James a écrit :Je ne suis peut être pas assez savant dans le domaine mais je pense que nous (je veux dire ceux qui en avaient/auraient la possibilité) n'avons pas suffisamment expérimenté la démocratie pour dire que ce n'est pas possible.
Quand j'étais étudiant, j'ai tenté de gérer une association sur le mode de la démocratie directe. Ca m'a beaucoup appris sur le fonctionnement démocratique. Sur un groupe de quelques dizaines de personnes déjà, c'était très difficile : chacun s'intéressait à ce qui le concernait tout directement, et se fichait éperdument du reste, même quand je m'efforçais de leur expliquer que "le reste" aurai des conséquences majeures sur leur intérêt immédiat.
Mais même sans expérience pratique, il suffit de réfléchir un peu pour comprendre que ce n'est pas possible : la démocratie directe demande au peuple d'avoir une opinion
informée sur tout. Pas des idées reçues, mais de s'être documenté, d'avoir réfléchi, et de savoir exactement quoi penser. C'est impossible, il y a beaucoup trop de choses à décider pour gérer un pays.
Et il y a un nombre d'informations qui ne doivent pas être rendues publiques, pour des questions évidentes de sécurité nationale. Comment le peuple peut-il décider sans avoir tous les éléments nécessaires pour comprendre la situation ?
Laissons donc à l'avenir la porte ouverte à cette possibilité.
Oh, mais je veux bien laisser la porte ouverte : d'autant qu'il y a beaucoup de domaines où on pourrait non pas mettre en place une vraie démocratie directe, mais mieux prendre en compte la volonté populaire.
Mais je n'ignore pas non plus que la démocratie directe est le domaine privilégié de la démagogie. Je n'ignore pas non plus que nombre d'idées politiques courageuses et bénéfiques ont dû passer malgré la voix dominante du peuple. L'abolition de l'esclavage ne s'est pas faite partout en accord avec la vox populi...
Au sujet de la pratique de la religion en France, ça peut se prêter à débat.
Nos jeunes comme tout les fonctionnaires sont interdits de porter des signes ostensibles (mot fourre-tout) témoignant de leur foi.
Faux. Il est interdit à nos jeunes de le faire
à l'école (publique), et à l'école seulement. Il est interdit aux fonctionnaires de le faire
dans le cadre de leurs fonctions. Rien n'interdit à une femme de venir à l'église avec une mantille sous prétexte qu'elle est fonctionnaire, et rien n'interdit à un jeune d'avoir une Bible dans son cartable quand il va à l'école, ni même de prier le rosaire en comptant sur ses doigts au lieu de se promener un chapelet à la main.
Dans la mesure où je ne connais aucun signe ostensible qu'un laïc
doive porter pour vivre en conformité à sa religion, je ne vois pas ce qui empêche un enfant de vivre sa foi quand il est à l'école.
Par contre, je suis persuadé que le témoignage de la foi, ce n'est pas de porter une croix au cou, mais de vivre en chrétien : de se montrer charitable, attentif à l'autre, être doux et modéré dans ses paroles, être artisan de paix et non chercher la dispute... "C'est à l'amour que vous montrerez les uns pour les autres que l'on reconnaîtra que vous êtes mes disciples", disait Jésus. Pas au port d'un badge ni d'un quelconque signe ostensible de chrétienté. La foi, ça se reconnait à ses fruits.
Je vous accorde que le climat tend à se durcir actuellement, mais c'est le contexte actuel (auquel il faut être vigilant), et non une tare intrinsèque à la démocratie.
De plus, et on l'a vu lors des débats sur le Mariage Pour Tous, lorsqu'un chrétien s'exprime, son avis est très souvent réduit à celui d'un extrémiste rétrograde et que sais-je encore...
Mais là, ce n'est pas une caractéristique de la démocratie, au contraire ! C'est une tendance de plus en plus marquée en France à refuser le débat démocratique, à exiger la liberté d'expression pour soi et à refuser celle des autres.
On voit très bien comment certaines personne se disent chrétiennes (sans avoir aucun mandat de l'Eglise pour s'exprimer en son nom, soit dit en passant...), s'offusquent de ne pas pouvoir s'exprimer librement, mais veulent interdire aux militants LGBT d'exprimer leurs opinions.
