par jeanbaptiste » lun. 21 oct. 2013, 23:28
En fait, le problème, c'est que votre phrase de Jean semble contradictoire si elle extraite de son contexte que voici :
Car la Loi fut donnée par Moïse;
la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.
18 Nul n'a jamais vu Dieu;
le Fils unique,
qui est tourné vers le sein du Père,
lui, l'a fait connaître.
Que veut dire Jean ? Que jusqu'à la première venue de Jésus, la Révélation n'était pas accomplie.
Jésus dit : "Je ne suis pas venu abolir la Loi, mais l'accomplir".
"Nul n'a jamais vu Dieu" se rapporte donc à cela : que la Révélation est achevée avec la venue de Jésus et donc que tout ce que l'on "entrevoyait" de cette Révélation jusqu'au Christ, était incomplète, que l'on ne connaissait donc pas Dieu "en plénitude".
Ce passage ne concerne pas les expériences particulières de rencontre avec Dieu (dans laquelle entre l'histoire de Jacob, qui est une "exception qui confirme la règle"), elle concerne le régime général de la Révélation, achevée avec le Christ.
Pour faire court : Jean ne parle pas ici de Jacob car cela n'est pas son sujet, il parle d'une chose proche, mais sur un autre plan.
Mais voyez, votre question est loin d'être idiote et ma réponse n'y répond pas totalement :
saint Augustin disait déjà :
Que signifient donc ces paroles de Jacob: "J'ai vu le Seigneur face à face", (Gn 32,30) et ce qui est écrit de Moïse, qu'il parlait à Dieu face à face (Ex 33,11), et encore ce que le prophète Isaïe dit de lui-même: "J'ai vu le Seigneur des armées assis sur un trône ?" (Is 6,1)
Ce à quoi, les Pères ont donnés diverses réponses complémentaires :
saint Grégoire le Grand :
Ces textes nous donnant clairement à comprendre que pendant cette vie mortelle, on peut bien voir Dieu sous certaines figures, mais jamais dans la claire manifestation de sa nature, c'est-à-dire que, l'âme comme inspirée par la grâce de l'Esprit saint, le voit comme à travers ces figures, mais sans pouvoir jamais parvenir à la vue intime de son essence. C'est ainsi que Jacob, qui affirme qu'il a vu Dieu, n'a vu cependant qu'un ange; c'est ainsi encore que Moïse, qui parlait à Dieu face à face, lui fait cette prière: "Manifestez-vous à moi ouvertement, afin que je vous voie et que je vous connaisse" (Ex 33,18). D'où nous pouvons conclure qu'il avait soif de voir dans toute sa splendeur cette nature infinie qu'il avait commencé à voir dans des figures imparfaites.
saint Jean Chrysostome :
Si les patriarches de l'Ancien Testament avaient véritablement vu la nature divine, ils ne l'auraient point vue sous des formes différentes, car cette divine nature est simple et sans figure, on ne peut la supposer ni assise, ni debout, ni en marche, toutes choses qui ne conviennent qu'aux corps. Aussi écoutez comment Dieu parle par son prophète: "J'ai multiplié pour eux les visions, et ils m'ont représenté à vous sous des images différentes" (Os 12,10). C'est-à-dire, je me suis accommodé à leur faiblesse; je ne leur ai pas apparu tel que j'étais. Comme le Fils de Dieu devait se manifester à nous dans une chair véritable, il les préparait dès lors à voir Dieu, autant que cela leur était possible.
saint Augustin :
Ces paroles sont encore vraies en ce sens, que personne n'a jamais pu comprendre, non seulement des yeux du corps, mais par les forces de son esprit, la plénitude de l'essence divine. Il y a, en effet, une grande différence entre la simple vision et la compréhension parfaite. Nous voyons ce dont nous apercevons la présence de quelque manière que ce soit, mais nous comprenons une chose quand nous la voyons si parfaitement, qu'aucune des parties qui la composent n'échappe à nos investigations.
Je retiens deux points :
1) Dieu s’accommode de la faiblesse des hommes et se montre sous le jour qu'à une époque donnée ces hommes peuvent comprendre.
