par Cinci » lun. 20 août 2018, 14:20
Le Père Latourelle écrivait dans un de ses livres :
"L'écroulement de la société occidentale
L'Occident est affligé par des phénomènes de cassure, de rejet et d'oubli de toutes les valeurs qui ont fait sa dignité et sa grandeur. Cette société est mortellement atteinte, en voie d'implosion et de dégénérescence. Après avoir substitué à l'Absolu un subjectivisme délirant, elle gère sa propre mort, car elle n'a aucun point de référence pour s'évaluer, aucune valeur qui puisse lui assurer un minimum de stabilité. Elle a détruit le mariage, la famille, le droit à la vie, l'éducation, l'autorité, la vérité, l'altérité. Dans cette société, ce qu'il y a de plus sublime dans l'homme, à savoir ce qui le fait à l'image et à la ressemblance de Dieu, l'amour, est trop souvent réduit à des formes perverses de jouissance : inutile ici de dénombrer. Comment reconnaître des signes de santé dans un monde où l'avortement, le divorce, la toxicomanie, le suicide et l'euthanasie sont acceptés comme phénomènes inéluctables ?
Le culte du corps est un autre trait essentiel de la société occidentale. A vrai dire, le corps s'identifie à la personne. Il devient un objet de culte : un culte qui se manifeste dans la plus-value accordée aux millionnaires du hockey, du baseball, du foot ou de la boxe, et dans le déferlement cyclonique de la pornographie. L'idéal de la culture est de s'abandonner aux pulsions et aux déterminismes du corps.
Dans la république des satisfaits, la gangrène est partout ... l'Occident reproduit en grand l'absence de système immunitaire qui caractérise le sida.
Cette description par langage allusif ressemble à un film d'horreur. Et pourtant, ces faits, nous les connaissons par les journaux, les revues, les magazines; nous les voyons au cinéma et à la télévision. La vérité est que l'Occident est hideux, que son sourire est grimaçant et tordu par la volupté et l'hypocrisie.
L'Église elle-même, en dépit du vigoureux redressement opéré par Vatican II, n'a pas su traverser indemne cet univers en décomposition. Le premier monde, malgré une connaissance privilégiée du Concile, manifeste une désaffection toujours plus grande à l'égard de l'Église. A une surabondance de biens matériels correspond une ignorance religieuse opaque, une pauvreté spirituelle et morale qui s'apparente à un vide. Au contact des religions orientales, la vision du spécifique chrétien, à savoir l'irruption de Dieu dans l'histoire, la chair et le langage de Jésus, a perdu ses contours définis, ses traits distinctifs. On en arrive ainsi à un christianisme délavé, aplati, sans attrait : une planète perdue dans la galaxie des religions, des sectes et des idéologies.
Dans le monde des exégètes et des théologiens, même catholiques, la christologie est devenue le terrain privilégié d'un processus d'abord souterrain, puis, à ciel ouvert, de grignotage et de sabotage. Autrefois, on entendait dire : "Le Christ, oui ... mais l'Église jamais". Aujourd'hui, on en arrive à dire : "Le Christ, un homme, un prophète, oui ...mais le Christ, vrai Dieu, comme le Père au sein de la Trinité, ce discours est trop dur à entendre !" La grande pierre d'achoppement pour le subjectivisme contemporain, c'est l'Incarnation.
A cette crise doctrinale s'ajoute la diminution numérique des vocations sacerdotales et religieuses, fulminante en Europe et en Amérique du Nord. En outre, les forces catholiques existantes se dressent les uns contre les autres en camp farouchement opposés, de gauche et de droite, au nom de positions doctrinales durcies à l'extrême. Le vieillissement des effectifs de l'Église s'accompagne d'un état d'ignorance qui affecte tous les niveaux. Dans cette ménagerie, où les positions les plus contradictoires cohabitent sans troubler, comment le peuple des baptisés peut-il s'orienter ?
Derrière ces mutations trop visibles se cache une mutation beaucoup plus profonde. Un typer d'humanité, avec toutes les valeurs qu'il véhiculait disparaît pour faire place à un nouveau type d'homme, dont on peut cibler les traits dominants.
et
[voyons ici ces traits dominants]
D'abord, le rejet et la honte du passé. Cette rage de destruction n'est pas une nouveauté : elle remonte au XVIIIe siècle, le siècle des Lumières, de la Raison déifiée. L'inédit, toutefois, c'est que la Raison s'en prend à toutes les valeurs et qu'elle se retrouve aussi bien chez les croyants que chez les incroyants. Elle s'oppose violemment à toute forme de tradition, à toute apparence de contrainte, à toute idée de transcendance. Nous avons honte de nos origines.
