par Christian » sam. 04 juin 2005, 20:45
Je ne sais pas quelles sont vos sources sur l'histoire de ces grands travaux : en ce qui concerne le canal de Suez, il est osé de parler d'entreprise privée libéral ou de marché: sa réalisation n'a été possible qu'avec le soutien actif de l' Impératrice Eugénie, du Khedive d'Egypte, et de l'appel à l'épargne publique, Ferdinand de Lesseps ayant écarté les banquiers de son projet. L'interéssé était diplomate et représentait les intérêt de la France en Egypte. Les travaux ont été réalisés dans le cadre inespéré d'une concession de 99 ans et Nasser s'est bien entendu empressé de nationaliser le Canal à l'expiration de celle-ci.
En ce qui concerne le métro, je reste très surpris : les superviseurs du métro Parisien ont été Edmont Huet et Fulgence Bienvenüe, inspecteur Général des Ponts et Chaussées, et la Ville de Paris et l'Etat en ont été les maîtres d'ouvrage. La Compagnie Générale de Traction du baron Empain, associé avec l'Etablissement Schneider du Creusot ont été les premiers concessionnaires-exploitants, mais n'ont pas réalisé les grands ouvrages de génie civil. En parlant de nationalisation ultérieure, vous confondez investissement et mode d'exploitation.
Cher Zefdebruz,
Je ne sais ce que vous entendez par ‘le marché’. La moindre des politesses, me semble-t-il, est de ne pas creuser un canal ni ouvrir les tranchées de la construction d’un métro sans obtenir l’autorisation du propriétaire des terrains.
Or, il se trouve que le propriétaire (ou celui qui se considérait tel) de l’Egypte était le Khédive. Lesseps l’avait connu alors qu’il était en poste au Caire, mais c’est bien en tant que promoteur du projet de Canal, et non plus comme diplomate, qu’il reprend la relation 15 ans plus tard. Le financement du projet par émission d’actions dans le public plutôt que par participation d’investisseurs institutionnels est un procédé hautement capitaliste. Le propriétaire ayant accordé une concession qui convenait au promoteur du canal, ce contrat n’est pas moins capitaliste.
(Un point d’histoire, Nasser n’a pas attendu la fin de la concession pour nationaliser le Canal (il n’aurait pas eu besoin de le faire, le Canal serait alors revenu de plein droit à l’Etat égyptien). Il a nationalisé le Canal 15 ans avant la fin de la concession, en 1956, ce qui lui a valu aussitôt une expédition militaire de la France et de l’Angleterre, alliée à Israël, à laquelle mirent fin la pression des Etats-Unis, alors alliés des Arabes).
Quant à notre métro, le propriétaire des rues, la Ville de Paris, avait alloué une concession au Baron Empain, qui avait fait fortune en construisant et exploitant des tramways un peu partout en Europe (et au Caire, justement). C’est Empain qui choisit Fulgence Bienvenue pour diriger les travaux et Guimard pour décorer les entrées et les stations. La Ville a souhaité effectuer elle-même les travaux de percement, c’est son droit, mais elle l’a fait par un financement purement capitaliste, en émettant des emprunts en Bourse. Ils furent remboursés par les recettes d’exploitation. Le métro de Paris n’a pas coûté un sou au contribuable, ce qui montre que l’intégralité eut pu être réalisée par une entreprise privée.
D’ailleurs, la compagnie qui reçut la 2ème concession, celle du fameux ‘Nord-Sud’, dut effectuer elle-même tous ses travaux de percement. Sa rentabilité fut plus précaire, car le sens du trafic parisien est essentiellement Est-Ouest.
J’ai vérifié mes souvenirs en relisant un article du Monde, généralement bien informé, disponible sur le site
http://www.lylytech.net/~cpierre/siteou ... /metro.htm
Cordialement
Christian
[quote]Je ne sais pas quelles sont vos sources sur l'histoire de ces grands travaux : en ce qui concerne le canal de Suez, il est osé de parler d'entreprise privée libéral ou de marché: sa réalisation n'a été possible qu'avec le soutien actif de l' Impératrice Eugénie, du Khedive d'Egypte, et de l'appel à l'épargne publique, Ferdinand de Lesseps ayant écarté les banquiers de son projet. L'interéssé était diplomate et représentait les intérêt de la France en Egypte. Les travaux ont été réalisés dans le cadre inespéré d'une concession de 99 ans et Nasser s'est bien entendu empressé de nationaliser le Canal à l'expiration de celle-ci.
En ce qui concerne le métro, je reste très surpris : les superviseurs du métro Parisien ont été Edmont Huet et Fulgence Bienvenüe, inspecteur Général des Ponts et Chaussées, et la Ville de Paris et l'Etat en ont été les maîtres d'ouvrage. La Compagnie Générale de Traction du baron Empain, associé avec l'Etablissement Schneider du Creusot ont été les premiers concessionnaires-exploitants, mais n'ont pas réalisé les grands ouvrages de génie civil. En parlant de nationalisation ultérieure, vous confondez investissement et mode d'exploitation. [/quote]
Cher Zefdebruz,
Je ne sais ce que vous entendez par ‘le marché’. La moindre des politesses, me semble-t-il, est de ne pas creuser un canal ni ouvrir les tranchées de la construction d’un métro sans obtenir l’autorisation du propriétaire des terrains.
Or, il se trouve que le propriétaire (ou celui qui se considérait tel) de l’Egypte était le Khédive. Lesseps l’avait connu alors qu’il était en poste au Caire, mais c’est bien en tant que promoteur du projet de Canal, et non plus comme diplomate, qu’il reprend la relation 15 ans plus tard. Le financement du projet par émission d’actions dans le public plutôt que par participation d’investisseurs institutionnels est un procédé hautement capitaliste. Le propriétaire ayant accordé une concession qui convenait au promoteur du canal, ce contrat n’est pas moins capitaliste.
(Un point d’histoire, Nasser n’a pas attendu la fin de la concession pour nationaliser le Canal (il n’aurait pas eu besoin de le faire, le Canal serait alors revenu de plein droit à l’Etat égyptien). Il a nationalisé le Canal 15 ans avant la fin de la concession, en 1956, ce qui lui a valu aussitôt une expédition militaire de la France et de l’Angleterre, alliée à Israël, à laquelle mirent fin la pression des Etats-Unis, alors alliés des Arabes).
Quant à notre métro, le propriétaire des rues, la Ville de Paris, avait alloué une concession au Baron Empain, qui avait fait fortune en construisant et exploitant des tramways un peu partout en Europe (et au Caire, justement). C’est Empain qui choisit Fulgence Bienvenue pour diriger les travaux et Guimard pour décorer les entrées et les stations. La Ville a souhaité effectuer elle-même les travaux de percement, c’est son droit, mais elle l’a fait par un financement purement capitaliste, en émettant des emprunts en Bourse. Ils furent remboursés par les recettes d’exploitation. Le métro de Paris n’a pas coûté un sou au contribuable, ce qui montre que l’intégralité eut pu être réalisée par une entreprise privée.
D’ailleurs, la compagnie qui reçut la 2ème concession, celle du fameux ‘Nord-Sud’, dut effectuer elle-même tous ses travaux de percement. Sa rentabilité fut plus précaire, car le sens du trafic parisien est essentiellement Est-Ouest.
J’ai vérifié mes souvenirs en relisant un article du Monde, généralement bien informé, disponible sur le site http://www.lylytech.net/~cpierre/siteouvert/document/metro.htm
Cordialement
Christian