra facilement des oreilles accueillantes. Le dialogue et le consensus demeurent des objectifs politiques légitimes. Mais dans le contexte du débat sur l'avortement, l'appel d'Obama préconisait une conformité culturelle à des principes immoraux et une acceptation du statu quo, c'est-à-dire une protection politique qui donnerait aux femmes le droit de choisir. En effet, Obama demande aux catholiques américains de considérer la question de l'avortement comme légalement tranchée, d'ignorer les contradictions de cette logique, et ainsi de laisser à la porte du débat public leurs inquiétudes à propos de la vérité morale, de la dignité humaine et bien sûr de la vie d'innocents à naître. Ce qui remplace ces valeurs chrétiennes, soutient Obama, c'est l'opportunité et le compromis: des valeurs laïques communes peuvent mener à des solutions communes, explique le président, ce qui, à son avantage, rend les lois autorisant l'avortement intouchables.
Aux diplômés de Notre Dame, Obama a donné en exemple son propre pragmatisme froid, sur lequel repose son agnosticisme rationnel. L'université n'a apporté aucune objection cohérente à la croyance, qui semble évidente à Obama, que la vérité ne peut jamais être atteinte et que sa revendication est source de divisions. Et là se trouve le plus mauvais service rendu par Notre Dame à ses étudiants et à ses élèves: en tant qu'institution consacrée à servir la vérité catholique, Notre Dame a donné l'impression que la complaisance avec le relativisme moral est le meilleur moyen, et le plus catholique, de rendre justice aux enfants à naître.
Fr. Aquinas Guilbeau, op
(Traduit de l'américain)
[b]Obama à Notre Dame[/b]
Le président Obama était reçu le 17 mai à l'université catholique Notre Dame, dans l'Indiana, pour prononcer le discours de remise des diplômes et recevoir un doctorat honoris causa, provoquant le scandale. Explication par un Dominicain américain.
Au mépris des instructions pourtant clairement données par les évêques américains, l'Université de Notre Dame a honoré, lors de sa remise de diplômes le mois dernier, un homme politique activement opposé à l'Évangile de la vie. Pour compliquer l'affaire, cet homme était le président récemment investi, Barack Obama.
Lors de la cérémonie du 17 mai, l'université a décerné un doctorat honoris causa au président Obama. Quelques instants plus tard, l'université l'accueillait sur le podium pour prononcer le discours de la remise des diplômes. Dans le système universitaire américain, ce sont les deux plus prestigieux honneurs qu'une université peut accorder à un homme. On ne sera donc pas étonné de voir plus de 80 évêques américains critiquer publiquement l'invitation de Notre Dame. Dans un ras-le-bol général, les évêques ont mis en garde l'université contre le mal que pouvait provoquer une telle remise de diplôme pour les catholiques américains.
Tout d'abord, ad intra, l'autorité enseignante des évêques, déjà affaiblie, pourrait souffrir au sein de la communauté universitaire. Ensuite, la décision de l'université pourrait, ad extra, remettre en cause la crédibilité de l'Église dans ses efforts pour apporter la vérité et la raison dans le débat national sur la vie humaine. Cette seconde inquiétude s'est déjà révélée prophétique. Les lignes du débat national sur l'avortement ont été redessinées le mois dernier à Notre Dame, et Obama, avec l'aide de l'université, les a habilement redéployées à son avantage.
Or, ce n'est pas le combat que les évêques américains comptaient mener à ce stade de la présidence d'Obama. À leur conférence en janvier, les évêques ont fêté la signification historique de l'élection d'Obama, mais ils ont aussi signalé leur détermination à s'opposer aux politiques contre la vie qu'il a défendues comme candidat. Avec force et vigueur, les évêques ont jusque-là tenu leur engagement. Depuis le 20 janvier, ils dénoncent la décision d'Obama d'autoriser le financement de l'avortement et de la recherche sur les cellules souches embryonnaires par les fonds publics. De plus, ils continuent de résister à la menace du président d'abroger l'objection de conscience qui protège les médecins et les hôpitaux et qui complique les procédures de fins de vie. Par des prêches publics, des lettres pastorales, des interviews télévisées, et même sur YouTube, les évêques ont mis sur pied une impressionnante campagne pro-lite qui semble avoir touché positivement les responsables politiques vis-à-vis de la vie humaine. Un récent sondage Gallup indique qu'au cours de l'année passée un nombre important d'Américains ont changé leur position passant du pro-choice au pro-life.
L'attitude de Notre Dame a ainsi modifié la vision de la lutte pro-life des évêques. Après des avancées publiques, l'épiscopat américain est maintenant forcé de battre en retraite et de se défendre au sein de ses propres institutions. En invitant Obama, l'administration universitaire a offert au président une plate-forme catholique à partir de laquelle il a pu promouvoir son programme pro-avortement. Faisant appel aux catégories spécieuses de dialogue et de juste échange, Obama a saisi l'opportunité de faire avancer sa cause. Avec son charme habituel et ses qualités oratoires, il a fragilisé le témoignage public pro-life des évêques. Depuis la tribune, Obama a appelé les catholiques américains à imiter l'effort des figures catholiques politiquement compromises qui, au lieu de soutenir la vérité, essaient de promouvoir le dialogue et un terrain d'entente avec les forces pro-avortement. Bien sûr, dans une population américaine peu habituée à la rancœur politique, cet appel de l'exécutif atteindra facilement des oreilles accueillantes. Le dialogue et le consensus demeurent des objectifs politiques légitimes. Mais dans le contexte du débat sur l'avortement, l'appel d'Obama préconisait une conformité culturelle à des principes immoraux et une acceptation du statu quo, c'est-à-dire une protection politique qui donnerait aux femmes le droit de choisir. En effet, Obama demande aux catholiques américains de considérer la question de l'avortement comme légalement tranchée, d'ignorer les contradictions de cette logique, et ainsi de laisser à la porte du débat public leurs inquiétudes à propos de la vérité morale, de la dignité humaine et bien sûr de la vie d'innocents à naître. Ce qui remplace ces valeurs chrétiennes, soutient Obama, c'est l'opportunité et le compromis: des valeurs laïques communes peuvent mener à des solutions communes, explique le président, ce qui, à son avantage, rend les lois autorisant l'avortement intouchables.
Aux diplômés de Notre Dame, Obama a donné en exemple son propre pragmatisme froid, sur lequel repose son agnosticisme rationnel. L'université n'a apporté aucune objection cohérente à la croyance, qui semble évidente à Obama, que la vérité ne peut jamais être atteinte et que sa revendication est source de divisions. Et là se trouve le plus mauvais service rendu par Notre Dame à ses étudiants et à ses élèves: en tant qu'institution consacrée à servir la vérité catholique, Notre Dame a donné l'impression que la complaisance avec le relativisme moral est le meilleur moyen, et le plus catholique, de rendre justice aux enfants à naître.
Fr. Aquinas Guilbeau, op
(Traduit de l'américain)