Globalement nos voix dans le débat public sont bien souvent ignorées.
A nous de savoir nous faire entendre, alors.
Et n'oubliez pas que notre devoir est d'aller annoncer la Bonne Nouvelle, pas de forcer tout le monde à écouter. Quand St Paul allait prêcher à la synagogue, il était moqué, méprisé, et il a même été lapidé. Qu'à cela ne tienne, il s'est adressé à ceux qui avaient envie de l'écouter.
Je pense sincèrement que trop souvent, nous nous plaignons parce que nous aimerions que tous entendent notre voix d'homme. Qu'il est difficile de faire taire notre voix pour laisser parler l'Esprit ! Et pourtant, l'Esprit, lui, parle dans la langue de celui qui l'entend...
Enfin bref, je ne vais pas vous faire le portrait de l'accueil fait à la religion dans notre pays, vous le connaissez comme moi. Heureusement, nous pouvons encore (pour le moment) dans l'ensemble pratiquer et penser en chrétiens, c'est déjà ça.
Que signifie penser en chrétien ? Vouloir convertir tout le monde de force ? Ou se réjouir d'être méprisé, moqué, conspué, chahuté, et parfois violenté, tout à ça à cause de Jésus ?
Que signifie penser en chrétien ? Vouloir imposer notre religion à tous ? Ou annoncer la Bonne Nouvelle et appeler à la conversion ?
Au sujet des effets révélateurs de la laïcité, c'est intéressant mais à mon sens, un peu insuffisant. Tous les efforts qui ont été menés visant à placer l’Église sous le signe du persécuteur du peuple et de l'obscurantiste a du clairement en décourager plus d'un, même des personnes de bonne volonté.
Retournez voir l'histoire du XIXe siècle, et regardez comment ont agi les hommes d'Eglise. Tout n'est pas rose. Et dans les faits, la religion a bien souvent été utilisée comme prétexte pour maintenir les structures sociales.
Et il faut bien reconnaître que l'essence même du christianisme n'est pas très réjouissante pour qui recherche confort et richesses dans ce monde. Notre doctrine sociale est d'avoir le soucis des pauvres, certes. Mais notre espérance est dans notre salut, pas dans l'aisance matérielle en ce monde. Et nous savons bien que la richesse est plutôt une difficulté quand on recherche le salut...
Tout ça, la laïcité le révèle. Nous voyons bien comment actuellement, après l'orgueil et l'avidité, c'est la luxure qui s'exprime de plus en plus librement.
Là où la laïcité présente une faiblesse, c'est que permettant cette libre expression du péché, elle nous expose d'autant plus à la tentation. On peut y voir une façon de jouer avec le démon.
Mais quelque part, je préfère le voir agir au grand jour plutôt qu'en catimini.
Il est bien plus aisé d'avoir à endosser une "petite inquiétude" (pour reprendre mes termes précis) concernant la défense du système républicain démocrate et laïc français que de se retrouver de près ou de loin affublé du sceau de l’extrême-droite...
Je pense que ni Prodigal ni moi n'avons voulu nous ériger en chantres du système républicain démocrate et laïc français. Au contraire, Prodigal s'est montré très critique à son égard, en le qualifiant de "démocratie la moins démocratique au monde".
Je ne connais pas suffisamment le fonctionnement des autres démocraties dans le monde (par exemple, je suis très, très sceptique sur les possibilité d'un réel jeu démocratique au Japon, vu les difficultés du débat public dans une culture profondément néoconfucianiste) pour savoir si la France est la pire de toute. Mais je constate que le fonctionnement démocratique y est de plus en plus entravé, et ce moins par les institutions que par la radicalisation de l'opinion et la montée sans cesse plus puissante de l'intolérance.
Je suis par ailleurs de plus en plus convaincu que l'adoption du quinquénat, avec élections présidentielles avant les élections législatives, a été une régression de la démocratie. Cette évolution institutionnelle a profondément changé le jeu politique et a eu des conséquences un peu partout dans notre société.
