Général de Gaulle : Un "Charlie" catholique

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« Puisque tout recommence toujours »

par joseph1 » sam. 22 juil. 2023, 14:37

[…] mais, soudain, le chant d’un oiseau, le soleil sur le feuillage ou les bourgeons d’un taillis me rappellent que la vie, depuis qu’elle parut sur la terre, livre un combat qu’elle n’a jamais perdu.

Alors, je me sens traversé par un réconfort secret. Puisque tout recommence toujours, ce que j’ai fait sera, tôt ou tard, une source d’ardeurs nouvelles après que j’aurai disparu.

Charles de Gaulle – Mémoires de guerre : Le salut (1944-1946)

Re: Général de Gaulle : Un "Charlie" catholique

par Guillaume C. » sam. 09 sept. 2017, 17:23

« Elle s'intéressait aux épouses, aux filles des hommes connus. Elle qui savait ce qu’était la souffrance m’interrogeait sur Anne de Gaulle dont elle avait deviné qu’elle était l’ange douloureux du Général : « ils se sont rejoints », disait-elle. »

Source : "Portrait de Marthe Robin", par Jean Guitton de l'Académie Français, Grasset & Fasquelle, 1985. Page 83.


A visionner également : Charles de Gaulle, la foi du général

Re: Un "Charlie" catholique

par Toto » mar. 26 janv. 2016, 22:48

T-t-t-t-t. Partiellement d'accord. Le catholicisme (les orthodoxes et les réformés font ce qu'ils veulent) est certes au-delà des contingences politiques, cela ne veut pas dire que celles-ci l'indiffèrent. Le fait que l'Eglise ait condamné le nazisme, le fascisme, le socialisme, et le communisme est une indication précieuse et montre que l'Eglise ne met pas toutes les idées politiques sur le même plan. Aucun régime ne peut se targuer d'être à 100% catholique, mais clairement certains sont plus éloignés que d'autres. De la même manière, aucun Chef d'Etat ne va se prétendre 100% catholique, mais certains le sont plus que d'autres, par exemple Saint Louis. Je pense que Charles de Gaulle, au-delà de certaines erreurs commises (notamment relatives à l'Algérie), a été plutôt, en s'efforçant de se placer du point de vue catholique, un bon Président et il n'est donc pas interdit de le mentionner sur un forum catholique.

Re: Un "Charlie" catholique

par jerome » mar. 26 janv. 2016, 20:17

Du partisanisme politique sur un forum catholique ?

Diantre, comment mieux convoquer le diviseur !

Le Christianisme n'est ni de gauche ni de droite. Le Christianisme n'est ni gaulliste ni socialiste. Le Christianisme est le Christianisme bien au delà de contingences politiques infécondes et diviseuses.

Re: Un "Charlie" catholique

par Guillaume C. » mar. 26 janv. 2016, 20:00

De Gaulle, aidez-nous !

Re: Un "Charlie" catholique

par Guillaume C. » mar. 26 janv. 2016, 19:59

DISCOURS DU PAPE PAUL VI
AU PRÉSIDENT DE LA FRANCE*

Mercredi 31 mai 1967



Monsieur le Président,

La venue de Votre Excellence en visite officielle au Vatican éveille en Notre âme de profondes résonances.

En votre personne, c’est d’abord la France que Nous saluons, cette nation qui a tant contribué à enrichir le patrimoine culturel de l’humanité, et dont l’incomparable rayonnement religieux et missionnaire est d’un si grand prix aux yeux de l’Eglise; la France, à laquelle Nous sommes personnellement redevable, depuis Nos jeunes années, de tant de précieux éléments de Notre propre formation.

Que Votre Excellence Nous permette, en l’accueillant aujourd’hui dans Notre demeure, de l’assurer de l’estime profonde que Nous inspire l’élite intellectuelle et spirituelle de son Pays, avec ses pasteurs, ses théologiens, ses philosophes, ses sociologues, ses écrivains, toujours si noblement soucieux d’inventer de nouvelles voies pour porter l’éternel message de l’Evangile aux hommes de notre temps.

Et la France vient à Nous dans la personne d’un des plus illustres de ses fils, dont l’histoire dira les services hors de pair qu’en des heures difficiles il a rendus à sa Patrie. C’est assez vous dire, Monsieur le Président, l’honneur et, le plaisir que Nous ressentons de votre visite.

