Le Politique et le Sacré - Falk Van Gaver

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par Christian » mar. 09 août 2005, 8:55

...l'homme est l'intendant des biens mis par Dieu à sa disposition. Il n'est pas autorisé à en abuser, mais ces biens sont à son service et non l'inverse.
La difficulté avec cette notion d’intendant est qu’elle est vide de tout contenu. Si je confie la gestion de mes nombreux immeubles à un syndic et de mon portefeuille à un banquier, je leur indique quel type de rendement je souhaite obtenir, quels investissements je souhaite exclure, etc. Aucun gérant sérieux n’acceptera un mandat ‘en blanc’. Or depuis le temps qu’on épluche la Bible, on n’a rien trouvé, rien de rien, sur le comportement que les êtres humains doivent avoir vis-à-vis de la nature, sinon qu’elle est là pour que nous la dominions, ce que nous faisons heureusement assez bien.

Non seulement le concept d’intendant est inopérant, mais il est dangereux, car en l’absence d’instruction divine, ce sont des instructions humaines que nous sommes sommés d’appliquer, avec les écolos, les gauchos, les tradis, les experts, chacun s’installant à la place du maître pour nous dire, à nous les gérants, ce que nous devons faire.

On a déjà assez donné avec les gens qui détournent les enseignements de la Bible pour que nous ne suivions pas ceux qui carrément en inventent.

Cela dit, l’absence d’instruction divine ne nous dégage pas de la responsabilité de la Création. Au contraire. Mais c’est à chacun de trouver la juste relation qu’il ou elle veut entretenir avec la nature. Vous avez donc bien raison de souligner que les ‘biens de la nature sont au service de l’être humain, et non l’inverse’ (l’inverse étant que nous ne devons ni idolâtrer, ni être prisonnier du monde matériel, ni le mépriser). Il n’existe nulle part une bonne réponse applicable à tous et que quelques esprits éclairés, voire illuminés, auraient découverte.

Christian

mon petit mot

par bajulans » sam. 06 août 2005, 23:29

Falk Van Gaver a fait un livre qui présente un certain intérêt, ce qui le gâte, à moins que ce ne soit l'effet de la lecture des seules citations, c'est cet aspect aphoristique, sentencieux.

Plus que d'aphorismes ou de sentences, nous avons besoins d'études sérieuses référencées. Nous crevons des calomnies.

Cela dit j'ai bien aimé : Sur la laïcité qui n'est pas de mettre l'Etat et l'Eglise, cote à cote, mais de faire dominer l'Etat sur l'Eglise. Bien vu.

Alors que l'Eglise parle de "saine laïcité" (Pie XII)

Pour ce qui de l'économe infidèle, je crois avoir compris que ce que loue le père de famille dans l'économe infidèle, ce n'est pas sa malhonnêteté, mais son caractère réfléchi et avisé. Il semble nous dire "vous ne réfléchissez pas assez, regardez donc les pécheurs comme ils sont malins, "prudents". Sur ce point, soyez comme eux."

C'est la même idée que dans "s'assoir avant de bâtir" (Lc 14, 28), il recommande de ne pas se lancer dans l'action sans avoir bien réfléchi préalablement. Toujours réfléchir avant d'agir. Celui qui se lance dans une construction doit d'abord bien réfléchir : "ai-je les moyens d'arriver jusqu'au boût du chantier." Il doit s'assoir avant de bâtir, pour calculer.

Et effectivement l'homme est l'intendant des biens mis par Dieu à sa disposition. Il n'est pas autorisé à en abuser, mais ces biens sont à son service et non l'inverse.

Pour ce qui est du sacrifice des animaux, c'est vrai que c'est un crêve coeur pour les humains dignes de ce nom, d'être obligés de tuer pour se nourrir. C'est certainement une suite de nos péchés et des péchés de nos pères. Nos anciens l'attribuaient au Déluge et à ses suites (les végétaux sont devenus moins nourrissant).

par zefdebruz » dim. 05 juin 2005, 15:21

Bonjour Christian,

et un grand merci pour votre analyse très intéressante de ce passage. J'interprétais cette parabole de manière très différente, mais j'avoue que votre raisonnement se tient ! La Parole du Seigneur est décidément inépuisable !

