Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

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Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par ChristianK » jeu. 14 déc. 2017, 22:36

Incertain a écrit :
ven. 27 oct. 2017, 10:22
Bonjour,

Ma question concerne la philosophie et la théologie, mais je pense qu'elle s'inscrit dans le thème de l'apologétique puisqu'il s'agit de répondre aux objections des athées.

Voici donc le problème :
Dans les philosophies chrétiennes ou proches, on en arrive (à mon avis de façon rigoureuse) à déterminer que l'univers a une Cause Première, et que celle-ci n'est pas une infinité d'atomes éternels. Cette Cause première a généré notre univers physique. On trouve un exemple très convainquant de cette démonstration chez Frédéric Guillaud dans son ouvrage "Dieu existe (Arguments philosophiques)" au Cerf. Il reprend la plupart des arguments de la théologie classique en y ajoutant des considérations plus contemporaines et une réflexion sur le Big Bang. Soit.

Il identifie ensuite cette Cause première à Dieu, en disant notamment qu'elle ne peut être matérielle (elle sert à expliquer la matière, donc si on dit qu'elle est matérielle on recule et on a rien expliqué), qu'elle est hors de l'espace et du temps, et il en conclut quecomme ce qui n'est pas matériel est spirituel, il s'agit donc nécessairement d'un Esprit. C'est là à mon sens que la démonstration achoppe. Cette Cause première pourrait être un X indéfinissable, certes non matériel au sens de non-étendu et non spatial, mais pas pour autant un Esprit conscient...

Ainsi cette Cause première pourrait être l'Etre en tant qu'être, ou l'énergie, ou la Substance (ce qui se tient "sous les choses"). Il semble hasardeux et difficile d'expliquer que cette Cause première aurait des qualités comme la conscience, l'intelligence ou la bonté.

Il y a un passage de "cause première, agent qui génère et soutient l'univers physique" à Etre intelligent, infini et bon. Comment ce passage est-il justifié et argumenté (peut-être chez St Thomas d'Aquin ou d'autres penseurs) ?

Le mieux pour cela est d'aller voir Aristote (et un livre sur lui par le prof. Thomas de Koninck. Il passe de 1er moteur à pure pensée.
Il y a plusieurs raisons, p.ex.le fait que le créateur doit être supérieur et non inférieur à l'homme.
Il ne faut pas non plus être naif: chez Dieu esprit est une facon de parler, una analogie avec l'homme. Et etymologiquement Dieu n'est pas loin de énergie, ENERGUEIA, qui veut dire en acte (par opposition à potentialité, DUNAMIS); or Aristote dit que Dieu est pure actualité (ERGON, oeuvre, travail), sans trace d'être en puissance.
Pour l'immatérialité c'est plus technique et abstrait. Je vais donner juste la formule même si ca peut paraitre peu compréhensible:
En aristotélisme tout être matériel est composé de matière et de forme (celle ci appelée âme chez les vivants). Or la matière est être en puissance. Et Dieu ne comporte aucun réalité potentielle, donc il ne peut comporter de matière.

En un sens toutefois il est vrai que Dieu n'est pas un esprit car toute notion d'esprit ne peut être calquée que sur le nôtre. Il est COMME (analogiquement) un esprit, en toute rigueur.

C'est pourquoi aussi certains théologiens (et Kierkegaard) n'aiment guère le Dieu des philosophes, qui leur parait une grosse chose pleine.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par TREBLA » jeu. 16 nov. 2017, 0:04

Cher Christophe67,

Merci pour votre réponse.
Christophe67 : mer. 15 nov. 2017

Je vais reprendre parmi votre propos deux éléments;
TREBLA a écrit :
mar. 14 nov. 2017, 23:39
Donc la génération spontanée n'existe pas. C'est une illusion.
En effet et cela a été prouvé par la suite.
Nous sommes d'accord que la génération spontanée n'existe pas. Il s'agit d'une fausse science.
Le mystère de l'origine de la vie ne commence à ce disiper que depuis une période très récente. Ce n'est que depuis le XIXe siècle (avec les travaux de Pasteur) que l'on sait que la génération spontanée n'existe pas et que les myriades d'organismes microscopiques (comme les virus et les bactéries) ne viennent pas de la matière qu'ils parasitent ou qu'ils agressent. La vie ne peut naître que de la vie.