Cette rencontre n’est pas la première. Et ce n’est pas sans émotion que Nous évoquerons la Messe qu’il Nous fut donné de célébrer en votre présence, comme Archevêque de Milan, devant l’ossuaire de Magenta, lors du centenaire de la célèbre bataille. Nous Nous étions permis, à l’issue de la cérémonie, d’exalter, en quelques brèves paroles, les valeurs de la concorde et de la fraternité entre les peuples. Et Votre Excellence, quittant la tribune officielle, Nous fit l’inoubliable honneur de venir vers Nous pour Nous manifester, par un geste d’une exceptionnelle cordialité, son plein acquiescement à Nos pensées et à Nos sentiments.

Ces pensées et ces sentiments n’ont pas changé. Nous estimons que si le dix-neuvième siècle vit les nationalités prendre conscience d’elles-mêmes et se constituer en Etats, le vingtième - sous peine de courir à de nouvelles catastrophes - doit être celui qui verra ces Etats se rapprocher dans une fraternelle entente.

Ce processus de rapprochement est, grâce à Dieu, en cours. Et Nous n’en voulons pour preuve que l’événement qui a été l’occasion de votre venue à Rome: la célébration du Dixième Anniversaire des Traités signés dans cette ville et instituant la «Communauté Economique Européenne» et l’«Euratom».

Que la France soit présente à ce rendez-vous en la personne du Chef de l’Etat lui-même, c’est assez pour montrer le prix qu’il attache au bon fonctionnement de ces jeunes institutions et à l’heureux affermissement de la Communauté européenne.

Mais ce n’est là qu’une étape sur la route de la paix et de la véritable fraternité entre tous les peuples du globe. Il faut viser plus loin, élargir l’horizon aux dimensions du monde. Et c’est ce qu’a voulu rappeler Notre récente encyclique sur le «développement», ce «nouveau nom de la paix» en notre siècle.

Nos fils de France ont bien saisi la portée de cet acte de Notre magistère, et Nous l’évoquons d’autant plus volontiers devant Votre Excellence que Nous savons combien elle partage personnellement Nos préoccupations et Nos espoirs en ce domaine.

Nous n’oublions pas, en effet, avec quel courage et au prix de quels sacrifices, parfois bien douloureux, la France, s’adaptant, sous votre impulsion, aux exigences des temps nouveaux, a su favoriser l’essor des jeunes nations, qui furent jadis ses colonies. Nous n’oublions pas davantage qu’avec une exemplaire générosité, elle a eu à cœur de consacrer, pour l’aide au «tiers-monde», une part proportionnellement notable de son revenu national. Attitude sagement réaliste et bien digne d’être relevée. Qui ne voit, en effet, que c’est seulement par une solidarité active et courageuse que pourront s’atténuer les divergences économiques entre les peuples et s’établir une paix solide et durable, dans la justice et dans la liberté? Cette paix, Votre Excellence le sait, est l’objet de Nos soucis constants, comme elle le fut de Nos deux prédécesseurs, auxquels Votre Excellence rendit également visite, Pie XII et Jean XXIII.

Que Votre Excellence Nous permette, en prenant congé d’elle, de saluer en sa personne la nation française et son Gouvernement, dont Nous sommes heureux d’accueillir, aux côtés de Votre Excellence et de Madame de Gaulle, deux des membres les plus distingués: Monsieur le Premier Ministre et Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères.

Qu’elle Nous permette enfin de l’assurer de Nos vœux et de Nos prières pour sa Personne, pour que Dieu l’assiste dans l’accomplissement de ses hautes tâches et pour qu’il daigne répandre sur tout le peuple français, qui Nous est si cher, l’abondance de ses divines bénédictions.



*AAS 59 (1967), p.627-629.

Insegnamenti di Paolo VI, vol. V,l p.273-276.

L’Attività della Santa Sede 1967 p.514-515.

L’Osservatore Romano, 1.6.1967, p.1.

L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française, n. 23 p.1.

La Documentation catholique, n.1496 col.1057-1062.
http://w2.vatican.va/content/paul-vi/fr ... ancia.html[/quote]

Re: Un "Charlie" catholique

par Guillaume C. » mar. 26 janv. 2016, 19:57

DISCOURS DU PAPE JEAN XXIII
AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE,
LE GÉNÉRAL CHARLES DE GAULLE

Samedi 27 juin 1959



Monsieur le Général, Monsieur le Président,

Tout ce qui est « la France » fait vibrer Notre cœur d’une manière très spéciale et caractéristique. Aussi les simples mots sont-ils incapables d’exprimer les sentiments profonds de respect, de reconnaissance, d’affection que votre visite de ce matin fait monter en Notre âme.