A bientôt

par Christian » dim. 05 juin 2005, 13:16

Bonjour zefdebruz,
lorsque Jésus dit " Faites vous des amis avec l'argent trompeur, pour que le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles " il expose au contraire de manière ironique ce qu'il faut éviter de faire : seul Dieu a le pouvoir d'accueillir dans les demeures éternelles, certainement pas des " amis" achetés !
“Ce que vous faites aux plus petits d’entre les miens, c’est à moi que vous le faites”

L’intendant de la création d’après la chute, où il faut bosser à la sueur de son front, où le fric existe, où chacun est endetté vis-à-vis de son frère, cet intendant agit juste. Il use du monde matériel comme il faut, pour soulager les peines humaines. Et il découvrira que ceux qui l’accueilleront dans le ciel ont le visage de ceux qu’il aura soulagés.

Et puisqu’on parle d’argent trompeur, rappelons-nous l’injonction de Jésus au jeune homme riche : « Vends tes biens et donne l’argent reçu aux pauvres. Tu auras un trésor dans les cieux ». Aurait-il ‘acheté’ les pauvres, ce jeune homme ?
Par ailleurs que dire du maître louant ensuite son gérant malhonnête pour son ingéniosité: comment pouvez vous confondre dans cette parabole ce maître avec le Père Eternel ? Surtout quand Jésus les assimile aux fils de ce monde, plus habiles entre eux que les fils de la Lumière.
Comme en science, retenons pour interpréter ce texte la théorie qui rend compte du maximum de phénomènes. Quel propriétaire humain féliciterait son intendant de l’avoir volé ? La parabole est incohérente si le propriétaire n’est pas le Père.

En revanche, le récit fait sens si les félicitations viennent du Père, de Celui qui a tout donné, qui ne retient rien. Le Père voit alors à travers l’action du gérant à quoi sert Sa création. Et effectivement, à quel meilleur usage l’affecter que de rendre plus légère la dette des hommes, que de rendre plus abondants l’huile et le froment ?

Et c’est Lui (sous la forme des désendettés) qui accueillera son gérant dans les demeures éternelles. Seule cette version tient la route. Jésus le charpentier sait bien que dans le monde des affaires, on ne rend guère les faveurs reçues (surtout si elles viennent d’un voleur). Le gérant ne pourrait sûrement pas compter sur de ‘vrais’ débiteurs du propriétaire lésé pour lui donner l’hospitalité après son renvoi.

Les fils de ce monde sont plus habiles que les fils de la lumière. C’est que ce Jésus reproche à ces derniers. « Et moi, je vous le dis… », formule habituelle du Seigneur pour contredire les idées reçues. « On vous a dit que… Et moi, je vous dis…. ». Il serait temps que les fils de la lumière pensent au bien matériel d’autrui, pensent à gérer la création et pas seulement leur âme. Il faut certes des Maries, mais des Marthes aussi.

Bon dimanche

Christian

par Christian » sam. 04 juin 2005, 22:46

Une pensée latérale pour suivre ma réponse ci-dessus à Charles.

Cette nature d’où Dieu s’est retiré, comme le déplore Van Gaver, nous pouvons la re-diviniser. Comment ?

C’est la fonction de l’économie. Eh oui.

L’homme, c’est du divinisable, nous dit le Père Varillon à la suite de Tertullien. « Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit fait Dieu ». Or l’homme économique est bien le démiurge de la nature. L’évolution, fruit du hasard selon Darwin, est aujourd’hui clairement son œuvre. A travers lui, l’évolution est devenue consciente. Il n’est bientôt plus un coin de terre que l’homme n’ait travaillé, plus un vivant dont il n’ait modifié l’environnement et/ou le patrimoine génétique par domestication, croisement ou manipulation.

L’économie, donc, humanise la nature. Elle façonne la nature à l’image de l’être humain, tantôt hideuse, tantôt splendide. Plus que tous autres, prêtres, politiciens, militaires, intellectuels, artistes, ce sont les hommes et les femmes d’affaires qui portent la responsabilité de cette humanisation de la nature.

A nous d’informer leur action. Pour que l’être humain en voie de divinisation imprime sur la nature sa marque divine.

