par Cinci » jeu. 10 déc. 2015, 4:01
Une causerie de Mgr Albert Rouet (ex-évêque de Poitiers) qui a eu lieu les 16 et 17 septembre 2011 à Montréal (Canada), à l'Institut pastoral des Dominicains. J'avais eu l'occasion de l'entendre aussi à la radio lors de cette visite. J'avais été charmé par le discours.
J'ai obtenu le texte la semaine dernière.
- «... la fidélité, pour le dire trop rapidement, c'est un mystère de morts et de résurrections. C'est la constance qui ne bouge pas, qui n'évolue jamais. La fidélité, elle, meurt à sa première manière pour ressusciter sous une autre forme. Je peux bien vous le dire, je suis resté prêtre, mais pas pour les mêmes raisons qui m'ont fait entrer au séminaire. Parce que l'on change, parce que la vie change. Je crois que la fidélité se tient dans l'évolution qui nous permet de vouloir à nouveau ce que l'on a voulu. On s'aperçoit, de mort en mort, qu'énormément de fausses raisons ou des raisons insuffisantes tombent. La vie ne pardonne rien. Des gens sur qui l'on comptait s'effondrent, des instances ecclésiales prennent des directions incroyables, des compromissions se dressent sous vos pas. Alors vous vous rendez compte que la seule raison qui tient à travers toutes ces morts, à travers toutes ces déceptions, tous ces aléas, c'est le Christ seul. C'est pourquoi la plus belle expression de la fidélité est cette vieille phrase qui remonte peut-être à saint Jérôme : suivre nu le Christ nu. Bien comprendre cette seule phrase nécéssite des années de réflexion, encore davantage pour l'appliquer un tant soit peu.
[...]
Qu'est-ce qui attire les catéchumènes? [...] Premièrement, l'historicité du Christ touche les gens. Cela ne veut pas dire qu'ils vont devenir chrétiens, mais puisque l'existence du Christ est historiquement assurée, qu'elle ne repose pas sur rien, la foi peut paraître crédible. Il y a des préalables à la foi, dont celui-là. Deuxièmement, pour d'autres, il y a une expérience spirituelle très réelle qui attire vers la personne du Christ, et c'est le Christ qui les renvoie vers l'Église. Troisièmement, il y a cette attention à la vie sociale, qui pousse les gens à se demander pourquoi les chrétiens font tout cela, pourquoi ils s'engagent en faveur de cet animal au corps complexe et malade, comme le dit le prophète Jérémie, et qui s'appelle l'homme.
Quant aux gestes et aux positions de l'Église qui nuiraient à sa crédibilité, je me permettrais une mise en garde : il faut faire attention avec le mot «Église», car en le globalisant constamment, on rend l'Église responsable de tout.
Par exemple, la décision de l'archevêque de Récife d'excommunier l'entourage d'une fillette de neuf ans ayant avorté met en cause cet archevêque brésilien. Personnellement, et j'espère que vous me le pardonnerez, je ne me suis pas du tout senti concerné par sa prise de position. Et j'ai le droit comme évêque dans l'Église, de dire que je ne la partage pas. On ne peut pas faire fonctionner l'Église comme une réalité stalinienne où tout le monde devrait s'aligner sur la première prise de parole sous prétexte qu'autrement l'unité volerait en éclat. L'unité ce n'est pas cela. C'est la communion. Je n'ai pas à me sentir engagé par les décisions de certaines églises locales.
Finalement, concernant l'Église de demain [...] Il faut confier des responsabilités à tous les baptisés et non pas les tenir pour des mineurs. Que si l'on veut être crédible il faut avoir des chrétiens adultes et non pas seulement des personnes qui aident. Que si demain l'on veut avoir une Église crédible, il faut des chrétiens formés qui ne sont pas butés sur des rites surannés mais qui aient un esprit ouvert et accessible au grand large. [...] Il faut cette espèce de radicalité évangélique qi est une radicalité de l'Incarnation et de la proximité. Il faut une Église du dialogue. Par exemple, tout le bruit fait autour des lefebvristes touche 3000 personnes en France. Je vous garantis que mes soucis premiers ne portent pas sur ces 3000 personnes, mais sur les millions de gens indifférents aux problèmes dont nous traitons ici.
