La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

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Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par cmoi » jeu. 02 avr. 2020, 4:58

A mon tour d'être pleinement d'accord avec vous... Y compris dans votre réponse interrogative envers Altior.

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Gaudens » mer. 01 avr. 2020, 23:13

Je suis bien d'acocrd avec ce que vous avez écrit ci-dessus,Cmoi:la primauté de Pierre est une chose,les modes d'actions et la portée de son autorité en sont une autre.Cela dit,le jour où des Eglises(pleinement reconnues comme telles) accepteront qu'en vertu de cette primauté un certain droit d'appel à Rome soit reconnu ne devra pas s'accompagner,comme c'est le cas chez certains orthodoxes intégristes qui relaient ainsi inconsciemment les veux d'une opinion progressiste dans le monde catholique, de l'exigence du démantèlement de l'autorité du pape de Rome à l'intérieur de l'Eglise latine :pendant mille ans les différentes Eglises ont vécu des écclésiologies différentes de fait et on ne pourra pas faire comme si ces mille ans et plus n'avaient pas existé.
Altior:d' accord avec vous sur le caractère peu probable historiquement de l'historicité d'une création apostolique du siège de Byzance,devenu Constantinople au IV è siècle:la prétention à être un siège fondé par Saint-André(qui est aussi celle de l'Eglise de Géorgie) est loin d'être documentée historiquement,à ce que je crois et c'est bien sa qualité de capitale du Basileus que la ville dût sa promotion au second rang de la Pentarchie (aujourd'hui Moscou pourrait prétendre au même rang pour de mêmes raisons de puissance).
Par contre,je ne vois pas pourquoi il faudrait mettre des bémols à l'apostolicité des sièges d'Alexandrie(Saint Marc) ou Jérusalem (ville qui vit naitre l'autorité de Pierre et surtout du premier évêque Jacques le Juste "frère" du Seigneur(certes pas un des douze mais quasiment...)

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Altior » mer. 01 avr. 2020, 22:09

Gaudens a écrit :
lun. 30 mars 2020, 18:39

A côté de Jérusalem, Rome,Antioche et Constantinople,n’oublions pas le rôle moteur d’Alexandrie dans les querelles théologiques autour de la nature du Christ :véhémente dans son opposition à l’arianisme (Arius était alexandrin) ,
Si Rome, Antioch et, avec certains bémols, Jérusalem et Alexandrie sont des sièges apostoliques, Constantinople est arrivé après quelques siècles de retard dans ce que fut nommé la «Pentarchie» et cela pour des raisons politiques. Pendant toute la dispute concernant la nature de Notre Seigneur elle n'était pas même métropole, elle dépendait de Césarée. D'ailleurs, c'est pourquoi le premier concile oecuménique ne s'est pas tenu à Constantinople, mais à Nicée.

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par cmoi » mar. 31 mars 2020, 13:43

Votre réponse n'était pas hors sujet Nebularis, il n'y manquait que le point que je soulevais aussi sous le fil d'un XXI ème siècle spirituel, à savoir que "cette prééminence que vous souhaitez comme nécessaire suppose l'usage de la force, c'est cela qui me trouble et qui m'a fait vous poser sur un post que vous avez ressuscité une question d'importance."

Concernant la place de Saint Pierre et sa succession : vaste sujet !
Je crois que le problème vient de la façon dont l'autorité s'exerce culturellement dans nos sociétés, car elle ne correspond pas à l'idée qu'en a le Dieu chrétien, même les autorités morales.
Les orthodoxes reconnaissent qu'il serait bon d'avoir quelqu'un non pas au-dessus du lot, mais dont le rôle "d'affermir ses frères" et de conciliateur, d'animateur, de pacificateur, un peu en dehors des circuits d'autorité justement, faciliterait la résolution de certains conflits.
A cela s'ajoute un rôle de représentation qui a pris, vu la façon dont notre monde s'est organisé, un visage diplomatique et politique permettant de se faire entendre auprès de certaines instances internationales.