C’est que la France et les Français sont bien familiers à Notre pensée. Dès Notre jeunesse, en effet, ce Nous fut une joie d’apprécier les qualités naturelles, intellectuelles et artistiques de la «douce France » – selon le mot d’un poète de la basse Latinité, dulcis Francia, – non moins que ses valeurs morales ancestrales. Par la suite, au cours de Nos missions et voyage, Nous pûmes constater le rayonnement de la culture française dans le monde et l’admirable travail accompli par les religieux et les religieuses de votre pays, particulièrement grands prélats missionnaires, consacrés auprès des populations qu’ils servent aux belles tâches éducatives, sociales ou charitable. Mais surtout, Nous avons eu le privilège de vivre sur le sol de France d’inoubliables années, alors que, sous votre impulsion, ce grand peuple renaissait à la vie et à l’espérance après de lourdes et cruelles épreuves.

Votre venue aujourd’hui, Monsieur le Président, évoque tout naturellement à Notre esprit ce séjour à Paris, et notamment la première visite que Nous vous faisions au matin du 1er janvier 1945. En qualité de nonce apostolique de Notre immortel Prédécesseur Pie XII, Nous avions ce jour-là l’honneur de vous présenter, au nom du Corps diplomatique accrédité auprès du gouvernement provisoire de la République française, les premiers vœux qu’offrait à Votre Excellence les représentants de nations amies, heureuses de saluer le renouveau français. « Grâce à votre clairvoyance politique et à votre énergie, vous disions-Nous alors, ce cher pays a retrouvé sa liberté et sa foi dans ses destinées ! ».

Et voici que la Providence, qui Nous a appelé depuis aux responsabilités du suprême Pontificat, permet aujourd’hui cette nouvelle et si agréable rencontre. Ce n’est pas la première fois d’ailleurs que Votre Excellence est reçue en cette demeure. En juin 1944, tandis que Rome venait de voir s’éloigner de ses murs le spectre de la guerre et qu’on entrevoyait déjà à l’horizon la fin tant espérée du terrible conflit, Notre Prédécesseur Pie XII était heureux de vous accueillir et de s’entretenir avec vous au cours d’une cordiale audience. Vous vous plaisiez alors à admirer la clarté de vues et la sérénité de jugement de ce grand Pontife, la force et l’inaltérable confiance de ce héraut de la vraie paix, dont les enseignements continuent encore de tracer la voie à tous les hommes de bonne volonté.

Cette œuvre de paix et de prospérité, vous désirez, Monsieur le Président, la réaliser en votre propre pays et dans le vaste cadre de la Communauté, mais vous avez également conscience de devoir la poursuivre plus largement encore au bénéfice de l’homme dans le monde. Appelé pour la seconde fois à présider aux destinées de votre patrie, à la suite d’un concours de circonstances où la France manifesta une fois de plus ses étonnantes capacités de redressement devant le péril, vous la voulez digne dans sa conduite de son passé prestigieux. Et c’est pourquoi, en travaillant au bonheur de vos concitoyens, vous souhaitez aussi avec noblesse que les ressources du pays, comme celles d’autres nations favorisées par la nature, puissent servir avec désintéressement au mieux-être de peuples économiquement moins développés. Est-il une perspective d’action plus conforme à l’idéal de justice et de charité fraternelle, dont le christianisme a pour toujours jeté le ferment dans la société humaine, et qui n’a cessé au cours des siècles de susciter les entreprises les plus généreuses et les plus fécondes pour le bien de l’humanité?

Laissez-Nous formuler des vœux sincères pour votre chère patrie. Reprenant volontiers ici les paroles qu’adressait il y a deux ans Notre Prédécesseur au président René Coty, « c’est tout ce peuple généreux de France, avec son glorieux héritage et ses dons remarquables, que Nous saluons en vous, Monsieur le Président, et auquel Nous exprimons Notre paternelle affection » !.

Ces vœux et ces prières, Nous les adressons à Dieu par l’intercession de Notre-Dame de Lourdes et de cette admirable lignée de saints issus de votre sol, qui constituent l’une des gloires les plus pures de votre patrie , et Nous appelons de grand cœur sur Votre Excellence et sur les hautes personnalités qui l’accompagnent une large effusion des divines bénédictions.