Encore que l'imaginaire des gens reste extrêmement prégnant : l'église, son clocher, et à l'ombre du clocher, le presbytère avec ses petites allées de buis taillés où déambule Monsieur le curé en soutane, disant son bréviaire, le chat à ses côtés, la queue dans les pans de la soutane ... Le premier travail c'est de faire admettre la réalité : nous ne sommes plus dans un monde rural tel que nous le rêvons. Cette image rurale ou urbaine du curé est dépassée; elle ne correspond plus à la réalité. Or les gens ont toujours ces représentations en tête. [...]
Je trouve quand même fâcheux que le seul argument devant lequel tout le monde s'incline soit que nous manquions de prêtres. Portons un peu notre attention sur cet argument. D'abord, il est répété partout. Dans le diocèse de Poitiers, quand je suis parti, il y avait 10 000 laïcs engagés au service du diocèse. Pourtant, jamais les médias n'ont posé de questions à ce sujet, préférant me demander combien j'avais de prêtres. [...] mais qu'il y ait 42 diacres dans le diocèse, 99 laïcs ayant lettre de mission, qu'il y ait 320 communautés locales, rien de tout cela n'apparaît comme construisant l'Église. Nous sommes devant une sorte de pulsion non réfléchie, non critiquée, qui nous fait croire au fond que l'Église c'est le curé ou l'évêque. Eh bien, non. Non. Un évêque seul, ce n'est pas l'Église. Vous voyez que nous avons un travail à faire sur les mentalités, sur les représentations.
Les communautés locales
C'est à partir de ces idées que nous avons travailler à bâtir un nouveau visage d'Église, idées renforcées par une étude de saint Paul, qui nous apprend que tout baptisé possède des dons qu'il doit mettre au service de tous. Il faut trouver des moyens qui permettent à tous les baptisés - et pas simplement quelques élus, quelques chrétiens de première classe qui donnent le ton - d'exprimer leurs capacités dont l'Église a besoin pour grandir. Le baptisé n'est pas un membre passif de cette Église, il est un acteur chargé de construire le Corps du Christ. C'est une théologie du baptême qui fonde l'expérience des communautés locales.
La structure vous la connaissez. Elle vient d'Amérique latine et d'Afrique, où ces communautés prennent divers noms : communauté chrétienne de base, communauté chrétienne de quartier, etc. Peu importe le nom. Pour qu'il y ait Église, car c'est ce de cela qu'il faut partir, il faut que la foi soit annoncée, la prière assurée et la charité exercée.
[...]
En France, on ne cesse d'entendre que c'est perdu, que nous sommes les derniers des Mohicans et que s'il reste encore quelques survivants qui ont la foi, il vaudrait mieux les garder dans un musée pour que l'on puisse voir ce que c'était comme type de vivant. Les gens ont vraiment compris qu'une forme d'Église était passée, mais que l'Église était toujours vivante et qu'une nouvelle forme d'Église était en train de naître. Que la vie, précisément, c'est de faire autre chose. A mes yeux, la plus belle réussite des communautés locales, c'est d'avoir rendu l'espérance, et même, plus précisément, d'avoir rendu chaque chrétien acteur de l'espérance. [...] Comme me le disait une vieille dame qui avait été déléguée pastorale :«Hier, l'Église, elle était là-bas (pointant la sous-préfecture à 25 kilomètres). Et, maintenant, l'Église, elle est chez nous!»
- Où est célébré l'Eucharistie ? par qui ?
Pour l'Eucharistie, nous avons fait un choix [...] nous pouvions assurer, avec nos 250 prêtres, une messe par semaine dans chaque communauté, une messe hebdomadaire qui aurait eu lieu le lundi, le mardi, le mercredi, le jeudi ... en choisissant cette option, nous aurions inévitablement tué le dimanche. L'autre option : favoriser le dimanche, en sachant que nous ne pourrons assurer la messe tous les dimanches. Nous avons décidé de favoriser le dimanche. Nous ne sommes pas du tout partisans, vous le savez, que les gens aillent le dimanche à la messe pour le simple fait d'aller à la messe, car dès lors, ils iront à une messe ou à une autre, celle qui leur plaît, entraînant ainsi l'éclatement de la communauté locale. Par contre, il paraît très important que la communauté locale prie tous les dimanches. Nous donnons donc aux communautés des instruments pour ce faire. Quand cette rencontre est bien menée, quand c'est un vrai temps de prière, avec un petit café à la fin et la présentation des nouvelles de la communauté, la pratique augmente. Dans ce débat, nous avons pris une position digne de Salomon : on ne communie pas obligatoirement tous les dimanches lorsqu'il y a prière dominicale, pas plus que l'on ne communie jamais, l'idée étant d'amener la communauté à réfléchir sur les raisons de communier. Il s'agit de casser les automatismes et d'éviter, et on y tient beaucoup, que le problème soit résolu par un oukaze épiscopal tombant d'en haut.