La nécessité de définir un dogme de l'infaillibilité pontificale, telle qu'elle s'est fait sentir pour le pape qui a voulu le promulguer (en s'appuyant sur une décision conciliaire à l'arraché), pourrait être vue comme causée par la séparation d'avec les orthodoxes, pour pallier à un manque.
Cette infaillibilité, comme je l'ai ici souvent répété, ne signifie pas l'omniscience et conserve des failles dans la précision requise face à certaines données et définitions.
Le terme prochain de la prophétie des papes (Malachie) pourrait bien signifier une réconciliation de ces deux Eglises, plus que la fin des temps...

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Nebularis » mar. 31 mars 2020, 12:25

Cmoi, je vous remercie et vous assure de mon côté de toute mon estime, bien que je n'aie toujours pas compris votre requête ! lol

Merci à vous Gaudens pour ces éclaircissements. On sent que la matière vous est familière ! Je me suis couché moins bête hier soir. Quelques objections cependant :
si les évêques sont successeurs des apôtres (individuellement,dans une longue chaine de transmission) ,pourquoi et comment devraient-ils être tous successeurs de Pierre ?
Il me semble qu'évêques et prêtres participent à la succession de tous les apôtres, et non seulement de Pierre.
Par ailleurs la primauté de saint Pierre parmi les Douze est une interprétation a posteriori de l’Église latine, dans un but évident de légitimation politique et spirituelle (fondée sur Rome comme lieu du martyre de l'apôtre, certes ; mais saint Pierre se serait-il jamais rendu à Rome si elle n'avait été la capitale politique de l'Empire ?)

Quoi qu'il en soit, cette prétendue primauté de saint Pierre est très loin d'être incontestable ni incontestée ! S'il ne s'agit pas de remettre en cause l'importance de saint Pierre, c'est-à-dire son rôle prééminent parmi les disciples du Divin Maître, il est en revanche possible (et nécessaire) de démontrer qu'on ne peut pas déduire de cette prééminence ce rôle d'autorité centrale et organisatrice que le catholicisme voudrait attribuer à l'apôtre et à ses successeurs.

Ainsi, le premier évêque chrétien fut Jacques le Juste, et non Pierre. Si Pierre était le premier des apôtres, s'il était détenteur de cette autorité suprême que revendiquent aujourd'hui les papes, n'est-ce pas à lui qu'aurait dû revenir cet honneur ?

Les actions de Pierre sont également contestées à au moins deux reprises par saint Paul dans ses épîtres, ce qui indique que le principe de la collégialité, cher à la tradition orthodoxe, mais rejeté dans les faits par la papauté, prévalait également aux premiers temps du christianisme.

Nulle part il n'est question d'une autorité centrale suprême qu'aurait exercée saint Pierre ; c'est là une fabrication de la papauté catholique, donc postérieure de plusieurs siècles, et dont les visées hégémoniques (tant sur le plan spirituel que temporel) ne font pas l'ombre d'un doute au regard de l'Histoire.
A noter que les Eglises orthodoxes chalcédoniennes (Constantinople et autres) sont restées jusqu’à présent moins avancées dans le dialogue(bien qu’il existe avec certaines ) avec les non-chalcédoniens.
C'est juste, mais il faut préciser que cette bonne entente (par exemple, entre catholiques et Arméniens) s'est faite au prix de l'abandon d'un certain nombre de traditions arméniennes, notamment sur le plan liturgique me semble-t-il, ce qui est je trouve un peu dommage...

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par cmoi » lun. 30 mars 2020, 21:24

A vous lire, cher Gaudens, j'ai l'impression qu'il y aura une suite et que ce n'est qu'une mise en bouche...
Je l'attends avec impatience...

