par Cinci » jeu. 24 déc. 2015, 2:11
Mère de l'Église ...
«... terminons la lecture du
chapitre 22 de la
Genèse : «L'Ange du Seigneur appela du ciel Abraham une seconde fois et lui dit :
- « Je le jure par moi-même - oracle de Yavhé - parce que tu as fait cette chose-là, que tu ne m'as pas refusé ton fils, ton unique, je te comblerai de bénédictions, et je multiplierai ta race comme les étoiles du ciel et comme le sable qui est au rivage de la mer, Ta descendance possédera la Porte de ses ennemis, et par ta race seront bénies toutes les familles du sol, en récompense de ce que tu as obéi à ma voix!»
Pour un chrétien c'est sur le Calvaire et en Marie que s'est réalisée et concrétisée pleinement et en surabondance la bénédiction promise à Abraham et qui, par elle, s'étend à toutes les familles du sol. Entre toutes les femmes, elle est par excellence la Bénie, canal de toute bénédiction pour toutes les familles du sol.
C'est là que la plénitude de la grâce, dont Dieu avait comblé au départ cette fille d'Israël, est devenue si féconde.
Marie est la mère de tous les saints de la Nouvelle Alliance, elle les enfante à la grâce et à la vie éternelle, elle habite et anime la sainteté de chacun. Marie est la mère des saints comme Abraham est le père des croyants. Le sablier s'est renversé, et tout le sable fin de la vie éternelle passe par l'étroit canal de cette femme sept fois sainte. Plus encore qu'Abraham, elle est exemplaire de la foi et de l'obéissance sacrificielles.
[...]
Le chapitre 22 de la Genèse raconte en termes simples ce qu'on a appelé le sacrifice d'Abraham et qui ne fut achevé que sur un mouton. Et pourtant, rien n'avait été plus irrévocable que la volonté d'Abraham d'immoler son fils à Dieu,
Ce même chapitre de la Genèse est sans doute, de toute la Bible, le texte qui fait le mieux comprendre en particulier le comportement de Marie durant le temps de la Passion de Jésus-Christ. Aussi cruel que l'événement concernant Abraham ait été, la Prophétie n'était qu'un brouillon inachevé. Il faudrait ne rien connaître aux artistes pour imaginer qu'une telle esquisse ne serait pas un jour reprise et achevée.
Le récit de la Genèse est prophétique de ce qui se passe au Calvaire : mais alors la prophétie crève sous le poids de l'histoire cruelle et consommée. Ici, on va jusqu'au bout du chemin, ici s'accomplit la Prophétie et s'achève la parabole, ici la volonté de Dieu est faite à la lettre, l'acte achève l'intention. Ici le sang de l'homme est versé comme sur un champ de bataille. Ici, c'est la chair d'un homme qui est immolée. Ici, on ne dit que des paroles dernières, la mort ne se trompe pas de victime, les actes sont suprêmes et couronnent les dernières volontés.
Sortez sur le chemin, filles de Sion, allez voir le roi Salomon au beau jour de ses noces : il a sur la tête le diadème dont sa mère l'a couronné, car c'est vrai : jamais il n'eût pu souffrir ce qu'il souffre sans ce corps que sa mère a fourni. Regardez! Taisez-vous! Pleurez! Le plus beau des enfants des hommes porte un diadème d'épines.
[...]
Entre ce vendredi où Jésus fut crucifié et ce dimanche matin où il est ressuscité des morts, il s'est passé un événement énorme et silencieux : Marie a gardé intacte dans son coeur la foi en la totalité du mystère chrétien. Ce mystère s'était inauguré en elle, un peu plus de trente ans plus tôt, au moment de l'Annonciation : de son propre consentement, elle était devenue la mère de Dieu; en ses entrailles de femme avait germé cet homme qu'on venait de crucifier et qui était le Saint des Saints. En vérité, en ce premier Samedi-Saint du monde eut lieu une nouvelle et secrète Annonciation :
c'est là que Marie est devenue mère des croyants de la Nouvelle Alliance, mère de l'Église. Mais cela se fit dans le total dénuement de la foi, dans le double silence du Grand Sabbat et du grand deuil : aucun ange n'apparaît. Dieu se tait. Jamais Marie n'a été plus seule, plus silencieuse, plus résolue à la volonté de Dieu, qui veut ce qui est.
Muette de douleur, muette de stupeur, muette de chagrin, accueillie dans une maison qui n'est pas la sienne, Marie garde la foi. La foi chrétienne, muette elle aussi comme l'enfant encore dans le sein de sa mère, est tout entière sous sa garde, tout entière réfugiée, reléguée, thésaurisée, vivante, au coeur de cette femme en grand deuil.
