par Socrate d'Aquin » lun. 08 oct. 2018, 22:01
Cher Valentin,
J'entends ce que vous dites Héraclius. Attention cependant à ne pas confondre universalisme et cosmopolitisme : le premier transcende les particularismes et les mesquineries provinciales. Il consiste à savoir d'où l'on vient, et y puiser la racine vitale, afin de la dépasser vers un idéal suprahumain que peuvent entrevoir tous les hommes.
Le cosmopolitisme au contraire, n'est pas dépassement, mais chaos : un agrégat désordonné, éclectique de traditions (racines) diverses, qui coexistent dans un même contexte, mais sans se fondre dans un tronc commun. Il signifie l'indifférence et l'adaptation à toutes les traditions, parce qu'en soi on n'en possède plus une de définie, d'héritée. C'est la tragédie de l’Église latine.
C'est en ce sens que je rejette la conception romaine de la catholicité, qui consiste en réalité à réunir des traditions liturgiques (et donc théologiques) incompatibles sous l'autorité du Vatican. Un prêtre catholique français n'a pas le droit d'avoir une épouse ; mais un prêtre greco-catholique le peut ! Vous voyez bien que c'est absurde.
Il n'y a nulle contradiction dans l'exemple que vous citez : dans un cas, on souligne la très profonde correspondance entre sacerdoce et célibat (correspondance que l'Eglise latine a très justement conservé) ; dans l'autre, on met en valeur que malgré tout, le sacerdoce ne l'implique pas nécessairement. Je me réjouis de cette diversité, en observant qu'on observe de part et d'autres des exceptions.
La chose serait autrement plus grave si l'on admettait une Eglise unitarienne par exemple.
Précisément, il n'y a aucun cosmopolitisme dans l'Eglise catholique : chacun vit selon sa tradition propre, sans confusion ; du moins est-ce là l'idéal qui est donné par l'Eglise.
L’Église orthodoxe quant à elle, est une véritable Communion universelle (katholikos) entre Églises autocéphales. Des particularités locales existent bel et bien entre Grecs, Russes, Roumains et Serbes (elles sont mentionnées par Maxime Kovalevsky dans l'extrait ci-dessus cité par notre ami Socrate) : elles ne sont pas niées d'ailleurs, mais transcendées, sublimées par une théologie commune, véritablement catholique.
C'est tout à fait exact, de même qu'il y a (ou qu'il y a eu) des usages différents en Angleterre (Sarum), en France (Lyon, Paris et Bayeux), en Espagne (rite mozarabe), en Allemagne, en Autriche... pour autant, je n'aurais nulle envie d'imposer l'un ou l'autre de ces usages aux pays de culture orientale.
Pour ce qui est de la France byzantine (catholique ou orthodoxe), j'observe deux choses. D'abord, les paroisses orthodoxes francophone ne sont pas très nombreuses. A Paris, sur la vingtaine de lieux de culte orthodoxes que compte la capitale, on compte en compte deux qui célèbrent la liturgie en français. Ne parlons pas du reste de la France.
De plus, elles se trouvent à mon sens dans une situation peu confortable : d'un côté, elles entendent s'adapter à la réalité du pays où elles se trouvent (et c'est bien). De l'autre, elles ne le font pas jusqu'au bout, et n'adoptent pas les usages liturgiques qui sont ceux de ce pays ("de ceux qui le gouvernent, et pour tout son peuple, prions le Seigneur..." pardon, je n'ai pas pu m'en empêcher).
Par ailleurs, comme l'a très bien dit Héraclius, non seulement la situation liturgique de l'Eglise catholique (et non pas seulement latine, quoi que l'on pense) est bien plus proche de celle que connurent les Pères que ne l'est celle de l'Orthodoxie, mais je ne vois pas pour quelle raison je devrais abandonner ma latinité. Quoi qu'il en soit des additions (très relatives) qui ont enrichi la liturgie romaine, elle est globalement resté semblable à celle que connut Rome avant 1054. Au nom de quoi faudrait-il l'abandonner au profit du rite byzantin, plus récent quoique tout aussi respectable ?