Voilà le vrai enjeu de l’activité économique, sa fonction ultime et sublime.

Ma pensée du dimanche.

Christian

PS. A lire sur ce sujet les penseurs russes, Troubetskoï, Berdiaev, et surtout le Père Serge Boulgakov.

par zefdebruz » sam. 04 juin 2005, 22:39

Bonsoir Christian :) ,

votre interprétation est étonnante : vous n'avez pas le sentiment que lorsque Jésus dit " Faites vous des amis avec l'argent trompeur, pour que le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles " il expose au contraire de manière ironique ce qu'il faut éviter de faire : seul Dieu a le pouvoir d'accueillir dans les demeures éternelles, certainement pas des " amis" achetés !

Par ailleurs que dire du maître louant ensuite son gérant malhonnête pour son ingéniosité: comment pouvez vous confondre dans cette parabole ce maître avec le Père Eternel ? Surtout quand Jésus les assimile aux fils de ce monde, plus habiles entre eux que les fils de la Lumière.

Cordialement

par Christian » sam. 04 juin 2005, 19:35

Falk Van Gaver
Le principal agent du mépris de la Création et de l'exploitation égoïste des ressources naturelles est une société déchristianisée, ayant perdu le respect des oeuvres de Dieu et l'espérance d'un salut cosmique englobant toutes les créatures." (p. 28)

Falk Van Gaver encore:
"Le monde n'est pas en notre possession, il s'agit d'un don (...) L'ascèse, la chasteté, la maîtrise de soi signifient que nous devons volontairement limiter notre production et notre consommation en faisant une distinction cruciale entre ce que nous désirons et ce dont nous avons besoin. Le sacrifice est la dimension qui manque à l'éthique moderne de l'environnement et à toute action écologique". (pp. 59-60)

Christian a écrit:
Je viens de faire un commentaire dans ma paroisse du très curieux évangile du ‘gérant malhonnête' (Lc, 16), qui ne m’a pas valu que des enthousiasmes, mais qui je crois réfute ce[s] affirmation[s] de Falk Van Gaver.

Christophe
Pouvez-vous préciser dans quelle mesure la parabole de l'intendant infidèle vous semble réfuter l'affirmation de Falk van Gaver ?
[align=justify]1 Jésus disait encore à ses disciples : « Un homme riche avait un gérant qui lui fut dénoncé parce qu'il gaspillait ses biens. 2 Il le convoqua et lui dit : 'Qu'est-ce que j'entends dire de toi ? Rends-moi les comptes de ta gestion, car désormais tu ne pourras plus gérer mes affaires.' 3 Le gérant pensa : 'Que vais-je faire, puisque mon maître me retire la gérance ? Travailler la terre ? Je n'ai pas la force. Mendier ? J'aurais honte. 4 Je sais ce que je vais faire, pour qu'une fois renvoyé de ma gérance, je trouve des gens pour m'accueillir.'
5 Il fit alors venir, un par un, ceux qui avaient des dettes envers son maître. Il demanda au premier : 'Combien dois-tu à mon maître ? - 6 Cent barils d'huile.' Le gérant lui dit : 'Voici ton reçu ; vite, assieds-toi et écris cinquante.' 7 Puis il demanda à un autre : 'Et toi, combien dois-tu ? - Cent sacs de blé.' Le gérant lui dit : 'Voici ton reçu, écris quatre-vingts.' 8 Ce gérant trompeur, le maître fit son éloge : effectivement, il s'était montré habile, car les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière.
9 Eh bien moi, je vous le dis : Faites-vous des amis avec l'Argent trompeur, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles. 10 Celui qui est digne de confiance dans une toute petite affaire est digne de confiance aussi dans une grande. Celui qui est trompeur dans une petite affaire est trompeur aussi dans une grande. 11 Si vous n'avez pas été dignes de confiance avec l'Argent trompeur, qui vous confiera le bien véritable ? 12 Et si vous n'avez pas été dignes de confiance pour des biens étrangers, le vôtre, qui vous le donnera ?
13 Aucun domestique ne peut servir deux maîtres : ou bien il détestera le premier, et aimera le second ; ou bien il s'attachera au premier, et méprisera le second. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l'Argent. » (Luc, 16)[/align]