*AAS 51 (1959), p.474-476.

L’Osservatore Romano 28.6.1959, p.1.

Discorsi, Messaggi, Colloqui del Santo Padre Giovanni XXIII, I, p.392-394.

La Documentation catholique, n°1308, col.929-931.

L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française, n°27, p.1.
http://w2.vatican.va/content/john-xxiii ... aulle.html

Re: Un "Charlie" catholique

par Guillaume C. » mar. 26 janv. 2016, 19:54

PAPE PIE XII. RÉPONSE A UN MESSAGE DU GÉNÉRAL DE GAULLE (23 juin 1958) (1) a écrit :
Le Saint-Père a bien voulu répondre par le Message suivant en français à la déférente communication (2) que lui avait fait parvenir le Général de Gaulle, Président du Conseil des Ministres de France :

A son Excellence le Général Charles de Gaulle, Président du Conseil des Ministres, Paris. — Vivement sensible au noble message que vous Nous adressez, Nous faisons monter vers Dieu Nos prières pour qu'il vous assiste dans votre importante et lourde tâche et Nous appelons sur votre patrie, qui Nous est si chère, un avenir de paix et de prospérité, en gage duquel Nous vous accordons bien volontiers Notre paternelle Bénédiction apostolique.

(1) D'après le texte français de l'Osservatore Romano, du 4 juillet 1958.

(2) Voici le texte de cette communication :
« Très Saint Père,
La Mission vient de m'être donnée de diriger à nouveau la France en une période grave pour son destin.
Au moment où j'assume cette lourde responsabilité, ma pensée respectueuse se porte vers Votre Sainteté.
En toute piété j'appelle Son soutien spirituel sur mon action et lui demande de bénir la France. »

Ch. de Gaulle
Site clerus.org

Re: Un "Charlie" catholique

par Guillaume C. » sam. 17 janv. 2015, 15:25

Charles de Gaulle. Mémoires de guerre, Tome II, L’Unité, Ed. Plon, 1956, p. 233 a écrit :
Le 30 juin (1944), visite au Pape. Le Saint-Siège, conformément à son éternelle prudence, était resté jusqu’alors sur une complète réserve à l’égard de la France Combattante, puis du Gouvernement d’Alger. Mgr Valerio Valeri, qui occupait en 1940 la nonciature à Paris, avait gardé ses fonctions à Vichy auprès du Maréchal, que M. Léon Bérard représentait au Vatican. Cependant, nous n’avions pas cessé d’utiliser des moyens de fortune pour faire connaître au Siège apostolique nos buts et nos sentiments, non sans, d’ailleurs, y trouver d’actives sympathies, notamment celles de l’éminent cardinal Tisserant. Nous savions que la défaite d’Hitler et de son système était souhaitée par le Saint-Père et nous voulions, dès que possible, nouer des relations avec lui. Le 4 juin, tandis qu’on se battait encore dans Rome, le commandant de Panafieu et le lieutenant Voizard avaient porté à Mgr Tisserant une lettre du général de Gaulle adressée à Pie XII. Le Pape m’avait répondu le 15. Aujourd’hui, je me rends à l’audience qu’il veut bien me donner.

Au Vatican, je prends d’abord contact avec le cardinal Maglione, secrétaire d’Etat, qui, malade et près de la mort, a tenu à se lever pour converser avec moi. De même que Rome, du haut de sa sérénité, regarde de siècle en siècle couler au pied de ses murailles le flot des hommes et des événements sans cesser d’y être attentive, ainsi l’Eglise assiste-t-elle, impavide mais compatissante et, au surplus, très renseignée, au flux et au reflux de la guerre.

Mgr Maglione, convaincu de la victoire des alliés, se soucie surtout de ses suites. Pour ce qui est de la France, il escompte la disparition de Vichy et déclare voir en fait, en ma personne, le chef du Gouvernement français. Il espère que le changement de régime pourra s’opérer sans graves secousses, spécialement pour l’Eglise de France. J’indique au cardinal que le Gouvernement de la République entend qu’il en soit ainsi, bien que certains milieux ecclésiastiques français aient pris à son endroit une attitude qui, demain, ne lui facilitera pas les choses. Quant à l’avenir de l’Europe après la défaite du Reich et l’ascension des Soviets, je dis que la condition d’un équilibre nouveau sera le redressement intérieur et extérieur de la France. Je demande au Vatican d’y aider de son immense influence.