- Accepteriez-vous que l'Eucharistie soit présidée par un homme ou une femme mariés?
[...] Ce qui se cache derrière cette question, et les communautés locales l'ont très bien compris, c'est le problème du plein et du vide. C'est la logique du jeune homme riche : il a de l'argent, une bonne situation, une bonne morale, et en plus il veut la vie éternelle ! Il veut tout, quoi ! Dans les communautés, on se réunit, on prie et si en plus on pouvait se faire sa messe ? Le risque est alors de se couper du reste des croyants. je crois que le premier travail du prêtre, sa première signification, est justement d'empêcher les communautés de s'autosatisfaire. Le prêtre ne préside pas l'Eucharistie parce qu'il préside une communauté, mais parce qu'il préside la communion entre les communautés. Lorsque vous avez tout, vous n'avez besoin de personne. La fraternité est alors impossible. Le prêtre est l'articulation entre les communautés auxquelles il est lié. C'est ainsi qu'il est serviteur de la communion, et c'est la raison pourquoi il va servir l'Eucharistie. Les communautés locales ont donc flairé qu'elles n'étaient pas Églises si elles étaient toutes seules, et qu'elles étaient toutes seules si elles avaient tout. A mon sens, le prêtre devrait être vu non pas comme celui qui a tous les pouvoirs, mais comme celui qui empêche les communautés de se refermer sur elles-mêmes, comme celui qui empêche la fermeture. Au nom du Christ.
Source : Verbatim de la conférence imprimé chez Fides pour le compte du Centre culturel chrétien de Montréal, «Hors de l'Évangile, point d'Église !», 2012, 92 p.
Une causerie de Mgr Albert Rouet (ex-évêque de Poitiers) qui a eu lieu les 16 et 17 septembre 2011 à Montréal (Canada), à l'Institut pastoral des Dominicains. J'avais eu l'occasion de l'entendre aussi à la radio lors de cette visite. J'avais été charmé par le discours.
J'ai obtenu le texte la semaine dernière.
[list]«... la fidélité, pour le dire trop rapidement, c'est un mystère de morts et de résurrections. C'est la constance qui ne bouge pas, qui n'évolue jamais. La fidélité, elle, meurt à sa première manière pour ressusciter sous une autre forme. Je peux bien vous le dire, je suis resté prêtre, mais pas pour les mêmes raisons qui m'ont fait entrer au séminaire. Parce que l'on change, parce que la vie change. Je crois que la fidélité se tient dans l'évolution qui nous permet de vouloir à nouveau ce que l'on a voulu. On s'aperçoit, de mort en mort, qu'énormément de fausses raisons ou des raisons insuffisantes tombent. La vie ne pardonne rien. Des gens sur qui l'on comptait s'effondrent, des instances ecclésiales prennent des directions incroyables, des compromissions se dressent sous vos pas. Alors vous vous rendez compte que la seule raison qui tient à travers toutes ces morts, à travers toutes ces déceptions, tous ces aléas, c'est le Christ seul. C'est pourquoi la plus belle expression de la fidélité est cette vieille phrase qui remonte peut-être à saint Jérôme : suivre nu le Christ nu. Bien comprendre cette seule phrase nécéssite des années de réflexion, encore davantage pour l'appliquer un tant soit peu.
[...]
Qu'est-ce qui attire les catéchumènes? [...] Premièrement, l'historicité du Christ touche les gens. Cela ne veut pas dire qu'ils vont devenir chrétiens, mais puisque l'existence du Christ est historiquement assurée, qu'elle ne repose pas sur rien, la foi peut paraître crédible. Il y a des préalables à la foi, dont celui-là. Deuxièmement, pour d'autres, il y a une expérience spirituelle très réelle qui attire vers la personne du Christ, et c'est le Christ qui les renvoie vers l'Église. Troisièmement, il y a cette attention à la vie sociale, qui pousse les gens à se demander pourquoi les chrétiens font tout cela, pourquoi ils s'engagent en faveur de cet animal au corps complexe et malade, comme le dit le prophète Jérémie, et qui s'appelle l'homme.