FOUREAUX, Francis. Dictionnaire de culture générale. Paris : Pearson Education France, 2010. 449 p.
L'auteur du texte ci-dessus nous dit « que les myriades d'organismes microscopiques (comme les virus et les bactéries) ne viennent pas de la matière ».

Les évolutionnistes ne veulent pas accepter ce fait confirmé par la vraie science de Louis Pasteur.
Lorsque le système solaire se forme il y a 4,55 milliards d'années dans une nébuleuse de gaz et de poussières à la périphérie de la Voie Lactée, rien ne laisse penser que la troisième planète qui est une boule de matière fondue va être le siège d'un phénomène extraordinaire : l'apparition de la vie.

http://www.evolution-biologique.org/
Selon la source évolutionniste ci-dessus, « l'apparition de la vie » s'est produite à partir d'une « boule de matière fondue ». Cela ne correspond pas à la réalite biologique, car « les virus et les bactéries ne viennent pas de la matière ».

Que le Seigneur vous bénisse.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Héraclius » mer. 15 nov. 2017, 18:05

Une théorie au sens scientifique n'a rien à voir avec le sens commun du terme théorie. La science expérimentale ne fonctionnant que par induction, elle n'est jamais en mesure de prouver quoi que ce soit au sens démonstratif, elle ne peut que construire des modèles qui collent le mieux possible aux données empiriques. Mais nier que cette méthode, qui repose sur un raisonnement inductif, ne peut pas produire du savoir, c'est limiter de façon drastique ce que l'on peut nommer comme tel.

Donc je n'ai aucun problème à ce que des théories sûres et défendues depuis longtemps par le consensus scientifique (comme l'évolution ou le Big Bang) soient tenus pour des instances de savoir et enseignées comme tel.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Christophe67 » mer. 15 nov. 2017, 12:07

Bonjour TREBLA,

Je vais reprendre parmi votre propos deux éléments;
TREBLA a écrit :
mar. 14 nov. 2017, 23:39
Donc la génération spontanée n'existe pas. C'est une illusion.
En effet et cela a été prouvé par la suite. Cependant face un concept qu'il ne comprend pas, l'homme est obligé de théoriser.
Après il reste à voir si cela est confirmé ou infirmé. Mais dans la réflexion je pense que cela est nécessaire.

Cependant certaines théories sont, non pas confirmées, mais exposées comme étant des vérités. Ne dit on pas de nos jours encore "théorie de l'évolution" , "théorie du big bang" et cependant ces théories sont prises comme des réalités au lieu de possibilités, des faisceaux concordants pour des preuves indiscutables. Est ce scientifique ? Non pas du tout et c'est même tout le contraire. Ce sont simplement des arguments utilisés de façons particulièrement dogmatiques pour imposer non pas une réalité mais servir une idéologie laïciste (à défaut d'une vraie laïcité). C'est une autre forme de foi, celle d'accepter des invraisemblances "scientistes" pour rejeter d'autres invraisemblances, mais invraisemblances quand même. Cela n'a rien de scientifique puisque c'est refuser une possibilité, ou rejeter une des inconnues dans une équation: le résultat ne pourra être juste (contraire à la science expérimentale comme vous le soulignez).