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Gaudens » lun. 30 mars 2020, 18:39

Bonjour à tous.
-J’aimerais revenir sur la notion de « centre » par rapport aux Eglises locales :
Pendant le premier siècle,rien n’était clair géographiquement :jusqu’à 70 (prise et saccage de Jérusalem par Titus,exil des chrétiens à Pella au bord du Jourdain), c’est plutôt Jérusalem qui faisait figure de centre,dont l‘évêque était un membre de la famille du Seigneur,ce qui devait ajouter à son prestige.Pierre,bougeant beaucoup,semble y être retourné à deux reprises,comme pour faire valider son rôle et sa position.En ce sens ,si Rome peut (au moins dans une perspective catholique) se dire "magistra " (enseignante,pas dominatrice, "magistra " n’étant pas « domina ») des Eglises , elle eut tort de s’en dire « Mater et Magistra » :si « mater » il y eut ,ce fut certainement Jérusalem.Puis Pierre ,considéré peut-être intuitu personae comme pierre de base des Eglises(« Tu es Pierre et sur cette pierre,je bâtirai mon Eglise », d’où l’adage « Ubi Petrus,ibi ecclesia)) , fonda l’Eglise d’Antioche(une des cinq futures de la Pentarchie) puis renforça et présidera l’Eglise de Rome ,jusqu’à son martyre en ce lieu .A cet égard,si une certaine apologétique orthodoxe s’est toujours plu à dire que c’est parce que capitale de l’Empire que Rome devint un centre(ce qu’on pouvait évidement retourner à Constantinople),le bon sens devrait admettre que les deux raisons furent simultanément valables :capitale de l’Empire et Ville du martyre des coryphées des Eglises, Pierre et Paul.Par ailleurs toujours dans une perspective orthodoxe(au sens confessionnel du terme,pas au sens théologique) Pierre représentait ici tout ministère épiscopal et tout évêque serait successeur de Pierre,pas seulement l’évêque de Rome (cf le regretté Olivier Clément dans son « Que Sais-je ? » sur l’Orthodoxie) ;je n’ai jamais trouvé cela bien convaincant :si les évêques sont successeurs des apôtres (individuellement,dans une longue chaine de transmission) ,pourquoi et comment devraient-ils être tous successeurs de Pierre ? Seuls l’évêque de Rome et ,à la grande rigueur celui d’Antioche, devraient pouvoir seuls s’en prévaloir.

A côté de Jérusalem, Rome,Antioche et Constantinople,n’oublions pas le rôle moteur d’Alexandrie dans les querelles théologiques autour de la nature du Christ :véhémente dans son opposition à l’arianisme (Arius était alexandrin) ,la majeure part de cette Eglise renversa tellement l’équilibre qu’elle fut considérée comme abritant l’hérésie monophysite, de sens contraire ;on dit aujourd’hui plutôt « miaphysite,du reste et des accords sur la christologie ont été bien engagés https://fr.wikipedia.org/wiki/Dialogue_ ... s_orthodox )entre l’Eglise de Rome et celle dont le Premier évêque se dit fièrement « Pape d’Alexandrie et Patriarche de la Prédication de Saint-Marc » : déclaration commune en 1973,Formule christologique en 1988 de la Commission de dialogue entre les deux Eglises ,apparemment non encore appprouvée solennellement par l’Eglise d’Alexandrie ,si mon information et suffisante et correcte .A noter que les Eglises orthodoxes chalcédoniennes (Constantinople et autres) sont restées jusqu’à présent moins avancées dans le dialogue(bien qu’il existe avec certaines ) avec les non-chalcédoniens.

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par cmoi » lun. 30 mars 2020, 11:45

Je parle bien de l’empereur Constantin premier, canonisé par l’église orthodoxe, qui mit fin aux persécutions des chrétiens, convoqua le concile de Nicée, déplaça à Byzance (devenu Constantinople), le cœur de son empire, et se fit baptiser sur son lit de mort (coutume en vigueur à l'époque, quelque peu « habile et rusée » (le Christ l’aurait-il louée ?) les fidèles attendant le dernier moment pour recevoir le baptême afin d’aller direct au ciel !).
Sans entrer dans la polémique des motifs de sa conversion, il est certain qu’il protégea la religion chrétienne et associa son développement à celui de son empire et pour en favoriser l’unité.