Le Saint-Père me reçoit. Sous la bienveillance de l’accueil et la simplicité du propos, je suis saisi par ce que sa pensée a de sensible et de puissant. Pie XII juge chaque chose d’un point de vue qui dépasse les hommes, leurs entreprises et leurs querelles. Mais il sait ce que celles-ci leur coûtent et souffre avec tous à la fois. La charge surnaturelle, dont seul au monde il est investi, on sent qu’elle est lourde à son âme, mais qu’il la porte sans que rien le lasse, certain du but, assuré du chemin.

Du drame qui bouleverse l’univers, ses réflexions et son information ne lui laissent rien ignorer. Sa lucide pensée est fixée sur la conséquence : déchaînement des idéologies confondues du communisme et du nationalisme sur une grande partie de la terre. Son inspiration lui révèle que, seules, pourront les surmonter la foi, l’espérance, la charité chrétiennes, lors même que celles-ci seraient partout et longtemps submergées. Pour lui, tout dépend donc de la politique de l’Eglise, de son action, de son langage, de la manière dont elle est conduite. C’est pourquoi, le Pasteur en fait un domaine qu’il se réserve personnellement et où il déploie les dons d’autorité, de rayonnement, d’éloquence, que Dieu lui a impartis. Pieux, pitoyable, politique, au sens le plus élevé que puissent revêtir ces termes, tel m’apparaît, à travers le respect qu’il m’inspire, ce pontife et ce souverain.

Nous parlons des peuples catholiques dont le sort est en balance. De la France, il croit qu’elle ne sera, d’abord, menacée que par elle-même. Il aperçoit l’occasion qu’elle va trouver, malgré ses épreuves, de jouer un grand rôle dans un monde où tant de valeurs humaines sont réduites aux abois, mais aussi le danger qu’elle court de retomber dans les divisions qui, trop souvent, paralysent son génie. Vers l’Allemagne, qui par beaucoup de côtés lui est particulièrement chère, se porte en ce moment sa principale sollicitude. «Pauvre peuple ! me répète-t-il. Comme il va souffrir !» Il prévoit une longue confusion en Italie, sans en éprouver, toutefois, une inquiétude excessive. Peut-être, pense-t-il, qu’après l’effondrement du fascisme et la chute de la monarchie, l’Eglise, moralement très puissante dans ce pays, y demeurera la seule force d’ordre et d’unité ; perspective qu’il semble envisager assez volontiers. Tan¬dis qu’il me le laisse entendre, je songe à ce que, tout à l’heure, des témoins m’ont rapporté. A peine finie la bataille d’hier, une foule énorme, d’un seul mouvement, s’est portée sur la place Saint-Pierre pour acclamer le Pape, tout comme s’il était le souverain délivré de Rome et le recours de l’Italie. Mais c’est l’action des Soviets, aujourd’hui sur les terres polonaises, demain dans toute l’Europe centrale, qui remplit d’angoisse le Saint-Père. Dans notre conversation, il évoque ce qui se passe déjà en Galicie où, derrière l’armée Rouge, commence la persécution contre les fidèles et les prêtres. Il croit que, de ce fait, la Chrétienté va subir de très cruelles épreuves et que, seule, l’union étroite des Etats européens inspirés par le catholicisme : Allemagne, France, Italie, Espagne, Belgique, Portugal, pourra endiguer le péril. Je discerne que tel est le grand dessein du pape Pie XII. Il me bénit. Je me retire.

Général de Gaulle : Un "Charlie" catholique

par Guillaume C. » sam. 17 janv. 2015, 0:42

LETTRE DU PAPE PIE XII AU GÉNÉRAL DE GAULLE (*). 15 juin 1944 a écrit :
C’est avec grand plaisir que Nous avons pris connaissance, cher fils, du message personnel que vous Nous avez adressé d’Alger en date du 29 mai et que le Commandant Panafieu Nous a remis ces jours-ci de votre part.

Il Nous a été agréable de voir en quels termes filialement reconnaissants vous rendiez hommage à l’œuvre de charité que Nous avons accomplie, avec l’aide de Dieu, en faveur de tous Nos fils éprouvés par la guerre, au nombre desquels vous placez à bon droit ceux de France, qui Nous sont particulièrement chers, soumis – comme ils l’ont été depuis plus longtemps que d’autres – à des privations et à des souffrances de toutes sortes.