Il est certain que Jésus ne se livre pas ici à une étude de cas pour école de commerce. J’ai lu bien des commentaires de cette parabole et aucun ne m’a satisfait. Mon interprétation (qui vaut ce qu’elle vaut) est celle-ci :

Le propriétaire est le Père (comme celui du Fils prodigue, comme le Maître de la vigne, l’Hôte du grand festin, l’Epoux qui vient tard le soir, comme tant de figures des paraboles). Et s’il est le Père, alors Son domaine donné en gérance est la création. La logique du Père n’est pas celle comptable des intérêts humains. Il n’attend pas de dividendes de son domaine. Sa création est là pour la félicité de ceux qu’Il y placés. La faute du gérant est de l’avoir oublié. Justement, il a cru que Dieu était âpre à exiger des comptes, à Se faire payer.

Mais non, Dieu ne demande rien pour Lui de Son domaine. Voilà pourquoi cette parabole torpille tout le discours constipé des écolos-cathos-gauchos, qui viennent cafter chez le propriétaire : «Il y en a un qui gaspille Tes biens, gnagnagna» ; tout le discours de ‘l’intendance’, celui de ces ‘fils de la lumière’, de blanc vêtus, qui ne mettent pas la main à la pâte et ne font pas juter le domaine alors que les endettés manquent d’huile et de froment, de ces peureux qui enfouissent le talent qu’on leur a donné pour le rendre bien intact, écologiquement propre, des rabat-joie et pense-petit qui prêchent ‘vivez dans la gêne’, ‘consommez moins’, ‘faites des sacrifices’, ‘Dieu (le radin) n’en a pas créé assez pour tout le monde’...

Le gérant a vite fait de réparer son erreur. « Je n’avais pas compris que le critère de gestion, celui sur lequel je serai jugé, c’est l’abondance ». Et de remettre une partie des dettes dues à son maître. Il ne s’agit pas de se ‘servir au tas’, ce qui serait irresponsable, ni que la remise de dette soit égale pour tout le monde (50% pour l’un, 20% pour l’autre), ce qui ne tient pas compte des personnes, mais que chacun ait le maximum de ce qu'il peut faire produire à la création.

Se mettre au service d’autrui, totalement dépendant de son bon vouloir, est l’humilité que le marché réclame de chacun de ses acteurs. Nous ne pouvons plus, pris dans sa discipline, nous attacher à la terre, au domaine, à l’argent, à la matière, mais seulement à leur finalité, qui est le peuple humain. Nous ne devons plus être comme ces paysans, amoureux de leur lopin, mais comme ces producteurs, conscients d’avoir à nourrir le maximum d’êtres humains. Nous ne devons plus être comme ces artisans et ces ingénieurs, amoureux de leur belle ouvrage, mais comme ces entrepreneurs, qui regardent d’abord quel problème humain l’ouvrage doit résoudre, belle ou pas.

Ainsi, nous ne serons pas trompés par la séduction de la matière. Ainsi nous aurons porté la création jusqu'à l'abondance, et nous l'aurons offerte, à grandes mesures débordantes aux êtres humains, qui nous accueilleront un jour dans les demeures éternelles.

Voilà la trame de l’argument que j’ai développé dans une communauté ultra progressiste de Londres. Je ne sais pas dans quelle demeure ils m’accueilleront, ces braves gens, mais sûrement plus chez eux :lol:

Bien à vous tous

Christian[align=justify][/align]

par Christian » ven. 03 juin 2005, 21:53

Cher Charles,

Tu as tout à fait raison. Mais je pense néanmoins n’avoir pas tort. Question de perspective. Il est certain que les êtres humains de tout temps ont contemplé la Nature, mais leur ravissement n’avait pas la même source. Le Kosmos grec n’est beau et ordonné que parce qu’il est d’essence divine (pour Platon comme pour les stoïciens). Ces corps que la statuaire nous a laissés sont sur-naturels ; les dieux et les héros ne prennent que la forme humaine parfaite, celle que nul n’a jamais rencontrée vendant des oignons sur l’agora. Ce n’est pas la nature qui remplit de joie, mais comme St Bonaventure le dit, la contemplation de Dieu à travers « les vestiges » de ses créatures. Dédivinisée, la nature est ingrate, impitoyable, inhospitalière.

