par feufollet » jeu. 04 févr. 2021, 20:51
Bonsoir, Ermite moderne, ancien métalleux
Je souhaite répondre à votre message qui m'a laissé songeur.
Mais tout d'abord, je vous demanderai, ainsi qu'au reste de mon potentiel lectorat, de bien vouloir excuser la loquacité inconvenante, voire effroyable (à vous de juger) de mon intervention. On me pardonnera en pensant que le sujet touche à une vieille passion de jeunesse.
Précisons donc d'emblée que j'ai été adepte depuis mes 14 ans et jusqu'à mes 22 ans environ d'une forme dite "extrême" de métal, le métal étant lui-même considéré comme extrême par bon nombre de personnes ; mais je suppose que tout est relatif (est-ce que
vraiment tout est relatif, c'est un autre débat...)
Bref, disons-le sans ambages, en tant qu'amateur de longue date de black metal, y compris d'artistes s'affichant ou se prétendant satanistes (j'y reviendrai), je ne peux pas souscrire à votre jugement, puisque vous écrivez, je cite :
le métal n'a rien de bon.
Ceci est faux, et je vais tâcher (humblement) de le prouver
Votre perspective étant celle du catholicisme, j'en tiendrai compte dans ma modeste démonstration, mais sans m'y limiter exclusivement et ce, au profit d’éventuels lecteurs non-catholiques ou non-chrétiens.
Pour commencer, rappelons immédiatement qu'on ne peut pas dire, et a fortiori en tant que catholique, que quelque chose (ou quelqu'un) soit
entièrement mauvais. Le diable lui-même n'est-il pas un ange tombé du Ciel ? Le Mal n'est-il pas voulu par Dieu ? N'est-il pas part de Son plan, de Son ordre ?
Il s'ensuit qu'il y a forcément quelque chose de bon dans le
heavy metal, il s'y trouve au moins un gramme, ou un microgramme de bonté ; on n'imagine pas un art (ou une pensée, une idée, etc.) qui soit intégralement mauvais de bout en bout : il ne survivrait pas, car même les méchants ont besoin de croire qu'ils font le Bien.
Vous dites que la musique est l'expression des émotions. C'est vrai, mais c'est plus que ça. Le métal, comme d'autres genres musicaux tels que le rap (bien que ce dernier soit entièrement distinct sur le plan sociologique), exprime aussi des codes, des valeurs, certains idéaux qui lui sont propres ou en tout cas, qui ne sont pas majoritaires dans la population. Ainsi le black metal se plaît à chanter le Moyen Âge, le paganisme (nordique ou celtique), les expéditions des Vikings etc., en réaction à un monde moderne perçu comme crépusculaire, décadent, faible et efféminé.
D'où un certain côté - justement - réactionnaire, y compris sur le plan politique, chez nombre de blackmétalleux, en tout cas aux débuts de ce mouvement (de 1990 à 1995 environ), car depuis il est vrai, et vous l'avez mentionné, le pluralisme est de rigueur (puisque beaucoup de gens initialement dans le viseur du black métal se sont mis à en écouter).
Surtout, le black metal invite à puiser aussi à d'autres sources. Beaucoup d'artistes black metal font référence (dans leurs écrits, dans les illustrations d'album) à des œuvres littéraires, des événements historiques, des questionnements philosophiques : autant de portes vers le Savoir que le jeune auditeur curieux aura envie d'aller pousser.
Ainsi, portés par leur dévouement à une passion initialement musicale, de nombreux jeunes métalleux finissent par se pencher sur la poésie courtoise française ou le romantisme fin-de-siècle ;-)
Donc pour résumer, le black métal est infiniment plus qu'un style de musique, qu'un simple divertissement. C'est - du moins pour ceux qui lui font l'honneur de le prendre au sérieux - un véritable art de vivre, ou disons un style de vie, un mode de pensée... mais réservé aux adolescents de par l'engagement fanatique qu'il entend susciter. Une rébellion antimoderne en quelque sorte.