Pour Clovis, ma vision : sa femme chrétienne priait pour celle-ci, aussi quand il se trouva en difficulté au cours d’une bataille, il demanda l’assistance du Christ et promit de se faire baptiser s’il gagnait : cela me fait toujours penser à Moïse, dont les armées triomphaient tant que ses bras étaient élevés vers le ciel (et ses compagnons les tenaient quand il n’en avait plus la force : je ne sais plus à quelle occasion).
Sa conversion entraîna celle de son royaume, celui des francs…

J’apprécie votre réponse, son ton pondéré et fraternel auquel je commence à m’habituer et prendre goût, mais j’avoue que j’attendais une analyse ou une prise en compte un peu plus pointue du risque de dérive dans l’usage de la force politique, quels que soient les exemples que l'on puisse citer car je n'ai pas fait beaucoup d'effort pour en chercher, retenant les plus emblématiques à mes yeux (mais non les plus pertinents assurément).

Disons que je comptais sur vous pour pallier à ma paresse... :oops:

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Nebularis » lun. 30 mars 2020, 8:44

Cher c moi,

je ne suis pas certain d’avoir bien saisi votre question.
La conversion de Clovis, tout comme celle de Constantin, fut progressive (il me semble même que Constantin n’a reçu le baptême que sur son lit de mort ; je confonds peut-être avec quelqu’un d’autre) et dans un cas comme dans l’autre, elle a été le fruit d’un choix volontaire (où les considérations politiques ont évidemment joué un rôle important).
Je ne vois donc pas bien où vous décelez ici de la violence ?

En général je pense que la violence est hélas inévitable dans un contexte politique. Que des dirigeants chrétiens y aient recours ne doit pas nous troubler, tant que cette violence reste défensive. Quelle est l’alternative : tendre l’autre joue ? Mais un dirigeant politique peut-il se le permettre, lui qui a la charge de tout un peuple ? Il serait tenu responsable si le règne qui succède au sien conduisait à l’oppression (voire la suppression) des chrétiens. La guerre défensive est donc une nécessité.

Pour ce qui est de la guerre offensive, on peut citer par exemple les campagnes de Charlemagne contre les Lombards et les Saxons et les conversions forcées qui s’en sont suivies. Elles sont à mon sens une terrible perversion. Jamais le Christ ne nous a demandé de tuer en Son nom.

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par cmoi » lun. 30 mars 2020, 5:45

Nébularis, vous me semblez à même par cette intervention que j'apprécie, de répondre à une de mes questions.
Il semble bien que par certains miracles (la conversion de ClovIs, par exemple, pour ne pas citer que celle de Constantin) notre Souverain et Seigneur n'ait pas dédaigné l'usage de la force pour parvenir à la conversion de nos frères humains.
Ce qui offre une sorte de contre-témoignage par trop évident au message des évangiles, comme vous le soulignez..
Comment conciliez-vous ou comprenez-vous cela ?
Est-ce nous qui extrapolons et associons des choses qui se sont ainsi retournées contre leur usage ?

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Nebularis » dim. 29 mars 2020, 23:51

Je reprends ce vieux fil laissé en friche...

Pour répondre aux deux derniers messages, le point de vue orthodoxe est que, comme l’écrivait Héraclius, l’évêque de Rome ne doit son importance qu’au statut et au prestige historique de cette ville, l’ancienne capitale politique de l’Empire romain. Si le martyre des saints Pierre et Paul avait eu lieu à Trifouilly-les-Oies, il est douteux qu’on y eût installé un siège apostolique (je me trompe peut-être).

La même chose est évidemment vraie pour Constantinople, Byzance n’étant que la capitale de l’Empire d’Orient.