Je donne un exemple qui n'a pas pour but de donner l'avantage à l'un ou l'autre camp : je travaille dans un hôpital universitaire et depuis un certain temps en génétique médicale concernant les maladies rares. Lorsque je discute avec un chercheur en génétique (sur un plan personnel n'étant moi-même ni médecin ni chercheur) il s'avère qu'il y ait autant de blancs dans une chaîne ADN qui invalide la "théorie de l'évolution" (dans les origines de l'homme -> singe -> poisson) que "la création". Je partage juste ce constat et ne cherche pas à développer plus en avant car ce n'est pas le sujet.
Vous mentionnez « la science que l'on oppose depuis deux siècles à la foi ». Est-ce que l'on oppose la science expérimentale à la foi ?
Non, pas du tout. C'est seulement la fausse science que l'on oppose à la foi. La génération spontanée est un exemple de la fausse science.
Science et théologie ont toujours avancées côte à côte et se sont nourries l'une et l'autre, ce n'est que récemment depuis deux siècles environ qu'on les oppose. La science expliquant le "comment" et la théologie le "pourquoi" il n'y pas lieu d'en faire des antagonismes mais des complémentarités.
Seuls ceux qui veulent plonger l'homme dans un obscurantisme profond souhaitent les dissocier. Les scientistes en pensant qu'il n'y a qu'un "comment" sans nécessité d'un "pourquoi', et les fondamentalistes par un "pourquoi" qui se passerait d'un "comment".
La nature n'aimant pas le vide, j'ai tendance à penser que là où il y a un manque, autre chose occupe cette "niche". A chacun de voir ce que peut être cet autre chose ;)
La vraie science confirme la foi.
Et réciproquement oserais-je dire. La compréhension nourrit et renforce la foi, la grâce de la foi nous permet de mieux comprendre.
En ce qui me concerne, l'acceptation des deux me permet par la science (mais pas que) d'entrer plus avant dans le mystère de la Création, et par la foi de mieux en apprécier la substantifique moelle. Avant cela il y avait un manque, une équation incomplète.

Et entre les deux, il y a des hommes !

Cordialement.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par TREBLA » mar. 14 nov. 2017, 23:39

Cher Christophe67,

J'aime bien votre commentaire pertinent :
Christophe67 :

Il y a même Stephen Hawking qui a bout d'arguments nous ressort la théorie de la génération spontanée, concernant ces multivers. On a bien mesuré le sérieux de cette théorie, battue en brèche en son époque par Pasteur.
« La génération spontanée est une chimère », selon Louis Pasteur. Selon LAROUSSE, une chimère n'est qu'une « idée vaine qui n'est que le produit de l'imagination ».

Donc la génération spontanée n'existe pas. C'est une illusion. Par contre, la loi de la biogenèse est un principe universellement confirmé par la science expérimentale.

Vous mentionnez « la science que l'on oppose depuis deux siècles à la foi ». Est-ce que l'on oppose la science expérimentale à la foi ?
Non, pas du tout. C'est seulement la fausse science que l'on oppose à la foi. La génération spontanée est un exemple de la fausse science.

La vraie science confirme la foi. TOUTE VIE VIENT DE LA VIE.

Que le Seigneur vous bénisse.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Héraclius » mar. 14 nov. 2017, 20:04

Incertain a écrit :
mar. 14 nov. 2017, 15:24
Bonjour Héraclius,

votre argument me laisse toujours très perplexe. A mon avis, il faudrait en voir le détail avec un logicien, car soit c'est un raisonnement tout à fait valide et constitue donc effectivement une preuve de l'intelligence de la Cause première, soit il s'y trouve un paralogisme. Je ne saurai le dire !
Néanmoins si on remplace "intelligibilité" par "blancheur" on obtient l'énoncé suivant :
"Parce que si X est source de toute choses, et que dans ''toute choses'' on trouve de la blancheur, alors X en est responsable. Ce n'est pas pareil qu'avec des ''phénomènes'', comme vous dites, dans le monde. Précisément à cause de la dimension totalisante de l'être nécéssaire ; tout vient de lui, donc on ne peut pas expliquer quoi que ce soit, sur le plan de l'être, par quelque chose d'autre que lui, toute autre chose ayant elle-même forcément son origine en lui."