D’autre part, Notre cœur paternel, attristé par la récente destruction – occasionnée par la guerre – d’insignes et séculaires monuments d’une haute valeur religieuse, artistique et historique, ne pouvait manquer d’être sensible au louable dessein que vous Nous manifestez d’éviter, pendant les opérations militaires en cours, de porter atteinte à ces précieux souvenirs de la civilisation chrétienne, semés comme des phares lumineux de foi, de culture et de vrai progrès le long des chemins que parcourent les armées.

Nous implorons chaque jour la Divine Miséricorde pour que la terrible tragédie, qui a fait déjà tant de victimes, arrive bientôt à sa fin et formons des vœux particulièrement affectueux pour que la France, qui Nous est si chère, sorte de la douloureuse épreuve spirituellement renouvelée et continue sa marche à travers l’histoire sur la trace glorieuse des traditions chrétiennes qui la rendirent jadis forte, grande et respectée parmi les nations.

Comme vous l’observez justement, la fin des combats ne suffirait pas à redonner à la France l’ordre et la tranquillité de la paix, qu’elle désire si vivement, si elle conservait dans son sein des germes funestes de discordes civiles et de conflits sociaux qui pourraient lui faire perdre tout le fruit des sacrifices imposés par la plus dure des guerres. Aussi est-ce avec ferveur que Nous demandons à Dieu d’épargner à votre patrie ces troubles néfastes, d’éclairer ceux qui seront chargés de la conduire et de faire prévaloir, dans le cœur de tous, des sentiments, non de rancœur et de violence, mais de charité et de réconciliation fraternelle.

C’est avec cette prière et ces vœux dans le cœur que Nous vous envoyons, cher fils, en retour de votre filial hommage et en gage des grâces de choix que Nous appelons d’En-Haut sur vous et sur votre patrie, Notre Bénédiction apostolique.


(*) Actes et documents du Saint-Siège relatifs à la Seconde Guerre mondiale, vol. 11 p. 400-401.
Site vatican.va
Valeurs actuelles du 22 décembre 2011 a écrit :
De Gaulle, l’épée et la croix. Par Claude Jacquemart

Tout au long de sa vie politique, il fut confronté à un dilemme : la nécessité de concilier la raison d’État avec les exigences de sa foi.



Les témoignages concordent : de Gaulle vécut avec la foi chrétienne chevillée au corps. « L’Église fait partie de sa vie », affirmait l’agnostique André Malraux. « Que de Gaulle ait été catholique d’un bout à l’autre de sa vie paraît évident », constatait le père Bruckberger, dominicain et aumônier général des Forces françaises de l’intérieur. « Sa foi est indéracinable », disait la future carmélite Élisabeth de Miribel, sa secrétaire de la France libre.

Au début de la guerre, lors de son épopée africaine, un administrateur de la France d’outre-mer en poste au Gabon, connu pour ses liens avec la franc-maçonnerie, lui lance à brûle-pourpoint : « Est-il vrai que vous êtes catholique pratiquant ? » « Oui, et après ? », répliqua le Général. Lui-même déclara en 1959 au journaliste américain David Schoenbrun à propos de la France et de son destin : « L’élément décisif pour moi, c’est que Clovis fut le premier roi à être baptisé chrétien. Mon pays est un pays chrétien et je commence à compter l’histoire de France à partir de l’accession d’un roi chrétien qui porte le nom des Francs. »

Le milieu familial et l’éducation eurent un rôle primordial. Le père, Henri de Gaulle, adepte de Maurras et “monarchiste de regret”, fut l’un des plus ardents défenseurs de l’enseignement libre et fit la plus grande partie de sa carrière, comme professeur puis préfet des études, au collège de l’Immaculée-Conception à Paris, un établissement réputé tenu par les jésuites. Sa mère, Jeanne Maillot, ne le cédait en rien à son époux : son fils témoignera qu’elle « portait à la patrie une passion intransigeante à l’égal de sa piété religieuse ».

Quant aux maîtres à penser, ils se nomment Charles Péguy (« Aucun écrivain ne m’a autant marqué », dira de Gaulle), Henri Bergson (« Il m’a fait comprendre la philosophie de l'action »), Emile Boutroux (« La vocation de l’homme est d’être maître des vents et des flots » ), Maurice Barrès, Ernest Psichari…

Se lançant en juin 1940 dans la grande aventure de la France libre (la croix de Lorraine contre la croix gammée), Charles de Gaulle prend cependant en compte une double réalité : voulant rassembler les Français, il ne saurait exclure personne – à l’exception de ceux qui, délibérément, ont choisi de collaborer avec l’ennemi. L’idée républicaine étant désormais ancrée en France, il ne peut être question de la remettre en question autour d’un autre projet.