A partir des Lumières, et surtout de l’idéalisme allemand, cette nature désenchantée n’est plus que le cadre matériel sur lequel l’être humain projette son esprit. Dieu s’en est retiré. Pour Hegel, elle une non-valeur, pour Marx, un facteur de production. Et donc, à ce moment-là, pour la première fois, les êtres humains découvrent la nature dans sa nudité. Elle peut certes évoquer, comme le Mont Blanc pour Rousseau, ‘le Grand Etre’, mais c’est le contemplateur désormais qui l’y place, il n’y était pas au départ, et de moins en moins de gens perçoivent du divin dans le naturel. Si le paysage est beau, c’est en soi. La nature ne conserve plus que sa seule dimension utilitaire, pour procurer au touriste le frisson esthétique, ou pour y planter des choux.

Christian

Le droit divin...

par Christophe » jeu. 02 juin 2005, 21:15

Bonsoir MB
MB a écrit :Question, donc : le pouvoir donné par Dieu est-il a priori indifférent à son contenu ou à son usage ?
[align=justify]I. Tout pouvoir provient de Dieu

" Que si l'on veut déterminer la source du pouvoir dans l'Etat, l'Eglise enseigne avec raison qu'il la faut chercher en Dieu. C'est ce qu'elle a trouvé exprimé avec évidence dans les saintes Lettres et dans les monuments de l'antiquité chrétienne. [...]

Cette origine divine de l'autorité humaine est attestée de la façon la plus claire en maints passages de l'ancien Testament : " C'est par moi que règnent les rois, par moi que les souverains commandent, que les arbitres des peuples rendent la justice (Prov., VIII, 15-16)." [...]

Et, en effet, la doctrine et la morale de Jésus-Christ ont trouvé un écho fidèle dans la prédication des Apôtres. On connaît l'enseignement sublime et décisif que saint Paul donnait aux Romains, bien qu'ils fussent soumis à des empereurs païens. " Il n'y a de pouvoir que celui qui vient de Dieu (Tract. CXVI in Joan., n.5)." D'où l'Apôtre déduit, comme une conséquence, que " le souverain est le ministre de Dieu (Ad. Rom., XIII, 1, 4)."
"
S.S. le Pape Léon XIII, Encyclique Diuturnum illud, "Sur l'origine du pouvoir civil" (1881)

:arrow: Le Magistère de l'Eglise reconnaît en Dieu la source unique et naturelle de toute autorité humaine. Dans l'ordre politique, le souverain est ministre de Dieu : la souveraineté est exercée au nom de Dieu et son seul objet est d’œuvrer à accomplir le bien commun, qui est la volonté de Dieu pour la Cité.[/align]
Voir le sujet : La DSE et les différentes formes de gouvernement

[align=justify]Dire que tout pouvoir ( qu'il soit politique, économique, social, familial ou autre... ) vient de Dieu ne signifie pas que tous ceux qui exercent une autorité se comportent effectivement en dignes ministres de Dieu : cela signifie que l'objet de leur mission est d'accomplir, dans les limites de leur autorité, la volonté de Dieu pour les hommes.
Que l'on soit gouverneur ou empereur, chrétien ou païen ne change rien à l'affaire : les gouvernants reçoivent de Dieu le mandat de gouverner la Cité et de servir le Bien commun, dessein du Dieu trinitaire pour la société des hommes.
Maintenant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, même les méchants - et en premier lieu Satan - n'exercent leur empire que dans la mesure où Dieu le leur permet. Nous rejoignons là la question du mal dans le plan de Dieu... Dieu a payé le prix fort, par le sacrifice du Fils, pour que nous disposions de la liberté de répondre à Son amour.