La foi chrétienne n'est pas du tout un sentiment, mais alors pas du tout : je veux dire qu'elle ne se sent pas et ne se mesure pas avec la sensibilité.
Si on exige une analogie, j'évoquerai la situation du croyant chrétien comme celle d'un soldat sous la ligne de feu, qui traverse un moment difficile, un de ces moments où on se demande s'il faut tenir ou ficher le camp. Le soldat décide de tenir le coup. Il ne s'émeut pas outre mesure de la situation critique où il est. Pourquoi? Le chef suprême en personne s'est engagé à le soutenir. Il lui a garanti que la victoire est au bout de l'effort. Le chef suprême a donné sa parole, et le soldat sait que cette parole sera tenue. Quand? Comment? Le temps et la manière, il ne le connait pas, Mais il sait que la parole sera tenue. Il considérerait comme une forfaiture de sa part d'en douter seulement. Voilà ce que j'appelle «avoir la foi». Je crois qu'un homme qui n'a pas le sens de l'honneur est incapable de percevoir ce qu'est la foi chrétienne. Par contre, on comprend beaucoup de choses au christianisme, quand on a compris que cette religion n'est absolument pas sentimentale, qu'elle ne se paie ni d'émotions. ni de mots.
A ce point de vue, Marie est incomparable. Dieu lui a donné sa Parole, au sens littéral et génétique - elle est la mère de la Parole créatrice et rédemptrice -, elle a donné à Dieu sa parole de femme : Parole de Dieu contre parole de fille d'Israël, poids égal, Voilà qui est fait. Voilà qui est acquis. Aucune des deux parties ne reviendra jamais sur ce Pacte et sur les exigences qui en découlent, Comme la religion d'Abraham, la religion de Marie , la religion chrétienne, est essentiellement une affaire d'honneur.
[...]
Nos écrivains sacrés n'ont pas parlé d'une apparition de Jésus ressuscité à sa mère. Ils n'ont pas fait mention de la présence de Marie à l'Ascension de son fils dans le ciel, parce qu'elle n'y était pas. [...] les apparitions de Jésus ressuscité ont pour but de confirmer la mission apostolique, de véhiculer le témoignage en chaîne, et on ne voit pas que Marie soit chargée de cette mission. Est-ce à dire que Marie a ignoré la Résurrection de son fils et son ascensipn dans le ciel? Loin de moi une telle pensée!
Mais sur ces faits essentiels, miraculeux, énormes, qui constituent les fondations de la foi chrétienne, Marie s'est trouvée exactement dans la même situation que nous, chrétiens de l'an 2000, qui y croyons. De tout l'élan de son être, elle y a cru aussi sur le témoignage de ceux qui l'avaient vu de nouveau vivant et qui l'ont vu monter au ciel. Elle y a cru, comme aujourd'hui tous les chrétiens y croient : sur le témoignage apostolique.
[...]
Le parcours de Marie du Vendredi-Saint jusqu'à sa mort à elle, fut une sorte de traversée du Désert comme l'est, ici-bas, le parcours des croyants. La foi et la foi seule, animée de tout son amour et de son espérance, l'a tenue debout et en marche. Elle a inauguré superbement l'attitude qui est le lot commun des chrétiens depuis la mort du dernier témoin de la Résurrection de Jésus-Christ [...] Je ne dis pas que Marie n'eût pas éprouvé du plaisir à revoir et touché son fils ressuscité. J'affirme que la foi chrétienne ne nous est pas donnée pour «nous faire plaisir», mais
pour que nous en vivions [...]
Je ne crois pas du tout que ce soit par hasard que la dernière des Béatitudes, énoncées dans l'Évangile, ait un rapport essentiel avec la foi, qui semble décidément la vertu constitutive de la vie chrétienne, nous dirions aujourd'hui son ADN. Cette dernière Béatitude a été prononcée par Jésus au cours de la seconde apparition à ses Apôtres, et en présence de Thomas qui, étant absent lors de la première apparition, en avait contesté la véracité. [...] Et voici la dernière des Béatitudes énoncées dans l'Évangile. Jésus dit :
- «Parce que tu as vu, Thomas, tu as cru. Bienheureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru!»
Quand Jésus a prononcé cette dernière Béatitude, je me demande s'il ne pensait pas d'abord à sa mère, tant cette Béatitude s'accommode à Marie comme gant à la main et comme chaussure au pied.
Source : R.L. Bruckberger,
Marie mère de Jésus-Christ, p. 154
[b]Mère de l'Église[/b] ...