Doit-on en conclure que la Cause première est blanche, puisqu'il y a de la blancheur dans ce qu'elle a produit ?
Doit-on en conclure que la Cause première est intelligente, parce qu'il y a de l'intelligibilité dans ce qu'elle a produit ?
Je ne pense pas que l'équivalence soit valable. Vous remarquerez que la question n'est pas de savoir si Dieu est intelligible, mais de savoir si il est ''intelligent''. Ce sont des concepts distincts, alors que le blanc et la blancheur sont assez équivalents.

Puisqu'il y a une dimension intellective à toutes choses, voir des choses qui n'existe qu'en temps que formes intellectives (genre les objets mathématiques), alors Dieu est capable de produire de l'intellectif. En d'autre terme, il ''pense'' ; il actualise certaines choses parmi les millions de possibilités qui sont concevables, et donc conçues par Dieu. Bien sûr ce n'est pas pareil que nous parce que Dieu conçoit tout, il possède tout dans son intellect en tant qu'il est leur origine, donc sa connaissance est fixe, totale, et non-réflexive (Dieu ne réfléchi pas, il sait).

Je sais bien que c'est pas très clair. Mais réfléchissons en prenant l'inverse : un Dieu sans intellect. Si Dieu ne peut pas penser, ne conçoit rien, alors quelle est l'origine des propositions abstraites ? Dieu pourrait-il leur donner l'existence sans les concevoirs ? Mais si il ne les conçoit pas, alors à quoi donne-t-il l'existence ? A des essences qui préexistent à Dieu ? Mais si elles lui préexistent, elles n'ont pas leur origine en lui - or nous avons vu qu'il était la source de tout.

Un Dieu qui donne l'existence donne l'existence à des formes ; il faut exister ''quelque chose'' , mais ce quelque chose, qui est pur possibilité avant son actualisation existentielle, doit lui-même avoir une source et cette source ne peut être que Dieu. Dieu est la source des essences ; dire cela, c'est dire qu'il les pense, au sens où il les fait émerger de lui.

De la blancheur on peut conclure que le blanc existe dans cette pensée de Dieu (puisqu'il l'actualise). C'est en ce sens qu'il ''existe en Dieu''. L'intelligibilité des choses aussi, existe en Dieu - le blanc fait parti des choses que pense Dieu.


Je suis mauvais pour expliquer je crois. :(


A noter que l'intellect divin ainsi décrit n'est pas une intelligence au sens humain du terme. Mais avec l'idée d'une volonté en Dieu - déduite de sa souveraine liberté conséquence de son indéterminisme et du fait qu'il soit cause (du monde), alors ont obtient un schéma intellect - volonté qui ressemble, en un sens très différent, de l'âme humaine.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par TREBLA » mar. 14 nov. 2017, 18:49

Cher Incertain,

Merci beaucoup pour votre initiative concernant cette discussion.
Incertain : mar. 07 nov. 2017

les athées [...] tiennent que l'évolution ajoute du nouveau, que la conscience etc. émergent de "la matière"
Oui, les athées croient cela. Il s'agit d'une croyance contraire aux données scientifiques.

Les données scientifiques sont très claires. La matière n'ajoute rien de nouveau. Dans la nature, le désordre est en train d'augmenter. Il s'agit du deuxième principe de la thermodynamique.
Pourquoi le Soleil est-il en panne ?
Le Soleil perd 100 millions de tonnes de sa masse chaque seconde

http://www.lefigaro.fr/sciences/2009/06 ... ?scrlybrkr
Ce n'est pas seulement le Soleil qui est en panne, c'est l'Univers entier qui est en panne.

En physique, le principe universel de l'ordre au désordre a un nom : c'est l'entropie.