[quote="James"]Je ne suis peut être pas assez savant dans le domaine mais je pense que nous (je veux dire ceux qui en avaient/auraient la possibilité) n'avons pas suffisamment expérimenté la démocratie pour dire que ce n'est pas possible.[/quote]
Quand j'étais étudiant, j'ai tenté de gérer une association sur le mode de la démocratie directe. Ca m'a beaucoup appris sur le fonctionnement démocratique. Sur un groupe de quelques dizaines de personnes déjà, c'était très difficile : chacun s'intéressait à ce qui le concernait tout directement, et se fichait éperdument du reste, même quand je m'efforçais de leur expliquer que "le reste" aurai des conséquences majeures sur leur intérêt immédiat.
Mais même sans expérience pratique, il suffit de réfléchir un peu pour comprendre que ce n'est pas possible : la démocratie directe demande au peuple d'avoir une opinion [i]informée[/i] sur tout. Pas des idées reçues, mais de s'être documenté, d'avoir réfléchi, et de savoir exactement quoi penser. C'est impossible, il y a beaucoup trop de choses à décider pour gérer un pays.
Et il y a un nombre d'informations qui ne doivent pas être rendues publiques, pour des questions évidentes de sécurité nationale. Comment le peuple peut-il décider sans avoir tous les éléments nécessaires pour comprendre la situation ?
[quote]Laissons donc à l'avenir la porte ouverte à cette possibilité.[/quote]
Oh, mais je veux bien laisser la porte ouverte : d'autant qu'il y a beaucoup de domaines où on pourrait non pas mettre en place une vraie démocratie directe, mais mieux prendre en compte la volonté populaire.
Mais je n'ignore pas non plus que la démocratie directe est le domaine privilégié de la démagogie. Je n'ignore pas non plus que nombre d'idées politiques courageuses et bénéfiques ont dû passer malgré la voix dominante du peuple. L'abolition de l'esclavage ne s'est pas faite partout en accord avec la vox populi...
[quote]Au sujet de la pratique de la religion en France, ça peut se prêter à débat.
Nos jeunes comme tout les fonctionnaires sont interdits de porter des signes ostensibles (mot fourre-tout) témoignant de leur foi.[/quote]
Faux. Il est interdit à nos jeunes de le faire [i]à l'école[/i] (publique), et à l'école seulement. Il est interdit aux fonctionnaires de le faire [i]dans le cadre de leurs fonctions[/i]. Rien n'interdit à une femme de venir à l'église avec une mantille sous prétexte qu'elle est fonctionnaire, et rien n'interdit à un jeune d'avoir une Bible dans son cartable quand il va à l'école, ni même de prier le rosaire en comptant sur ses doigts au lieu de se promener un chapelet à la main.
Dans la mesure où je ne connais aucun signe ostensible qu'un laïc [i]doive[/i] porter pour vivre en conformité à sa religion, je ne vois pas ce qui empêche un enfant de vivre sa foi quand il est à l'école.
Par contre, je suis persuadé que le témoignage de la foi, ce n'est pas de porter une croix au cou, mais de vivre en chrétien : de se montrer charitable, attentif à l'autre, être doux et modéré dans ses paroles, être artisan de paix et non chercher la dispute... "C'est à l'amour que vous montrerez les uns pour les autres que l'on reconnaîtra que vous êtes mes disciples", disait Jésus. Pas au port d'un badge ni d'un quelconque signe ostensible de chrétienté. La foi, ça se reconnait à ses fruits.
Je vous accorde que le climat tend à se durcir actuellement, mais c'est le contexte actuel (auquel il faut être vigilant), et non une tare intrinsèque à la démocratie.
[quote]De plus, et on l'a vu lors des débats sur le Mariage Pour Tous, lorsqu'un chrétien s'exprime, son avis est très souvent réduit à celui d'un extrémiste rétrograde et que sais-je encore...[/quote]
Mais là, ce n'est pas une caractéristique de la démocratie, au contraire ! C'est une tendance de plus en plus marquée en France à refuser le débat démocratique, à exiger la liberté d'expression pour soi et à refuser celle des autres.
On voit très bien comment certaines personne se disent chrétiennes (sans avoir aucun mandat de l'Eglise pour s'exprimer en son nom, soit dit en passant...), s'offusquent de ne pas pouvoir s'exprimer librement, mais veulent interdire aux militants LGBT d'exprimer leurs opinions.