«... terminons la lecture du [b]chapitre 22[/b] de la [b]Genèse[/b] : «L'Ange du Seigneur appela du ciel Abraham une seconde fois et lui dit :
[list] « Je le jure par moi-même - oracle de Yavhé - parce que tu as fait cette chose-là, que tu ne m'as pas refusé ton fils, ton unique, je te comblerai de bénédictions, et je multiplierai ta race comme les étoiles du ciel et comme le sable qui est au rivage de la mer, Ta descendance possédera la Porte de ses ennemis, et par ta race seront bénies toutes les familles du sol, en récompense de ce que tu as obéi à ma voix!»[/list]
Pour un chrétien c'est sur le Calvaire et en Marie que s'est réalisée et concrétisée pleinement et en surabondance la bénédiction promise à Abraham et qui, par elle, s'étend à toutes les familles du sol. Entre toutes les femmes, elle est par excellence la Bénie, canal de toute bénédiction pour toutes les familles du sol.
C'est là que la plénitude de la grâce, dont Dieu avait comblé au départ cette fille d'Israël, est devenue si féconde. [b]Marie est la mère de tous les saints de la Nouvelle Alliance[/b], elle les enfante à la grâce et à la vie éternelle, elle habite et anime la sainteté de chacun. Marie est la mère des saints comme Abraham est le père des croyants. Le sablier s'est renversé, et tout le sable fin de la vie éternelle passe par l'étroit canal de cette femme sept fois sainte. Plus encore qu'Abraham, elle est exemplaire de la foi et de l'obéissance sacrificielles.
[...]
Le chapitre 22 de la Genèse raconte en termes simples ce qu'on a appelé le sacrifice d'Abraham et qui ne fut achevé que sur un mouton. Et pourtant, rien n'avait été plus irrévocable que la volonté d'Abraham d'immoler son fils à Dieu, [b]Ce même chapitre de la Genèse est sans doute, de toute la Bible, le texte qui fait le mieux comprendre en particulier le comportement de Marie durant le temps de la Passion de Jésus-Christ[/b]. Aussi cruel que l'événement concernant Abraham ait été, la Prophétie n'était qu'un brouillon inachevé. Il faudrait ne rien connaître aux artistes pour imaginer qu'une telle esquisse ne serait pas un jour reprise et achevée.
Le récit de la Genèse est prophétique de ce qui se passe au Calvaire : mais alors la prophétie crève sous le poids de l'histoire cruelle et consommée. Ici, on va jusqu'au bout du chemin, ici s'accomplit la Prophétie et s'achève la parabole, ici la volonté de Dieu est faite à la lettre, l'acte achève l'intention. Ici le sang de l'homme est versé comme sur un champ de bataille. Ici, c'est la chair d'un homme qui est immolée. Ici, on ne dit que des paroles dernières, la mort ne se trompe pas de victime, les actes sont suprêmes et couronnent les dernières volontés.
Sortez sur le chemin, filles de Sion, allez voir le roi Salomon au beau jour de ses noces : il a sur la tête le diadème dont sa mère l'a couronné, car c'est vrai : jamais il n'eût pu souffrir ce qu'il souffre sans ce corps que sa mère a fourni. Regardez! Taisez-vous! Pleurez! Le plus beau des enfants des hommes porte un diadème d'épines.
[...]
Entre ce vendredi où Jésus fut crucifié et ce dimanche matin où il est ressuscité des morts, il s'est passé un événement énorme et silencieux : Marie a gardé intacte dans son coeur la foi en la totalité du mystère chrétien. Ce mystère s'était inauguré en elle, un peu plus de trente ans plus tôt, au moment de l'Annonciation : de son propre consentement, elle était devenue la mère de Dieu; en ses entrailles de femme avait germé cet homme qu'on venait de crucifier et qui était le Saint des Saints. En vérité, en ce premier Samedi-Saint du monde eut lieu une nouvelle et secrète Annonciation : [b]c'est là que Marie est devenue mère des croyants de la Nouvelle Alliance, mère de l'Église[/b]. Mais cela se fit dans le total dénuement de la foi, dans le double silence du Grand Sabbat et du grand deuil : aucun ange n'apparaît. Dieu se tait. Jamais Marie n'a été plus seule, plus silencieuse, plus résolue à la volonté de Dieu, qui veut ce qui est.
Muette de douleur, muette de stupeur, muette de chagrin, accueillie dans une maison qui n'est pas la sienne, Marie garde la foi. La foi chrétienne, muette elle aussi comme l'enfant encore dans le sein de sa mère, est tout entière sous sa garde, tout entière réfugiée, reléguée, thésaurisée, vivante, au coeur de cette femme en grand deuil.