Personne n'attend de vous que vous abandonniez votre latinité. Contrairement à ce que vous affirmez, il existe au sein de l’Église orthodoxe la possibilité de conserver le rite latin, même si, à titre personnel, je considère qu'il ne peut s'agir là que d'une solution transitoire pour des nouveaux convertis avant le passage à la liturgie byzantine, seule véritablement orthodoxe.
Par ailleurs, quelle plus belle preuve de catholicité peut-il y avoir que de louer Dieu dans une langue étrangère, à travers une tradition qui, sans être celle de ses racines propres, les magnifie en les universalisant ? Je n'ai pas l'impression de trahir mes racines françaises, que je chéris tendrement, lorsque je participe à la liturgie slavonne.
Mais admettons que je veuille comprendre tout ce que dit le prêtre sans recourir à l'aide d'un livret liturgique : je n'ai qu'à me rendre dans une des (nombreuses) paroisses francophones qui existent dans toutes les grandes villes de France.
Quelle pauvre latinité que celle que vous mentionnez ; elle se résume à quelques paroisses, essentiellement aux Etats-Unis, coupées la plupart du temps de toute Eglise "canonique", et même dans le cas contraire, privées de toute hiérarchie. En outre, quelle liturgie célèbrent-elles ? Soit une reconstitution hasardeuse de l'ancien rite des Gaules ; soit une douteuse adaptation du rituel anglican ; soit une adaptation de la liturgie romaine, le plus souvent en langue anglaise. Peu attirant.
Au moins les grecs-catholiques bénéficient-ils non seulement de leurs usages liturgiques propres, mais aussi d'une hiérarchie propre (dans le meilleur des cas) : ils ont des clercs formés à leurs traditions, et ordonnés par leurs propres évêques.
J'ai écrit un petit article à ce sujet, si cela vous intéresse :
http://reflexioncatholiques.over-blog.c ... caise.html
Cher Valentin,
[quote]J'entends ce que vous dites Héraclius. Attention cependant à ne pas confondre universalisme et cosmopolitisme : le premier transcende les particularismes et les mesquineries provinciales. Il consiste à savoir d'où l'on vient, et y puiser la racine vitale, afin de la dépasser vers un idéal suprahumain que peuvent entrevoir tous les hommes.
Le cosmopolitisme au contraire, n'est pas dépassement, mais chaos : un agrégat désordonné, éclectique de traditions (racines) diverses, qui coexistent dans un même contexte, mais sans se fondre dans un tronc commun. Il signifie l'indifférence et l'adaptation à toutes les traditions, parce qu'en soi on n'en possède plus une de définie, d'héritée. C'est la tragédie de l’Église latine.
C'est en ce sens que je rejette la conception romaine de la catholicité, qui consiste en réalité à réunir des traditions liturgiques (et donc théologiques) incompatibles sous l'autorité du Vatican. Un prêtre catholique français n'a pas le droit d'avoir une épouse ; mais un prêtre greco-catholique le peut ! Vous voyez bien que c'est absurde.
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Il n'y a nulle contradiction dans l'exemple que vous citez : dans un cas, on souligne la très profonde correspondance entre sacerdoce et célibat (correspondance que l'Eglise latine a très justement conservé) ; dans l'autre, on met en valeur que malgré tout, le sacerdoce ne l'implique pas nécessairement. Je me réjouis de cette diversité, en observant qu'on observe de part et d'autres des exceptions.
La chose serait autrement plus grave si l'on admettait une Eglise unitarienne par exemple.
Précisément, il n'y a aucun cosmopolitisme dans l'Eglise catholique : chacun vit selon sa tradition propre, sans confusion ; du moins est-ce là l'idéal qui est donné par l'Eglise.