En ce sens, il est vain, d’un côté comme de l’autre, de vouloir nier l’évidence : l’Église indivise du Premier millénaire est, politiquement parlant, la prolongation administrative de l’Empire romain, et la soumission à l’empereur d’Orient, entre 476 et 800, était acceptée de tous les évêques, Rome compris. C’est justement pour échapper à cette autorité que les papes se tourneront vers les royaumes francs : un roitelet barbare dénué de prestige impérial ne pouvait prétendre aux mêmes prérogatives, en matière de foi, que l’empereur byzantin, augmentant ainsi mécaniquement le pouvoir de l’évêque de Rome. C’est dans ce contexte que se situent la prétendue donation de Constantin, forgée de toutes pièces afin d’acquérir une souveraineté temporelle, et le couronnement de Charlemagne, organisé pour permettre la suzeraineté spirituelle du pape sur les royaumes d’Occident.

Voilà le cœur, le véritable point de départ de la critique orthodoxe à l’égard du catholicisme : en succombant à l’attrait du pouvoir temporel, le pape est tombé dans les rets du Tentateur :
Et le diable l’ayant emmené sur une haute montagne, lui montra en un instant tous les royaumes de la terre,

et lui dit : « Je vous donnerai toute cette puissance et toute la gloire de ces royaumes ; car elle m’a été livrée, et je la donne à qui je veux.

Si donc vous vous prosternez devant moi, elle sera toute à vous. »
La dimension éminemment politique du schisme entre nos deux Églises est absolument évidente, comme l’a déjà souligné, encore une fois à raison, Héraclius.
Autrement, c’est-à-dire sans cette dimension politique, il est tout aussi évident que la prééminence serait revenue ni à Rome, ni à Constantinople, mais à Jérusalem.

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Cgs » mar. 25 nov. 2014, 9:59

Bonjour,

Ce que les orthodoxes doivent comprendre, c'est que l'Eglise, depuis les premiers temps, a toujours fonctionné avec un centre et des églises locales. Toujours. Les formes ont varié dans les siècles, mais cela a toujours existé. Se pose la question de ce centre, et la question de la succession apostolique donne des éléments de réponse. Je donne des éléments qui laissent penser que le centre vient de Saint Pierre (là, on est d'accord avec les orthodoxes) et que la succession apostolique s'est fixée à Rome avec la succession des papes, jusqu'à aujourd'hui. Les faits historiques l'attestent.

En effet, la rupture ne date pas de 1054, elle s'est juste formalisée à cette date-ci. Il n'empêche que L'Eglise universelle ("catholique" signifie "universel") a toujours connu des dissensions, qui n'ont pas forcément abouti à un schisme. La question est : une église locale est-elle en communion avec l'autorité centrale ou pas ? Concernant les églises que l'on appelle églises orthodoxes aujourd'hui, ce n'est plus le cas, puisque la primauté du ministère prétrinien n'est pas reconnue par ces églises depuis le schisme.

Ce qui a troublé l'affaire à l'époque est certainement la confusion entre le religieux et le politique, c'est évident. La conséquence n'en est pas moins logique.

D'où la question : comment les orthodoxes se situent-ils vis-à-vis de la succession apostolique ? Leur position me semble contradictoire :
:arrow: tenir d'une part que Rome est une église qui a reçu du Christ et qui a été le vecteur principal de la propagation de la foi et de sa conservation authentique.
:arrow: tenir que cette église a dévié depuis le schisme en adoptant des dogmes faux (par exemple les dogmes mariaux).

Comment résoudre cette difficulté ? Si les dogmes proclamés par l'Eglise catholique sont faux, cela signifie que l'Eglise a failli dans son rôle de transmission de la foi. Et donc Jésus se trompe en disant à Pierre : "Les portes de l'Hadès ne l'emporteront pas contre elle (l'Eglise)", de même qu'il lance en l'air une promesse vaine quand il prie pour que la foi de Pierre ne défaille pas.
Conséquence : l'Eglise catholique n'est pas (ou plus) l'Eglise du Christ, dans cette acception, puisque Dieu ne peut pas s'y contredire.