La foi chrétienne n'est pas du tout un sentiment, mais alors pas du tout : je veux dire qu'elle ne se sent pas et ne se mesure pas avec la sensibilité.
Si on exige une analogie, j'évoquerai la situation du croyant chrétien comme celle d'un soldat sous la ligne de feu, qui traverse un moment difficile, un de ces moments où on se demande s'il faut tenir ou ficher le camp. Le soldat décide de tenir le coup. Il ne s'émeut pas outre mesure de la situation critique où il est. Pourquoi? Le chef suprême en personne s'est engagé à le soutenir. Il lui a garanti que la victoire est au bout de l'effort. Le chef suprême a donné sa parole, et le soldat sait que cette parole sera tenue. Quand? Comment? Le temps et la manière, il ne le connait pas, Mais il sait que la parole sera tenue. Il considérerait comme une forfaiture de sa part d'en douter seulement. Voilà ce que j'appelle «avoir la foi». Je crois qu'un homme qui n'a pas le sens de l'honneur est incapable de percevoir ce qu'est la foi chrétienne. Par contre, on comprend beaucoup de choses au christianisme, quand on a compris que cette religion n'est absolument pas sentimentale, qu'elle ne se paie ni d'émotions. ni de mots.
A ce point de vue, Marie est incomparable. Dieu lui a donné sa Parole, au sens littéral et génétique - elle est la mère de la Parole créatrice et rédemptrice -, elle a donné à Dieu sa parole de femme : Parole de Dieu contre parole de fille d'Israël, poids égal, Voilà qui est fait. Voilà qui est acquis. Aucune des deux parties ne reviendra jamais sur ce Pacte et sur les exigences qui en découlent, Comme la religion d'Abraham, la religion de Marie , la religion chrétienne, est essentiellement une affaire d'honneur.
[...]
Nos écrivains sacrés n'ont pas parlé d'une apparition de Jésus ressuscité à sa mère. Ils n'ont pas fait mention de la présence de Marie à l'Ascension de son fils dans le ciel, parce qu'elle n'y était pas. [...] les apparitions de Jésus ressuscité ont pour but de confirmer la mission apostolique, de véhiculer le témoignage en chaîne, et on ne voit pas que Marie soit chargée de cette mission. Est-ce à dire que Marie a ignoré la Résurrection de son fils et son ascensipn dans le ciel? Loin de moi une telle pensée!
Mais sur ces faits essentiels, miraculeux, énormes, qui constituent les fondations de la foi chrétienne, Marie s'est trouvée exactement dans la même situation que nous, chrétiens de l'an 2000, qui y croyons. De tout l'élan de son être, elle y a cru aussi sur le témoignage de ceux qui l'avaient vu de nouveau vivant et qui l'ont vu monter au ciel. Elle y a cru, comme aujourd'hui tous les chrétiens y croient : sur le témoignage apostolique.
[...]
Le parcours de Marie du Vendredi-Saint jusqu'à sa mort à elle, fut une sorte de traversée du Désert comme l'est, ici-bas, le parcours des croyants. La foi et la foi seule, animée de tout son amour et de son espérance, l'a tenue debout et en marche. Elle a inauguré superbement l'attitude qui est le lot commun des chrétiens depuis la mort du dernier témoin de la Résurrection de Jésus-Christ [...] Je ne dis pas que Marie n'eût pas éprouvé du plaisir à revoir et touché son fils ressuscité. J'affirme que la foi chrétienne ne nous est pas donnée pour «nous faire plaisir», mais [b]pour que nous en vivions[/b] [...]
Je ne crois pas du tout que ce soit par hasard que la dernière des Béatitudes, énoncées dans l'Évangile, ait un rapport essentiel avec la foi, qui semble décidément la vertu constitutive de la vie chrétienne, nous dirions aujourd'hui son ADN. Cette dernière Béatitude a été prononcée par Jésus au cours de la seconde apparition à ses Apôtres, et en présence de Thomas qui, étant absent lors de la première apparition, en avait contesté la véracité. [...] Et voici la dernière des Béatitudes énoncées dans l'Évangile. Jésus dit :
[list]
«[i]Parce que tu as vu, Thomas, tu as cru. Bienheureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru![/i]»[/list]
Quand Jésus a prononcé cette dernière Béatitude, je me demande s'il ne pensait pas d'abord à sa mère, tant cette Béatitude s'accommode à Marie comme gant à la main et comme chaussure au pied.
Source : R.L. Bruckberger, [u]Marie mère de Jésus-Christ[/u], p. 154