[quote]Globalement nos voix dans le débat public sont bien souvent ignorées. [/quote]
A nous de savoir nous faire entendre, alors.
Et n'oubliez pas que notre devoir est d'aller annoncer la Bonne Nouvelle, pas de forcer tout le monde à écouter. Quand St Paul allait prêcher à la synagogue, il était moqué, méprisé, et il a même été lapidé. Qu'à cela ne tienne, il s'est adressé à ceux qui avaient envie de l'écouter.
Je pense sincèrement que trop souvent, nous nous plaignons parce que nous aimerions que tous entendent notre voix d'homme. Qu'il est difficile de faire taire notre voix pour laisser parler l'Esprit ! Et pourtant, l'Esprit, lui, parle dans la langue de celui qui l'entend...
[quote]Enfin bref, je ne vais pas vous faire le portrait de l'accueil fait à la religion dans notre pays, vous le connaissez comme moi. Heureusement, nous pouvons encore (pour le moment) dans l'ensemble pratiquer et penser en chrétiens, c'est déjà ça.[/quote]
Que signifie penser en chrétien ? Vouloir convertir tout le monde de force ? Ou se réjouir d'être méprisé, moqué, conspué, chahuté, et parfois violenté, tout à ça à cause de Jésus ?
Que signifie penser en chrétien ? Vouloir imposer notre religion à tous ? Ou annoncer la Bonne Nouvelle et appeler à la conversion ?
[quote]Au sujet des effets révélateurs de la laïcité, c'est intéressant mais à mon sens, un peu insuffisant. Tous les efforts qui ont été menés visant à placer l’Église sous le signe du persécuteur du peuple et de l'obscurantiste a du clairement en décourager plus d'un, même des personnes de bonne volonté.[/quote]
Retournez voir l'histoire du XIXe siècle, et regardez comment ont agi les hommes d'Eglise. Tout n'est pas rose. Et dans les faits, la religion a bien souvent été utilisée comme prétexte pour maintenir les structures sociales.
Et il faut bien reconnaître que l'essence même du christianisme n'est pas très réjouissante pour qui recherche confort et richesses dans ce monde. Notre doctrine sociale est d'avoir le soucis des pauvres, certes. Mais notre espérance est dans notre salut, pas dans l'aisance matérielle en ce monde. Et nous savons bien que la richesse est plutôt une difficulté quand on recherche le salut...
Tout ça, la laïcité le révèle. Nous voyons bien comment actuellement, après l'orgueil et l'avidité, c'est la luxure qui s'exprime de plus en plus librement.
Là où la laïcité présente une faiblesse, c'est que permettant cette libre expression du péché, elle nous expose d'autant plus à la tentation. On peut y voir une façon de jouer avec le démon.
Mais quelque part, je préfère le voir agir au grand jour plutôt qu'en catimini.
[quote]Il est bien plus aisé d'avoir à endosser une "petite inquiétude" (pour reprendre mes termes précis) concernant la défense du système républicain démocrate et laïc français que de se retrouver de près ou de loin affublé du sceau de l’extrême-droite...[/quote]
Je pense que ni Prodigal ni moi n'avons voulu nous ériger en chantres du système républicain démocrate et laïc français. Au contraire, Prodigal s'est montré très critique à son égard, en le qualifiant de "démocratie la moins démocratique au monde".
Je ne connais pas suffisamment le fonctionnement des autres démocraties dans le monde (par exemple, je suis très, très sceptique sur les possibilité d'un réel jeu démocratique au Japon, vu les difficultés du débat public dans une culture profondément néoconfucianiste) pour savoir si la France est la pire de toute. Mais je constate que le fonctionnement démocratique y est de plus en plus entravé, et ce moins par les institutions que par la radicalisation de l'opinion et la montée sans cesse plus puissante de l'intolérance.
Je suis par ailleurs de plus en plus convaincu que l'adoption du quinquénat, avec élections présidentielles avant les élections législatives, a été une régression de la démocratie. Cette évolution institutionnelle a profondément changé le jeu politique et a eu des conséquences un peu partout dans notre société.