" Et Dieu vit tout ce qu'il avait fait : c'était très bon. Il y eut un soir, il y eut un matin : ce fut le sixième jour. " ( Gn 1.31 )

A bientôt
Christophe[/align]

par MB » jeu. 02 juin 2005, 18:13

Re-avé

Je cite :
"Jésus n'enseigne pas à ses disciples : " Rendez à Dieu ce qui est à Dieu et révoltez vous contre César l'usurpateur " mais il leur enseigne : " Rendez à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César ". ( Mt 22.21 ) Si César possède - en droit - quelque chose, c'est donc bien que la sphère politique ne peut pas être - en droit - réduite pas à néant.

Interrogé par Pilate, Jésus ne lui répond pas : " Ton pouvoir, c'est de Satan que tu l'as reçu " mais il lui répond : Tu n'aurais aucun pouvoir sur moi si tu ne l'avais reçu d'en haut. " ( Jn 19.11 ) Si tout pouvoir provient de Dieu, c'est donc que la politique n'est pas par essence le domaine du Mal. Elle ne devient le domaine du Mal que lorsqu'elle tente de se couper de sa source..."


Je profite de cette remarque pour lancer une vague question.
Si Pilate a reçu son pouvoir d'en-haut (au fait, dans le texte, de quel en-haut s'agit-il ? Dieu ou l'empereur ?), alors c'est aussi le cas de n'importe quel roitelet, n'importe quel gouverneur de province, quoiqu'ils fassent, qu'ils soient chrétiens, paiens, ou tout ce qu'on veut. Et beaucoup de monde est concerné : que je sache, la plupart des chefs ou des rois qui ont gouverné quelque chose depuis que le pouvoir existe n'étaient pas chrétiens ni meme spécialement bons.

Question, donc : le pouvoir donné par Dieu est-il a priori indifférent à son contenu ou à son usage ?

Cordialement

par MB » jeu. 02 juin 2005, 18:01

Coucou !
VexillumRegis a écrit :[align=justify]Je dois dire que je suis assez surpris par la véhémence - pour ne pas dire l'hystérie - de vos réponses. Il est vrai que Falk van Gaver ne semble guère apprécier le libéralisme, c'est une évidence, et je m'attendais bien à ce que les paladins de la sacro-sainte doctrine libérale viennent dénoncer l'hérésie : je ne suis pas déçu. Auriez-vous fait preuve d'un tel feu si l'auteur avait critiqué l'Eglise dans des termes équivalents ? On peut se poser la question...
Réaction d'impatience en effet, hystérie peut-etre pas... si je vous ai choqué, ce n'était pas mon intention.
Si l'auteur avait critiqué l'Eglise dans de tels termes, eh bien je l'aurais verbalement démoli. Je n'ai pas l'occasion de défendre l'Eglise ici, parce que personne ne la conteste sur ce site. Il y a bien sur des gens qui dans certains salons font des critiques assez fortes (je suis attentif à ces discussions), mais personne ici n'en veut à l'Eglise dans son principe meme.

Au fait, il y a un auteur, en ce moment, qui emploie ce genre de termes contre l'Eglise : c'est Onfray. J'ai feuilleté qqs pages de son dernier déchet, et je peux vous garantir que les réactions qu'il a suscitées en moi étaient autrement plus énergiques... vous savez bien que ce livre est vraiment une sous-pensée, mais qu'il se vend bien, hélas.

Amicalement

Coaction et Confessionnalisme

par Christophe » lun. 30 mai 2005, 21:09

[align=justify]Bonsoir Christian !
Christian a écrit :Mais il ne s’agit pas de remplacer la toute puissance des hommes l’Etat par la toute puissance des hommes de l’Eglise. Le césaropapisme ne pointe-t-il pas son bout d’nez derrière une phrase comme "rendre à Dieu toute sa place dans la société et la politique” ? Dans la société, oui, oui et oui. Dans la politique, jamais.
Vous vouliez certainement dire papocésarisme ? Non, vraiment je ne le vois pas pointer dans le discours de van Gaver.
La seule véritable question est celle-ci : pour être sauvé, suffit-il de faire les gestes, ou encore, faut-il être converti ?
C'est étrange car je suis à la fois totalement d'accord avec votre rejet de la coaction en matière religieuse... et totalement d'accord avec Falk van Gaver sur sa volonté de rompre avec le laïcisme ambiant. Faut-il croire que la contradiction que vous voulez absolument forcer n'existe pas ?
S’il suffit de faire les gestes, Van Gavel, les fondamentalistes, les politiques, ont raison. Est bon catholique celui qui va aux offices. Donc, rendons les offices obligatoires sous peine de sanctions. Est fidèle celui/celle qui ne trompe ni ne quitte son conjoint. Donc, faisons qu’ils restent ensemble, sous peine de lapidation. Est généreux celui qui se sépare d’un billet de 100 euros en faveur des pauvres. Envoyons les percepteurs confisquer les 100 euros.
Encore une fois, je ne vois pas ce qui vous autorise à ranger Falk van Gaver parmi les fondamentalistes... Je ne crois pas qu'il ait proposé aucun des mesures que vous évoquez. Personnellement, même si je suis favorable à une action de l'Etat - soumise au principe de subsidiarité - en faveur des plus pauvres, ce n'est pas dans le but de sauver l'âme des contribuables contre leur gré...