Quant aux gestes et aux positions de l'Église qui nuiraient à sa crédibilité, je me permettrais une mise en garde : il faut faire attention avec le mot «Église», car en le globalisant constamment, on rend l'Église responsable de tout.
Par exemple, la décision de l'[b]archevêque de Récife[/b] d'excommunier l'entourage d'une fillette de neuf ans ayant avorté met en cause cet archevêque brésilien. Personnellement, et j'espère que vous me le pardonnerez, je ne me suis pas du tout senti concerné par sa prise de position. Et j'ai le droit comme évêque dans l'Église, de dire que je ne la partage pas. On ne peut pas faire fonctionner l'Église comme une réalité stalinienne où tout le monde devrait s'aligner sur la première prise de parole sous prétexte qu'autrement l'unité volerait en éclat. L'unité ce n'est pas cela. C'est la communion. Je n'ai pas à me sentir engagé par les décisions de certaines églises locales.
Finalement, concernant l'Église de demain [...] Il faut confier des responsabilités à tous les baptisés et non pas les tenir pour des mineurs. Que si l'on veut être crédible il faut avoir des chrétiens adultes et non pas seulement des personnes qui aident. Que si demain l'on veut avoir une Église crédible, il faut des chrétiens formés qui ne sont pas butés sur des rites surannés mais qui aient un esprit ouvert et accessible au grand large. [...] Il faut cette espèce de radicalité évangélique qi est une radicalité de l'Incarnation et de la proximité. Il faut une Église du dialogue. Par exemple, tout le bruit fait autour des lefebvristes touche 3000 personnes en France. Je vous garantis que mes soucis premiers ne portent pas sur ces 3000 personnes, mais sur les millions de gens indifférents aux problèmes dont nous traitons ici.
Encore que l'imaginaire des gens reste extrêmement prégnant : l'église, son clocher, et à l'ombre du clocher, le presbytère avec ses petites allées de buis taillés où déambule Monsieur le curé en soutane, disant son bréviaire, le chat à ses côtés, la queue dans les pans de la soutane ... Le premier travail c'est de faire admettre la réalité : nous ne sommes plus dans un monde rural tel que nous le rêvons. Cette image rurale ou urbaine du curé est dépassée; elle ne correspond plus à la réalité. Or les gens ont toujours ces représentations en tête. [...]
Je trouve quand même fâcheux que le seul argument devant lequel tout le monde s'incline soit que nous manquions de prêtres. Portons un peu notre attention sur cet argument. D'abord, il est répété partout. Dans le diocèse de Poitiers, quand je suis parti, il y avait 10 000 laïcs engagés au service du diocèse. Pourtant, jamais les médias n'ont posé de questions à ce sujet, préférant me demander combien j'avais de prêtres. [...] mais qu'il y ait 42 diacres dans le diocèse, 99 laïcs ayant lettre de mission, qu'il y ait 320 communautés locales, rien de tout cela n'apparaît comme construisant l'Église. Nous sommes devant une sorte de pulsion non réfléchie, non critiquée, qui nous fait croire au fond que l'Église c'est le curé ou l'évêque. Eh bien, non. Non. Un évêque seul, ce n'est pas l'Église. Vous voyez que nous avons un travail à faire sur les mentalités, sur les représentations.
[b]Les communautés locales[/b]
C'est à partir de ces idées que nous avons travailler à bâtir un nouveau visage d'Église, idées renforcées par une étude de saint Paul, qui nous apprend que tout baptisé possède des dons qu'il doit mettre au service de tous. Il faut trouver des moyens qui permettent à tous les baptisés - [i]et pas simplement quelques élus, quelques chrétiens de première classe qui donnent le ton[/i] - d'exprimer leurs capacités dont l'Église a besoin pour grandir. Le baptisé n'est pas un membre passif de cette Église, il est un acteur chargé de construire le Corps du Christ. C'est une théologie du baptême qui fonde l'expérience des communautés locales.