2) Il y a voir et voir : quand Jacob dit "j'ai vu Dieu", ce qu'il voit n'est pas Dieu en sa plénitude complète, ce que son intelligence limitée dans son corps mortel (et non encore glorieux), serait incapable d'appréhender, ce qu'il dit c'est qu'il a vu Dieu se manifester à lui d'une manière qu'il pouvait entendre. On dit qu'il a vu un ange de Dieu, oui, car un ange est un "envoyé" de Dieu et est une présence et un message très clair de Dieu Lui-même.
Les deux vont ensemble.
Car en vérité, quand on dit "j'ai vu le pape", dit-on qu'on l'a vu "en plénitude", que l'on a perçu la totalité de sa nature ? Non. Quand bien même nous resterions des heures à lui parler, nous serions éloigné d'une vision "en plénitude". Il reste que nous l'avons vu, nous avons vu une "manifestation" de lui, et non pas sa nature plein et entière.
C'est vrai pour Dieu. Un ange de Dieu c'est une manifestation de Lui envoyé aux hommes. En ce sens voir un ange envoyé par Dieu c'est voir ce que Dieu veut que nous sachions de Lui à tel moment, c'est voir ce qu'Il veut que nous voyons de Lui à tel moment.
Car la vision "réelle" de Dieu ne peut être que la vision de sa nature pleine et entière, et cette vision là nous est impossible, au moins ici-bas.
Le Christ, en tant qu'Incarnation de l'Être, est donc un extraordinaire Mystère car il est par nature l'Incarnation même de ce qui, théoriquement, était "inincarnable".
Et il faut donc réintroduire ce mot de Jean dans ce contexte : Oui, nul n'a vu Dieu. Car même si les anges ont été quelque chose comme de "petites révélations" de Dieu faites à quelques hommes, le Christ Lui, est la Révélation faite à tous les hommes en tant qu'il est à la fois le messager et le message.
En fait, le problème, c'est que votre phrase de Jean semble contradictoire si elle extraite de son contexte que voici :
[quote]Car la Loi fut donnée par Moïse;
la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.
18 Nul n'a jamais vu Dieu;
le Fils unique,
qui est tourné vers le sein du Père,
lui, l'a fait connaître.[/quote]
Que veut dire Jean ? Que jusqu'à la première venue de Jésus, la Révélation n'était pas accomplie.
Jésus dit : "Je ne suis pas venu abolir la Loi, mais l'accomplir".
"Nul n'a jamais vu Dieu" se rapporte donc à cela : que la Révélation est achevée avec la venue de Jésus et donc que tout ce que l'on "entrevoyait" de cette Révélation jusqu'au Christ, était incomplète, que l'on ne connaissait donc pas Dieu "en plénitude".
Ce passage ne concerne pas les expériences particulières de rencontre avec Dieu (dans laquelle entre l'histoire de Jacob, qui est une "exception qui confirme la règle"), elle concerne le régime général de la Révélation, achevée avec le Christ.
Pour faire court : Jean ne parle pas ici de Jacob car cela n'est pas son sujet, il parle d'une chose proche, mais sur un autre plan.