Ainsi vont se retrouver à Londres un catholique emblématique comme Georges Thierry d’Argenlieu, officier de marine qui deviendra amiral dans la France libre avant de rejoindre un couvent, mais aussi le juif René Cassin, rédacteur de la Déclaration universelle des droits de l’homme que l’Onu adoptera en 1948. Sans compter Pierre Dac, juif lui aussi, ou l’avocat André Weil-Curiel, qui était également socialiste et maçon, parmi d’autres.

L’Église de France restera prudente, voire hostile, à l’égard de l’exilé de Londres qu’aucun de ses dignitaires ne ralliera. Rendant à César ce qui est à César, la plupart des prélats reconnaissent l’autorité du maréchal Pétain. S’y ajoute le respect affectueux envers le vainqueur de Verdun, dernier général en chef des armées françaises de la Grande Guerre (51 des 96 futurs évêques et archevêques de 1940 ont alors été mobilisés).

Intervient enfin la peur du communisme qui fera dire au cardinal Baudrillart, recteur très écouté de l’Institut catholique de Paris, après le début des hostilités entre l’Allemagne et la Russie : « Voici les temps d’une nouvelle croisade. » Cela n’empêchant d’ailleurs pas des prélats loyaux à l’égard du pouvoir de secourir, à leurs risques et périls, des juifs persécutés, tel Mgr Piguet, évêque de Clermont-Ferrand, qui sera déporté au camp de Dachau et recevra en 2001, à titre posthume, la médaille de Juste parmi les nations.

L’attitude du haut clergé trouvera sa sanction à la Libération quand, le 26 août 1944, le père Bruckberger et les chefs de la Résistance feront interdire l’entrée de Notre-Dame de Paris au cardinal-archevêque, Mgr Suhard, afin de permettre au général de Gaulle d’y entendre un Te deum. Motif : Mgr Suhard avait reçu solennellement, quatre mois plus tôt, le maréchal Pétain et présidé, en juillet 1944, un service funèbre à la mémoire de Philippe Henriot, le chantre de la collaboration, assassiné par des résistants.

Or cette humiliation ne correspondait pas au voeu du Général, qui s’y résigna, écrira-t-il dans ses Mémoires, en raison de « l’état de tension » régnant alors parmi les combattants de la Libération. Bien avant celle-ci, il avait manifesté son souci de rassurer l’Église quant à ses intentions. C’est ainsi que, reçu à sa demande, en juin précédent, par le pape Pie XII, grâce à l’intercession du cardinal Tisserant, robuste prélat à la barbe abondante qui résidait à Rome et ne cachait pas ses sentiments gaullistes, il lui avait affirmé le « respect filial du peuple de France ». Le 20 septembre 1944, oubliant l’incident de Notre-Dame, il accordera une audience au cardinal Suhard et lui fera comprendre que le nouveau régime a besoin de l’Église. Et le 9 mai 1945, Mgr Suhard présidera la messe et le Te deum de la victoire dans sa cathédrale, en présence du Général et de son épouse.

Journaliste, ancien directeur du Pèlerin, Gérard Bardy consacre aux convictions personnelles du Général une étude considérable. Il souligne notamment que « l’épuration dans l’Église sera la plus indolore possible, surtout si on la compare à celle qui a eu lieu dans l’administration, la justice, l’armée ou les milieux intellectuels ». Pour de Gaulle, le destin de la France – même si la laïcité de l’État est la règle – reste inséparable de celui du catholicisme romain dont Clovis, quinze siècles plus tôt, était devenu le bras séculier.


Mgr Roncalli, le meilleur pape pour la France

Il obtiendra le rappel du nonce apostolique, Mgr Valerio Valeri, à ses yeux trop compromis avec le régime de Vichy, que Pie XII remplacera par Mgr Giuseppe Angelo Roncalli. Moyennant quoi, Mgr Valeri repartira pour Rome avec les honneurs militaires et sera fait commandeur de la Légion d’honneur…

Jusqu’à sa démission, en janvier 1946, le Général va entretenir des relations de totale confiance avec Mgr Roncalli dont il a mesuré, sous ses dehors de prélat débonnaire, l’intelligence et la hauteur de vue. De son côté, le nouveau nonce saura mener une politique habile d’apaisement entre le Saint-Siège et le gouvernement français. Georges Bidault, successeur de Jean Moulin à la présidence du Conseil national de la Résistance et figure de proue de la démocratie chrétienne, lui présentera une liste de « 30 évêques à démissionner » en raison de leur adhésion au régime de Vichy. En tête de liste, le cardinal Suhard. Mgr Roncalli rayera le zéro du chiffre 30 d’un trait de plume.