Les choses ne vont pas du bon au meilleur et du meilleur à l'excellent. C'est un rêve peu scientifique. Au contraire, les choses vont du mauvais au pire. C'est la réalité physique.

Que le Seigneur vous bénisse.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Incertain » mar. 14 nov. 2017, 15:24

Bonjour Héraclius,

votre argument me laisse toujours très perplexe. A mon avis, il faudrait en voir le détail avec un logicien, car soit c'est un raisonnement tout à fait valide et constitue donc effectivement une preuve de l'intelligence de la Cause première, soit il s'y trouve un paralogisme. Je ne saurai le dire !
Néanmoins si on remplace "intelligibilité" par "blancheur" on obtient l'énoncé suivant :
"Parce que si X est source de toute choses, et que dans ''toute choses'' on trouve de la blancheur, alors X en est responsable. Ce n'est pas pareil qu'avec des ''phénomènes'', comme vous dites, dans le monde. Précisément à cause de la dimension totalisante de l'être nécéssaire ; tout vient de lui, donc on ne peut pas expliquer quoi que ce soit, sur le plan de l'être, par quelque chose d'autre que lui, toute autre chose ayant elle-même forcément son origine en lui."

Doit-on en conclure que la Cause première est blanche, puisqu'il y a de la blancheur dans ce qu'elle a produit ?
Doit-on en conclure que la Cause première est intelligente, parce qu'il y a de l'intelligibilité dans ce qu'elle a produit ?

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Héraclius » jeu. 09 nov. 2017, 14:17

Bonjour !
Cela veut dire qu'il y a bien de l'être : qui subsiste, qui garde sa structure. Cette structure peut être plus ou moins saisie par l'esprit humain. Vous appelez cette structure "intelligibilité de l'univers". C'est franchir un pas. Ensuite vous dîtes que la cause contient nécessairement ses effets. C'est ce que contestent les athées, qui tiennent que l'évolution ajoute du nouveau, que la conscience etc. émergent de "la matière".
Ne confondons pas tout. Là, nous sommes dans un cadre théiste, établi par l'argument pour la contigence, et nous posons la question de savoir si l'être nécessaire de la métaphysique est doté, ou non, d'une sorte d'intellect.

Mon raisonnement (que je formulle mal mais bon) est le suivant :

P1 : L'Être nécessaire est la source directe de toute chose en tant qu'il leur confère l'existence elle-même (par définition, c'est analytique). Il n'y a rien qui ne vienne de lui.
P2 : Il y a dans l'être de l'intelligibilité (les choses sont raisisables par l'intellect, on peut rendre raison des choses, les comprendre, au moins certaines).
C (par P1 et 2) : L'Être nécessaire est source existentielle directe (pas juste causale, hein) de l'intelligibilité. Ce qui implique (cf. P1) qu'elle vient de lui, qu'elle se trouve en lui. Donc l'être nécessaire a un genre d'intellect puisqu'il y a de l'intelligible dans sa création.

La clé c'est que même si l'Être nécessaire n'est pas forcément cause première de tout - parce qu'il y a des causes secondes, l'évolution que vous indiquez étant un bon exemple - il est la source existentielle de toute chose. C'est lui qui confère l'être. Y compris pour des choses sur lesquels il n'agit pas directemment.
Donc que l'univers soit stable et structuré, soit ; que cette structure puisse être peu à peu décrite et donner lieu à des théories intelligibles, soit ; de là à attribuer à l'univers l'intelligence parce qu'il est intelligible, ça me semble un saut qui demande de poser des étapes. Un phénomène inintelligent peut être intelligible, je ne vois pas de contradiction dans cette assertion, même si elle concerne le Tout...
Je suis d'accord avec votre dernière phrase, sauf pour sa dernière partie. Parce que si X est source de toute choses, et que dans ''toute choses'' on trouve de l'intelligibilité, alors X en est responsable. Ce n'est pas pareil qu'avec des ''phénomènes'', comme vous dites, dans le monde. Précisément à cause de la dimension totalisante de l'être nécéssaire ; tout vient de lui, donc on ne peut pas expliquer quoi que ce soit, sur le plan de l'être, par quelque chose d'autre que lui, toute autre chose ayant elle-même forcément son origine en lui.