Bonsoir, Ermite moderne, ancien métalleux :)
Je souhaite répondre à votre message qui m'a laissé songeur.
Mais tout d'abord, je vous demanderai, ainsi qu'au reste de mon potentiel lectorat, de bien vouloir excuser la loquacité inconvenante, voire effroyable (à vous de juger) de mon intervention. On me pardonnera en pensant que le sujet touche à une vieille passion de jeunesse.
Précisons donc d'emblée que j'ai été adepte depuis mes 14 ans et jusqu'à mes 22 ans environ d'une forme dite "extrême" de métal, le métal étant lui-même considéré comme extrême par bon nombre de personnes ; mais je suppose que tout est relatif (est-ce que [i]vraiment [/i]tout est relatif, c'est un autre débat...)
Bref, disons-le sans ambages, en tant qu'amateur de longue date de black metal, y compris d'artistes s'affichant ou se prétendant satanistes (j'y reviendrai), je ne peux pas souscrire à votre jugement, puisque vous écrivez, je cite : [i]le métal n'a rien de bon[/i].
Ceci est faux, et je vais tâcher (humblement) de le prouver :-D
Votre perspective étant celle du catholicisme, j'en tiendrai compte dans ma modeste démonstration, mais sans m'y limiter exclusivement et ce, au profit d’éventuels lecteurs non-catholiques ou non-chrétiens.
Pour commencer, rappelons immédiatement qu'on ne peut pas dire, et a fortiori en tant que catholique, que quelque chose (ou quelqu'un) soit [u]entièrement[/u] mauvais. Le diable lui-même n'est-il pas un ange tombé du Ciel ? Le Mal n'est-il pas voulu par Dieu ? N'est-il pas part de Son plan, de Son ordre ?
Il s'ensuit qu'il y a forcément quelque chose de bon dans le [i]heavy metal[/i], il s'y trouve au moins un gramme, ou un microgramme de bonté ; on n'imagine pas un art (ou une pensée, une idée, etc.) qui soit intégralement mauvais de bout en bout : il ne survivrait pas, car même les méchants ont besoin de croire qu'ils font le Bien.
Vous dites que la musique est l'expression des émotions. C'est vrai, mais c'est plus que ça. Le métal, comme d'autres genres musicaux tels que le rap (bien que ce dernier soit entièrement distinct sur le plan sociologique), exprime aussi des codes, des valeurs, certains idéaux qui lui sont propres ou en tout cas, qui ne sont pas majoritaires dans la population. Ainsi le black metal se plaît à chanter le Moyen Âge, le paganisme (nordique ou celtique), les expéditions des Vikings etc., en réaction à un monde moderne perçu comme crépusculaire, décadent, faible et efféminé.
D'où un certain côté - justement - réactionnaire, y compris sur le plan politique, chez nombre de blackmétalleux, en tout cas aux débuts de ce mouvement (de 1990 à 1995 environ), car depuis il est vrai, et vous l'avez mentionné, le pluralisme est de rigueur (puisque beaucoup de gens initialement dans le viseur du black métal se sont mis à en écouter).
Surtout, le black metal invite à puiser aussi à d'autres sources. Beaucoup d'artistes black metal font référence (dans leurs écrits, dans les illustrations d'album) à des œuvres littéraires, des événements historiques, des questionnements philosophiques : autant de portes vers le Savoir que le jeune auditeur curieux aura envie d'aller pousser.
Ainsi, portés par leur dévouement à une passion initialement musicale, de nombreux jeunes métalleux finissent par se pencher sur la poésie courtoise française ou le romantisme fin-de-siècle ;-)
Donc pour résumer, le black métal est infiniment plus qu'un style de musique, qu'un simple divertissement. C'est - du moins pour ceux qui lui font l'honneur de le prendre au sérieux - un véritable art de vivre, ou disons un style de vie, un mode de pensée... mais réservé aux adolescents de par l'engagement fanatique qu'il entend susciter. Une rébellion antimoderne en quelque sorte.