Mais voyez, votre question est loin d'être idiote et ma réponse n'y répond pas totalement :
saint Augustin disait déjà :
[quote]Que signifient donc ces paroles de Jacob: "J'ai vu le Seigneur face à face", (Gn 32,30) et ce qui est écrit de Moïse, qu'il parlait à Dieu face à face (Ex 33,11), et encore ce que le prophète Isaïe dit de lui-même: "J'ai vu le Seigneur des armées assis sur un trône ?" (Is 6,1)[/quote]
Ce à quoi, les Pères ont donnés diverses réponses complémentaires :
saint Grégoire le Grand :
[quote]Ces textes nous donnant clairement à comprendre que pendant cette vie mortelle, on peut bien voir Dieu sous certaines figures, [b]mais jamais dans la claire manifestation de sa nature[/b], c'est-à-dire que, l'âme comme inspirée par la grâce de l'Esprit saint, le voit comme à travers ces figures, mais sans pouvoir jamais parvenir à la vue intime de son essence. C'est ainsi que Jacob, qui affirme qu'il a vu Dieu, n'a vu cependant qu'un ange; c'est ainsi encore que Moïse, qui parlait à Dieu face à face, lui fait cette prière: "Manifestez-vous à moi ouvertement, afin que je vous voie et que je vous connaisse" (Ex 33,18). D'où nous pouvons conclure qu'il avait soif de voir dans toute sa splendeur cette nature infinie qu'il avait commencé à voir dans des figures imparfaites.[/quote]
saint Jean Chrysostome :
[quote]Si les patriarches de l'Ancien Testament avaient véritablement vu la nature divine, ils ne l'auraient point vue sous des formes différentes, car cette divine nature est simple et sans figure, on ne peut la supposer ni assise, ni debout, ni en marche, toutes choses qui ne conviennent qu'aux corps. Aussi écoutez comment Dieu parle par son prophète: "[b]J'ai multiplié pour eux les visions, et ils m'ont représenté à vous sous des images différentes[/b]" (Os 12,10). C'est-à-dire,[b] je me suis accommodé à leur faiblesse[/b]; je ne leur ai pas apparu tel que j'étais. Comme le Fils de Dieu devait se manifester à nous dans une chair véritable, il les préparait dès lors à voir Dieu, autant que cela leur était possible.[/quote]
saint Augustin :
[quote]Ces paroles sont encore vraies en ce sens, que personne n'a jamais pu comprendre, non seulement des yeux du corps, mais par les forces de son esprit, la plénitude de l'essence divine. [b]Il y a, en effet, une grande différence entre la simple vision et la compréhension parfaite.[/b] Nous voyons ce dont nous apercevons la présence de quelque manière que ce soit, mais nous comprenons une chose quand nous la voyons si parfaitement, qu'aucune des parties qui la composent n'échappe à nos investigations.[/quote]
Je retiens deux points :
1) Dieu s’accommode de la faiblesse des hommes et se montre sous le jour qu'à une époque donnée ces hommes peuvent comprendre.
2) Il y a voir et voir : quand Jacob dit "j'ai vu Dieu", ce qu'il voit n'est pas Dieu en sa plénitude complète, ce que son intelligence limitée dans son corps mortel (et non encore glorieux), serait incapable d'appréhender, ce qu'il dit c'est qu'il a vu Dieu se manifester à lui d'une manière qu'il pouvait entendre. On dit qu'il a vu un ange de Dieu, oui, car un ange est un "envoyé" de Dieu et est une présence et un message très clair de Dieu Lui-même.
Les deux vont ensemble.
Car en vérité, quand on dit "j'ai vu le pape", dit-on qu'on l'a vu "en plénitude", que l'on a perçu la totalité de sa nature ? Non. Quand bien même nous resterions des heures à lui parler, nous serions éloigné d'une vision "en plénitude". Il reste que nous l'avons vu, nous avons vu une "manifestation" de lui, et non pas sa nature plein et entière.
C'est vrai pour Dieu. Un ange de Dieu c'est une manifestation de Lui envoyé aux hommes. En ce sens voir un ange envoyé par Dieu c'est voir ce que Dieu veut que nous sachions de Lui à tel moment, c'est voir ce qu'Il veut que nous voyons de Lui à tel moment.
Car la vision "réelle" de Dieu ne peut être que la vision de sa nature pleine et entière, et cette vision là nous est impossible, au moins ici-bas.
Le Christ, en tant qu'Incarnation de l'Être, est donc un extraordinaire Mystère car il est par nature l'Incarnation même de ce qui, théoriquement, était "inincarnable".
Et il faut donc réintroduire ce mot de Jean dans ce contexte : Oui, nul n'a vu Dieu. Car même si les anges ont été quelque chose comme de "petites révélations" de Dieu faites à quelques hommes, le Christ Lui, est la Révélation faite à tous les hommes en tant qu'il est à la fois le messager et le message.