Remarquons que l'on peut adopter le même raisonnement pour l'Eglise orthodoxe. Comment trancher ? Savoir dans quelle continuité chaque église est permet de donner des pistes de réponse.

(si l'on cherche des schismes plus anciens, le schisme de l'église d'Alexandrie illustre bien ce que je dis. L'église d'Alexandrie est fondée en 39-40 par Saint Marc, envoyé par Saint Pierre pour évangéliser l'une des plus grandes villes d'orient à l'époque. Le siège apostolique d'Alexandrie était très important, au point, par exemple, qu'il fixât les dates de Pâques pour toute l'Eglise [nous avons des mentions de Lettres Festales adressées au pape en ce sens, preuve que si l'église était très libre, elle en référait quand même à l'autorité de Rome]. Sous l'influence de l'arianisme à partir du IVème siècle, certaines églises autour d'Alexandrie commencèrent à rompre avec l'autorité, à une époque où la primauté de Rome restait bien établie et reconnue. C'est donc sciemment que ces églises se sont progressivement séparées de la Pentarchie, donc de Rome.)

En Christ,

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Héraclius » mar. 25 nov. 2014, 0:22

Cgs, pour le coup votre point de vue se tient, mais est partial. Un Orthodoxe vous répondrais que la primauté du Pape était une réalité, mais dans le cadre de la Pentarchie où il n'est que le primus inter pares des 5 patriarches (et encore, peut-être plus parce qu'il siège sur l'antique capitale romaine que parce qu'il est successeur de Pierre). Et dans les fait, il aurait raison ; Grégoire le Grand, si universels aient été ses enseignements et son influence, se battait pour ne pas être soumis à l'Archevêque de Ravenne en Italie (qui était primat de l'exarchat byzantin). Alors la juridiction universelle...

1054 n'est pas décisif du tout. Le schisme est un processus de 4 siècles au moins, qui commence avec le couronnement de Charlemagne par Léon III et finit avec la prise de Constantinople par les Latins (où les choses deviennent irréversibles). Il est assez révélateur de voir d'ailleurs que ces deux évènements sont de nature politique.

Entre les deux ? La réforme grégorienne, le schisme de Photius, les croisades (et la rupture du pacte avec l'empire, notamment) et bien sûr la double excommunication.

On peut même remonter encore avant, avec le Concile in Trullo (691 !), un synode local assemblé par Justinien II qui se prétend suite du précédent concile oeucuménique et qui prend divers mesures disciplinaires condamnant les us de l'Ouest (le célibat des prêtre, notamment) et surtout proclamme la Pentarchie au sens ou elle est aujourd'hui comprise par les Orthodoxes (Canon 36). Le concile sera rejeté par Rome et ajouté au décrets oeucuméniques précédents par Constantinople.


Bref, c'est une trèèèèèès longue histoire. Alors chercher à savoir quant est la "vraie" rupture, c'est un peu vain.




Héraclius -

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Cgs » lun. 24 nov. 2014, 23:24

Bonsoir,

Pour ajouter sur le thème de la succession apostolique, quelques faits :

:arrow: Léon IX est couronné Pape en 1046 et meurt en avril 1054. Le schisme est officialisé en juillet, par l'excommunication des églises d'Orient par les Latins. La réaction de l'Eglise d'Orient est d'"excommunier" à son tour l'Eglise de Rome.

:arrow: Le pape suivant, Victor II, est élu le 3 avril 1055, près d'un an après.

La question est simple : Comment considérer la succession apostolique avant le schisme ? Après le schisme ? Qu'en pensent les orthodoxes ?

Historiquement, le successeur de Léon IX, 153ème pape depuis Saint Pierre, est Victor II. On voit bien la continuité entre les deux périodes, avec notamment des personnages historiques importants comme le moine Hildebrand, futur Grégoire VI. Le même collège, même si amputé de quelques prélats des églises séparées, a proposé le nom du futur pape à l'empereur Henri III.

