par Fée Violine » lun. 26 févr. 2018, 16:55
Le monde est stone
Soudain, regardant tout autour, ils ne virent plus que Jésus seul avec eux.
Évangile selon saint Marc, chapitre 9, verset 8
Audrey,
Fidèle de Retraite dans la Ville
Le monde est stone, pierre qui parfois broie la vie des enfants. Emmurée dans ce silence où j’avais trop crié, j’étais écrasée par ce poids de honte de n’avoir jamais pu, jamais su me défendre. M’étendre sur le sol et mourir, il ne restait que cela. Sans plainte, sans révolte. Simplement m’éteindre, reposer, enfin. J’avais treize ans.
« Tandis qu’en moi mon âme défaillait, je me suis souvenu du Seigneur. »* Mon regard, qui se lève du sol, se pose sur la crèche de Noël, et cette certitude alors : je n’ai pas le droit. Pas le droit de céder à la mort où tout menait, m’enserrant comme un filet. Dieu, là. Son regard dans le mien, présence qui échappe à tout mot, désarme la mort, repousse le néant. Je ne comprends pas, mais c’est assez pour reprendre le chemin.
Les années passent. Les murs du silence confinent la vie, à la fois protègent et emprisonnent. Et ces chaînes aux pieds, que mon regard ne veut, ne peut pas voir. « Mais tu veux au fond de moi la vérité. »** Tu le veux par amour pour moi, Seigneur. Cette vérité, c’est toi. Rencontre vivante, intime fulgurance dans le temps arrêté. « Il a fendu le rocher : les eaux ont ruisselé ! »*** Et soudain, la chair sait en cette faim de Dieu qui la prend au corps, ce qu’elle a toujours confusément cherché. Instant de grâce où tout est donné.
Et une vie pour le déployer. Rouvrir la blessure, présenter à Dieu cette douleur nue, intacte, plaie béante qu’effleure son infinie tendresse. Et la grâce de la confiance donnée, le silence brisé, la honte enlevée d’être dite. Les murs tombent, pierres roulées, et la vie qui inonde, les larmes et la joie. S’engager avec Dieu sur les chemins du passé, du pardon libérateur, comme en Terre promise.
Et puis un jour, regarder en arrière en toute douleur et voir le Christ là, seul, à mes côtés. Expérience de transfiguration, bouleversante, qui saisit l’être tout entier, où l’on sait que seul, on ne l’a jamais été. Ma vie à sa lumière. Elle abolit les comment, les pourquoi. Présence qui seule fait sens. Dieu, mon rocher.
*Livre de Jonas ch.2, v. 8
** Psaume 50 v. 8
***Livre d'Isaïe ch. 48, v. 21
Le monde est stone
[i]Soudain, regardant tout autour, ils ne virent plus que Jésus seul avec eux.[/i]
Évangile selon saint Marc, chapitre 9, verset 8
Audrey,
Fidèle de Retraite dans la Ville
Le monde est stone, pierre qui parfois broie la vie des enfants. Emmurée dans ce silence où j’avais trop crié, j’étais écrasée par ce poids de honte de n’avoir jamais pu, jamais su me défendre. M’étendre sur le sol et mourir, il ne restait que cela. Sans plainte, sans révolte. Simplement m’éteindre, reposer, enfin. J’avais treize ans.
« Tandis qu’en moi mon âme défaillait, je me suis souvenu du Seigneur. »* Mon regard, qui se lève du sol, se pose sur la crèche de Noël, et cette certitude alors : je n’ai pas le droit. Pas le droit de céder à la mort où tout menait, m’enserrant comme un filet. Dieu, là. Son regard dans le mien, présence qui échappe à tout mot, désarme la mort, repousse le néant. Je ne comprends pas, mais c’est assez pour reprendre le chemin.
Les années passent. Les murs du silence confinent la vie, à la fois protègent et emprisonnent. Et ces chaînes aux pieds, que mon regard ne veut, ne peut pas voir. « Mais tu veux au fond de moi la vérité. »** Tu le veux par amour pour moi, Seigneur. Cette vérité, c’est toi. Rencontre vivante, intime fulgurance dans le temps arrêté. « Il a fendu le rocher : les eaux ont ruisselé ! »*** Et soudain, la chair sait en cette faim de Dieu qui la prend au corps, ce qu’elle a toujours confusément cherché. Instant de grâce où tout est donné.
Et une vie pour le déployer. Rouvrir la blessure, présenter à Dieu cette douleur nue, intacte, plaie béante qu’effleure son infinie tendresse. Et la grâce de la confiance donnée, le silence brisé, la honte enlevée d’être dite. Les murs tombent, pierres roulées, et la vie qui inonde, les larmes et la joie. S’engager avec Dieu sur les chemins du passé, du pardon libérateur, comme en Terre promise.
Et puis un jour, regarder en arrière en toute douleur et voir le Christ là, seul, à mes côtés. Expérience de transfiguration, bouleversante, qui saisit l’être tout entier, où l’on sait que seul, on ne l’a jamais été. Ma vie à sa lumière. Elle abolit les comment, les pourquoi. Présence qui seule fait sens. Dieu, mon rocher.
*Livre de Jonas ch.2, v. 8
** Psaume 50 v. 8
***Livre d'Isaïe ch. 48, v. 21