Vous connaissez maintenant assez bien mes convictions, et j'ai participé à la rédaction d'une ébauche de programme qui, sans être parfait, me semble néanmoins ne pêcher ni par son intolérance religieuse ni par sa coaction en matière de morale privée.

Rassurez-vous, nous ne sommes pas socialistes et la loi n'est pas pour nous un instrument en vue de l'édification d'un "homme nouveau"...


Fraternellement en Christ
Christophe[/align]

par guelfo » lun. 30 mai 2005, 14:39

J'adhère totalement à la magistrale analyse de Christian.

VR, même si nous ne sommes sans doute pas sur la même ligne en ce qui concerne le volet plus immédiatement politique du texte que tu nous proposes, je crois que tu passes un peu vite sur son panthéisme implicite et ce qu'il implique comme vision de la nature humaine.

par Christian » lun. 30 mai 2005, 12:31

Salut Christophe
Jésus n'enseigne pas à ses disciples : " Rendez à Dieu ce qui est à Dieu et révoltez vous contre César l'usurpateur " mais il leur enseigne : " Rendez à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César ". ( Mt 22.21 ) Si César possède - en droit - quelque chose, c'est donc bien que la sphère politique ne peut pas être - en droit - réduite pas à néant.

Interrogé par Pilate, Jésus ne lui répond pas : " Ton pouvoir, c'est de Satan que tu l'as reçu " mais il lui répond : Tu n'aurais aucun pouvoir sur moi si tu ne l'avais reçu d'en haut. " ( Jn 19.11 ) Si tout pouvoir provient de Dieu, c'est donc que la politique n'est pas par essence le domaine du Mal. Elle ne devient le domaine du Mal que lorsqu'elle tente de se couper de sa source...
Si tout pouvoir provient de Dieu, c'est donc que la politique n'est pas par essence le domaine du Mal. Voilà une bonne question théologique. Les pandémies, les famines, les catastrophes naturelles, ne viennent-elles pas de Dieu, et ne devons-nous pas les combattre et les prévenir ? Dieu aime toutes les créatures vivantes, comme nous le rappelle les citations de VR ci-dessus, mais nous détruisons avec acharnement et avec raison les germes, les microbes et tous animaux contaminés vecteurs de maladies. Pilate a reçu son pouvoir d’en haut, comme Staline, Pol Pot, Hitler et tant d’autres, et Jésus au moment même où il le prononce, va subir l’iniquité de ce pouvoir. Le fait qu'il vienne d'en-haut ne le rend pas juste, pas plus que la peste n'est bonne parce que voulue par Dieu.

C'est tout le problème du Mal.

Dans l'immédiat, je te retourne ce que dit Falk van Gaver "remettre César à sa place, qui est dans l'Evangile d'imposture et de domination.”