Dès lors, cela semble bien être l'Orient qui s'est coupé de la racine, et non l'inverse.

Quant à savoir si les églises étaient de même importance ou non, on sait que la primauté de Pierre, puis des successeurs évêques de Rome ne fut guère contestée jusqu'au Vème siècle, preuve qu'il y avait une vraie primauté de Rome sur les autres églises (qui croissaient et se créaient régulièrement, cf par exemple les voyages de Saint Thomas en Chine).

Tertullien écrit d'ailleurs en 190 pour inviter ses lecteurs à parcourir les différentes églises: "Es-tu près de l'Achaïe ? Tu as Corinthe. Si tu n'es pas loin de la Macédoine, tu as les Philippiens. (...). Si tu es près de l'Italie, tu as Rome, d'où nous vient l'autorité.
(Source : "La primauté de l'évêque de Rome : dans les trois premiers siècles ", Ermoni, Vincent (1858-1910), Bloud (Paris), 1903.)

Dans les premiers siècles, les églises unies à Rome donnaient aussi certains papes à celle-ci, preuve que les églises étaient unies autour des successeurs de Pierre à Rome (même si l'écrasante majorité des papes étaient originaires de la péninsule italienne). Quelques exemples :
:arrow: Saint Eleuthère est d'origine grecque
:arrow: Saint Victor Ier est d'origine berbère, comme Saint Gélase Ier, quelques siècles après
:arrow: Jean IV, vient de Dalmatie en Europe Centrale, son successeur Saint Théodore Ier vient de Jérusalem.
:arrow: Jean V est syrien d'origine
:arrow: Grégoire V est le premier pape germain au Xème siècle.
etc.

Donc contrairement à ce que l'on croit, il y a des indices sur la conservation de la succession apostolique dans les différentes églises.La question est : est-on rattaché à la racine qu'est le Christ ?

En Christ,

Re: La Tradition dans l'orthodoxie et le catholicisme

par Héraclius » lun. 24 nov. 2014, 19:24

Permettez-moi d'apporter fraternellement à votre connaissance du Christianisme, et probablement à celle de bien des catholiques et protestants, que la foi orthodoxe n'a pas toujours été localisé qu'en Orient chrétien, mais aussi en Occident jusqu'en 1054.
Les catholiques disent qu'avant 1054, les Byzantins étaient catholiques alors que orthodoxes disent que les Latins d'avant cette date était orthodoxes. Nous fêtons ainsi des patriarches de Constantinople d'avant le schisme (par exemple St Jean Chrysostome, le 13 septembre - vous le fêtez en janvier il me semble), et vous fêtez pareillement des papes.

Théologiquement parlant, si l'Eglise catholique est la vraie église de Dieu, alors sa position est juste et les byzantins étaient bien catholiques. L'inverse est vrai pour l'Eglise orthodoxe (Il est si difficile d'utiliser ces termes qui ne veulent rien dire l'un sans l'autre !).

Maintenant, si on prend une approche socio-historique de la question, il est clair que les divisions politiques, théologiques, ecclésiologiques sont bien antérieures.

Tout cela pour dire que je pourrais bien vous faire la remarque que la Sainte Eglise Catholique et Orthodoxe, que je crois être actuellement celle en communion avec Rome, était jadis présente massivement en Orient. Ainsi, vous même suggériez la même chose à propos de l'Occident, à la nuance près que vous vous référez à l'Eglise actuellement en communion avec Constantinople pour parler de la Vraie Eglise. Bref, peu importe.

Vous voyez ce que je veux dire ?

Par contre, il y a plusieurs traditions spirituelles nullement concurrentes puisque non exclusives, et il se trouve que le Christianisme Oriental (Byzantin pour être précis) est partagé par catholiques (les "uniates") et orthodoxes. Donc lorsque l'on parle de spiritualité, nul besoin de mettre le dogme qui nous fâche dedans (même si on ne peut bien sûr rien séparer - la méthode a ses limites).

Dieu vous bénisse,


Héraclius -

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