[quote]L’Église orthodoxe quant à elle, est une véritable Communion universelle (katholikos) entre Églises autocéphales. Des particularités locales existent bel et bien entre Grecs, Russes, Roumains et Serbes (elles sont mentionnées par Maxime Kovalevsky dans l'extrait ci-dessus cité par notre ami Socrate) : elles ne sont pas niées d'ailleurs, mais transcendées, sublimées par une théologie commune, véritablement catholique.
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C'est tout à fait exact, de même qu'il y a (ou qu'il y a eu) des usages différents en Angleterre (Sarum), en France (Lyon, Paris et Bayeux), en Espagne (rite mozarabe), en Allemagne, en Autriche... pour autant, je n'aurais nulle envie d'imposer l'un ou l'autre de ces usages aux pays de culture orientale.
Pour ce qui est de la France byzantine (catholique ou orthodoxe), j'observe deux choses. D'abord, les paroisses orthodoxes francophone ne sont pas très nombreuses. A Paris, sur la vingtaine de lieux de culte orthodoxes que compte la capitale, on compte en compte deux qui célèbrent la liturgie en français. Ne parlons pas du reste de la France.
De plus, elles se trouvent à mon sens dans une situation peu confortable : d'un côté, elles entendent s'adapter à la réalité du pays où elles se trouvent (et c'est bien). De l'autre, elles ne le font pas jusqu'au bout, et n'adoptent pas les usages liturgiques qui sont ceux de ce pays ("de ceux qui le gouvernent, et pour tout son peuple, prions le Seigneur..." pardon, je n'ai pas pu m'en empêcher).
Par ailleurs, comme l'a très bien dit Héraclius, non seulement la situation liturgique de l'Eglise catholique (et non pas seulement latine, quoi que l'on pense) est bien plus proche de celle que connurent les Pères que ne l'est celle de l'Orthodoxie, mais je ne vois pas pour quelle raison je devrais abandonner ma latinité. Quoi qu'il en soit des additions (très relatives) qui ont enrichi la liturgie romaine, elle est globalement resté semblable à celle que connut Rome avant 1054. Au nom de quoi faudrait-il l'abandonner au profit du rite byzantin, plus récent quoique tout aussi respectable ?
[quote]Personne n'attend de vous que vous abandonniez votre latinité. Contrairement à ce que vous affirmez, il existe au sein de l’Église orthodoxe la possibilité de conserver le rite latin, même si, à titre personnel, je considère qu'il ne peut s'agir là que d'une solution transitoire pour des nouveaux convertis avant le passage à la liturgie byzantine, seule véritablement orthodoxe.
Par ailleurs, quelle plus belle preuve de catholicité peut-il y avoir que de louer Dieu dans une langue étrangère, à travers une tradition qui, sans être celle de ses racines propres, les magnifie en les universalisant ? Je n'ai pas l'impression de trahir mes racines françaises, que je chéris tendrement, lorsque je participe à la liturgie slavonne.
Mais admettons que je veuille comprendre tout ce que dit le prêtre sans recourir à l'aide d'un livret liturgique : je n'ai qu'à me rendre dans une des (nombreuses) paroisses francophones qui existent dans toutes les grandes villes de France.
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Quelle pauvre latinité que celle que vous mentionnez ; elle se résume à quelques paroisses, essentiellement aux Etats-Unis, coupées la plupart du temps de toute Eglise "canonique", et même dans le cas contraire, privées de toute hiérarchie. En outre, quelle liturgie célèbrent-elles ? Soit une reconstitution hasardeuse de l'ancien rite des Gaules ; soit une douteuse adaptation du rituel anglican ; soit une adaptation de la liturgie romaine, le plus souvent en langue anglaise. Peu attirant.
Au moins les grecs-catholiques bénéficient-ils non seulement de leurs usages liturgiques propres, mais aussi d'une hiérarchie propre (dans le meilleur des cas) : ils ont des clercs formés à leurs traditions, et ordonnés par leurs propres évêques.
J'ai écrit un petit article à ce sujet, si cela vous intéresse : [url]http://reflexioncatholiques.over-blog.com/2018/06/le-chant-du-cygne-de-l-orthodoxie-francaise.html[/url]