Bien à toi

Christian

PS Aujourd’hui est un jour de congé à Londres, il pleut, et je passe trop de temps sur ce forum

par Christian » lun. 30 mai 2005, 11:53

Je laisse Falk van Gaver donner sa conception (qui est aussi la mienne et celle de l'Eglise, à ce qu'il me semble) de la séparation entre le temporel et le spirituel :

"Rendez à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César - Cet axiome évangélique est aujourd'hui trop utilisé par nombre de chrétiens pour justifier leur lâcheté face à l'emprise étatique moderne. L'Etat-providence, c'est l'idole car la seule providence est celle de Dieu. Nous devons en finir avec le 'monstre-Etat' pour lequel la laïcité ne fut que le paravent et l'instrument offensif de son extension et de son emprise sur l'ensemble de l'existence des hommes. On nous accusera de tendances théocratiques, et les chrétiens pussilanimes auront peur de faire ressurgir leurs mauvais démons médiévaux... Qu'ils se rassurent : nous sommes, nous autres modernes, loin, bien loin de la théocratie. Nous sommes en 'statocratie', la 'statolâtrie', l'idolâtrie. Rendre à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César. Loin de défendre César contre Dieu, cette phrase nous invite à défendre toujours les droits de Dieu contre la prétention sans cesse renouvellée de César de se substituer à Dieu (l'Etat-providence, çà ne s'invente pas...). Aujourd'hui, chrétiens, nous devons rendre à Dieu sa place, toute sa place dans nos existences et dans nos sociétés. Car cette phrase du Christ ne fonde en rien une distinction du spirituel et du temporel, donnant à l'un la sphère privée et à l'autre la sphère publique. Elle n'évacue en rien Dieu de la politique et de la société et ne relègue pas la religion aux consciences. Au contraire, cette exhortation nous invite à rendre à Dieu toute sa place dans la société et la politique, et à remettre César à sa place, qui est dans l'Evangile est d'imposture et de domination. Rendre à Dieu toute sa place, remettre César à sa place : voilà comment entendre aujourd'hui ce verset". (pp. 170 et 171)
N’ayant pas lu le livre entier, je ne veux pas me lancer dans le commentaire de cette citation ‘décontextualisée’. Le ‘monstre-Etat’, la ‘statolâtrie’, sont des concepts auxquels je souscris entièrement (qui en douterait ici ? ;-) ) Mais il ne s’agit pas de remplacer la toute puissance des hommes l’Etat par la toute puissance des hommes de l’Eglise. Le césaropapisme ne pointe-t-il pas son bout d’nez derrière une phrase comme "rendre à Dieu toute sa place dans la société et la politique” ? Dans la société, oui, oui et oui. Dans la politique, jamais.
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La seule véritable question est celle-ci : pour être sauvé, suffit-il de faire les gestes, ou encore, faut-il être converti ?

S’il suffit de faire les gestes, Van Gavel, les fondamentalistes, les politiques, ont raison. Est bon catholique celui qui va aux offices. Donc, rendons les offices obligatoires sous peine de sanctions. Est fidèle celui/celle qui ne trompe ni ne quitte son conjoint. Donc, faisons qu’ils restent ensemble, sous peine de lapidation. Est généreux celui qui se sépare d’un billet de 100 euros en faveur des pauvres. Envoyons les percepteurs confisquer les 100 euros.

Par la force et la menace, on obtient l’apparence de la conversion, de la chasteté, de la générosité. Mais c’est établir une société de la peur, et pour obtenir quoi ? le faux-semblant, l’hypocrisie, le Pharisaïsme… Il n’y a aucune vertu à être tempérant en Arabie saoudite : on n’y trouve pas d’alcool. Le vrai musulman respectable dans sa pratique, il vit à Paris. Au milieu de toutes les tentations, il reste ferme dans son observance. Si j’étais Allah, c’est lui que je prendrais dans mon paradis, pas son coreligionnaire de la Mecque.

De même un peuple de vrais chrétiens vit dans une société libérale. A mon avis, on ne peut pas être chrétien au milieu de réprouvés. Je me sentirais mal d’aller dans une église, si à côté de moi, un musulman n’a pas eu le droit de construire sa mosquée et un athée de travailler le dimanche (et que répondrais-je aux musulmans qui persécutent les chrétiens, si les musulmans ne sont pas libres chez moi ?).

Pour moi, un chrétien ne peut pas vouloir que la liberté de la presse, la pratique des autres cultes, la pornographie, la prostitution, l’homosexualité, le divorce, soient interdits. Il veut les combattre non par la loi, mais par son enseignement ; non par la peur des sanctions, mais par le témoignage qu’il donne que sa pratique chrétienne comble toutes les vies.

Christian

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