Par une étonnante coïncidence, les destins du Général et de Mgr Roncalli vont se croiser à nouveau en 1958. En mai, de Gaulle revient au pouvoir. Le 9 octobre, Pie XII meurt. Aussitôt, celui qui n’est encore que le dernier président du Conseil de la IVe République agonisante convoque à Paris, en urgence, l’ambassadeur de France au Vatican, Roland de Margerie, envoyant même son avion à Rome pour hâter son retour. Les deux hommes aboutissent à la conclusion que le meilleur candidat à la succession de Pie XII serait Mgr Roncalli.

De Gaulle fait passer le message à son fidèle cardinal Tisserant et aux cardinaux étrangers qui, au Vatican, sont les plus proches de la France. Il mobilise également Mgr Feltin, ancien archevêque de Bordeaux (l’un de ceux dont Bidault voulait la tête), devenu cardinal-archevêque de Paris en 1949, ainsi que Wladimir d’Ormesson, ambassadeur auprès du Saint-Siège de 1948 à 1956.
Le jour de l’ouverture du conclave, le Général adresse un télégramme de soutien à Mgr Roncalli, qui lui répond « en termes on ne peut plus aimables et complices ». Le 28 octobre 1958, Mgr Roncalli, élu pape, devient Jean XXIII. Le Général adresse au nouveau souverain pontife « l’hommage de [son] filial respect ». De Gaulle écrira à Mgr Grente, cardinal-archevêque du Mans : « Sans nul doute, l’élection du pape Jean XXIII est un bienfait pour la France. » Le 27 juin 1959, le président de la République, accompagné par sa femme, accomplit un voyage officiel au Vatican. Devant le pape, il s’agenouille. En réponse aux paroles de bienvenue du Saint-Père, il déclare : « Nous déposons, au nom de la France, nos respects à ses pieds. »
“Charles le catholique”, pour reprendre le titre de Gérard Bardy, suscita des dévouements exemplaires ; il provoqua aussi des haines inexpiables. Ce fut d’abord, à partir de 1940, sa volonté d’affirmer sa légitimité face au gouvernement de Vichy. Du même coup, les serviteurs de ce régime deviendront des traîtres qu’il conviendra, le moment venu, de punir selon leurs “fautes”, les épurateurs dépassant souvent le désir du Général lui-même. Ce fut aussi, lors de la tragédie algérienne, le lent cheminement de “la France de Dunkerque à Tamanrasset” jusqu’à l’indépendance avec son cortège d’horreurs, la révolte de soldats meurtris dans leur âme, le désespoir d’une population se jugeant abandonnée.

Le chrétien ordinaire se trouve seul face à sa conscience. Le chrétien porté au sommet de l’État doit concilier les impératifs de sa conscience et les de voirs de sa charge. Fallait-il fusiller Pucheu ? et Brasillach ? Fallait-ilfusiller Bastien-Thiry ? Gérard Bardy soutient, comme l’amiral Philippe de Gaulle, que l’organisateur de l’attentat du Petit-Clamart fut passé par les armes parce qu’il n’avait pas hésité à faire tirer sur une femme (Yvonne de Gaulle accompagnait son mari dans la voiture). Mais le chef des poseurs de bombes du FLN dans la casbah d’Alger, Yacef Saadi, fut gracié alors qu’il portait la responsabilité de dizaines de morts, parmi lesquels des femmes et des enfants. Bastien-Thiry avait pris ses risques, il en avait mesuré les conséquences. De Gaulle incarnait l’État. Or la répétition des attentats contre sa personne compromettait l’avenir de ce dernier. D’où sa décision assortie de la conviction que, pour un chrétien, la suppression du corps charnel ne peut réduire l’essentiel à néant l’âme immortelle.


Claude Jacquemart
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Photo : Le général de Gaulle, alors chef du gouvernement provisoire de la république française, est reçu au Vatican pour une audience auprès du pasteur angélique (Pie XII). 30 juin 1944.

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