Héraclius -

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Christophe67 » mer. 08 nov. 2017, 2:30

Bonjour Incertain,
Incertain a écrit :
mer. 08 nov. 2017, 1:17
j'ai toujours eu l'intuition que l'organisation et l'ordre de l'univers prouvent l'existence de Dieu. Mais je ne trouve pas l'enchaînement logique pour expliciter cette impression. En gros, s'il n'y avait pas de Dieu, l'univers devrait être une bouillie ou un chaos. il faut que quelque chose l'organise, sinon il ne tiendrait pas tout seul... Mais je n'arrive pas à donner une tournure rigoureuse à cette impression. Un athée dirait que l'univers peut être ordonné sans un Dieu qui l'ordonne, que "la matière" est dotée de lois, d'une consistance etc. Donc je suis perplexe.
Ce propos me fait penser à ce que disait Huber Reeves cet après midi sur une radio nationale. Cette impression qu'il nomme "l'intelligence de la nature".

Hors pour reprendre vos termes "je ne trouve pas l'enchaînement logique pour expliciter cette impression" ne faudrait il pas pour cela comprendre l'univers ? Nous en sommes bien loin.

Alors j'ai bien conscience que je sors de la logique dite "rationnelle" mais, pour reprendre la citation de St Augustin que j'utilise en signature, si il fallait croire pour comprendre ? Pas forcément tout connaitre mais simplement comprendre ? Et si l'enchaînement logique était métaphysique ? N''est ce pas agir à l'encontre des protocoles des méthodes expérimentales que de refuser une possibilité pour confirmer ou infirmer une hypothèse initiale ? ;)


Cordialement.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Christophe67 » mer. 08 nov. 2017, 2:09

Bonjour Antoine75,
antoine75 a écrit :
lun. 06 nov. 2017, 1:09
La création aurait pu faire que les êtres soient éternels sans éprouver la moindre souffrance ... Les êtres vivants pourraient être éternels tout en ne nuisant pas à leur environnement.

Mais c'est peut-être ce que nous serons au terme de notre existence à la résurrection, espérons-le !
Ce fut le cas à la Création, jusqu'à la Chute de l'homme par le péché originel.

La nature de l'homme n'était pas d'être immortel mais c'était un don de Dieu, ce qu'on appelle les dons préternaturels ( ainsi que la connaissance infuse, l'intégrité des passions ....)

En se séparant de Dieu l'homme a perdu ces dons ... comme une fiancé sa bague de fiançailles.


Cordialement.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Incertain » mer. 08 nov. 2017, 1:17

Bonsoir Héraclius,

j'ai toujours eu l'intuition que l'organisation et l'ordre de l'univers prouvent l'existence de Dieu. Mais je ne trouve pas l'enchaînement logique pour expliciter cette impression. En gros, s'il n'y avait pas de Dieu, l'univers devrait être une bouillie ou un chaos. il faut que quelque chose l'organise, sinon il ne tiendrait pas tout seul... Mais je n'arrive pas à donner une tournure rigoureuse à cette impression. Un athée dirait que l'univers peut être ordonné sans un Dieu qui l'ordonne, que "la matière" est dotée de lois, d'une consistance etc. Donc je suis perplexe.

Pour en revenir à votre argument sur l'intelligibilité, vous écrivez :

"Quand je parle d'intelligibilité, comprennez bien que je ne parle pas juste des lois physiques, je parle de la compréhensibilité de l'univers, son caractère rationnel ; le fait que l'on puisse rendre raison des choses. Ce fait est dépendant de l'être nécessaire."