Second trait : le règne du Moi. Au lieu de sociétés centrées sur des valeurs, ou tout au moins des intérêts communs, nous nous trouvons devant des monades isolées, hermétiques les uns aux autres. Tout part du Moi... si tant est qu'on puisse parler de départ. Dans ce monde où la subjectivité triomphe jusqu'au paroxysme, il n'y a évidemment pas de place pour les autres, et encore moins pour l'Autre. Il ne reste plus que le Moi, promu au rang de valeur suprême. Nous assistons au surgissement d'un type d'homme inédit, caractérisé par la désertion des valeurs et par un surinvestissement du moi. Chacun vit dans son bunker, insensible aux autres, incapable d'être affecté ou interpellé.
Nous arrivons ainsi au troisième trait : l'homme du vide et de l'indifférence. Toutes les valeurs ayant été évacuées, nous vivons dans un vide aussi bien affectif, émotionnel, qu'intellectuel et spirituel : en somme dans un espace désaffecté. Ce vide n'engendre ni le cri, ni la révolte, ni le désir de le remplir ou d'en sortir, mais une totale indifférence, une sorte d'hébétude. Vrai ou faux, beau ou laid, sublime ou monstrueux se banalisent et ne troublent plus. Les émissions de télévision livrent leur marchandise sans autre logique que l'incohérence. On passe d'une séquence de Shakespaere à une séquence de porno sans que personne sursaute et encore moins proteste. Les téléphones qui devraient hurler devant un tel étalage de charcuterie, demeurent silencieux.
Nietszche disait : "N'importe quel sens vaut mieux que pas de sens du tout." Aujourd'hui, le besoin de sens a été aboli, et l'on y voit un synonyme de liberté."
Tiré de :
Latourelle, p. 236
Latourelle nous faisait le portrait de la société post-moderne en quelque sorte. Et de la société post-chrétienne émane comme tout naturellement une certaine aversion du christianisme doctrinalement organisé, bien défini, avec des exigences propres. La société libérale qui est post-chrétienne en même temps se révèle comme rétive à toute perspective de retour en arrière.
Le Père Latourelle écrivait dans un de ses livres :
[color=#0000BF]"[b]L'écroulement de la société occidentale[/b]
L'Occident est affligé par des phénomènes de cassure, de rejet et d'oubli de toutes les valeurs qui ont fait sa dignité et sa grandeur. Cette société est mortellement atteinte, en voie d'implosion et de dégénérescence. Après avoir substitué à l'Absolu un subjectivisme délirant, elle gère sa propre mort, car elle n'a aucun point de référence pour s'évaluer, aucune valeur qui puisse lui assurer un minimum de stabilité. Elle a détruit le mariage, la famille, le droit à la vie, l'éducation, l'autorité, la vérité, l'altérité. Dans cette société, ce qu'il y a de plus sublime dans l'homme, à savoir ce qui le fait à l'image et à la ressemblance de Dieu, l'amour, est trop souvent réduit à des formes perverses de jouissance : inutile ici de dénombrer. Comment reconnaître des signes de santé dans un monde où l'avortement, le divorce, la toxicomanie, le suicide et l'euthanasie sont acceptés comme phénomènes inéluctables ?
Le culte du corps est un autre trait essentiel de la société occidentale. A vrai dire, le corps s'identifie à la personne. Il devient un objet de culte : un culte qui se manifeste dans la plus-value accordée aux millionnaires du hockey, du baseball, du foot ou de la boxe, et dans le déferlement cyclonique de la pornographie. L'idéal de la culture est de s'abandonner aux pulsions et aux déterminismes du corps.
Dans la république des satisfaits, la gangrène est partout ... l'Occident reproduit en grand l'absence de système immunitaire qui caractérise le sida.
Cette description par langage allusif ressemble à un film d'horreur. Et pourtant, ces faits, nous les connaissons par les journaux, les revues, les magazines; nous les voyons au cinéma et à la télévision. La vérité est que l'Occident est hideux, que son sourire est grimaçant et tordu par la volupté et l'hypocrisie.