La structure vous la connaissez. Elle vient d'Amérique latine et d'Afrique, où ces communautés prennent divers noms : communauté chrétienne de base, communauté chrétienne de quartier, etc. Peu importe le nom. Pour qu'il y ait Église, car c'est ce de cela qu'il faut partir, il faut que la foi soit annoncée, la prière assurée et la charité exercée.
[...]
En France, on ne cesse d'entendre que c'est perdu, que nous sommes les derniers des Mohicans et que s'il reste encore quelques survivants qui ont la foi, il vaudrait mieux les garder dans un musée pour que l'on puisse voir ce que c'était comme type de vivant. Les gens ont vraiment compris qu'une forme d'Église était passée, mais que l'Église était toujours vivante et qu'une nouvelle forme d'Église était en train de naître. Que la vie, précisément, c'est de faire autre chose. A mes yeux, la plus belle réussite des communautés locales, c'est d'avoir rendu l'espérance, et même, plus précisément, d'avoir rendu chaque chrétien acteur de l'espérance. [...] Comme me le disait une vieille dame qui avait été déléguée pastorale :«Hier, l'Église, elle était là-bas (pointant la sous-préfecture à 25 kilomètres). Et, maintenant, l'Église, elle est chez nous!»
- [i]Où est célébré l'Eucharistie ? par qui ?[/i]
Pour l'Eucharistie, nous avons fait un choix [...] nous pouvions assurer, avec nos 250 prêtres, une messe par semaine dans chaque communauté, une messe hebdomadaire qui aurait eu lieu le lundi, le mardi, le mercredi, le jeudi ... en choisissant cette option, nous aurions inévitablement tué le dimanche. L'autre option : favoriser le dimanche, en sachant que nous ne pourrons assurer la messe tous les dimanches. Nous avons décidé de favoriser le dimanche. Nous ne sommes pas du tout partisans, vous le savez, que les gens aillent le dimanche à la messe pour le simple fait d'aller à la messe, car dès lors, ils iront à une messe ou à une autre, celle qui leur plaît, entraînant ainsi l'éclatement de la communauté locale. Par contre, il paraît très important que la communauté locale prie tous les dimanches. Nous donnons donc aux communautés des instruments pour ce faire. Quand cette rencontre est bien menée, quand c'est un vrai temps de prière, avec un petit café à la fin et la présentation des nouvelles de la communauté, la pratique augmente. Dans ce débat, nous avons pris une position digne de Salomon : on ne communie pas obligatoirement tous les dimanches lorsqu'il y a prière dominicale, pas plus que l'on ne communie jamais, l'idée étant d'amener la communauté à réfléchir sur les raisons de communier. Il s'agit de casser les automatismes et d'éviter, et on y tient beaucoup, que le problème soit résolu par un oukaze épiscopal tombant d'en haut.
- [i]Accepteriez-vous que l'Eucharistie soit présidée par un homme ou une femme mariés?[/i]
[...] Ce qui se cache derrière cette question, et les communautés locales l'ont très bien compris, c'est le problème du plein et du vide. C'est la logique du jeune homme riche : il a de l'argent, une bonne situation, une bonne morale, et en plus il veut la vie éternelle ! Il veut tout, quoi ! Dans les communautés, on se réunit, on prie et si en plus on pouvait se faire sa messe ? Le risque est alors de se couper du reste des croyants. je crois que le premier travail du prêtre, sa première signification, est justement d'empêcher les communautés de s'autosatisfaire. Le prêtre ne préside pas l'Eucharistie parce qu'il préside une communauté, mais parce qu'il préside la communion entre les communautés. Lorsque vous avez tout, vous n'avez besoin de personne. La fraternité est alors impossible. Le prêtre est l'articulation entre les communautés auxquelles il est lié. C'est ainsi qu'il est serviteur de la communion, et c'est la raison pourquoi il va servir l'Eucharistie. Les communautés locales ont donc flairé qu'elles n'étaient pas Églises si elles étaient toutes seules, et qu'elles étaient toutes seules si elles avaient tout. A mon sens, le prêtre devrait être vu non pas comme celui qui a tous les pouvoirs, mais comme celui qui empêche les communautés de se refermer sur elles-mêmes, comme celui qui empêche la fermeture. Au nom du Christ.
Source : [i]Verbatim[/i] de la conférence imprimé chez Fides pour le compte du Centre culturel chrétien de Montréal, «Hors de l'Évangile, point d'Église !», 2012, 92 p.[/list]