Pour moi le raisonnement saute plusieurs étapes et je vais essayer de le décomposer :

- l'univers dure, il est stable ;
- l'univers est non chaotique ;
- l'univers est prévisible ("le soleil se lèvera demain")...

Cela veut dire qu'il y a bien de l'être : qui subsiste, qui garde sa structure. Cette structure peut être plus ou moins saisie par l'esprit humain. Vous appelez cette structure "intelligibilité de l'univers". C'est franchir un pas. Ensuite vous dîtes que la cause contient nécessairement ses effets. C'est ce que contestent les athées, qui tiennent que l'évolution ajoute du nouveau, que la conscience etc. émergent de "la matière".

Donc que l'univers soit stable et structuré, soit ; que cette structure puisse être peu à peu décrite et donner lieu à des théories intelligibles, soit ; de là à attribuer à l'univers l'intelligence parce qu'il est intelligible, ça me semble un saut qui demande de poser des étapes. Un phénomène inintelligent peut être intelligible, je ne vois pas de contradiction dans cette assertion, même si elle concerne le Tout...



D

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par TREBLA » lun. 06 nov. 2017, 18:44

Cher antoine75,

J'aime bien votre commentaire :
antoine75 : lun. 06 nov. 2017

La création aurait pu faire que les êtres soient éternels sans éprouver la moindre souffrance ...
Je souhaite aussi « que les êtres soient éternels sans éprouver la moindre souffrance ».

Est-ce que « le mal, les maladies et la mort » faisaient partie intégrale de la Création originale ?
Selon le récit de la Genèse, la réponse est que non.

Après avoir terminé son œuvre créatrice, « Dieu vit tout ce qu'il avait fait, et voici cela était très bon » (Gn 1, 31).

Est-ce que Dieu vit « le mal, les maladies et la mort » et déclara que tout cela était très bon ?
Ce n'était certainement pas le cas.

Que le Seigneur vous bénisse.

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par Héraclius » lun. 06 nov. 2017, 11:45

antoine75 a écrit :
lun. 06 nov. 2017, 1:09
La création pourrait être plus intelligible que ça. Vous oubliez le mal, les maladies et la mort. La création aurait pu faire que les êtres soient éternels sans éprouver la moindre souffrance, Les êtres vivants auraient tout autant pu ne pas avoir besoin de manger et de donc de dégrader leur environnement en tuant d'autres êtres vivants ou en détruisant des fruits et des plantes par exemple. Les êtres vivants pourraient être éternels tout en ne nuisant pas à leur environnement.

Mais c'est peut-être ce que nous serons au terme de notre existence à la résurrection, espérons-le !

Le mal, la maladie, la mort sont intelligibles. On peut en parler, les comprendre, ce sont des réalités compréhensibles.

La question de intelligibilité des choses est distincte de questions comme le problème du mal. On a certes du mal à comprendre le mal au sens où, précisément, son rôle et son sens nous échappent, et qu'on peut y voir une contradiction avec l'idée de Dieu, mais cela n'a rien à voir avec le fait que ces choses sont comprises dans un ordre intelligible.

C'est pas hyper clair, je sais. :incertain:

Re: Comment les théologiens catholiques passent-ils de "la Cause Première" à Dieu?

par antoine75 » lun. 06 nov. 2017, 1:09

La création pourrait être plus intelligible que ça. Vous oubliez le mal, les maladies et la mort. La création aurait pu faire que les êtres soient éternels sans éprouver la moindre souffrance, Les êtres vivants auraient tout autant pu ne pas avoir besoin de manger et de donc de dégrader leur environnement en tuant d'autres êtres vivants ou en détruisant des fruits et des plantes par exemple. Les êtres vivants pourraient être éternels tout en ne nuisant pas à leur environnement.

Mais c'est peut-être ce que nous serons au terme de notre existence à la résurrection, espérons-le !

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