L'Église elle-même, en dépit du vigoureux redressement opéré par Vatican II, n'a pas su traverser indemne cet univers en décomposition. Le premier monde, malgré une connaissance privilégiée du Concile, manifeste une désaffection toujours plus grande à l'égard de l'Église. A une surabondance de biens matériels correspond une ignorance religieuse opaque, une pauvreté spirituelle et morale qui s'apparente à un vide. Au contact des religions orientales, la vision du spécifique chrétien, à savoir [i]l'irruption de Dieu dans l'histoire[/i], la chair et le langage de Jésus, a perdu ses contours définis, ses traits distinctifs. On en arrive ainsi à un christianisme délavé, aplati, sans attrait : une planète perdue dans la galaxie des religions, des sectes et des idéologies.
Dans le monde des exégètes et des théologiens, même catholiques, la christologie est devenue le terrain privilégié d'un processus d'abord souterrain, puis, à ciel ouvert, de grignotage et de sabotage. Autrefois, on entendait dire : "Le Christ, oui ... mais l'Église jamais". Aujourd'hui, on en arrive à dire : "Le Christ, un homme, un prophète, oui ...mais le Christ, vrai Dieu, comme le Père au sein de la Trinité, ce discours est trop dur à entendre !" La grande pierre d'achoppement pour le subjectivisme contemporain, c'est l'[i]Incarnation[/i].
A cette crise doctrinale s'ajoute la diminution numérique des vocations sacerdotales et religieuses, fulminante en Europe et en Amérique du Nord. En outre, les forces catholiques existantes se dressent les uns contre les autres en camp farouchement opposés, de gauche et de droite, au nom de positions doctrinales durcies à l'extrême. Le vieillissement des effectifs de l'Église s'accompagne d'un état d'ignorance qui affecte tous les niveaux. Dans cette ménagerie, où les positions les plus contradictoires cohabitent sans troubler, comment le peuple des baptisés peut-il s'orienter ?
Derrière ces mutations trop visibles se cache une mutation beaucoup plus profonde. Un typer d'humanité, avec toutes les valeurs qu'il véhiculait disparaît pour faire place à un nouveau type d'homme, dont on peut cibler les traits dominants.[/color]
et
[color=#0000BF][voyons ici ces traits dominants]
D'abord, le rejet et la honte du passé. Cette rage de destruction n'est pas une nouveauté : elle remonte au XVIIIe siècle, le siècle des Lumières, de la Raison déifiée. L'inédit, toutefois, c'est que la Raison s'en prend à toutes les valeurs et qu'elle se retrouve aussi bien chez les croyants que chez les incroyants. Elle s'oppose violemment à toute forme de tradition, à toute apparence de contrainte, à toute idée de transcendance. Nous avons honte de nos origines.
Second trait : le règne du [i]Moi[/i]. Au lieu de sociétés centrées sur des valeurs, ou tout au moins des intérêts communs, nous nous trouvons devant des monades isolées, hermétiques les uns aux autres. Tout part du [i]Moi[/i]... si tant est qu'on puisse parler de départ. Dans ce monde où la subjectivité triomphe jusqu'au paroxysme, il n'y a évidemment pas de place pour les autres, et encore moins pour l'Autre. Il ne reste plus que le [i]Moi[/i], promu au rang de valeur suprême. Nous assistons au surgissement d'un type d'homme inédit, caractérisé par la désertion des valeurs et par un surinvestissement du moi. Chacun vit dans son bunker, insensible aux autres, incapable d'être affecté ou interpellé.
Nous arrivons ainsi au troisième trait : l'homme du vide et de l'indifférence. Toutes les valeurs ayant été évacuées, nous vivons dans un vide aussi bien affectif, émotionnel, qu'intellectuel et spirituel : en somme dans un espace désaffecté. Ce vide n'engendre ni le cri, ni la révolte, ni le désir de le remplir ou d'en sortir, mais une totale indifférence, une sorte d'hébétude. Vrai ou faux, beau ou laid, sublime ou monstrueux se banalisent et ne troublent plus. Les émissions de télévision livrent leur marchandise sans autre logique que l'incohérence. On passe d'une séquence de Shakespaere à une séquence de porno sans que personne sursaute et encore moins proteste. Les téléphones qui devraient hurler devant un tel étalage de charcuterie, demeurent silencieux.
Nietszche disait : "N'importe quel sens vaut mieux que pas de sens du tout." Aujourd'hui, le besoin de sens a été aboli, et l'on y voit un synonyme de liberté."
Tiré de :
Latourelle, p. 236 [/color]
Latourelle nous faisait le portrait de la société post-moderne en quelque sorte. Et de la société post-chrétienne émane comme tout naturellement une certaine aversion du christianisme doctrinalement organisé, bien défini, avec des exigences propres. La société libérale qui est post-chrétienne en même temps se révèle comme rétive à toute perspective de retour en arrière.